AFFAIRE : N RG 06/03087Code Aff. : ARRET N J V. J B. ORIGINE : DECISION du Tribunal de Grande Instance d'ARGENTAN en date du 12 Octobre 2006 - RG no 06/00079PREMIERE CHAMBRE - SECTION CIVILE ARRET DU 09 SEPTEMBRE 2008
APPELANTE :
LA FEDERATION DEPARTEMENTALE DES ARTISANS BOULANGERS PATISSIERS DE L'ORNEMaison du Boulanger, Rond Point de Lattre de Tassigny 50204 COUTANCESprise en la personne de son représentant légal
représentée par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avoués assistée de Me COHEN, avocat au barreau D'ARGENTAN
INTIMEE :
L'E.U.R.L. DE NORMANDIE " LA MIE CALINE "9 -11 Place du Marché 61200 ARGENTANprise en la personne de son représentant légal
représentée par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués assistée de la SCP PETAT SEPTIER AMIEL CERVONI, avocats au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
M. BOYER, Président de Chambre,Mme BEUVE, Conseiller,M. VOGT, Conseiller, rédacteur,
DEBATS : A l'audience publique du 05 Juin 2008
GREFFIER : Madame GALAND
ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 09 Septembre 2008 et signé par M. BOYER, Président, et Madame GALAND, Greffier
Exposé de la procédure et des demandes
Par acte en date du 7 juin 2006, la Fédération Départementale des Artisans Boulangers et Boulangers Pâtissiers de l'Orne, représentée par son Président dénommé, a fait citer l'EURL de Normandie (exerçant à Argentan sous l'enseigne « La Mie Câline » en tant que « terminal de cuisson ») aux fins d'obtenir, au visa des articles 808 et 809 du Nouveau Code de procédure civile, et en référence à un arrêté du Préfet de l'Orne, en date du 19 juillet 1996,* qu'il lui soit fait interdiction, sous astreinte, d'ouvrir tous les jours de la semaine,* qu'elle fasse connaître, sous astreinte, son jour de fermeture au Directeur Départemental du Travail, conformément à l'article 3 de l'arrêté, et que ce jour soit affiché de manière apparente et visible depuis l'extérieur du point de vente,* sa condamnation au paiement d'une indemnité provisionnelle de 1000 EUR pour la période de huit jours allant du 31 janvier au 8 février 2006 (le magasin de vente ayant toutefois été ouvert sans jour d'interruption jusqu'au 7 février), ainsi que d'une somme de 1500 EUR, en application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de procédure civile, outre les dépens.
Par décision de référé, contradictoire, en date du 12 octobre 2006, le Président du Tribunal de Grande Instance d'Argentan a renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu'elles aviseront, en retenant que l'accord du 10 mai 1996 mentionné dans l'arrêté préfectoral, en conjonction avec une statistique de l'INSEE, n'établit pas qu'il soit manifestement certain que cet accord reflète la volonté de la majorité des professionnels du secteur, ce qui constitue une contestation sérieuse sur la légalité de l'arrêté, même si aucune action en annulation n'a été engagée à ce jour ; par ailleurs, la demande reconventionnelle de l'EURL de Normandie a été rejetée, et la demanderesse a été condamnée aux dépens.
Les dernières conclusions, auxquelles il est fait exprès référence, ont été régularisées* le 11 décembre 2007 par l'EURL de Normandie, intimée,* le 19 mars 2007 par la Fédération Départementale des Artisans Boulangers et Boulangers Pâtissiers de l'Orne, représentée par son Président dénommé, appelante.
L'ordonnance de clôture est intervenue en cet état, le 7 mai 2008.
À l'ouverture des débats à l'audience du 5 juin 2008, la Cour a rejeté la demande tendant à l'admission de deux pièces communiquées le 26 mai 2008 par l'intimée, à savoir son exercice d'un recours devant le tribunal administratif en date du 22 mai 2008, et un arrêt du Conseil d'État en date du 29 octobre 2007.
En l'absence d'autres demandes des parties, le Président a ensuite fait rapport de l'affaire.
Motivation
Il suffira de rappeler que l'arrêt du Conseil d'État, s'il n'est pas publié au Recueil, est néanmoins accessible sur le site Internet public Legifrance.gouv.fr, et que la saisine récente de la juridiction administrative ne constitue pas non plus, en elle-même, une cause grave de nature à justifier la révocation de l'ordonnance de clôture.Sur la recevabilité de l'action initiée par la Fédération précitée
L'intimée fait valoir, sur le fondement de l'article 116 du Code de procédure civile, que le Président du groupement ne justifie pas d'une habilitation conforme aux statuts, et que cette irrégularité de fond n'est pas susceptible d'être couverte en cours de procédure, dès lors que les organes de direction n'ont pas été régulièrement mandatés.
Pour autant, il ressort des dispositions statutaires que le Président de la Fédération, dont il n'est pas discuté qu'elle soit dotée de la personnalité morale, la représente devant les Tribunaux, selon l'article 17, même si la décision d'agir incombe au Conseil d'Administration selon la procédure interne mentionnée par l'article 16.
En l'espèce, ont été produits le procès-verbal d'une séance du Conseil d'administration de la Fédération précitée en date du 8 février 2006 (pièce no 13), ainsi qu'un extrait de celle-ci (pièce no 12), qui permettent de considérer que l'irrégularité de fond susceptible d'affecter le pouvoir du Président de représenter la personne morale a disparu avant que le juge ne statue.
L'action est donc recevable.
Sur le bien-fondé de l'action
Par arrêt lu le 30 mars 2005, mentionné dans les tables du recueil Lebon (et versé par l'intimée), le Conseil d'État statuant au contentieux sur la contestation afférente à un arrêté similaire du Préfet du Vaucluse en date du 6 juin 1996, a notamment retenu, en référence aux termes cités de l'article L. 227-17 du Code du travail, que « les dispositions de cet article impliquent que l'accord à intervenir entre les syndicats d'employeurs et de travailleurs résultent d'échanges et de discussions menées simultanément et collectivement entre ces différents organismes et non de simples avis recueillis séparément auprès de chacun d'entre eux ».
En l'espèce, selon les termes de l'arrêté du Préfet de l'Orne en date du 19 juillet 1996, le protocole d'accord intervenu le 10 mai 1996 entre certaines organisations professionnelles, s'est formé après que d'autres groupements également concernés, ainsi désignés, « ont été régulièrement invités à la négociation ou consultés ».
Il résulte des termes mêmes de l'arrêté que l'ensemble des parties prenantes n'a pas été convoqué pour mener simultanément et collectivement les échanges et les discussions préalables à l'intervention du protocole d'accord, fondant l'arrêté préfectoral sur lequel s'appuie l'appelante.
Pour ce seul motif ainsi substitué à celui du premier juge, il est justifié d'une difficulté sérieuse conduisant à la confirmation de l'ordonnance entreprise, ce qui rend sans objet l'examen des demandes plus subsidiaires de l'intimée.
Sur les autres demandes
Partie perdante, l'appelante sera tenue des dépens, sans qu'il y ait lieu toutefois, en équité, de la condamner à supporter les frais irrépétibles exposés par son adversaire, au-delà de l'émolument légal de son avoué.
Par ces motifsLa Cour,statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
Dit la Fédération Départementale des Artisans Boulangers et Boulangers Pâtissiers de l'Orne recevable en son action,
Confirme l'ordonnance entreprise,
Dit n'y avoir lieu à indemnité au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,
Condamne la Fédération Départementale des Artisans Boulangers et Boulangers Pâtissiers de l'Orne aux dépens d'appel,
Accorde à la SCP Mosquet Mialon d'Oliveira et Leconte, Avoués, droit de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
C. GALAND J. BOYER