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16/06/2022 | FRANCE | N°20/02455

France | France, Cour d'appel de Caen, 2ème chambre civile, 16 juin 2022, 20/02455


AFFAIRE : N° RG 20/02455 -

N° Portalis DBVC-V-B7E-GT7H

 



ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : DECISION du Juge des contentieux de la protection de LISIEUX en date du 24 Août 2020 RG n° 1120000049





COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 16 JUIN 2022









APPELANTE :



S.A. FINANCO

N° SIRET : 338 138 795

[Adresse 5]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal



représentée par Me Emmanuelle BLANGY, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Stéphanie BORDIEC, avocat au barreau de BORDEAUX





INTIME :



Monsieur [H] [B]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 6]

[...

AFFAIRE : N° RG 20/02455 -

N° Portalis DBVC-V-B7E-GT7H

 

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : DECISION du Juge des contentieux de la protection de LISIEUX en date du 24 Août 2020 RG n° 1120000049

COUR D'APPEL DE CAEN

DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRÊT DU 16 JUIN 2022

APPELANTE :

S.A. FINANCO

N° SIRET : 338 138 795

[Adresse 5]

[Localité 4]

prise en la personne de son représentant légal

représentée par Me Emmanuelle BLANGY, avocat au barreau de CAEN,

assistée de Me Stéphanie BORDIEC, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIME :

Monsieur [H] [B]

né le [Date naissance 2] 1949 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 1]

non représenté, bien que régulièrement assigné

DEBATS : A l'audience publique du 04 avril 2022, sans opposition du ou des avocats, M. GOUARIN, Conseiller, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme LE GALL, greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme EMILY, Président de Chambre,

Mme COURTADE, Conseillère,

M. GOUARIN, Conseiller,

ARRÊT prononcé publiquement le 16 juin 2022 à 14h00 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS

Selon offre préalable acceptée le 18 décembre 2015, la société Financo a consenti à M. [H] [B] un crédit affecté d'un montant de 13.500 euros, au taux d'intérêt de 3,84 % l'an, remboursable en 144 mensualités de 119,04 euros, hors assurance, destiné à financer la réalisation de travaux de rénovation.

Ce contrat stipule qu'en cas de défaillance de l'emprunteur, il pourra être résilié de plein droit par le prêteur sans aucune formalité préalable.

Un procès-verbal de réception des travaux a été établi le 28 janvier 2016.

Le 10 mai 2017, M. [B] a bénéficié d'un plan de surendettement prévoyant le rééchelonnement de ses dettes, dont celle envers la société Financo au titre du prêt en cause.

Suivant lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 6 août 2019, distribuée le 8 août suivant, la société Financo a informé M. [B] qu'en application des conditions générales du prêt la déchéance du terme était acquise au 22 mai 2017 et l'a mis en demeure de lui payer la somme totale de 13.836,46 euros au titre du montant des échéances impayées à peine de déchéance du terme du prêt.

Suivant acte d'huissier du 14 janvier 2020, la société Financo a fait assigner M. [B] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lisieux aux fins, notamment, de le voir condamner au paiement de la somme de 12.866,71 euros et celle de 500 euros à titre d'indemnité de procédure.

Par lettre simple du 16 décembre 2016, la société Financo avait mis en demeure M. [B] de lui payer dans un délai de 15 jours la somme de 445,77 euros au titre des échéances impayées, à peine de déchéance du terme.

Par jugement du 24 août 2020, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Lisieux a :

- déclaré la société Financo recevable en son action,

- débouté la société Financo de ses demandes au titre de constat de la déchéance du terme du crédit affecté souscrit le 18 décembre 2015 avec M. [B],

- ordonné la déchéance du droit aux intérêts conventionnels à compter de la date de conclusion du contrat,

- condamné M. [B] à payer à la société Financo la somme de 1.201,26 euros correspondant aux échéances impayées en capital pour la période du 4 juillet 2019 au 4 août 2020, cette somme ne portant pas intérêts,

- dit qu'à compter du jugement M. [B] devra à la société Financo les échéances prévues au contrat au titre du seul capital,

- débouté la société Financo du surplus de ses demandes,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- condamné M. [B] à payer à la société Financo la somme de 300 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.

Selon déclaration du 13 novembre 2020, la société Financo a interjeté appel de cette décision.

Par dernières conclusions du 11 février 2021, l'appelante poursuit l'infirmation du jugement attaqué en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes au titre de constat de la déchéance du terme de crédit affecté souscrit le 18 décembre 2015 par M. [B], ordonné la déchéance du droit aux intérêts conventionnels à compter de la date de conclusion de ce contrat et condamné M. [B] à lui payer la somme de 1.201,26 euros au titre des échéances échues impayées de juillet 2019 à août 2020.

Elle demande à la cour, statuant à nouveau de ces chefs, de condamner M. [B] à lui payer la somme de 12.866,71 euros en principal, arrêtée au 13 décembre 2019, outre les intérêts au taux contractuel de 3,84 % à compter du 30 novembre 2019 et au taux légal sur le surplus.

Subsidiairement, elle demande de condamner M. [B] à lui payer la somme de 237,08 euros au titre des échéances échues impayées au 22 mai 2017 ainsi que la somme correspondant aux échéances échues impayées du 4 juillet 2019 jusqu'à l'arrêt à intervenir, assortie des intérêts au taux contractuel de 3,84 % à compter de cette date, de dire et juger que le contrat de crédit reprendra tous ses effets à compter de l'arrêt à intervenir et, en tout état de cause, de condamner l'intimé à lui verser la somme de 2.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux dépens d'appel.

M. [B] n'a pas constitué avocat, la déclaration d'appel lui ayant été signifiée à personne le 11 janvier 2021.

La mise en état a été clôturée le 23 février 2022.

Pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il est référé aux dernières écritures des parties.

MOTIVATION

1. Sur la déchéance du terme

Au visa des articles 1217 du code civil, L. 311-22 devenu L. 312-36 du code de la consommation, le premier juge a estimé que, s'agissant d'une condition d'exigibilité de la créance qui entre dans l'appréciation du bien-fondé de la créance, il appartient au juge de vérifier l'existence d'une mise en demeure préalable à la déchéance du terme, qu'en l'espèce, si le contrat de crédit en cause prévoit que le prêteur peut résilier ce contrat de plein droit, sans formalité préalable, notamment en cas de défaillance de l'emprunteur, une telle clause dé déchéance automatique est par nature contraire aux dispositions de l'article L. 311-22 devenu L. 312-36 du code de la consommation qui impose avant toute déchéance du terme un avertissement sur le risque encouru et que la société Financo ne justifiait pas de l'envoi de la mise en demeure préalable du 16 décembre 2016 avant la déchéance du terme prononcée le 6 août 2019.

Cependant, comme le soutient à bon droit l'intimée, si selon l'article L. 141-4 devenu R. 632-1 du code de la consommation le juge peut soulever d'office toutes les dispositions de ce code dans les litiges nés de son application, il n'entre pas dans les pouvoirs du juge de relever d'office le moyen tiré de l'absence de mise en demeure préalable à la déchéance du terme résultant de l'application des dispositions du code civil et non du code de la consommation, édictées dans le seul intérêt du débiteur auquel il appartient de s'en prévaloir et qui ne revêt aucun caractère d'ordre public.

En l'espèce, le premier juge a excédé ses pouvoirs en soulevant d'office le moyen tiré de l'absence de mise en demeure préalable à la déchéance du terme, alors qu'il ressort des énonciations du jugement entrepris que M. [B], comparant, avait indiqué qu'il ne contestait pas la dette.

La société Financo justifie avoir adressé le 6 août 2019 à M. [B] une lettre l'informant de la déchéance du terme du contrat de crédit en cause au 22 mai 2017, et ce conformément aux conditions générales du prêt en cause prévoyant la résiliation plein droit de ce prêt en cas de défaillance de l'emprunteur, de sorte que la déchéance du terme doit être constatée au 22 mai 2017.

Le jugement attaqué sera donc infirmé sur ce point.

2. Sur la remise préalable de la fiche européenne normalisée et la déchéance du droit aux intérêts

C'est par des motifs pertinents que la cour adopte que le premier juge, au visa des articles L. 311-6 devenu L. 312-12, R. 311-3 devenu R. 312-2 et L. 411-48 devenu L. 341-1 du code de la consommation, a estimé que la société Financo ne rapportait pas la preuve, dont la charge lui incombe, de l'exécution de son obligation d'information précontractuelle de l'emprunteur par la remise de la fiche d'information précontractuelle européenne normalisée, la seule mention par laquelle celui-ci reconnaît avoir reçu cette information ne pouvant constituer qu'un indice devant être complété par un ou plusieurs éléments complémentaires, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de la société Financo.

Selon l'article L. 311-48 devenu L. 341-8 du code de la consommation, en cas de déchéance du droit aux intérêts, le débiteur n'est tenu qu'au remboursement du capital restant dû suivant l'échéancier prévu, les sommes perçues au titre des intérêts étant restituées ou imputées sur le capital restant dû. Ces dispositions excluent le paiement de toute autre somme telle l'indemnité prévue à l'article L. 312-9.

Comme l'a justement retenu le premier juge, la déchéance du droit aux intérêts conventionnels de 3,84 % l'an constitue une sanction insuffisamment effective au regard du taux d'intérêt légal applicable aux dettes des particuliers envers les professionnels, qui est actuellement de 0,76 % majoré de 5 points pour le taux d'intérêt légal majoré.

En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a condamné M. [B] à payer à la société Financo la somme de 1.201,26 euros correspondant aux échéances impayées en capital pour la période du 4 juillet 2019 au 4 août 2020, mais confirmé en ce qu'il a dit que la somme due par M. [B] ne porterait pas intérêts.

La cour statuant à nouveau de ce chef, au regard de l'historique financier produit par l'appelante, M. [B] sera condamné à payer à la société Financo la somme de 12.618,72 euros au titre du capital prêté déduction faite des sommes versées par M. [B] au titre de remboursement dudit crédit ainsi que du plan de surendettement dont il bénéficie (13.500 euros ' 281,28 euros d'échéances payées - 600 euros versés au titre des échéances du plan de surendettement), outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

3. Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement entrepris relatives aux frais irrépétibles et aux dépens de première instance ne sont pas critiquées.

M. [B], qui succombe, sera condamné aux dépens d'appel.

Il n'y a pas lieu de prononcer de condamnation complémentaire sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Financo de ses demandes au titre de constat de la déchéance du terme du crédit affecté souscrit le 18 décembre 2015 avec M. [B], a condamné ce dernier à payer à la société Financo la somme de 1.201,26 euros correspondant aux échéances impayées en capital pour la période du 4 juillet 2019 au 4 août 2020 ;

Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées,

Constate la déchéance du terme au 22 mai 2017 ;

Condamne M. [H] [B] à payer à la société Financo la somme de 12.618,72 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Condamne M. [H] [B] aux dépens d'appel ;

Dit n'y avoir lieu de prononcer de condamnation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

N. LE GALLF. EMILY


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 2ème chambre civile
Numéro d'arrêt : 20/02455
Date de la décision : 16/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-16;20.02455 ?
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