COUR D'APPEL de CAEN
Juridiction du Premier Président Contentieux des personnes hospitalisées sans leur consentement.
ORDONNANCE DU 08 Décembre 2016-------------
CONTRÔLE DE PLEIN DROIT DE L'HOSPITALISATION
No RG : 16/ 04278 No MINUTE : 16/ 65
Appel de l'ordonnance rendue le 17 Novembre 2016 par le Juge des libertés et de la détention de CAEN
APPELANT :
Monsieur Jean-Jacques X... né le 02 Septembre 1949 à TROUVILLE SUR MER (14360) demeurant... ... Actuellement hospitalisé au Centre Esquirol de Caen
Comparant, assisté de Me Julien DUVAL, avocat au barreau de CAEN,
PARTIES INTERVENANTES :
- Le Directeur du centre hospitalier Centre Esquirol, CHU de Caen, Avenue Côte de Nacre, 14000 CAENNon comparant ni représenté
-M. Patrick X... (son frère) tiers demandeur Non comparant
-L'UDAF du Calvados en la personne de Madame Y... ès qualité de curateur de Jean-Jacques X... Non comparant
LE MINISTÈRE PUBLIC :
En l'absence de Jacky COULON, avocat général auquel l'affaire a été régulièrement communiquée,
Devant Nous, Agnès QUANTIN, présidente de chambre, déléguée par ordonnance du premier président en date du 31 août 2015, assistée de Ghislaine LEPELLEY, greffière
DÉBATS à l'audience publique du 08 Décembre 2016 ;
Les parties comparantes ayant été avisées à l'issue des débats que l'ordonnance sera prononcée le même jour et leur sera immédiatement notifiée ;
ORDONNANCE prononcée publiquement le 08 Décembre 2016 et signée par Agnès QUANTIN, présidente de chambre, déléguée par le premier président, et Ghislaine LEPELLEY, greffière ;
Nous, Agnès QUANTIN, magistrat délégué,
Vu les articles L. 3211 – 1 et suivants, R. 3211 – 1 et suivants du code de la santé publique et R. 91, R. 93 (- 2o), R. 93-2 et R. 117 (- 9o) du code de procédure pénale ;
Vu l'ordonnance du 17 Novembre 2016 du Juge des libertés et de la détention de CAEN qui a maintenu l'hospitalisation complète de Jean-Jacques X..., hospitalisé à la demande d'un tiers (son frère), au Centre Esquirol, CHU de Caen, Avenue Côte de Nacre, 14000 CAEN depuis le 9 novembre 2016 ;
Vu la notification de cette ordonnance le 17 novembre 2016 à la personne hospitalisée ;
Vu l'appel de cette ordonnance interjeté par cette personne le 28 Novembre 2016 ;
Vu les avis adressés le 29 novembre 2016 aux parties et au ministère public les informant de la tenue de l'audience le 08 Décembre 2016 ;
Vu les pièces du dossier ;
Vu l'avis écrit du Ministère Public ;
Vu le certificat médical de situation établi par le docteur Z... le 5 décembre 2016
Jean-Jacques X... et Maître DUVAL Julien ayant été entendus et la personne hospitalisée ou son avocat ayant eu la parole en dernier ;
DÉCISION :
Il résulte du dossier que Jean-Jacques X... a été admis le 24 juillet 2015 au CHU de Caen, centre Esquirol, sous la forme d'une hospitalisation complète, par une décision du directeur de l'établissement :
- au vu d'un certificat médical du docteur A... en date du 24 juillet 2015 qui avait constaté le 24 juillet 2015 que Jean-Jacques X... tenait des propos délirants, présentait une hyperactivité désordonnée troublant l'ordre public (maison de retraite), harcelait sa maman qu'il terrorisait ; il concluait que Jean-Jacques X... présentait des troubles mentaux rendant impossible son consentement, que son état de santé imposait des soins immédiats en milieu hospitalier en application de l'article L 3213-3 du code de la santé publique,
- au vu d'une demande de son frère et curateur, Patrick X... en date du 24 juillet 2015.
Le 25 juillet 2015, Jean-Jacques X... a été examiné par un psychiatre, le docteur B... qui notait que Jean-Jacques X... présentait une excitation de l'humeur avec excitation psychomotrice dont témoignaient les symptômes suivants : accélération du débit idéique, logorrhée, accélérération du débit verbal, irritabilité, familiarité ; il présentait des idées délirantes mégalomaniaques. Il rappelait les troubles du comportement décrits par l'entourage du patient au niveau de la maison de retraite de son père et avec sa mère. Il notait également des troubles du sommeil ; Jean-Jacques X... se montrait très sthénique et véhément vis à vis de l'hospitalisation et surtout de ses frères. Il concluait que les troubles mentaux de Jean-Jacques X... rendaient impossible son consentement aux soins et justifiaient la poursuite de soins et d'une surveillance continue de telle sorte qu'il préconisait la poursuite de la mesure de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète.
La décision de maintien de cette mesure était prise le 25 juillet 2015 par le directeur du CHU de Caen.
Le 27 juillet 2015, le docteur C..., psychiatre, examinait Jean-Jacques X... et confirmait l'existence des symptômes susdécrits : accélération du discours, logorrhée rendant son discours diffluent ; il tenait des propos à teneur mégalomaniaque, parfois familiers et encore véhéments envers l'un de ses frères ; il critiquait la prise en charge thérapeutique mais restait compliant aux soins. La reconnaissance des troubles était partielle ; il rationnalisait les troubles du comportement qu'il avait présentés et les imputait aux autres. Ses troubles mentaux rendaient impossible son consentement aux soins et justifiaient la poursuite de soins et d'une surveillance continue. Il préconisait la poursuite de la mesure de soins psychiatriques sous la forme d'une hospitalisation complète.
La décision de maintien de cette mesure était prise le 27 juillet 2015 par le directeur du CHU de Caen.
Jean-Jacques X... était ensuite pris en charge dans le cadre d'un programme de soins établi le 22 octobre 2015, puis à nouveau sous la forme d'une hospitalisation complète à compter du 21 janvier 2016.
Par ordonnance du 28 janvier 2016, le juge des libertés et de la détention de Caen disait que les soins psychiatriques dont Jean-Jacques X... fait l'objet pouvaient se poursuivre sous la forme d'une hospitalisation complète, décision confirmée par une ordonnance du magistrat délégué par le premier président en date du 11 février 2016.
Selon un certificat médical du 28 avril 2016 du docteur Z..., psychiatre, en date du 28 avril 2016, l'état mental de Jean-Jacques X... autorisait que les soins soient dispensés selon un programme de soins qui était exposé.
Le 28 avril 2016, le directeur du CHU de Caen décidait que Jean-Jacques X... est pris en charge sous la forme et selon les modalités définies dans ce programme de soins.
Le 12 juillet 2016, le collège prévu à l'article L 3211-9 du code de la santé publique notait que la conscience de la maladie restait limitée avec des difficultés à percevoir les risques de rechute et préconisait le maintien des soins sous contrainte.
Le 21 octobre 2016, le docteur B... préconisait le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous la forme du programme de soins actuel. Il notait que Jean-Jacques X... présentait une humeur stable mais qu'il persistait des altérations du jugement et une conscience relative et variable des troubles qui sont banalisés. La pris du traitement régulier est importante.
Le 21 octobre 2016, le directeur du CHU de Caen maintenait la mesure de soins psychiatriques sous la forme et les modalités définies dans le programme de soins.
Le 9 novembre 2016, le docteur B... examinait Jean-Jacques X... et constatait qu'il présentait une excitation psychique et motrice avec accélération du débit verbal, de la pensée, hyperactivité désordonnée ; il existe une exaltation de l'humeur avec euphorie, optimisme exagéré. Il note une désinhibition avec familiarité et des troubles du sommeil qui est désorganisé. Il souligne qu'à ces troubles s'associent des idées mégalomaniaques. Il faisait état de deux e-mails envoyés par sa tutrice pour l'alerter de l'état de santé de cette personne protégée, alléguant une activité inadaptée avec des propos mégalomaniques et d'un e-mail envoyé par un frère du patient pour l'alerter sur la réapparition de troubles du comportement de Mr X.... Il concluait que les troubles mentaux de Monsieur X... justifiaient la poursuite de soins et d'une surveillance continue sous la forme d'une hospitalisation complète.
Le 9 novembre 2016, le directeur du CHU de Caen décidait que les soins psychiatriques de Jean-Jacques X... se poursuivent sous la forme d'une hospitalisation complète.
Le 14 novembre 2016, le docteur D..., psychiatre examinait Jean-jacques X... et notait une excitation psychomotrice avec tachypsychie, hyperactivité psychique. Il n'est pas conscient de ses troubles actuels, minimisant la présence de ses troubles et demandant à réduire le traitement sédatif et sollicitant d'avoir accès à plus d'activité et de contacts extérieurs. Il n'est pas en capacité de maintenir son consentement aux soins et d'entendre la nécessité des soins en hospitalisation. Or il est nécessaire qu'il reste en soins avec une surveillance en hospitalisation complète en unité fermée pour réduire les stimulations et son hyperactivité afin de stabiliser son humeur. Il préconisait le maintien de la mesure de soins sous la forme d'une hospitalisation complète.
Par ordonnance du 17 novembre 2016, le juge des libertés et de la détention a ordonné le maintien de l'hospitalisation complète de Jean-Jacques X....
Le 28 novembre 2016, l'avocat de Jean-Jacques X... interjetait appel de cette décision par une déclaration motivée adressée au premier président de la cour d'appel de Caen.
Selon un certificat du 5 décembre 2016 rédigé par le docteur Z..., psychiatre, la réhospitalisation de Jean-Jacques X... est consécutive à une décompensation de sa pathologie psychiatrique dans un contexte de non respect des règles d'hygiènes de vie, de mauvaise prise médicamenteuse et d'une perte de relation de confiance. Si le patient se montre moins sthénique et logorrhéique, il reste en hyperactivité psychique avec sollicitations permanentes de l'équipe. Il reste très stimulable et tout élargissement du cadre hospitalier peut le déstabiliser : il y a quelques jours, il a été autorisé à avoir son portable et s'en est servi pour passer des commandes non urgentes à La Redoute. Son adhésion aux soins reste précaire avec faible perception du caractère pathologique de son état et difficultés à accepter le cadre. Ainsi devant la persistance d'une symptomatologie aigue et le risque de conduites à risque associées, les soins doivent se poursuivre tel que pour le moment.
Elle conclut que les troubles mentaux de Monsieur X... rendent impossible son consentement aux soins et justifient la poursuite de soins et d'une surveillance continue. sous la forme d'une hospitalisation complète.
Elle préconise le maintien de la mesure de soins sous la forme d'une hospitalisation complète.
Il résulte des certificats de trois psychiatres différents qui ont examiné Jean-Jacques X... les 9 novembre 2016, 14 novembre 2016 et 5 décembre 2016 que Jean-Jacques X... présente des troubles mentaux dont les symptômes sont précisément décrits, que ces troubles mentaux rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins immédiats assortis d'une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, étant observé que les deux précédentes prises en charge sous la forme d'un programme de soins n'ont pas été efficaces.
Les conditions prévues par l'article L 3212-1 du code de la santé publique sont donc réunies de telle sorte qu'il convient de confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention du 17 novembre 2016 disant que les soins psychiatriques dont Jean-Jacques X... fait l'objet peuvent se poursuivre sous la forme d'une hospitalisation complète.
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement par ordonnance,
Confirmons l'ordonnance entreprise ;
Disons que la présente ordonnance sera notifiée à Monsieur Jean-Jacques X..., son conseil Maître Julien DUVAL, Monsieur Patrick X..., tiers demandeur, Monsieur le directeur de l'UDAF pris en la personne de Madame Y..., curatrice, Monsieur le Directeur du Centre Esquirol de Caen ;
Disons que la présente décision sera communiquée au ministère public ;
Laissons les dépens à la charge de l'Etat.
La greffière La présidente de chambre, déléguée
Ghislaine LEPELLEY Agnès QUANTIN