La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/07/2022 | FRANCE | N°19/01232

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 05 juillet 2022, 19/01232


AFFAIRE : N° RG 19/01232 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GJ2M

 



ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : DÉCISION du Tribunal de Grande Instance de CAEN du 12 Mars 2019

RG n° 17/03756







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 05 JUILLET 2022





APPELANTE :



La SA SADA ASSURANCES

N° SIRET : B 580 201 127

[Adresse 7]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal



représentée pa

r Me Marie BOURREL, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Pascal DELCROIX, avocat au barreau de MARSEILLE





INTIMÉES :



Madame [I] [N]

née le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Localité 3]



r...

AFFAIRE : N° RG 19/01232 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GJ2M

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DÉCISION du Tribunal de Grande Instance de CAEN du 12 Mars 2019

RG n° 17/03756

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 05 JUILLET 2022

APPELANTE :

La SA SADA ASSURANCES

N° SIRET : B 580 201 127

[Adresse 7]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Marie BOURREL, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Pascal DELCROIX, avocat au barreau de MARSEILLE

INTIMÉES :

Madame [I] [N]

née le [Date naissance 1] 1984 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée et assistée de Me Alice DUPONT-BARRELLIER, avocat au barreau de CAEN

La CPAM DU PUY DE DOME venant aux droits du RSI PROFESSIONS LIBERALES

[Adresse 2]

[Localité 8]

pris en la personne de son représentant légal

PARTIE INTERVENANTE :

La Société DARAG DEUTSCHLAND AG

[Adresse 10]

[Localité 4])

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Marie BOURREL, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Pascal DELCROIX, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

M. GANCE, Conseiller,

DÉBATS : A l'audience publique du 26 avril 2022

GREFFIER : Mme COLLET

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 05 Juillet 2022 par prorogation du délibéré initialement fixé au 28 Juin 2022 et signé par M. GUIGUESSON, président, et COLLET, greffier

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 10 janvier 2015, Mme [N] a été victime d'un accident de la circulation à [Localité 11] (14). Une expertise contradictoire amiable a été diligentée, à l'issue de laquelle les experts ont déposé leur rapport commun le 21 septembre 2015.

Un désaccord persistant sur le montant de la réparation de ses préjudices, par actes du 5 et 18 décembre 2017, Mme [N] a fait assigner la société Sada Assurances et le Régime Social des Indépendants (Rsi) devant le tribunal de grande instance de Caen.

Par jugement du 12 mars 2019 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal de grande instance de Caen a :

- condamné Sada Assurances à verser à Mme [N] :

* la somme de 92 429,60 euros en deniers ou quittances, provisions non déduites, en réparation de son préjudice corporel ;

* la somme de 4 000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

l'ensemble de ces sommes avec intérêts au taux légal à compter de ce jour ;

- débouté Mme [N] du surplus de ses demandes ;

- condamné Sada Assurances aux dépens de l'instance ;

- déclaré le jugement opposable au Rsi ;

- ordonné l'exécution provisoire.

Par déclaration du 16 avril 2019, Sada Assurances a formé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 16 février 2022, Sada Assurances demande à la cour de :

- accueillir Darag Deutschland Ag en son intervention volontaire ;

- la mettre hors de cause en l'état du transfert de son portefeuille de contrats automobiles à Darag Deutschland Ag ;

- débouter Mme [N] des fins de son appel incident ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de doublement des intérêts car il apparaît que les dispositions de la loi et la procédure de l'offre d'indemnisation telle que prévue par la loi de 1985 ont été respectées ;

- confirmer le jugement rendu sur les postes :

* Dépenses de santé actuelles,

* Frais divers,

* Assistance d'une tierce personne,

* Perte de gains professionnels actuels,

* Préjudice matériel,

- réformer le jugement rendu sur les postes :

* Incidence professionnelle temporaire et permanente,

* Déficit fonctionnel temporaire,

* Souffrances endurées,

* Déficit fonctionnel permanent ;

- débouter Mme [N] de ses chefs de demandes injustifiées et infondées, et dans l'ensemble réduire ses prétentions de façon sensible ;

- déduire des sommes qui seront retenues la provision versée à hauteur de 500 euros par Allianz et les sommes versées au titre de l'exécution provisoire par elle ;

- réformer le jugement en ce qu'il accordé la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ou à tout le moins réduire la réclamation ;

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Aux termes de ses dernières écritures notifiées le 17 septembre 2019, Mme [N] demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident ;

- évaluer ses préjudices de la façon suivante :

*dépenses de santé actuelles

évaluation : 516,14 euros

priorité victime : 120,37 euros

tiers payeur : 395,77 euros

*frais divers

évaluation : 1 495,34 euros

priorité victime : 1 495,34 euros

tiers payeurs : 0 euros

*tierce personne temporaire

évaluation : 489,11 euros

priorité victime : 489,11 euros

tiers payeur : 0 euros

*perte de gains professionnels actuels

évaluation : 396,99 euros

priorité victime : 396,99 euros

tiers payeur : 0 euros

*incidence professionnelle temporaire

évaluation : 2 733,54 euros

priorité victime : 2 733,54 euros

tiers payeur : 0 euros

*incidence professionnelle

évaluation: 67 466,09 euros

priorité victime : 67 466,09 euros

tiers payeur : 0 euros

*déficit fonctionnel temporaire

évaluation : 728 euros

priorité victime : 728 euros

tiers payeur : 0 euros

*souffrances endurées

évaluation : 4 000 euros

priorité victime : 4 000 euros

tiers payeur : 0 euros

*déficit fonctionnel permanent

évaluation -principal : 20 233,37 euros

évaluation-subsidiaire : 17 651,84 euros

priorité victime-principal : 20 233,37 euros

priorité victime-subsidiaire : 0 euros

tiers payeur-principal : 0 euros

tiers payeur-subsidiaire : 0 euros

*préjudice matériel

évaluation : 152,18 euros

priorité victime : 152,18 euros

tiers payeur : 0 euros

*total

évaluation-principal : 98 210,77 euros

évaluation-subsidiaire : 95 629, 23 euros

priorité victime-principal : 97 815 euros

priorité victime-subsidiaire : 95 233,46 euros

tiers payeur-principal : 395,77 euros

tiers payeur-subsidiaire : 395,77 euros

En conséquence,

- condamner Sada Assurances à lui payer, en réparation de son préjudice corporel, en denier ou quittance, la somme de 97 815 euros ou subsidiairement 95 233,46 euros en réparation de son préjudice corporel ;

- dire et juger que ces indemnités produiront intérêts au double du taux légal, avant imputation de la créance des tiers payeurs et sans tenir compte des provisions versées, à compter du 10 septembre 2015 jusqu'au jour où l'arrêt à intervenir aura un caractère définitif ;

- rendre l'arrêt commun au Rsi ;

- condamner Sada Assurances à lui payer, en plus de l'indemnité allouée par le tribunal, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens et dire qu'ils seront recouvrés par Me Barrelier, avocat.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 6 avril 2022.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

En 1er lieu, il convient de donner acte à la société DARAG Deutschland AG de son intervention volontaire, de ce qu'elle se substitue en réalité à la société SADA Assurances, qu'il convient de mettre celle-ci hors de cause, ce qui est admis par les parties ;

En 2ème lieu, au regard de la saisine de la cour, il convient uniquement de statuer sur la réparation des préjudices supportés et sur l'application du doublement des intérêts. Par ailleurs il est constant que la victime est justifiée à obtenir la réactualisation de ses réparations au jour le plus proche où la cour statue.

- Sur le préjudice patrimonial :

- Sur les dépenses de santé actuelles :

Il s'agit des frais médicaux, hospitaliers, pharmaceutiques et paramédicaux consécutifs à l'accident qui ont été payés par la victime ou le tiers payeur ;

La société DARAG sollicite la confirmation du jugement entrepris ayant alloué à madame [N], la somme de ce chef de 123,37 euros. Madame [N] compte tenu de l'état définitif des prestations RSI produit aux débats et de l'actualisation de la somme accordée par le 1er juge sollicite celle de 130,22 euros.

La cour trouve les éléments pour accorder la somme de 130,22 euros qui correspond à celle acquise aux débats de 120,37 euros actualisée;

- Sur les frais divers :

S'agissant de ce poste, les frais qui le constituent ne sont pas contestés, ils sont composés par les honoraires du médecin conseil à hauteur de 1380 euros plus celle de 61,80 euros de frais de transport, soit un total de 1441, 80 euros, ce montant est admis par l'assureur.

Dans ces conditions, il y a lieu de l'accorder sous son montant actualisé à hauteur de 1554,68 euros comme présenté dans le dispositif ;

- Sur l'assistance tierce personne temporaire :

Ce poste correspond au besoin d'assistance par une tierce personne professionnelle rémunérée à ce titre ou par une aide familiale non rémunérée dans les actes de la vie courante liée aux séquelles avant consolidation ;

La société DARAG sollicite la confirmation du jugement entrepris, il doit être constaté que la base de 2 heures sur 13 semaines est admise par les parties à la procédure. Le tarif horaire à appliquer peut être celui actualisé par madame [N] correspond au taux horaire du smic en 2022, soit 17,97 euros soit à accorder : 467,22 euros, soit 13x 2x17,97 euros ;

- Sur la perte de gains professionnels actuels :

la société DARAG ne s'oppose pas à la confirmation du jugement entrepris.

Madame [N] justifie qu'il convient de prendre comme référence pour la perte de gains supportée, le revenu de l'année antérieure à l'accident et non pas celle de l'année de celui-ci qui compte tenu de l'arrêt de travail accordé est inférieur à ce qu'il aurait du être.

Il s'ensuit que sur une base de revenus annuels de 24076 euros et de 2006 euros mensuels, c'est une somme journalière de 95,54 euros x 4 jours soit 382,16 euros, actualisée à 413,42 euros qui est obtenue, montant qu'il convient d'allouer à l'intéressée.

- Sur l'incidence professionnelle :

Ce poste indemnise la dévalorisation sur le marché du travail, l'augmentation de la pénibilité au travail ainsi que la perte de chance professionnelle concernant les perspectives de carrière et d'avenir ;

- Sur l'incidence professionnelle temporaire :

la société DARAG conteste le principe d'une incidence professionnelle temporaire, estimant d'une part, qu'il n'est produit par madame [N] aucune attestation de perte de revenus, que les douleurs ressenties, qu'elle invoque, relèvent du poste souffrances endurées, qui est indemnisé par ailleurs ;

En tout état de cause, selon la société DARAG, il ne peut s'agir que d'une perte de chance de réaliser les actes invoqués comme pénibles et douloureux, quand le poste de préjudice dit de l'incidence professionnelle fait partie des préjudices patrimoniaux post consolidation ;

Sur ce la cour estime que c'est de manière justifiée que le 1er juge a rappelé ce que suit ;

- que l'accroissement de la pénibilité de l'exercice professionnel consécutif à un accident doit être réparé en application du principe de la réparation intégrale, comme n'étant pas compris ni dans la perte de gains professionnels actuels ni dans les déficits fonctionnels, ni dans les souffrances endurées ;

- que l'incidence professionnelle a pour objectif d'indemniser les séquelles, en ce qu'elles limitent les possibilités professionnelles ou rendent l'activité professionnelle antérieure plus fatigante ou plus pénible et s'attache à indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité, mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle comme l'augmentation de la pénibilité à l'emploi ;

La pénibilité à l'emploi constitue pour madame [N] au regard de son activité de coiffeuse, qui exige une agilité physique certaine et des gestes précis et répétés, l'élément déterminant de l'incidence professionnelle invoquée ;

Dans le cas d'espèce, la cour comme le 1er juge y a procédé, peut admettre une incidence professionnelle temporaire puisque durant la période antérieure à la date de consolidation du 10 juillet 2015, madame [N] a repris son activité professionnelle dés le 15 janvier 2015 après 4 jours d'arrêt ;

Au regard de cette reprise d'activité dans la période antérieure à la consolidation, il ne peut pas être ignoré la pénibilité supportée par madame [N] pour laquelle le docteur [B] note dans son rapport du 20 février 2015 :

- Elle n'a pu reprendre ses activités que le 14 janvier 2015, depuis cette date elle est très génée par des douleurs de l'épaule gauche dés qu'elle doit avoir les bras en l'air, notamment pour faire les brushings et shampoings.

Le docteur [P] le 14 septembre 2015, précise dans son rapport s'agissant du retentissement professionnel, que madame [N] présente une gêne dans certains mouvements scapulaires prolongés et en hauteur comme les brushings, sans impossibilité ni inaptitude ;

La cour au regard des éléments ci-dessus rappelés, retiendra comme le 1er juge, le principe d'une incidence professionnelle antérieure à la date de consolidation, dont l'évaluation peut être faite sur la base du salaire, sachant comme le soutient madame [N] que le salaire est un paramètre essentiel de la relation de travail et qu'il est la contre partie d'un effort physique comme en l'espèce, l'importance de la pénibilité ayant un impact sur l'exercice de la profession.

Ainsi le recours à une fraction du salaire peut être appliqué, même pour apprécier la perte de chance d'avoir pu faire les actes exigés pour l'activité en cause sans pénibilité particulière, ce qui impacte la relation au travail et le salaire en résultant;

En effet la pénibilité et les difficultés à effectuer les gestes correspondant à la profession exercée qui donne lieu au revenu perçu, doivent être indemnisées puisque l'employé doit augmenter ses efforts pour maintenir son activité et son salaire correspondant à niveau constant ;

La cour estime que les calculs présentés par madame [N] peuvent être retenus s'agissant du montant du salaire mensuel moyen appliqué à hauteur de 1778 euros, au regard des déclarations de revenus et de l'avis d'impôt produits aux débats portant sur les années 2014, 2015, 2016 et 2017 ;

S'agissant des taux à appliquer pour apprécier l'importance des effets de la pénibilité, la cour estime qu'un taux unique de 20% doit être retenu sur toute la période du 14 janvier 2015 au 10 juillet 2015, soit à retenir une somme de :

- pour la période du 14 janvier 2015 au 10 avril 2015 : 2 mois et 28 jours soit 2 x 1778 soit 3556 euros et 28 jours à 84,66 euros par jour, soit 2370,48, soit un total de 5926,48 euros sur lequel est appliqué le taux de 20%, soit à retenir 1185,29 euros, car les éléments médicaux produits aux débats n'exigent que la période du 14janvier 2015 au 10 juillet 2015 soit divisée en deux.

Soit 1189,29 euros + 1066,80 euros, comme sollicités pour la période du 11 avril 2015 au 10 juillet 2015, soit à allouer la somme de 2256,09 euros soit à allouer au final la somme actualisée de : 2441,08 euros ;

- Sur l'incidence professionnelle permanente :

La cour ne retiendra pas la proposition faite par madame [N] de se conformer au logiciel de capitalisation des rentes du professeur [V], mais conservera l'usage du barême publié dans la Gazette du Palais 2020 dans la mesure où comme le 1er juge l'a noté celui-ci apparaît mieux adapté aux données sociologiques et économiques actuelles, la cour adoptant à ce titre la motivation du 1er juge;

La société DARAG pour ce poste conteste la solution d'un abattement de 10% du salaire mensuel à titre définitif jusqu'à l'âge de la retraite, car dés lors que la victime est apte à la poursuite de son activité, elle ne subit pas de préjudice économique. Elle explique que le déficit fonctionnel permanent a été évalué à 3%, et ce d'autant que l'âge de la retraite retenue à 65 ans est lui aussi contestable, quand la pénibilité invoquée ne concerne que certaines tâches ;

La cour estime que selon les deux rapports d'expertise réalisés, celui du 20 février 2015 fait état pour madame [N] d'une douleur de l'épaule gauche dés que cette dernière a les bras en l'air quand le rapport du 14 septembre 2015 ne fait état plus que d'une gêne dans certains mouvements scapulaires prolongés ;

Dans ces conditions, le taux utilisé par le 1er juge et recommandé par madame [N] apparaît excessif pour déterminer la pénibilité constante que cette dernière va subir de manière pérenne dans son activité professionnelle, telle qu'elle peut être évaluée à ce jour.

Un taux de référence de 5% semble suffisant sachant que madame [N] poursuit son activité, même si elle présente selon les attestations produites aux débats, des difficultés pour soutenir son rythme professionnel, ce qui lui impose des pauses fréquentes ;

Dans ces conditions, sur une base d'un salaire constant de 1778 euros, il convient en retenant une indemnité mensuelle de 88 euros, de calculer la somme à accorder comme suit :

- 88 x85 mois soit à compter du 10 juillet 2015 jusqu'au 30 juin 2022 :

-7480 euros plus 88 x12 x l'indice de l'euro rente à 62 ans âge légal de départ à la retraite pour une femme de 38 ans avec un taux d'intérêt à 0,30% soit : 22,283, soit à retenir 22530 euros soit en tout : 31 010 euros ;

Il en résulte que la cour accordera à madame [N] la somme de 31010 euros pour l'incidence professionnelle définitive, compte tenu de la nature physique de l'activité professionnelle de madame [N], des contraintes de stations debout prolongées, de la répétition d'actes techniques qui exigent une force et une maîtrise ;

- Sur les préjudices extrapatrimoniaux :

- Sur le déficit fonctionnel temporaire :

Ce poste a pour objet d'indemniser le préjudice résultant de la gêne dans les actes de la vie courante, que rencontre la victime pendant la maladie traumatique jusqu'à la date de consolidation. Ce préjudice intègre notamment la privation temporaire des activités privées et d'agrément ainsi que le préjudice sexuel.

Madame [N] sollicite la confirmation du jugement entrepris alors que la société DARAG propose la somme de 676 euros ;

La cour admettra l'évaluation fixée par le 1er juge à hauteur de 728 euros, l'appelante ne présentant aucun élément chiffré de nature à contredire la motivation du jugement entrepris.

- Sur le déficit fonctionnel permanent :

Madame [N] sollicite la confirmation du jugement entrepris, en ce qu'il l'a indemnisée pour ce poste, sur la base non pas d'une valeur du point d'incapacité en fonction du seul taux du déficit fonctionnel évalué par les médecins et de l'âge de madame [N] à la date de la consolidation de son état, et à la vue de son espérance de vie à cette date, mais sur la base d'une indemnité journalière de 1 euro avec l'usage du barême de capitalisation publié à la Gazette du Palais d'avril 2016 et l'âge de madame [N] à la date du jugement ;

La société DARAG s'oppose à cette solution en rappelant que le taux d'incapacité fixé par l'expert prend en compte les composantes du poste DFP de la victime;

Il peut être rappelé que le poste du DFP indemnise la réduction définitive après consolidation du potentiel physique, psychosensoriel et intellectuel résultant de l'atteinte à l'intégrité anatomophysiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions de l'existence.

La cour ne trouve aucun motif pertinent pour ne pas faire reposer l'évaluation de ce poste sur la valeur du point avec le taux qui a été évalué par le médecin expert, le docteur [P], car ce dernier a tenu compte des éléments suivants qui sont ceux qui composent le DFP :

- du déficit physique, en mentionnant une contusion du rachis dans son ensemble de la région thoracique gauche et scapulaire gauche,

- des phénomènes douloureux, en mentionnant que l'examen avait retrouvé une douleur dans les mouvements extrêmes de l'épaule, une petite limitation de la mobilité essentiellement aux phénomènes algiques, un testing de coiffe qui semble négatif mais sensible ;

- et les répercussions psychologiques en mentionnant quelques troubles psychotraumatiques avec appréhension à la conduite et sensation de fatigabilité et irritabilité ;

Dés lors en retenant le taux d'incapacité de 3% et un valeur du point de 2000 euros, la cour accordera à madame [N] la somme de 6000 euros de ce chef, et le jugement sera infirmé;

-Sur les souffrances endurées :

Ce poste indemnise les souffrances physiques et morales subies par la victime jusqu'à la date de consolidation, l'expert en l'espèce a évalué ce préjudice à 2,5/7, soit un niveau entre léger et modéré, ce qui justifie la somme de 4000 euros allouée par le 1er juge et la confirmation du jugement entrepris.

- Sur le préjudice matériel :

En l'absence, de toute contestation sérieuse sur ce poste, il convient de confirmer le jugement entrepris et d'actualiser la somme allouée à hauteur de 158,48 euros;

- Sur le doublement des intérêts :

Cette prétention n'a pas été accordée par le 1er juge, et la société DARAG sollicite la confirmation du jugement entrepris, en estimant qu'il est rapporté la preuve que les dispositions de la loi et de la procédure d'offre d'indemnisation ont été parfaitement respectées ;

Madame [N] répond qu'il n'y a pas eu d'offre provisionnelle détaillée dans les 8 mois de l'accident, que la 1ère offre qui a été faite, était manifestement incomplète se limitant à réaliser des propositions aux seuls postes de préjudices relevés par les médecins experts en occultant les préjudices patrimoniaux de la victime, quand l'offre du 13 octobre 2015 ne visait pas le préjudice matériel et s'est avérée également incomplète ;

La cour ne retiendra pas les arguments de madame [N] au regard des articles L.211-9 et L.211-13 du code des assurances et cela en ce que :

-l'accident étant du 10 janvier 2015, le délai pour présenter une offre expirait le 10 septembre 2015 et il est juste de noter que la 1ère offre provisionnelle qui a été adressée est en date du 23 septembre 2015 ;

- cette offre comme le 1er juge l'a appréciée était manifestement insuffisante, se limitant à proposer l'indemnisation de 4 postes de préjudices pour une somme de 6335 euros ;

- cependant, une offre définitive a bien été réalisée le 13 octobre 2015, dans le délai de 5 mois à compter de la date à laquelle l'assureur a eu connaissance de la date de consolidation fixée au 10 juillet 2015 par le rapport d'expertise du 14 septembre 2015, expédié le 21 septembre 2015 ;

- cette offre en est une conforme, puisqu'elle vise l'intégralité des postes de préjudices subis par la victime à la seule exception du préjudice matériel ce qui n'est pas décisif, celui-ci ayant une valeur de 146,50 euros, comme pour la créance du Rsi qui est à hauteur de 395,77 euros ;

- ainsi elle correspond à l'offre définitive faite dans le délai de 5 mois imparti ;

- certes cette 2ème offre a été adressée au conseil de madame [N], mais il ne peut pas être soutenu que ce dernier n'était pas mandaté par sa cliente, puisque maître Dupont Barrelier a répondu à cette offre en s'en reconnaissant comme le bon destinataire par un courrier du 2 décembre 2015 ;

Qu'il s'ensuit que le jugement sera confirmé en ce qu'il a écarté la demande formée en doublement des intérêts légaux ;

- Sur les autres demandes :

L'équité et les solutions apportées par la cour conduisent à confirmer le jugement entrepris s'agissant des dépens et des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et de dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 précité en appel, les dépens d'appel étant à supporter par la société Darag.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe.

- Donne acte à la société DARAG Deutschland AG de son intervention volontaire;

- Met hors de cause la SADA Assurances en l'état du transfert de son portefeuille de contrats automobiles au profit de la société DARAG Deutschland AG;

- Confirme le jugement entrepris sauf s'agissant de l'évaluation des postes de préjudices suivants :

- les dépenses de santé actuelles, les frais divers, l'assistance tierce personne, la perte de gains professionnels actuels, l'incidence professionnelle temporaire, l'incidence professionnelle permanente, le déficit fonctionnel permanent et le préjudice matériel,

- et en ce qu'il a condamné Sada Assurances à verser à Mme [N] :

* la somme de 92 429,60 euros en deniers ou quittances, provisions non déduites, en réparation de son préjudice corporel ;

- L'infirme de ces chefs et statuant à nouveau :

- Fixe comme il suit les postes de préjudices dont ceux infirmés :

- dépenses de santé actuelles : 130,22 euros ;

- frais divers : 1554,68 euros ;

- assistance tierce personne :467,22 euros ;

- perte de gains professionnels actuels : 413,22 euros ;

- incidence professionnelle temporaire : 2441, 08 euros ;

- incidence professionnelle permanente : 31010 euros ;

- déficit fonctionnel temporaire : 728 euros ;

- déficit fonctionnel permanent : 6000 euros ;

- souffrances en durées : 4000 euros ;

- préjudice matériel 158,48 euros ;

- Soit un total de : 46902,90 euros ;

- Condamne la société Darag Deutschland AG à verser à Mme [N] :

* la somme de 46902,90 euros en deniers ou quittances, provisions non déduites, en prenant en compte les sommes déjà versées au titre de l'exécution provisoire, en réparation de son préjudice corporel ;

- Déboute madame [N] du surplus de ses demandes en ce compris celle formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Déboute la société Darag Deutschland AG du surplus de ses demandes ;

- Rejette toutes autres demandes ;

- Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne la société Darag Deutschland AG en tous les dépens d'appel ;

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

COLLETG. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/01232
Date de la décision : 05/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-05;19.01232 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award