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23/06/2022 | FRANCE | N°20/01753

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 23 juin 2022, 20/01753


AFFAIRE : N° RG 20/01753 -

N° Portalis DBVC-V-B7E-GSXG

 



ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce de CAEN en date du 24 Juin 2020

RG n° 19/003763





COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 23 JUIN 2022









APPELANTE :



S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

N° SIRET : 542 097 902

[Adresse 1]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal





représentée et assistée de Me France LEVASSEUR, avocat au barreau de CAEN





INTIMES :



Monsieur [D] [E]

né le [Date naissance 4] 1970 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 5]





S.A.S. MONTERY GAILLAR...

AFFAIRE : N° RG 20/01753 -

N° Portalis DBVC-V-B7E-GSXG

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce de CAEN en date du 24 Juin 2020

RG n° 19/003763

COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 23 JUIN 2022

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

N° SIRET : 542 097 902

[Adresse 1]

[Localité 6]

prise en la personne de son représentant légal

représentée et assistée de Me France LEVASSEUR, avocat au barreau de CAEN

INTIMES :

Monsieur [D] [E]

né le [Date naissance 4] 1970 à [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 5]

S.A.S. MONTERY GAILLARDET

N° SIRET : 810 651 240

[Adresse 7]

[Localité 2]

représentés et assistés de Me Robert APÉRY, avocat au barreau de CAEN

DEBATS : A l'audience publique du 28 avril 2022, sans opposition du ou des avocats, Madame EMILY, Président de Chambre et Mme COURTADE, Conseillère, ont entendu les plaidoiries et en ont rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

Mme VELMANS, Conseillère,

ARRÊT prononcé publiquement le 23 juin 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

* * *

Par acte sous seing privé en date du 21 juin 2014, la SA BNP Paribas Personal Finance a consenti à la SA Société Nouvelle Montery Gaillardet immatriculée sous le numéro siren 392 700 183, devenue la SA ARG, un prêt affecté à l'acquisition d'un véhicule d'un montant de 43.000 euros, remboursable en 48 mensualités au taux contractuel nominal de 7,50% et au taux effectif global de 8,86% l'an.

Par acte du même jour signé par l'emprunteur, la banque et le vendeur, ce dernier a constitué à son profit une réserve de propriété avec subrogation au profit du prêteur.

Par acte du 9 avril 2015, la SA ARG a cédé son fonds de commerce à la SAS Montery Gaillardet, immatriculée sous le numéro siren 810 651 240. Le 30 juin 2016, la SAS Montery Gaillardet a vendu le véhicule objet du prêt à M. [D] [E], son directeur général, lequel l'a revendu à la SAS Sim Auto le 24 juin 2018.

Par jugement du 11 octobre 2017, le tribunal de commerce de Caen a ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la SA ARG.

Des échéances sont demeurées impayées conduisant la banque à prononcer la déchéance du terme le 25 janvier 2018, après une mise en demeure restée infructueuse.

Par actes d'huissier des 8 et 26 avril 2019, la société BNP Paribas Personal Finance a fait assigner la SAS Montery Gaillardet et M. [E] devant le tribunal de commerce de Caen afin d'obtenir le paiement du solde du prêt consenti le 21 juin 2014.

Par jugement du 24 juin 2020, le tribunal de commerce de Caen a :

- débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de ses demandes ;

- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à la SAS Montery-Gaillardet la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à la SAS Montery-Gaillardet la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [E] la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [E] la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance aux dépens.

Par déclaration en date du 17 septembre 2020, la SA BNP Paribas Personal Finance a relevé appel de cette décision, intimant la SAS Montery-Gaillardet et M. [E].

Par ordonnance du 12 mai 2021, le conseiller de la mise en état a :

- déclaré nul l'acte de signification du 11 août 2020 ;

- débouté en conséquence la SAS Montery-Gaillardet de sa demande tendant à voir déclarer l'appel irrecevable ;

- ordonné à la SAS Montery-Gaillardet de verser aux débats l'original de l'acte de cession du 9 avril 2015 et de ses annexes dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la présente ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard courant pendant une durée de trois mois ;

- condamné la SAS Montery-Gaillardet aux dépens de l'incident ;

- condamné la SAS Montery-Gaillardet à verser à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 1.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté la SAS Montery-Gaillardet de sa demande formée au titre des frais irrépétibles.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 6 janvier 2022, la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes et condamné celle-ci à dommages et intérêts, frais irrépétibles et dépens,

Statuant de nouveau,

Vu les articles 1134 et suivants en leur rédaction applicable à la cause sinon les articles

1240 et suivants du code civil,

- Condamner in solidum la société Montery Gaillardet et M. [D] [E] à lui payer la somme de 14 261 euros suivant compte provisoirement arrêté au 7 avril 2018 majorée des intérêts contractuels à courir jusqu'à parfait paiement en exécution du contrat de prêt sinon à titre de dommages-intérêts,

- Rejeter les moyens fins et conclusions de la société Montery Gaillardet et de M. [D] [E] et les débouter de l'intégralité de leurs demandes,

- Condamner les mêmes in solidum au versement d'une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner les mêmes in solidum aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 29 décembre 2021, la SAS Montery Gaillardet demande à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris,

- Condamner la société BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme complémentaire de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 29 décembre 2021, M. [E] demande de :

- Confirmer le jugement entrepris,

- Condamner la société BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme complémentaire de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens.

L'instruction de l'affaire a été close par ordonnance du 19 janvier 2022.

Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS

I. Sur la demande en paiement de la SA BNP Paribas Personal Finance

L'article 2367 du code civil dispose que la propriété d'un bien peut être retenue en garantie par l'effet d'une clause de réserve de propriété qui suspend l'effet translatif d'un contrat jusqu'au complet paiement de l'obligation qui en constitue la contrepartie.

La propriété ainsi réservée est l'accessoire de la créance dont elle garantit le paiement.

L'article 2372 ancien du même code, dans sa version applicable au litige, ajoute que le droit de propriété se reporte sur la créance du débiteur à l'égard du sous-acquéreur ou sur l'indemnité d'assurance subrogée au bien.

La BNP se prévaut de la clause de réserve de propriété stipulée avec subrogation pour agir en revendication de sa créance, constitutive du solde de l'emprunt, contre la SAS Montery Gaillardet et M. [E], intimés, en faisant valoir que ces derniers sont sous-acquéreurs successifs de mauvaise foi du véhicule financé par le prêt litigieux.

La SAS Montery Gaillardet et M. [E] concluent au débouté en soutenant que le contrat de crédit, qui ne leur a pas été transféré, ne leur est pas opposable, et que la subrogation consentie par le garage Josse, vendeur initial, au profit de la BNP, qui n'est pas l'auteur du paiement, est exclue de sorte que la banque ne peut se prévaloir de la clause de réserve de propriété.

L'acte du 21 juin 2014 annexé au contrat de prêt stipule: ' Par la présente, le vendeur constitue à son profit une réserve de propriété, différant le transfert de la propriété du bien désigné ci-dessus jusqu'au paiement effectif et complet du prix. Dès réception du solde du prix de vente du bien, réglé par le prêteur, il subroge ce dernier conformément aux dispositions de l'article 1250 al 1 et suivants du code civil, dans tous ses droits et actions nés de la clause de réserve de propriété. (...) L'acheteur s'interdit de vendre le bien, de le remettre en gage, tant que la propriété ne lui a pas été transférée définitivement.'

Cette subrogation conventionnelle est inopérante au regard des conditions posées par l'article 1250 al 1 du code civil. En effet, selon ce texte, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 applicable au litige, le créancier subrogeant doit recevoir son paiement d'une tierce personne et non du débiteur.

Le prêteur qui se borne à verser au vendeur les fonds empruntés par son client afin de financer l'acquisition d'un véhicule n'est pas l'auteur du paiement, ce client étant devenu, dès la conclusion du contrat de crédit, propriétaire des fonds ainsi libérés entre les mains du vendeur.

Ainsi, à l'exact moment du déblocage des fonds par le prêteur entre les mains du vendeur, la propriété du bien est tranférée à l'acquéreur-emprunteur.

Il s'ensuit qu'aucune subrogation dans les droits du garage Josse n'a pu s'opérer au profit de la BNP qui ne peut opposer un quelconque droit de propriété pour revendiquer la créance de prix entre les mains du sous-acquéreur.

Par suite, l'argumentation de l'appelante selon laquelle la SAS Montery Gaillardet et M. [E] auraient acquis le bien en toute connaissance de l'existence de l'emprunt et donc en fraude de ses prétendus droits est dépourvue de pertinence.

Il ressort clairement de l'original de l'acte de cession du fonds de commerce du 9 avril 2015, faisant expressément référence page 4 à l'acquisition du véhicule litigieux par la SAS Montery Gaillardet pour être mis à disposition de M. [F], et de son annexe page 12, également produite en original et paraphée, que le véhicule litigieux faisait bien partie des éléments cédés avec le fonds mais qu'en revanche, en l'absence de stipulation expresse dans ledit acte, le contrat de crédit n'a pas été transféré à la société cessionnaire.

Le courriel de Me [Y] du 2 août 2018 produit par la banque, qui a été désigné mandataire liquidateur en octobre 2017 soit plus de deux ans après la cession du fonds et qui n'est pas intervenu à cette opération, n'est pas de nature à rapporter la preuve contraire.

Par ailleurs, la clause de transfert des risques contenue dans l'acte de cession ne signifie nullement que les dettes de la cédante, la SA ARG, sont tranférées à la société acquéreur.

Dès lors, ni la SAS Montery Gaillardet ni M. [E] ne sont tenus à une quelconque obligation de remboursement de l'emprunt à l'égard de la banque.

Enfin, l'appelante qui ne caractérise pas une faute des intimés en lien avec le défaut de recouvrement du solde du crédit n'est pas fondée à agir sur le fondement de la responsabilité délictuelle.

Le jugement est donc confirmé en ce qu'il a débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de sa prétention.

II. Sur les demandes indemnitaires de la SAS Montery Gaillardet et M. [E] pour procédure abusive

L'action engagée par la SA BNP Paribas Personal Finance, quoique mal fondée, ne procède pas d'un comportement fautif de sa part, de nature à faire dégénérer en abus le droit d'agir en justice ou de contester une décision.

Il convient donc de débouter les intimés de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, le jugement étant infirmé à ce titre.

III. Sur les autres demandes

Les dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles sont confirmées.

La SA BNP Paribas Personal Finance succombant, est condamnée aux dépens de l'appel, à payer à la SAS Montery Gaillardet et M. [E], à chacun, la somme complémentaire de 500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, et est déboutée de sa demande formée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu'il a condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à la SAS Montery Gaillardet et à M. [E] la somme de 3.000 euros à chacun à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées et y ajoutant,

DEBOUTE la SAS Montery Gaillardet et M. [E] de leur demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à la SAS Montery Gaillardet et M. [E], à chacun, la somme complémentaire de 500€ sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE la SA BNP Paribas Personal Finance de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA BNP Paribas Personal Finance aux dépens de l'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

N. LE GALLF. EMILY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/01753
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;20.01753 ?
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