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12/09/2008 | FRANCE | N°07/03071

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale, 12 septembre 2008, 07/03071


AFFAIRE : N RG 07 / 03071 Code Aff. : ARRET N C. P ORIGINE : Décision du Tribunal de Commerce de COUTANCES en date du 07 Septembre 2007 RG no 517 / 42

TROISIEME CHAMBRE-SECTION SOCIALE 2 ARRET DU 12 SEPTEMBRE 2008
APPELANTE :
Société COMPAGNIE DES ILES DE LA MANCHE Rue des Iles 50400 GRANVILLE
Représentée par la SCP PARROT-LECHEVALLIER-ROUSSEAU, avoués près la Cour d'Appel, assisté de Me MONTAGNON, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :
Monsieur Guy Y... ...
Représenté par Monsieur BOSSE, délégué syndical
COMPAGNIE FRANCAISE DE TRANSPORT INTER

URBAIN-C. F. T. L.-, venant aux droits de la SOCIETE DE NAVIGATION DE NORMANDIE (SNN) 163-...

AFFAIRE : N RG 07 / 03071 Code Aff. : ARRET N C. P ORIGINE : Décision du Tribunal de Commerce de COUTANCES en date du 07 Septembre 2007 RG no 517 / 42

TROISIEME CHAMBRE-SECTION SOCIALE 2 ARRET DU 12 SEPTEMBRE 2008
APPELANTE :
Société COMPAGNIE DES ILES DE LA MANCHE Rue des Iles 50400 GRANVILLE
Représentée par la SCP PARROT-LECHEVALLIER-ROUSSEAU, avoués près la Cour d'Appel, assisté de Me MONTAGNON, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :
Monsieur Guy Y... ...
Représenté par Monsieur BOSSE, délégué syndical
COMPAGNIE FRANCAISE DE TRANSPORT INTERURBAIN-C. F. T. L.-, venant aux droits de la SOCIETE DE NAVIGATION DE NORMANDIE (SNN) 163-169 Avenue Georges Clémenceau 92000 NANTERRE
Représentés par la SCP TERRADE-DARTOIS, avoués près la Cour d'Appel

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur DEROYER, Président, rédacteur Monsieur COLLAS, Conseiller, Madame GUENIER-LEFEVRE, Conseiller,
DEBATS : A l'audience publique du 16 Juin 2008
GREFFIER : Mademoiselle GOULARD
ARRET prononcé publiquement le 12 Septembre 2008 à 14 heures par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile et signé par Monsieur DEROYER, Président, et Mademoiselle GOULARD, Greffier

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Monsieur Y... a été embauché à compter du 21 février 2004 en qualité de capitaine de navire par la Société de Navigation de Normandie ci après dénommée SNN aux droits de laquelle se trouve actuellement la société COMPAGNIE FRANCAISE DE TRANSPORT INTERURBAIN ci après dénommée la société CFTI.
Monsieur Y... a ainsi été engagé aux termes de deux contrats d'engagement maritime à durée déterminée, du 21 février 2004 au 31 octobre 2004 puis du 1er novembre 2004 au 31 décembre 2005.
Le 14 mars 2005, sur appel d'offres, le conseil général de la Manche confiait la délégation du service public portant sur l'exploitation des liaisons maritimes avec les îles anglo-normandes, auparavant confiée à la Société Navigation de Normandie, à la SAS Compagnie des îles de la Manche à compter du 1er avril 2005.
La SAS Compagnie des îles de la Manche poursuivait le contrat de travail de Monsieur Y....
Monsieur Y... a été licencié par lettre du 19 octobre 2005 pour motif personnel avec préavis, la SAS Compagnie des îles de la Manche rompant également son mandat de capitaine.
Soutenant qu'il n'avait pas perçu toutes les sommes auxquelles il pouvait prétendre au titre de l'exécution de son contrat de travail, et contestant la légitimité de son licenciement, Monsieur Y... a saisi le tribunal de commerce de COUTANCES pour faire valoir ses droits.
Vu le jugement rendu le 7 septembre 2007 par le Tribunal de commerce de COUTANCES ayant notamment alloué à Monsieur Y... une indemnité pour préjudice moral en réparation de la résiliation de son mandat le capitaine une indemnité au titre de la requalification des contrats à durée déterminée et une indemnité pour licenciement abusif.
Vu les conclusions déposées le 15 février 2008 et oralement soutenues à l'audience par la SAS Compagnie des îles de la Manche appelante ;
Vu les conclusions déposées le 4 février 2008 ainsi qu'à l'audience et oralement soutenues par Monsieur Y... ;
Vu les conclusions déposées le 12 février 2008 et oralement soutenues à l'audience par la Société COMPAGNIE FRANCAISE DE TRANSPORT INTERURBAIN CFTI venant aux droits de la société SNN.
Par arrêt du 28 mars 2008 la cour a ordonné la réouverture des débats afin de garantir le respect du contradictoire quant aux pièces communiqué et aux notes fournies en délibéré et à fin d'obtenir des précisions de fait concernant les griefs du 6 juillet et du 30 août 2005.
Vu la note en délibéré et les pièces déposées le 22 février 2008 par la SAS Compagnie des îles de la Manche ;
Vu la note en délibéré et les pièces déposées le 25 février 2008 par Monsieur Y... ;
Vu les conclusions complémentaires déposées le 29 mai 2008 par Monsieur Y... et le 9 juin 2008 par la société CFTI et les observations orales des parties à l'audience du 16 juin 2008, et notamment celles de Monsieur Y... et de la SAS Compagnie des îles de la Manche ;

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MOTIFS
-Sur les pièces versées à l'audience du 16 juin 2008
À cette audience, le conseil de Monsieur Y... verse au débat une pièce (lettre de M. Z... responsable d'exploitation du 3 juin 2005) dont il reconnaît qu'en dépit de la réouverture des débats ordonnés précédemment qu'il ne l'a pas communiquée aux autres parties.
Cette pièce tardivement communiquée en dépit de la réouverture des débats sera écartée du dossier afin de garantir le respect du principe du contradictoire.
- Sur la demande de requalification des contrats à durée déterminée
Les juridictions ne tranchent les litiges que dans le cadre des moyens de fait et de droit qui leur sont soumis.
En l'espèce, Monsieur Y... se borne à invoquer l'absence de motifs de recours à un contrat à durée déterminée s'agissant manifestement du premier contrat qui n'en comporte pas, sans critiquer la pertinence du motif figurant dans le second contrat.
La SAS Compagnie des îles de la Manche ne critique pas la demande en requalification du contrat et se place même résolument dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée se limitant seulement à soutenir qu'il n'est pas justifié du fondement légal en vertu duquel elle serait redevable des conséquences de la régularisation de ce contrat.
La société CFTI fait valoir que les dispositions du code du travail maritime ne font pas obligation à l'employeur d'indiquer le motif du recours à un contrat à durée déterminée.
Cependant, le contrat d'engagement ainsi que les conditions de travail des marins à bord des navires sont régis par des lois particulières.
Notamment, en application des dispositions de l'article 10-1 du code du travail maritime, le contrat d'engagement doit indiquer s'il est conclu pour une durée déterminée pour une durée indéterminée ou pour un voyage. Conclu pour une durée déterminée, il doit contenir l'indication de cette durée. En application de l'article 10-2 du même code, le contrat d'engagement à durée déterminée peut prévoir le report de son terme et peut être renouvelé une fois dans ce cadre. La durée totale du contrat, compte tenu le cas échéant du report du terme ne peut excéder 12 mois d'embarquement effectif sous réserve des dispositions de l'article 102-22, non concernées au cas d'espèce.
Les dispositions des articles 10-1 à 10-7 du code du travail maritime réglementant effectivement les conditions de conclusion d'un contrat à durée déterminée, ne prévoient notamment pas d'obligation pour l'employeur de faire figurer au contrat le motif pour lequel il y est recouru, ni d'indemnité particulière en cas de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée.
Ainsi, il ne peut être recouru aux dispositions de droit commun du code du travail pour accueillir la demande d'indemnité de requalification formée par Monsieur Y..., dès lors que des dispositions du code du travail maritime réglementent les conditions de conclusion d'un engagement à durée déterminée. Il sera donc retenu que la SAS Compagnie des îles de la Manche et Monsieur Y... s'accordent à considérer que le contrat était devenu un contrat à durée indéterminée, mais que, faute de dispositions légales dans le code du travail maritime, il ne peut être fait droit à la demande d'indemnité de requalification.

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- Sur le licenciement
La lettre de licenciement dont les motifs fixent les limites du litige, est rédigée en ces termes : " Vous occupez les fonctions de capitaine depuis le 21 février 2004 au sein de la Compagnie des Iles de la Manche.
A la suite du changement de direction, nous avons fait un point avec vous en mai 2005 pour définir les axes de notre collaboration, sur lesquels vous deviez être particulièrement vigilant compte tenu de vos fonctions, et qui laissaient à désirer par manque de rigueur.
- Ainsi, le 11 avril lors du voyage retour sur Diélette, par temps de brume vous n'avez pas respecté les signaux phoniques réglementaires dans des conditions de visibilité réduite. Lors de cette traversée le chef mécanicien a été absent de la passerelle une bonne partie de la traversée.
- Le 11 mai alors que vous preniez un bout dans l'hélice obligeant à réduire la vitesse vous n'avez pas fait d'annonces passagers. L'hôtesse a fait une annonce selon mes instructions.
- Caméra à vision nocturne. Lors d'une réunion au CG 50 j'ai appris que vous aviez fait venir un dépanneur alors qu'il suffisait d'appuyer sur le bouton de mise en marche. Cela a entraîné un coût de 50 € injustifié pour notre compagnie.
Il est clair que vous n'avez pas tenu compte de nos remarques car, depuis notre mise au point, nous avons encore eu à déplorer vos insuffisances professionelles.
Ainsi, le 6 juillet alors que vous étiez en approche de Carteret dans une zone riche en algue et que des avaries se sont déjà produites dans cette zone (colmatage filtres), le chef mécanicien n'était pas à son poste et vous êtes descendu de la passerelle, laissant seul votre second capitaine. Durant la traversée le chef mécanicien s'était déjà absenté pour lire des revues dans le carré, sans provoquer la moindre réaction de votre part.
Le 30 août, lors de la visite conjointe des affaires maritimes, vous ignoriez la procédure de test d'alerte de sûreté (SSAS). Ce qui n'est pas acceptable, pour le moins surprenant de la part d'un capitaine qualifié sur ce navire.
Par ailleurs, vous n'avez pas respecté la tenue de la revue de commandement. Il ne s'agit pas d'une revue par navire. La revue de commandement est une critique objective de l'ISM. Or, la votre contient aucun commentaire sur l'ISM.
Vous avez à plusieurs reprises manifesté vos réticences à l'encontre de la nouvelle direction.
Ainsi, à ce jour, nous constatons votre manque d'adhésion aux procédures et méthodes de fonctionnement que nous avions revues ensemble et que nous jugeons indispensable pour mener à bien votre mission de capitaine dans le cadre de la délégation de service public qui repose sur la Compagnie.
L'ensemble de ces faits démontrent votre incapacité à tenir en rigueur votre pose de capitaine et votre mauvaise volonté à intégrer les méthodes en vigueur dans l'entreprise.
Le service public que nous assurons ne peut s'en accommoder, le transport de passagers ne pouvant notamment tolérer le risque d'une sécurité approximative ".
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Après l'énumération de trois types de comportements du salarié, l'employeur rappelle dans sa lettre de licenciement que depuis la mise au point intervenue ensuite, il a eu à déplorer de nouvelles insuffisances professionnelles s'analysant en des ignorances de procédure ou des négligences dans le soin apporté par le salarié à ses prestations de travail.
Il apparaît donc des termes de la lettre de licenciement qui reproche in fine, un manque d'adhésion aux procédures et méthodes de travail de l'entreprise et une incapacité de tenir avec rigueur le poste de capitaine, que l'employeur à entendu stigmatiser des comportements révélateurs d'insuffisances professionnelles qui ont perduré en dépit de la mise au point opérée. Ainsi, la SAS Compagnie des îles de la Manche s'est placée sur le terrain de l'insuffisance professionnelle et non sur le terrain disciplinaire.
Le fait du 11 avril 2005 formellement contesté par Monsieur Y... qui fait observer l'absence surprenante d'intervention du directeur d'exploitation alors qu'il était supposé naviguer dans les conditions de visibilité réduite sans respecter les signaux phoniques réglementaires, n'est rapporté que par l'attestation du directeur d'exploitation lequel est le signataire de la lettre de licenciement.
Aucun autre élément ne venant confirmer ce fait, il ne peut être retenu.
Si la revue de commandement rédigée par Monsieur Y... le 28 septembre 2005 est particulièrement succincte et laconique, l'employeur ne fournit aucun exemple permettant de se convaincre que le contenu de ce document était nettement en deçà de celui habituellement fourni à cette occasion.
En revanche, si le fait du 20 avril 2005 (mentionné par erreur dans la lettre de licenciement comme étant du 11 mai), résulte également de l'attestation de M. Z..., Monsieur Y... n'en conteste pas la matérialité qu'il l'admet implicitement en se bornant cette fois à critiquer l'intervention du directeur d'exploitation auprès de l'hôtesse, de nature selon lui à saper son autorité de capitaine.
Il est donc établi que le salarié a délibérément négligé de faire annoncer les causes du ralentissement du navire et du retard à l'arrivée.
L'ignorance de la mise en marche de la caméra à vision nocturne est établie par le rapport d'intervention du technicien extérieur à l'entreprise qui a été appelé à cet effet. Monsieur Y... invoque à la fois l'absence de documentation à bord démentie par l'employeur et le fait que cette tâche relèverait du chef mécanicien.
Cependant le rapport du technicien démontre que la mise en marche de cet appareil de sécurité, laquelle ne pouvait être ignorée du capitaine même si elle relevait habituellement du chef mécanicien, ne comportait aucune complexité particulière. Le grief doit donc être retenu.
Les faits du 6 juillet 2005 (en réalité du 5 juillet) résultent du rapport de M. A... chargé d'une inspection du navire, lequel a été surpris par le comportement du chef mécanicien et du capitaine au cours d'une traversée, le chef lisant des revues au carré, aucune surveillance machine n'étant effectuée pendant plus de 15 minutes et le capitaine ayant déserté la passerelle peu avant l'arrivée au port, laissant seul le second capitaine pour la manoeuvre.
Monsieur Y... qui souligne les nombreux déplacements que doit faire le chef mécanicien lors d'une traversée et qui est alors remplacé à son poste par son second, ne soutient pas que le second du chef mécanicien était effectivement présent au poste le 5 juillet 2005, lors des absences du chef mécanicien. 07 / 3071 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 2 PAGE No6

Ainsi, est établie l'absence de réaction de Monsieur Y... devant les absences prolongées et non remplacées de son chef mécanicien, y compris à l'approche du port.
L'ignorance découverte lors d'une visite des affaires maritimes le 30 août 2005 à bord du navire Victor Hugo, de la procédure de test d'alerte de sûreté dit SASS dont était équipé ce navire depuis mars 2004 n'est pas contestée par le salarié. Il s'agit d'un système d'alerte de sûreté du navire vers une autorité compétente à terre, fournissant l'indication du navire de sa position et de l'existence de menaces ou d'une atteinte à sa sûreté.
L'un des points d'activation de ce système était situé sur la passerelle près des commandes de caméras de côté sur bâbord, à portée de main du capitaine qui pilote traditionnellement sur la chaise bâbord, et que ne pouvait sérieusement ignorer les capitaines du navire.
Le salarié soutient que la documentation afférente à cette procédure n'avait pas été fournie par la compagnie, et que l'organisation des exercices et entraînements de sûreté qui sont de la responsabilité en l'espèce du second capitaine, requérait une formation spécifique que n'avait pas encore suivie les deux capitaines du Victor Hugo.
Cependant, peu important que la documentation correspondante ne soit pas matériellement à bord le jour de l'inspection, il convient d'observer que Monsieur Y... avait servi sur les navires de son nouvel employeur depuis le 21 février 2004 pour le compte de la compagnie normande de navigation dont il reconnaît qu'elle a été détentrice des documents en question.
Alors que la création d'un système d'alerte de sûreté résulte d'un décret du 26 mars 2004 et que le navire en était équipé alors qu'il était armé par la société SNN, et avait fait l'objet d'un certificat international provisoire de sûreté délivré le 1er avril 2005, Monsieur Y... ne peut sérieusement soutenir qu'il ignorait l'existence de ce système d'alerte et de son fonctionnement ni encore que celui-ci nécessitait une formation spécifique dont il n'est pas justifié, pour en connaître au moins la mise en oeuvre minimale.
C'est encore vainement qu'il soutient que l'organisation des exercices et la participation aux entraînements de sûreté sont de la responsabilité du second capitaine, dès lors qu'en sa qualité de capitaine il ne pouvait ignorer l'existence ni les principes de base de fonctionnement de ce système de sécurité.
Le grief doit donc être retenu
Ainsi, apparaissent établis divers griefs qui caractérisent des négligences et des insuffisances au regard de la vigilance et de la compétence que requiert pour un capitaine de navire l'exercice de ses fonctions, alors que ce dernier est seul maître à bord des navires qu'il commande, que l'employeur doit de ce fait, avoir une totale confiance et assurance quant aux capacités du capitaine qu'il a recruté, et que ce dernier représente à ce titre tant à l'égard des passagers que des autorités maritimes, l'armement qui l'emploie.
Les négligences et insuffisances qui résultent des pièces du dossier eu égard aux impératifs de sécurité qui s'imposent à l'employeur, caractérisent en l'espèce une cause réelle et sérieuse de licenciement et justifient la rupture corrélative du mandat de capitaine.
Le jugement qui a fait une appréciation insuffisante des faits de l'espèce, sera donc réformé sur ce point, et Monsieur Y... sera débouté de ses demandes indemnitaires au titre de la rupture de son contrat et de son mandat de capitaine.

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- Sur le 13ème mois
Monsieur Y... justifie par un document intitulé conditions générales d'embarquement du personnel inscrit maritime officiers et personnel d'exécution de la société de navigation de Normandie son premier employeur, (annexe du 18 juillet 2003) et signé de M. De C... capitaine d'armement, qu'il était prévu dans cette entreprise au chapitre des grilles de salaires pour les capitaines un salaire annuel incluant les primes diverses et primes de toucher, versé sur 13 mois.
La circonstance que cette disposition n'ait pas été prévue au contrat de travail et que la société compagnie des îles de la Manche n'en aurait pas eu connaissance lors de la reprise de cette délégation de service public est sans incidence sur le transfert sur le fondement des dispositions de l'article 102-8 du code du travail maritime, au nouvel employeur des contrats de travail en cours et la poursuite de leur exécution dans les conditions mêmes où ils étaient exécutés lors du changement de délégataire du service public.
S'agissant d'un engagement unilatéral de l'employeur ou de dispositions d'un statut collectif, elles étaient encore en vigueur jusqu'à la date du licenciement soient par l'effet de l'article 102-8 du code du travail maritime en l'absence de dénonciation de l'engagement, soit en l'absence d'accord de substitution intervenu entre temps, non allégué en l'espèce.
Le salaire annuel convenu au deuxième contrat de travail était de 61 000 € somme conforme aux conditions générales d'embarquement du 18 juillet 2003 concernant les capitaines.
Rien ne faisant apparaître que le salaire mensuel versé en 2005 aurait atteint le salaire conventionnel garanti réparti sur 12 mois, ce que la société compagnie des îles de la Manche ne soutient pas, l'examen des bulletins de paie démontrant même le contraire, c'est à bon droit que le salarié revendique le paiement pro rata temporis du 13ème de son salaire annuel pour la période travaillée en 2005 au service de la SAS Compagnie des îles de la Manche, précision étant faite que la société de navigation de Normandie avait payé pro rata temporis la part qui lui incombait en 2005.
L'employeur ne conteste pas l'augmentation de salaire la somme de 62 220 € à compter du 1er janvier 2005.
Le salarié lui-même ne conteste pas que sa demande est calculée sur neuf mois au lieu de 7, 7 mois. Le contrat ayant pris fin au 21 novembre 2005, sa demande sera réduite à due concurrence soit 3071, 44 €.
Il n'y aura pas lieu à congés payés sur cette somme dès lors que le 13e mois de salaire est inclu dans le salaire global établi pour l'année entière englobant à la fois les périodes de travail et de congés.
- Sur la demande de compensation
Quand bien même la SAS Compagnie des îles de la Manche reconnaît le caractère indéterminé de la durée du contrat de travail, il ne peut être fait droit à sa demande en restitution de l'indemnité de précarité, dès lors que celle-ci a été effectivement versée au salarié.
Le licenciement ayant été prononcé le 19 octobre 2005 par lettre reçue le 21 avec un préavis d'un mois, les salaires versés au-delà du 21 novembre 2005 n'étaient pas dus et doivent être restitués, peu important à cet égard la mention erronée qui a pu figurer sur l'attestation ASSEDIC délivrée par l'employeur.
Il sera ordonné la compensation des sommes dues entre Monsieur Y... et la SAS Compagnie des îles de la Manche. 07 / 3071 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 2 PAGE No8

En raison des circonstances de l'espèce, il apparaît équitable d'allouer à Monsieur Y... et à la société CFTI une indemnité en réparation de tout ou partie de ses frais irrépétibles dont le montant sera fixé au dispositif.
La SAS Compagnie des îles de la Manche, partie perdante sera déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Ecarte des débats la pièce communiquée par Monsieur Y... à l'audience du 16 juin 2008 intitulé lettre de M. Z... datée du 3 juin 2005.
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Condamne la SAS Compagnie des îles de la Manche à verser à Monsieur Y... les sommes suivantes :
-3 071, 44 € à titre de rappel de 13ème mois ;-700 € d'indemnité par application de l'article 700 du code de procédure civile.
Dit que Monsieur Y... est redevable d'une somme de 5 723, 04 € au titre des salaires indûment versés et le condamne à la restitution de cette somme.
Ordonne la compensation des sommes dues entre les parties.
Déboute les parties et notamment Monsieur Y..., de leurs autres demandes.
Condamne la SAS Compagnie des îles de la Manche à verser à la société CFTI une indemnité de 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la SAS Compagnie des îles de la Manche de sa demande fondée sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile et la condamne aux dépens de première instance et d'appel.
LE GREFFIER LE PRESIDENT

E. GOULARD B. DEROYER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/03071
Date de la décision : 12/09/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Tribunal de commerce de Coutances, 07 septembre 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.caen;arret;2008-09-12;07.03071 ?
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