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23/06/2022 | FRANCE | N°19/03206

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 23 juin 2022, 19/03206


AFFAIRE : N° RG 19/03206 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GOCH

 



ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce de LISIEUX en date du 08 Novembre 2019

RG n° 2019.1426





COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 23 JUIN 2022









APPELANTE :



SCCV GRAND LARGE

N° SIRET : 821 065 109

[Adresse 2]

[Adresse 2]

prise en la personne de son représentant légal



représentée par Me Nicolas DELAPLACE, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Franck LAVAIL, avocat au barreau de PARIS





INTIMEE :



SAS DE BIASIO

N° SIRET : 813 326 378

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

p...

AFFAIRE : N° RG 19/03206 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GOCH

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION du Tribunal de Commerce de LISIEUX en date du 08 Novembre 2019

RG n° 2019.1426

COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 23 JUIN 2022

APPELANTE :

SCCV GRAND LARGE

N° SIRET : 821 065 109

[Adresse 2]

[Adresse 2]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Nicolas DELAPLACE, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Franck LAVAIL, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

SAS DE BIASIO

N° SIRET : 813 326 378

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Dominique MARI, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Johann PHILIP, avocat au barreau d'EURE

DEBATS : A l'audience publique du 25 avril 2022, sans opposition du ou des avocats, Madame EMILY, Président de Chambre, a entendu seule les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement le 23 juin 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

* * *

Par acte d'huissier de justice du 10 avril 2019, la SCCV GRAND LARGE a assigné la SAS DE BIASIO devant le tribunal de commerce de Lisieux aux fins de voir condamner cette dernière au paiement d'une somme de 80 400 euros à titre de dommages et intérêts au motif que la société DE BIASIO avait engagé sa responsabilité contractuelle en rompant les relations convenues à l'occasion de la réalisation de travaux de gros 'uvre d'un chantier situé [Adresse 1].

Par jugement du 8 novembre 2019, le tribunal de commerce de Lisieux a :

- débouté la SAS DE BIASIO en son exception d'incompétence ;

- débouté la SCCV GRAND LARGE de l'ensemble de ses demandes fin et conclusions ;

- dit que la SAS DE BIASIO et la SCCV GRAND LARGE n'étaient pas liées par un contrat et déclaré justifié le retrait de l'offre de la société DE BIASIO ;

- condamné la SCCV GRAND LARGE à payer à la SAS DE BIASIO la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SCCV GRAND LARGE aux entiers dépens et liquidé les frais de greffe à la somme de 73,22 euros.

Par déclaration du 15 novembre 2019, la société GRAND LARGE a fait appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions du 7 juin 2021, elle demande à la cour d'appel de :

- débouter la société DE BIASIO de son appel incident comportant demandes indemnitaires.

- infirmer la décision déférée en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

A titre principal,

- dire et juger que la brusque rupture des relations contractuelles de la société DE BIASIO constitue une faute ayant engagé sa responsabilité contractuelle devant être réparée ;

En conséquence,

- condamner la société DE BIASIO à payer à la société GRAND LARGE, au titre des inexécutions contractuelles, les sommes de :

- 64.320 euros au titre des pénalités contractuelles,

- 8.000 euros de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation des acquéreurs,

- 34.560 euros au titre du surcoût de construction causé par la défection fautive de la société DE BIASIO,

- 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé du fait de la désorganisation de l'opération générée par ses agissements fautifs ;

A titre subsidiaire,

- dire et juger que la brusque rupture, par la société DE BIASIO, des pourparlers engagés par les parties constitue une faute ayant engagé sa responsabilité extra-contractuelle devant être réparée ;

En conséquence

- condamner la société DE BIASIO à payer à la SCCV GRAND LARGE, les sommes de :

- 8.000 euros de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation des acquéreurs,

- 34.560 euros au titre du surcoût de construction causé par la rupture abusive des pourparlers par la société DE BIASIO ;

- 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé du fait de la désorganisation de l'opération générée par les agissements fautif de la société DE BIASIO ;

En toute hypothèse,

- ordonner la capitalisation des intérêts échus depuis plus d'un an ;

- condamner la société DE BIASIO à payer à la société GRAND LARGE, la somme de 12.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens avec distraction au bénéfice de Maître Nicolas DELAPLACE conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions du 5 juillet 2021, la société DE BIASIO demande à la cour d'appel de :

- confirmer le jugement entrepris ;

Y ajoutant,

- condamner la société SCCV GRAND LARGE à verser à la société DE BIASIO la somme de 10000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

- condamner la société SCCV GRAND LARGE à verser à la société DE BIASIO la somme de 10000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 décembre 2021.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions visées supra.

SUR CE, LA COUR

Sur l'existence d'un contrat

La SCCV GRAND LARGE soutient qu'il existait un contrat entre les parties, qu'un acte d'engagement avait été régularisé reprenant le devis de la société DE BIASIO ce qui démontre l'existence d'un accord sur la chose et sur le prix et que cet accord avait en outre reçu un commencement d'exécution (échanges pour préparer le lot, négociation d'un poste supplémentaire au devis).

La société DE BIASIO fait valoir qu'aucun contrat n'avait été formé entre les parties faute d'accord sur la chose et sur le prix et faute de respect du formalisme requis en la matière, la norme P 03-001 applicable au marché prévoyant que l'acceptation de l'engagement était valablement faite par lettre recommandée avec accusé de réception.

Il résulte de la norme NF P03-001 applicable au marché et de son article 4.2.3.5 que le marché est conclu par la signature ou par l'acceptation, par le maître de l'ouvrage, de l'offre présentée par l'entrepreneur dans les conditions énoncées lors de la consultation, quel que soit le mode de celle-ci. A défaut de clause particulière dans la consultation, cette acceptation doit intervenir dans les 60 jours qui suivent la remise de l'offre. A l'expiration de ce délai, l'entrepreneur n'est plus lié par son offre.

L'article 6.3.2 de la norme prévoit que les communications et notifications liées par un délai sont valablement faites par lettre recommandée avec avis de réception ou par tous moyens permettant de donner date certaine.

Cet article ne soumet pas la validité de l'acte d'engagement à une acceptation formalisée par lettre recommandée avec avis de réception mais permet de donner une date certaine à la réception des documents et fait courir notamment le délai de 60 jours pour acceptation de l'offre de l'entrepreneur.

Il résulte des pièces versées aux débats que la société DE BIASIO a établi un devis le 6 juillet 2018 pour un prix de 670 000 euros HT.

L'acte d'engagement a été signé par la société DE BIASIO le 27 juillet 2018 pour le montant de son devis.

Au vu des copies de courriels communiquées, il y a eu des discussions entre les parties sur le prix du marché principal puis une demande de chiffrage complémentaire pour la réalisation de voiles de sous-sol a été faite le 2 août 2018 avec un chiffrage définitif de ces travaux supplémentaires réalisé par la société DE BIASIO le 15 août 2018.

Contrairement à ce que soutient la société DE BIASIO , le courriel du 15 août 2018 relatif au chiffrage définitif de la réalisation de voiles de sous-sol pour un montant de 32 500 euros et qui indique que le devis initial n'est plus valable ne fait pas référence au marché principal chiffré à hauteur de 670 000 euros HT mais au premier devis relatif aux voiles de sous-sol établi pour un montant de 21 550 euros HT. La société DE BIASIO n'a pas remis en cause l'acte d'engagement signé le 27 juillet 2018 par ce courriel du 15 août 2018.

La société DE BIASIO a participé à une réunion préparatoire au chantier le 29 août 2018. Elle indique qu'elle a assisté à cette réunion à titre d'information, comme invitée, et que c'est à cette occasion qu'elle a constaté l'impréparation de la SCCV GRAND LARGE, que des fondations avaient déjà été faites alors que tous les lots n'étaient pas encore attribués et que des fondations avaient été réalisées sans calcul de descentes de charges.

Pour autant, par courriel du 30 août 2018, la société DE BIASIO demandait à la société SCCV GRAND LARGE de lui retourner l'acte d'engagement signé.

Dans un courriel du 30 août 2018, la société GRAND LARGE indique envoyer l'acte d'engagement signé de sa part par courriel et par courrier.

La société DE BIASIO a reconnu dans un courriel du 31 août 2018 avoir reçu ce document signé par mail le 30 août 2018 au matin.

Cette signature de l'acte d'engagement par les deux parties, au prix du devis établi par l'entrepreneur, vaut conclusion du marché.

Il y a donc bien eu un contrat conclu entre les parties.

Sur la rupture fautive du contrat

La société GRAND LARGE fait valoir que la rupture du contrat est fautive dès lors que la société DE BIASIO a émis un devis en ayant à sa disposition tous les éléments techniques nécessaires, que c'est cette dernière qui est à l'origine du décalage entre les pieds de grue et la grue qu'elle envisageait d'utiliser puisqu'elle n'avait jamais répondu aux messages lui demandant des précisions sur les descentes de charges de sa grue, que les prétextes utilisés pour justifier la rupture des relations contractuelles étaient de faux prétextes et qu'en tout état de cause les motifs invoqués ne lui permettaient nullement de rompre unilatéralement le contrat ou d'invoquer une exception d'inexécution.

La société DE BIASIO soutient que la SCCV GRAND LARGE a méconnu ses obligations essentielles en ne lui communiquant pas toutes les pièces nécessaires et notamment le cahier des clauses administratives particulières , que le chantier n'était pas conduit dans les règles de l'art, que les plans étaient sans cesse modifiés, que des travaux supplémentaires ont été demandés, que les fondations étaient sous-dimensionnées et avaient été réalisées dans étude sur les descentes de charges, qu'en avril 2019, le bureau de contrôle avait dénoncé cette situation.

La résolution du contrat synallagmatique résulte soit de l'application d'une clause résolutoire, soit en cas d'inexécution suffisamment grave, d'une notification du créancier au débiteur ou d'une décision de justice.

Aux termes de l'article 1226 du code civile, le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification. Sauf urgence, il doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. La mise en demeure mentionne expressément qu'à défaut pour le débiteur de satisfaire à son obligation, le créancier sera en droit de résoudre le contrat.

Lorsque l'inexécution persiste, le créancier notifie au débiteur la résolution du contrat et les raisons qui la motivent.

Le débiteur peut à tout moment saisir le juge pour contester la résolution. Le créancier doit alors prouver la gravité de l'inexécution.

Dès le 31 août 2018, la société DE BIASIO a rompu, par courriel, ses relations contractuelles avec la SCCV GRAND LARGE.

La société DE BIASIO précise dans son courriel que le projet est mené de façon aventureuse, que les pieds sous grue ont été réalisés sans aucune information de la part de la société DE BIASIO qui n'a pas donné d'information sur le modèle de grue, que les pieux du bâtiment sont réalisés sans descentes de charges effectuées par ses soins, que les voiles par passes vont débuter sans aucune étude de sa part, qu'elle ne dispose d'aucun plans de descentes des charges des lots CES pour effectuer ses calculs et qu'elle a appris qu'il restait des lots à attribuer.

La société DE BIASIO indique dans son courriel qu'elle garantit ses ouvrages et et qu'elle ne souhaite pas être confrontée à de futurs sinistres.

La société DE BIASIO, dans un courriel du 31 août 2018, fait valoir que le choix de la grue ne se fait qu'après la conclusion du contrat, pendant la phase de préparation au cours de laquelle chaque corps d'état lui diffuse ses besoins par rapport aux descentes de charge, ce qui lui permet de définir ses besoins matériels, ses modes opératoires, de passer ses commandes et qu'elle ne peut donner ses besoins en descentes de charges avant de définir une grue, de définir un profil de vent et de calculer les fondations de grue.

Dans un mail en réponse du même jour, le maître d'ouvrage indique : «  J'entends vos craintes sur ce dossier et je ne peux vous donner totalement tort. Une défaillance d'entreprise précédent votre arrivée a totalement désorganisé l'opération avec une inquiétude de la maîtrise d'ouvrage sur les délais courants. » Il demande à l'entreprise DE BIASIO de revoir sa position s'engageant à un arrêt général de l'opération , à mettre en place notamment un planning de préparation des travaux cohérent avec l'ensemble des intervenants. Il est proposé une période de préparation de 4 semaines avec démarrage des VPP après confirmation des descentes de charges générales et la vérification des pieux.

Dans ses conclusions, la SCCV GRAND LARGE confirme que les descentes de charges sur les pieux de grue ne permettaient pas l'utilisation de la grue de la société DE BIASIO imputant cette difficulté à cette dernière qui n'avait pas répondu aux différents messages (versés aux débats) lui demandant des informations relatives aux descentes de charges de sa grue.

Si les échanges de courriels relatifs à la traction pouvant être reprise par les pieux confirment la difficulté, la société IngeOuest Structures proposait dans un mail du 30 août 2018 deux solutions pour remédier au problème (4 micropieux ou ajout de 2 pieux).

Contrairement aux affirmations de la société DE BIASIO dans ses dernières conclusions, le rapport d'examen de l'APAVE du 15 mars 2019 n'a pas émis d'avis défavorable à la poursuite des travaux et il n'est nulle part écrit que les calculs de descentes de charges non pas été effectués.

Concernant l'attribution des derniers lots, il est relevé par l'APAVE que celle-ci doit être faite au plus vite pour la coordination avec le gros 'uvre.

Au vu de la solution technique proposée pour renforcer les pieux, des délais consentis par la société GRAND LARGE, la difficulté technique invoquée par la société DE BIASIO au titre des pieds de grue et des descentes de charges n'apparaît pas suffisamment grave pour justifier une résolution unilatérale du contrat.

Il sera en outre relevé que dans l'acte d'engagement, la société DE BIASIO reconnaît avoir étudié l'ensemble du dossier et avoir vérifié que les documents remis lui permettaient de remplir ses engagements contractuels.

Dans son courriel du 31 août 2018, il n'est pas fait mention de l'absence de communication de certains documents et la société DE BIASIO ne justifie aucune réclamation à ce titre.

La société DE BIASIO ne justifie pas non plus de ce que les plans étaient sans cesse modifiés.

Par rapport aux travaux supplémentaires sollicités, la société DE BIASIO a répondu à la demande et a établi un devis complémentaire.

Au vu de ces éléments, la société DE BIASIO n'établit pas une inexécution de ses obligations par la société GRAND LARGE suffisamment grave pour justifier d'une rupture unilatérale du contrat.

Dès lors, le jugement sera infirmé et il sera jugé que la société DE BIASIO a rompu de manière fautive le contrat conclu entre les parties.

Sur l'indemnisation du préjudice

La société GRAND LARGE invoque comme préjudice 96 jours de retard devant être indemnisé à hauteur de 670 euros par jour, l'indemnisation de deux clients du fait de retard de livraison, un surcoût du poste de peinture, une désorganisation du chantier.

La société DE BIASIO conteste l'existence d'un préjudice en lien avec son retrait du chantier, fait valoir que le retard ne lui est pas imputable et que la désorganisation du chantier préexistait à son retrait.

Elle précise en outre qu'il ne saurait y avoir d'indemnisation pour une rupture brutale des relations commerciales qui n'est justifiée ni dans son principe ni dans son quantum, que la demande relative à la désorganisation ne repose sur aucun fondement distinct des autres préjudices, que le retard invoqué par les deux acheteurs qui ont été indemnisés ne peut lui être imputable et que préjudice lié au poste peinture n'est pas justifié.

La société GRAND LARGE fait état d'un début d'intervention de la société DE BIASIO prévu début septembre 2018.

Le retrait du chantier a eu lieu le 31 août 2018.

Il sera constaté qu'une nouvelle entreprise de gros 'uvre a signé un nouvel acte d'engagement le 1er novembre 2018.

Dès lors, il doit être retenu un retard pour le lot gros 'uvre de 2 mois.

Il sera relevé que le cahier des clauses administratives particulières prévoit au titre des pénalités de retard, lorsque les travaux ne sont pas effectués et terminés dans le délai prévu au marché, une pénalité égale à un millième du montant du marché global avec un minimum de 1500 euros par jour de retard.

Au vu de ces éléments, du montant du chantier, du fait que le chantier n'avait pas débuté, le préjudice subi par la société GRAND LARGE du fait du retard dans le début des travaux de gros 'uvre peut être évalué à la somme de 30 000 euros.

Dans son message du 31 août 2018, la société GRAND LARGE reconnaît la désorganisation totale du chantier avant l'arrivée de la société DE BIASIO avec déjà une inquiétude de la maîtrise d''uvre sur les délais courants.

La somme réclamée à hauteur de 20 000 euros pour la désorganisation du chantier n'apparaît pas ainsi justifiée comme étant en lien avec le retrait de la société DE BIASIO et fait double emploi avec l'indemnisation allouée au titre du retard dans l'attribution du lot gros 'uvre. La société GRAND LARGE sera déboutée de sa demande à ce titre.

Concernant l'indemnisation à hauteur de 5500 euros et de 2500 euros de deux acheteurs dans le cadre de protocoles d'accord, il y a lieu de relever qu'il est mentionné que la date de livraison des appartements était initialement prévue le 30 septembre 2019 alors qu'elle n'est intervenue que le 10 mars 2021 soit avec18 mois de retard. Si la société GRAND LARGE a mis en avant la défection de la société DE BIASIO pour expliquer ce retard, il est aussi invoqué dans les protocoles d'accord les intempéries, les grèves et la crise sanitaire.

Il sera en outre rappelé la grande désorganisation du chantier qui préexistait au retrait de la société DE BIASIO.

Dès lors, le lien de causalité entre le départ de la société DE BIASIO et le retard de livraison des appartements de 18 mois n'est pas justifié. La société GRAND LARGE sera déboutée de sa demande à ce titre.

Concernant la facture de peinture, la société GRAND LARGE fait état d'un surcoût de mise en peinture des 24 lots livrés à hauteur de 34 560 euros. Elle fournit un devis non daté et ne justifie aucunement d'un surcoût du lot peinture en lien avec le départ du chantier de la société DE BIASIO. Elle sera donc déboutée de sa demande à ce titre.

La société DE BIASIO sera par conséquent condamnée à payer à la société GRAND LARGE la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour la rupture fautive du contrat.

Il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

La demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la société DE BIASIO sera rejetée dès lors qu'il est reconnu que la rupture du contrat de marché est fautive et qu'il est fait droit partiellement aux demandes de la société GRAND LARGE.

Les dispositions du jugement déféré relatives aux frais de procédure et aux dépens seront infirmées.

La société DE BIASIO, qui est condamnée à paiement, sera déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de la condamner à payer à la SCCV GRAND LARGE la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel.

La société DE BIASIO sera en outre condamnée aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement au profit de Maître Nicolas DELAPLACE par application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe ;

INFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

JUGE que la rupture du marché de gros 'uvre par la société DE BIASIO est fautive ;

CONDAMNE la société DE BIASIO à payer à la SCCV GRAND LARGE la somme de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

DIT que les intérêts échus dus au moins pour une année entière produiront intérêt ;

CONDAMNE la société DE BIASIO à payer à la SCCV GRAND LARGE la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel ;

CONDAMNE la société DE BIASIO aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement au profit de Maître Nicolas DELAPLACE ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

N. LE GALLF. EMILY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/03206
Date de la décision : 23/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-23;19.03206 ?
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