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07/06/2022 | FRANCE | N°19/02212

France | France, Cour d'appel de Caen, 1ère chambre civile, 07 juin 2022, 19/02212


AFFAIRE : N° RG 19/02212 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GL5E





ARRÊT N°



JB.





ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de CHERBOURG du 06 Mai 2019

RG n° 14/00100







COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 07 JUIN 2022





APPELANTES :



Madame [S] [D] épouse [Y]

née le 07 Juin 1956 à [Localité 13]

[Adresse 15]

[Localité 12]



Madame [E] [M]

née le 21 Avril 1947 à [Loc

alité 13]

[Adresse 5]

[Localité 14]



représentées et assistées de Me Thomas DOLLON, avocat au barreau de CHERBOURG





INTIMÉS :



Monsieur [G] [J]

né le 09 Septembre 1963 à [Localité 19]

Le Manoir

[Localité 13]


...

AFFAIRE : N° RG 19/02212 -

N° Portalis DBVC-V-B7D-GL5E

ARRÊT N°

JB.

ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance de CHERBOURG du 06 Mai 2019

RG n° 14/00100

COUR D'APPEL DE CAEN

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 07 JUIN 2022

APPELANTES :

Madame [S] [D] épouse [Y]

née le 07 Juin 1956 à [Localité 13]

[Adresse 15]

[Localité 12]

Madame [E] [M]

née le 21 Avril 1947 à [Localité 13]

[Adresse 5]

[Localité 14]

représentées et assistées de Me Thomas DOLLON, avocat au barreau de CHERBOURG

INTIMÉS :

Monsieur [G] [J]

né le 09 Septembre 1963 à [Localité 19]

Le Manoir

[Localité 13]

Madame [K] [V] épouse [J]

née le 22 Décembre 1970 à [Localité 18]

Le Manoir

[Localité 13]

représentés et assistés de Me Laurence MARTIN, avocat au barreau de CAEN

DÉBATS : A l'audience publique du 10 mars 2022, sans opposition du ou des avocats, M. GUIGUESSON, Président de chambre, a entendu seul les plaidoiries et en a rendu compte à la cour dans son délibéré

GREFFIER : Mme COLLET

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

M. GUIGUESSON, Président de chambre,

Mme VELMANS, Conseillère,

M. GANCE, Conseiller,

ARRÊT : rendu publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile le 07 Juin 2022 par prorogation du délibéré initialement fixé au 24 Mai 2022 et signé par M. GUIGUESSON, président, et Mme COLLET, greffier

* * *

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [D] épouse [Y] est propriétaire d'une parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 6] sur la commune de [Localité 13] (50) voisine des parcelles n°[Cadastre 1], [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 4] et [Cadastre 7] appartenant à M. et Mme [J]. Pour accéder depuis la voie publique à la parcelle n°[Cadastre 4], M. et Mme [J] empruntent un chemin situé sur la parcelle n°[Cadastre 6] appartenant à Mme [Y] et qui empiète également sur la parcelle A n°[Cadastre 10] appartenant à Mme [E] [D] épouse [M], soeur de Mme [Y].

En juin 2011, Mme [Y] a fait édifier un talus sur son terrain pour empêcher le passage de M. et Mme [J]. En août 2011, considérant que leurs parcelles étaient enclavées, M. et Mme [J] ont abattu le talus édifié par Mme [Y].

Par acte du 27 février 2012, Mme [Y] a saisi le juge de proximité aux fins d'obtenir réparation du préjudice subi. Le juge de proximité s'étant déclaré incompétent, l'affaire a été renvoyée devant le tribunal d'instance qui par jugement du 29 novembre 2013 s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance de Cherbourg.

Par jugement du 10 septembre 2015, le tribunal de grande instance de Cherbourg a ordonné une expertise judiciaire et a missionné M. [B] en qualité d'expert.

Par acte du 28 avril 2016, M. et Mme [J] ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Cherbourg afin de rendre les opérations d'expertise judiciaire communes et opposables à Mme [M]. Par ordonnance du 19 juillet 2016, le juge des référés du tribunal de grande instance de Cherbourg s'est déclaré incompétent au profit du juge de la mise en état.

Par ordonnance du 8 mars 2017, le juge de la mise en état du tribunal de grande instance de Cherbourg a déclaré commun et opposable à Mme [M] le jugement rendu le 10 septembre 2015 et les opérations d'expertise judiciaire ordonnées. L'expert a déposé son rapport le 29 septembre 2017.

Par jugement du 6 mai 2019 auquel il est renvoyé pour un exposé complet des prétentions en première instance, le tribunal de grande instance de Cherbourg a :

- constaté l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] sur la commune de [Localité 13] ;

- dit que la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] sur la commune de [Localité 13] et appartenant à M. et Mme [J] bénéficie, pour l'accès au chemin communal, d'une servitude de passage sur les parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 6] et n°[Cadastre 10] sur la même commune et appartenant respectivement à Mme [Y] et à Mme [M] ;

- dit que cette servitude de passage s'exercera par le chemin Est-Ouest existant sur le haut de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 6] et le bas de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 10] et ce uniquement pour les besoins de l'exploitation agricole de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] ;

- condamné Mme [Y] et Mme [M] à payer in solidum à M. et Mme [J] une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum Mme [Y] et Mme [M] aux dépens, en ce compris les frais d'expertise ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 19 juillet 2019, Mme [Y] et Mme [M] ont formé appel de ce jugement.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 8 février 2022, Mme [Y] et Mme [M] demandent à la cour de :

- réformer le jugement du tribunal de grande instance de Cherbourg-en-Cotentin en date du 5 mai 2019 en ce qu'il a :

* constaté l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] sur le commune de [Localité 13] ;

* dit que la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] sur la commune de [Localité 13] et appartenant à M. et Mme [J] bénéficie, pour l'accès au chemin communal, d'une servitude de passage sur les parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 6] et n°[Cadastre 10] sur la même commune, et leur appartenant respectivement ;

* dit que cette servitude de passage s'exercera par le chemin Est-Ouest existant sur le haut de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 6] et le bas de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 10] et ce uniquement pour les besoins de l'exploitation agricole de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] ;

* les a condamnés à payer in solidum M. et Mme [J] une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

* les a condamnés in solidum aux dépens, en ce compris les frais d'expertise ;

en conséquence,

- dire et juger que la parcelle A n°[Cadastre 6] figurant au cadastre de la commune de [Localité 13] appartenant à Mme [Y] n'est grevée d'aucune servitude de passage au profit de la parcelle A n°[Cadastre 4] figurant au cadastre de ladite commune appartenant à M. et Mme [J] ;

- débouter M. et Mme [J] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

en conséquence,

- faire interdiction à M. et Mme [J] ou à toute personne de leur chef, de passer sur la parcelle A n°[Cadastre 6] appartenant à Mme [Y] et ce sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir ;

- assortir cette interdiction d'une indemnité de 500 euros au profit de Mme [Y] pour chaque passage constaté ;

- dire et juger que la parcelle A n°[Cadastre 10] figurant au cadastre de la commune de [Localité 13] appartenant à Mme [M] n'est grevée d'aucune servitude de passage au profit de la parcelle A n°[Cadastre 4] propriété de M. et Mme [J] ;

en conséquence,

- faire interdiction à M. et Mme [J] ou à toute personne de leur chef, de passer sur la parcelle A n°[Cadastre 10] appartenant à Mme [M] et ce sous astreinte de 100 euros par jour à compter de la signification du jugement à intervenir ;

- assortir cette interdiction d'une indemnité de 500 euros au profit de Mme [M] pour chaque passage constaté ;

en tout état de cause,

- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à Mme [Y] la somme de 1 221,60 euros au titre de la réfection du talus, réactualisable à la date de réalisation des travaux ;

- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à Mme [Y] la somme de 1 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à Mme [Y] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement M. et Mme [J] à payer à Mme [M] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement M. et Mme [J] aux entiers dépens tant de première instance que d'appel en ce compris le coût des opérations d'expertise ;

subsidiairement,

- fixer l'indemnisation des préjudices à subir par Mme [Y] et Mme [M] du fait de l'existence d'une servitude légale si celle-ci venait à être consacrée et condamner M. et Mme [J] au paiement d'indemnités en réparation de ces préjudices et pour ce faire ordonner un complément d'expertise ou inviter M. [B] à fournir à la cour tous renseignements utiles et nécessaires au calcul et à la fixation de ces préjudices pour lui permettre de procéder le cas échéant à une évaluation globale de ceux-ci.

Aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 13 janvier 2020, M. et Mme [J] demandent à la cour de :

- déclarer Mme [Y] et Mme [M] autant irrecevables que mal fondées en leur appel et les en débouter ;

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Cherbourg en date du 6 mai 2019 en toutes ses dispositions, c'est-à-dire en ce qu'il a :

* constaté l'état d'enclave de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] sur le commune de [Localité 13] ;

* dit que la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] sur la commune de [Localité 13] et leur appartenant bénéficie, pour l'accès au chemin communal, d'une servitude de passage sur les parcelles cadastrées section A n°[Cadastre 6] et n°[Cadastre 10] sur la même commune et appartenant respectivement à Mme [Y] et à Mme [M] ;

* dit que cette servitude de passage s'exercera par le chemin Est-Ouest existant sur le haut de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 6] et le bas de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 10] et ce uniquement pour les besoins de l'exploitation agricole de la parcelle cadastrée section A n°[Cadastre 4] ;

* condamné Mme [Y] et Mme [M] à leur payer in solidum une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

* condamné in solidum Mme [Y] et Mme [M] aux dépens, en ce compris les frais d'expertise ;

* et en ce qu'il a débouté Mme [Y] de sa demande de paiement de la somme de 1 221,60 euros au titre de la réfection du talus et 1 000 euros au titre du préjudice moral ;

- déclarer irrecevable les demandes de :

* fixation de l'indemnité des préjudices à subir par Mme [Y] et Mme [M] du fait de l'existence d'une servitude légale ;

* leur condamnation au paiement d'indemnités en réparations ;

* de complément d'expertise ou d'invitation à M. [B] à fournir à la cour tous renseignements sur le calcul et la fixation des préjudices ;

en tout état de cause, les en débouter ;

- y additant, condamner Mme [Y] et Mme [M] à leur payer une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel.

L'ordonnance de clôture de l'instruction a été prononcée le 23 février 2022.

Pour l'exposé complet des prétentions et de l'argumentaire des parties, il est expressément renvoyé à leurs dernières écritures susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Considérant que mesdames [Y] et [M] expliquent qu'il résulte très clairement du rapport d'expertise déposé par l'expert judiciaire, que la parcelle cadastrée A[Cadastre 4] n'est pas enclavée, qu'elle est accessible par des engins agricoles sans passer par la parcelle N°[Cadastre 6] et ce depuis le chemin rural en utilisant la partie haute des parcelles N° A [Cadastre 8] et [Cadastre 11] ;

Qu'il découle de ces constats que la parcelle A[Cadastre 4] appartenant à monsieur et madame [J] n'est pas enclavée ;

Que dans ces conditions, la destruction faite par les intimés du talus édifié pour interdire le passage est fautive, et qu'elles sont justifiées à obtenir la réparation des préjudices tant matériel que moral supportés ;

Considérant que monsieur et madame [J] soutiennent que la parcelle N°[Cadastre 4] est enclavée sur certaines périodes de l'année en raison de l'importante humidité des terres ;

Qu'il est impossible de passer par la parcelle N°[Cadastre 1] du fait de la nature des sols, et qu'en temps de pluie, il est impossible d'y utiliser des engins agricoles, qu'il est démontré que le passage de ceux-ci par la parcelle N°[Cadastre 1] vers la parcelle N° [Cadastre 4] n'est pas envisageable ;

Que l'aménagement d'un passage vers la parcelle N°[Cadastre 4] par les parcelles N° A [Cadastre 8], ou A-[Cadastre 9]-[Cadastre 11] A[Cadastre 16] et A [Cadastre 1] conduirait à engager des dépenses excessives au regard de la valeur de la parcelle A [Cadastre 4] ;

SUR CE

- Sur la servitude de passage :

Considérant que c'est de manière justifiée que les 1ers juges se sont reportés aux articles 637 et suivants du code civil, qui prévoient que la charge imposée sur un héritage pour l'usage et l'utilisation d'un héritage appartenant à un autre propriétaire, et qui constitue une servitude, dérive soit de la situation naturelle des lieux, soit des obligations imposées par la loi ou les conventions ;

Que selon l'article 682 du code civil, le propriétaire dont les fonds sont enclavés et qui n'a sur la voie publique aucune issue ou qu'une issue insuffisante notamment comme en l'espèce pour l'exploitation agricole, est justifié à réclamer sur le fonds de ses voisins un passage suffisant pour la desserte complète de ses fonds à charge d'une indemnité proportionnée au dommage qui peut en résulter ;

Que comme les 1ers juges l'ont également relevé en application des articles 688 et 691 du code civil, les attestations produites par monsieur et madame [J] selon lesquelles un droit de passage existe sur les fonds en cause depuis 40 ans sont inopérantes ;

Que selon les appréciations de l'expert judiciaire il s'avère, selon ce dernier, que :

- la parcelle A [Cadastre 4] n'est pas enclavée, car il suffit de regarder le plan des propriétés [J] pour constater que l'ensemble des parcelles sont desservies par le chemin rural dit ' [Adresse 17]', que le litige vient du fait qu'il est plus commode et plus court d'exploiter la parcelle N° A[Cadastre 4] en passant sur les parcelles A [Cadastre 6] et A[Cadastre 7] de mesdames [Y] et [M], ce qui s'est toujours fait depuis 40 ans ;

Que l'expert explique que les engins agricoles peuvent accéder à la parcelle A N°[Cadastre 4] sans passer par la parcelle A N°[Cadastre 6], que cependant selon cette option, la parcelle A N°[Cadastre 4] est moins facile à exploiter, que le parcours est plus long, que le passage par les parcelles A [Cadastre 2] et [Cadastre 7] en partie basse est très humide en hiver, mais que rien n'empêche les consorts [J] de passer un peu plus vers le nord en partie haute de leurs parcelles A [Cadastre 8] et [Cadastre 11] et de réaménager le passage busé existant entre les parcelles A [Cadastre 1] et A [Cadastre 4] ;

Que cependant la cour ne retiendra ces analyses, car monsieur et madame [J] peuvent se prévaloir des dispositions de l'article 682 précité comme les 1ers juges y ont procédé, en estimant qu'ils disposent par les parcelles N° [Cadastre 7] et [Cadastre 8] d'un accès insuffisant car ne permettant pas le passage de machines agricoles, puisque la parcelle A N°[Cadastre 4] est affectée à la mise en culture, et que l'humidité importante des sols rend impraticable les parcelles précitées, comme en atteste particulièrement le procès-verbal de constat d'huissier du 28 juin 2021 qui comporte les éléments factuels suivants :

- le champ derrière la barrière est totalement détrempé, il présente des ornières de passage de roues qui sont remplies d'eau, ces ornières sont profondes de 15 à 20 centimètres, le long de la haie en bordure gauche en pénétrant dans le champ se trouve un cheminement complètement en état de boue où les bottes s'enfoncent jusqu'à mi-hauteur emprunté par un troupeau de bovins qui avancent péniblement, il m'est précisé que ces ornières résultent d'un seul passage, alors qu'une exploitation courante de la terre impliquerait des passages réguliers dans un sens comme dans l'autre, ce qui est en l'état impossible ;

Que s'agissant du passage busé, l'huissier commis a constaté le 3 août 2011, qu'en remontant la haie séparant cette parcelle de celle A N°[Cadastre 4], il n'existait qu'un passage non utilisable par les engins agricoles et qu'il n'existait aucun autre passage possible entre les deux parcelles ;

Qu'à l'analyse de tous ces éléments, la cour retient que le passage contesté est utilisé par monsieur et madame [J], car l'état de celui passant par les parcelles [Cadastre 8], [Cadastre 16] et [Cadastre 1] ne peut pas l'être par des engins agricoles en raison de l'humidité trop importante des parcelles A[Cadastre 1], A[Cadastre 8] et A[Cadastre 16], et parce que le passage critiqué est indispensable pour permettre l'exploitation normale et sans dommage de la parcelle N°[Cadastre 4] ;

Que le passage busé est également inadapté à cet effet du fait notamment de sa largeur ;

Que l'expert a cependant retenu la solution de travaux pour permettre le passage par les parcelles A [Cadastre 8], [Cadastre 16] et [Cadastre 1], ce qui nécessite des travaux de terrassement, dont le coût s'élève à la somme de 19369, 07 euros, selon le devis versé aux débats, sachant que l'expert ne s'est pas prononcé sur ce coût, qu'il ne l'a pas approuvé pas plus que la nature des travaux envisagés ;

Que la cour au regard de tous ces éléments estime que les 1ers juges ont justement apprécié par des motifs adoptés, que l'aménagement d'un passage vers la parcelle A[Cadastre 4] passant par les parcelles A[Cadastre 8] ou A [Cadastre 9]-[Cadastre 11] A[Cadastre 16] et A[Cadastre 1] de même que [Cadastre 2] et [Cadastre 3] pour des engins agricoles fonctionnant à toutes saisons, conduirait à engager des dépenses excessives au regard de la valeur de la parcelle A[Cadastre 4], compte tenu de la valeur vénale des terres labourables dans le secteur et de l'usage agricole qui en est fait, sachant que les appelantes ne produisent strictement aucune estimation desdites parcelles, de la valeur de celles voisines qui leur appartiennent, de nature à contrecarrer cette affirmation ;

Qu'en définitive, la cour confirmera le jugement entrepris en ce que les 1ers juges ont retenu l'état d'enclave de la parcelle A N°[Cadastre 4] en ce que celle-ci ne bénéficie pas d'un accès suffisant à la voie publique, dans la mesure où son aménagement induirait des dépenses hors proportion, pour permettre l'accès à des engins agricoles, ce qui est indispensable pour l'exploitation de la parcelle concernée, et cela indépendamment du changement de destination de celle-ci qui n'est pas récent ;

Qu'il s'ensuit que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a retenu que les fonds appartenant à madame [Y] et à madame [M] sont grevés d'une servitude légale de passage au profit de monsieur et madame [J], qu'il le sera également s'agissant des mesures subséquentes ordonnées ;

Que sur les demandes présentées par mesdames [Y] et [M], ces dernières seront déboutées de celles présentées et tirées de l'absence de servitude de passage, ainsi que de celles formées à hauteur de 1221,60 euros au titre de la réfection du talus dont la mise en place n'était pas justifiée compte tenu de la servitude reconnue ;

Que la même solution doit s'appliquer s'agissant du préjudice moral allégué pour les mêmes motifs précités, puisque le principe de la servitude est admis ;

Que s'agissant de la demande pour être indemnisées par mesdames [Y] et [M] tendant à l'évaluation de l'indemnité résultant du préjudice découlant de la servitude reconnue, qu'il n'y a pas lieu d'ordonner une mesure d'expertise ou un complément d'expertise, pour suppléer à la carence des parties, car il appartenait aux appelantes de présenter une demande chiffrée en se fondant sur les appréciations de l'expert judiciaire qui fait état du calcul suivant : le préjudice sera estimé au prix de la terre agricole augmenté d'une indemnité de réemploi de 20% ;

Que mesdames [M] et [Y] disposaient ainsi des moyens pour faire évaluer leur préjudice, ce dont elles se sont abstenues, que leur demande sera rejetée, étant acquis qu'il ne s'agit pas d'une demande nouvelle au sens de l'article 564 du code de procédure civile, car l'indemnité dont s'agit constitue une demande qui est la conséquence et le complément de celles présentées devant les 1ers juges, liées à la servitude au sens de l'article 566 du code de procédure civile.

- Sur les autres demandes :

Considérant que l'équité et les solutions retenues par la cour conduisent à accorder à monsieur et madame [J] la somme de 2000 euros au titre de leurs frais irrépétibles et d'écarter celles formées à ce titre respectivement par mesdames [Y] et [M] qui parties perdantes supporteront les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe ;

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

- Y ajoutant :

- Déclare recevables les demandes présentées par mesdames [M] et [Y] en fixation d'une indemnité pour réparer les préjudices résultant de l'existence d'une servitude de passage, en paiement de celle-ci et en complément d'expertise ;

- Déboute mesdames [Y] et [M] de toutes leurs demandes en compris de celle formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne mesdames [M] et [Y] à payer à monsieur et madame [J] la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne mesdames [M] et [Y] aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT

M. COLLETG. GUIGUESSON


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : 1ère chambre civile
Numéro d'arrêt : 19/02212
Date de la décision : 07/06/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-06-07;19.02212 ?
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