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06/12/2022 | FRANCE | N°19/03207

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 06 décembre 2022, 19/03207


AFFAIRE : N° RG 19/03207 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GOCK





ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de CAEN du 26 Septembre 2019 - RG n° 16/02362







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2022





APPELANTE :



La SELARL CABINET [E] [J]

N° SIRET : 332 345 594

[Adresse 4]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal



représentée

par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau de CAEN

assistée de Me Thomas CARRERA, avocat au barreau de CAEN,



INTIMÉS :



Monsieur [Z] [H]

né le 02 Février 1949 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 3]



L'EURL...

AFFAIRE : N° RG 19/03207 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GOCK

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de CAEN du 26 Septembre 2019 - RG n° 16/02362

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2022

APPELANTE :

La SELARL CABINET [E] [J]

N° SIRET : 332 345 594

[Adresse 4]

[Localité 2]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Gaël BALAVOINE, avocat au barreau de CAEN

assistée de Me Thomas CARRERA, avocat au barreau de CAEN,

INTIMÉS :

Monsieur [Z] [H]

né le 02 Février 1949 à [Localité 6]

[Adresse 1]

[Localité 3]

L'EURL [Z] [H]

N° SIRET : 530 016 807

[Adresse 5]

[Localité 7]

prise en la personne de son représentant légal

représentés par Me Laetitia CANTOIS, avocat au barreau de CAEN

assistés de Me Luc DARTOIS, avocat au barreau de l'EURE,

DÉBATS : A l'audience publique du 11 octobre 2022, sans opposition du ou des avocats, M. GARET, Président de chambre, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme COLLET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GARET, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

Mme COURTADE, Conseillère,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 06 Décembre 2022 et signé par M. GARET, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

FAITS ET PROCEDURE

Suivant acte sous seing privé du 16 juin 2015, faisant suite à une promesse sous conditions suspensives en date du 25 mars 2015, l'EURL [Z] [H] (ci-après l'EURL) a cédé à la société Cabinet [E] [J] (la société [J]) un fonds libéral de géomètre-expert exploité à [Localité 7] (Calvados) moyennant un prix de 20.000 €.

Aux termes de cet acte, la cession portait exclusivement sur':

- le transfert de l'ensemble des contrats en cours (une liste de dossiers étant annexée à l'acte),

- le droit de présentation de tous nouveaux clients ou chantiers de la cédante,

- les archives de la cédante,

- le contrat de travail de M. [W] [H], fils de [Z] [H] et salarié de l'EURL'cédante ;

- le droit à la ligne téléphonique ouvert sous le numéro 02 31 96 90 11 à transférer à la société [J].

Par actes des 14 et 15 juin 2016, la société [J], qui se plaignait «'de l'absence totale de consistance de son acquisition'», a fait assigner l'EURL ainsi que M. [Z] [H] devant le tribunal de grande instance de Caen aux fins de remboursement du prix et d'indemnisation de ses préjudices, la demanderesse se prévalant en effet':

- à titre principal, d'une résolution de la vente pour manquement à l'obligation de délivrance,

- à titre subsidiaire, d'une annulation de la vente pour dol,

- et à titre infiniment subsidiaire, d'une résolution de la vente pour vices cachés.

Par jugement du 26 septembre 2019, le tribunal a :

- débouté la société [J] de l'intégralité de ses prétentions ;

- reconventionnellement, fait injonction à la société [J] de transférer les archives papier entreposées [Adresse 5] à [Localité 7] dans des locaux lui appartenant ;

- dit n'y avoir lieu à astreinte de ce chef ;

- condamné la société [J] à payer à l'EURL [H] une indemnité d'occupation de 100 € par mois à compter du 1er juillet 2015 et ce, jusqu'au complet transfert des archives';

- condamné la société [J] à payer à l'EURL [H] et à M. [Z] [H], unis d'intérêt, la somme de 2.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société [J] aux dépens et accordé à Me Cantois, avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par déclaration du 15 novembre 2019, la société [J] a interjeté appel de ce jugement.

L'appelante a notifié ses dernières conclusions le 3 août 2020, les intimés les leurs le 5 mai 2020.

La clôture a été prononcée par ordonnance du 14 septembre 2022.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société [J] demande à la cour de :

A titre principal,

- réformer le jugement en toutes ses dispositions ;

- débouter l'EURL et M. [Z] [H] de toutes leurs demandes ;

- débouter l'EURL et M. [Z] [H] de leur appel incident ;

- prononcer la résolution de la cession du fonds libéral de géomètre expert conclue le 16 juin 2015 avec l'EURL ;

- condamner solidairement l'EURL et M. [Z] [H] au remboursement du prix versé, soit la somme de 20.000 € ;

- condamner solidairement l'EURL et M. [Z] [H] au versement d'une somme de 18.817,10€ à titre de dommages et intérêts ;

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour refusait de prononcer la résolution de la vente sur le fondement des articles 1603 à 1611 du code civil,

- annuler la cession ;

- condamner en conséquence solidairement l'EURL et M. [Z] [H] au versement d'une somme de 20.000 € à titre de restitution du prix';

- condamner solidairement l'EURL et M. [Z] [H] au versement d'une somme de 18.817,10€ à titre de dommages et intérêts ;

A titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour refusait de prononcer l'annulation de la vente sur le fondement de l'article 1116 du code civil,

- condamner solidairement l'EURL et M. [Z] [H] au versement d'une somme de 38.817,10€ ;

En tout état de cause,

- condamner solidairement l'EURL et M. [Z] [H] au versement d'une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Au contraire, l'EURL et M. [Z] [H] demandent à la cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la société [J] de l'intégralité de ses prétentions ;

Statuant à nouveau,

- condamner la société [J], sous astreinte de 100 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir, à transférer les archives papier sises au [Adresse 5] à [Localité 7] dans des locaux lui appartenant ;

- condamner la société [J] à payer à l'EURL une indemnité d'occupation de 600 € par mois à compter du jour de la cession, soit du 16 juin 2015, jusqu'à libération complète des lieux par le transfert des archives ;

- condamner la société [J] au paiement d'une somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société [J] aux entiers dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement au profit de Me Cantois, avocat au barreau de Caen.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la mise en cause de M. [Z] [H]':

Il est constant que ce n'est pas pas M. [H] qui a cédé le fonds à l'origine du litige, mais l'EURL, personne morale distincte de son dirigeant.

Pour autant et pour justifier la mise en cause de M. [H] lui-même, la société [J] se prévaut d'une clause insérée à l'article 8 de l'acte de cession aux termes de laquelle 'M. [Z] [H] se porte fort et agit en qualité de garant solidaire des obligations de l'EURL [Z] [H] résultant des présentes'».

En tout état de cause, M. [H] reconnaît lui-même que son maintien sur la procédure s'impose, ne serait-ce qu'en sa qualité de liquidateur de l'EURL, actuellement en cours de dissolution amiable, et demande la confirmation du jugement en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à mettre hors de cause M. [H].

En conséquence et d'un commun accord entre les parties, le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de résolution de la vente pour manquement à l'obligation de délivrance':

L'article 1603 du code civil dispose que le vendeur a deux obligations principales, celle de délivrer et celle de garantir la chose qu'il vend.

L'article 1610 ajoute que si le vendeur manque à faire la délivrance dans le temps convenu entre les parties, l'acquéreur pourra, à son choix, demander la résolution de la vente, ou sa mise en possession, si le retard ne vient que du fait du vendeur.

Enfin, l'article 1611 précise que dans tous les cas, le vendeur doit être condamné aux dommages et intérêts, s'il résulte un préjudice pour l'acquéreur, du défaut de délivrance au terme convenu.

Se prévalant de ces dispositions, la société [J] réclame la résolution de la vente, la restitution du prix de 20.000 €, et l'allocation d'une somme de 18.817,10 € à titre de dommages-intérêts en réparation des différents préjudices qu'elle aurait subis par suite de son acquisition.

A l'appui de ces demandes, elle reproche désormais à l'EURL deux manquements à l'obligation de délivrance incombant à la cédante':

- d'une part une absence de transmission de la clientèle,

- d'autre part une absence de transmission du contrat de travail de M. [W] [H].

En revanche, la cour observe que l'appelante n'a pas repris à hauteur d'appel le reproche, précédemment formulé devant le tribunal, tiré d'une absence de délivrance des archives de la cédante, si ce n'est pour s'opposer à la demande reconventionnelle de l'EURL tendant à l'allocation d'une indemnité pour l'occupation de ses locaux par lesdites archives, «'inexploitables'» selon la société [J], ce qui justifie, selon elle, qu'elle ait renoncé à en prendre possession jusqu'à ce jour.

En tout état de cause, la société [J] n'invoque plus le moyen tiré d'une absence de délivrance des archives de l'EURL à l'appui de sa demande de résolution de la vente.

Il lui en sera donné acte.

- Sur le moyen tiré de l'absence de délivrance de la clientèle cédée':

A l'appui de cette affirmation, la société [J] se plaint notamment de ce que, peu après la vente, les appels téléphoniques de la clientèle se sont raréfiés, au point qu'elle a fini par se convaincre qu'elle avait «'acheté du vent'».

Ce faisant, la société [J] reconnaît que l'EURL lui a effectivement transféré sa ligne téléphonique, ce qui lui a permis de réceptionner l'ensemble des appels précédemment destinés à l'EURL pour les traiter désormais à son seul profit.

Par ailleurs, il convient de rappeler que l'acte de cession prévoyait la cession, d'une part d'une liste exhaustive de dossiers en cours, précisément dix, d'autre part d'un droit de présentation de tous nouveaux clients ou chantiers au profit de la société [J], l'EURL s'interdisant parallèlement de les prendre en charge et, plus généralement, de se rétablir dans une activité concurrente de celle de la cessionnaire.

Or, la société [J] ne conteste pas qu'elle a bénéficié du transfert effectif des dix dossiers précités, ni ne reproche à l'EURL ou à M. [Z] [H] d'avoir détourné la clientèle cédée, ou encore de s'être réinstallés au mépris de leurs engagements.

Au surplus, l'EURL produit un grand nombre de messages électroniques dont il résulte qu'avant même que la cession intervienne effectivement, elle a tout fait pour placer la société [J] en position de reprendre son activité, et ce, au vu et au su de la clientèle cédée comme de tous autres prospects qu'elle avait pu approcher.

Ausssi, c'était à la société [J] qu'il incombait d'entretenir cette clientèle, sans pouvoir imputer à l'EURL la responsabilité d'une baisse éventuelle de l'activité cédée.

En tout état de cause, elle ne saurait lui reprocher d'avoir manqué à son obligation de délivrer sa clientèle, l'EURL ayant en effet satisfait aux seuls engagements qu'elle avait pris à cet égard, à savoir':

- céder à la société [J] un certain nombre de dossiers en cours, limitativement énumérés,

- et présenter tous nouveaux clients ou chantiers à la société [J], tout en cessant sa propre activité.

- Sur la rupture du contrat de travail cédé, prétendument intervenue avant la cession du fonds':

La société [J] reproche ici à l'EURL de lui avoir fait croire qu'elle lui cédait le contrat de travail de M. [W] [H], alors qu'en réalité ce contrat avait déjà été rompu avant même la cession.

Elle déplore ainsi d'avoir été privée de l'unique salarié de l'entreprise et, par là même, de la clientèle qui y était nécessairement attachée.

Cependant et même s'il est établi que quelques jours avant la signature de l'acte de vente, l'EURL a versé à M. [H] le solde des sommes qu'elle restait lui devoir à cette date, notamment une indemnité compensatrice de congés payés d'un montant substantiel correspondant manifestement à un ou plusieurs exercices écoulé(s), pour autant il ne s'agissait pas d'un «'solde de tout compte'» au sens de celui qui, prévu à l'article L 1234-20 du code du travail, fait l'inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail.

Au demeurant, la société [J] est mal fondée à soutenir que le contrat de travail ne lui a pas été transféré, alors'qu'il résulte des éléments du dossier que le salarié a continué à travailler pour son nouvel employeur pendant plusieurs semaines, à tout le moins jusqu'à ce que M. [H] prenne acte de la rupture qu'il estimait lui avoir été imposée par la société [J], et qu'il saisisse le conseil des prud'hommes d'une demande indemnitaire pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'instance s'étant finalement achevée par un procès-verbal de conciliation en date du 23 mai 2016.

La société [J] soutient également qu'alors qu'elle pensait que le salarié était employé à temps complet, elle a découvert incidemment que celui-ci ne travaillait effectivement qu'à temps partiel, l'activité de l'entreprise, atone depuis quelque temps déjà, étant réduite d'autant, ce dont l'EURL s'était bien gardé de l'informer.

Ici encore, la critique de l'appelante est injustifiée, étant en effet rappelé':

- d'une part, que l'activité de l'EURL ne se résumait pas à celle de son salarié [W] [H], l'entreprise ayant également un dirigeant en la personne de [Z] [H]'; en tout état de cause, la société [J] a été informée, préalablement à son acquisition, du niveau d'activité de l'entreprise puisque les chiffres d'affaires des trois derniers exercices lui ont été dûment communiqués';

- d'autre part et surtout, que la société [J] s'est fait communiquer par l'expert-comptable de l'EURL, pendant la phase de négociation de l'acquisition du fonds, tous éléments d'informations en rapport avec le contrat de travail du salarié'; or, contrairement à ce qu'elle soutient, le salarié n'était pas employé à temps partiel, mais bien à temps complet ainsi qu'il est mentionné dans l'acte de cession'; ainsi, ce n'est qu'au titre du seul mois de mai 2015, au demeurant pour des raisons non précisées mais en toute hypothèse sans rapport avec une réduction de son temps de travail, que le salarié a bénéficié, au cours de ce seul mois, d'une indemnisation pour «'chômage partiel'», à hauteur de 99 heures sur les 151,67 heures habituellement travaillées par l'intéressé.

Il est donc établi que le contrat de travail du salarié a été valablement transféré à la société [J] et ce, aux conditions convenues entre les parties.

Par suite, aucun manquement à l'obligation de délivrance du vendeur n'étant caractérisé, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'acquéreur de sa demande tendant à la résolution du contrat, de même que de sa demande indemnitaire subséquente.

Sur la demande (subsidiaire) d'annulation de la vente pour cause de dol':

L'article 1116 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, dispose que le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.

Le même article ajoute que le dol ne se présume et qu'il doit être prouvé.

Il appartient donc à la société [J] de rapporter la preuve des tromperies dont l'EURL, prise en la personne de son dirigeant M. [Z] [H], se serait rendu coupable pour surprendre le consentement de l'acquéreur et l'amener à contracter à des conditions désavantageuses.

Ici encore, le reproche n'est pas établi, étant encore rappelé'qu'il n'est pas démontré que l'EURL ait dissimulé quelque information que ce soit à la société [J], qu'il s'agisse de celles relatives à l'activité de l'entreprise cédée, notamment à l'état de sa clientèle ainsi que des contrats en cours, ou encore de celles afférentes au contrat de travail de M. [W] [H].

A cet égard, c'est sans preuve que la société [J] dénonce la «'sous-activité chronique'» du salarié qui, à l'en croire, ne travaillait même plus à 50'% depuis les six derniers mois précédant la cession, alors en effet qu'elle produit, pour seul justificatif de cette affirmation, l'unique bulletin de salaire afférent au mois de mai 2015 (cf supra).

En tout état de cause, il n'appartenait qu'à la société [J], candidate à l'acquisition, de réclamer tous justificatifs utiles de cette activité, si tant est que celle-ci ait si déterminante de son consentement à acquérir le fonds.

Au demeurant, la société [J], qui au surplus était assistée d'un avocat, a acheté l'entreprise au vu des chiffres d'affaires dûment déclarés par l'EURL.

L'ayant fait en parfaite connaissance de cause, elle ne saurait se plaindre d'un dol.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'acquéreur de sa demande tendant à l'annulation du contrat pour dol, de même que de sa demande indemnitaire subséquente.

Sur la demande (infiniment subsidiaire) de résolution de la vente pour vices cachés':

L'article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

L'article 1642 précise que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

L'article 1644 ajoute que dans le cas de l'article 1641, l'acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

L'article 1645 ajoute encore que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu'il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l'acheteur.

Ici encore, la société [J] ne justifie pas en quoi la chose qu'il a acquise,'en l'occurrence le fonds, aurait été affectée d'un vice, a fortiori caché, étant rappelé qu'elle a eu accès à tous les éléments d'information en possession de l'EURL, qu'il s'agisse de ceux en rapport avec l'activité cédée, notamment les chiffres d'affaires réalisés au cours des trois derniers exercices, les contrats en cours ou encore les pièces afférentes au contrat de travail de M. [W] [H].

Si la société [J] estimait les pièces produites insuffisantes, il lui appartenait d'en solliciter de nouvelles pour compléter son information, ce d'autant plus qu'elle était assistée d'un avocat pendant le processus de négociation de l'acquisition.

Enfin, la société [J] ne démontre pas non plus en quoi elle aurait subi un préjudice en rapport avec les vices dont elle se prévaut, les sommes dont elle sollicite le remboursement correspondant essentiellement aux honoraires de conseil qu'elle a exposés dans le cadre de l'acquisition du fonds ou encore du litige prud'homal qui l'a depuis opposé à M. [W] [H].

En aucun cas, ces sommes ne sauraient être mises à la charge de l'EURL, qui n'est en rien responsable de ces dépenses.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté l'acquéreur de sa demande tendant à la résolution du contrat pour vices cachés, de même que de sa demande indemnitaire subséquente.

Sur la demande reconventionnelle en paiement d'une indemnité d'occupation à la charge de la société [J]':

Pour réclamer le paiement d'une indemnité d'occupation d'un montant mensuel de 600 € à compter du 16 juin 2015, date de la vente, jusqu'à la complète libération des lieux, l'EURL fait essentiellement valoir':

- que depuis l'origine du litige, elle tente vainement de faire récupérer par la société [J] les archives dont celle-ci est devenue propriétaire par suite de l'acquisition du fond';

- qu'elle est dès lors contrainte d'exposer un loyer pour continuer à entreposer ces archives, alors même qu'elles ne lui appartiennent plus.

Au contraire et pour s'opposer à cette prétention, la société [J] fait observer':

- que ces archives sont totalement inutilisables, ce qui explique qu'elle n'ait pas voulu «'prendre la responsabilité de détenir [lesdites pièces] non tenues qui plus est dans le cadre d'une cession de clientèle inexistante'» et ce, dans l'attente d'une résolution amiable ou judiciaire de la vente';

- qu'au demeurant, les loyers prétendument exposés par l'EURL [Z] [H] le sont en réalité au profit d'un autre société, l'EURL Les Dolmaines, dont M. [H] est également le gérant.

Aussi et au vu de cet exposé, dont il résulte que la société [J] a toujours refusé de prendre possession des archives litigieuses, rien n'empêchait l'EURL, sinon d'en disposer à son gré, à tout le moins de les retirer du local dans lequel elles étaient entreposées, de façon à ce que la propriétaire des lieux puisse en reprendre la complète disposition.

En tout état de cause, alors au surplus que l'EURL ne fournit aucune précision quant à la quantité d'archives qu'elle aurait ainsi conservées, les circonstances précitées ne justifient pas que soit mise à la charge de la société [J] une indemnité d'occupation, quel qu'en soit le montant.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Sur les autres demandes':

Partie perdante, la société [J] sera condamnée à payer à l'EURL et à M. [Z] [H], unis d'intérêt, une somme de 2.000 € au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel, cette condamnation devant s'ajouter à celle de même montant déjà accordée au titre de ceux exposés en première instance, qui sera confirmée.

Enfin, la société [J] supportera les entiers dépens de première instance et d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Statuant publiquement par mise à disposition, contradictoirement et en dernier ressort':

- confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la société Cabinet [E] [J] à payer à l'EURL [Z] [H] une indemnité d'occupation de 100 € par mois à compter du 1er juillet 2015 et jusqu'au complet transfert des archives entreposées au [Adresse 5] à [Localité 7]';

- l'infirmant de ce seul chef, statuant à nouveau et y ajoutant':

* déboute l'EURL [Z] [H] de toute demande au titre d'une indemnité d'occupation';

* déboute les parties du surplus de leurs demandes';

* condamne la société Cabinet [E] [J] à payer l'EURL [Z] [H] et à M. [Z] [H], unis d'intérêt, une somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel';

* condamne la société Cabinet [E] [J] aux entiers dépens de la procédure d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

M. COLLET D. GARET


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/03207
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;19.03207 ?
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