TROISIEME CHAMBRE- SECTION SOCIALE 1 ARRET DU 13 JUIN 2008
APPELANT :
Monsieur Cyrille X...... 14980 ROTS
Comparant en personne, assisté de Me BRAND, avocat au barreau de CAEN
INTIMEE :
SA CARREFOUR Centre Commercial Saint Clair- BP 135 14204 HEROUVILLE SAINT CLAIR CEDEX
Représentée par Me DELOM DE MEZERAC, avocat au barreau de CAEN
DEBATS : A l'audience publique du 20 Mars 2008, tenue par Mme PONCET, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré
GREFFIER : Madame POSE
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur POUMAREDE, Président, Madame CLOUET, Conseiller, Madame PONCET, Conseiller, rédacteur
ARRET prononcé publiquement le 13 Juin 2008 à 14 heures par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile et signé par Monsieur POUMAREDE, Président, et Madame POSE, Greffier
FAITS ET PROCÉDURE
La SA Carrefour a embauché M Cyrille X... comme boucher ouvrier professionnel le 2 / 1 / 90, l'a promu chef de rayon le 8 / 2 / 92. Il a exercé ces fonctions à Annecy, à Reims. Le 23 / 10 / 97, la SA Carrefour l'a muté à Hérouville St Clair en qualité de directeur du rayon boucherie, l'a promu le 1 / 6 / 99 manager métier en boucherie et l'a licencié par lettre du 30 / 1 / 02 pour faute grave. Le 27 / 12 / 02, M X... a saisi le conseil des prud'hommes de Caen aux fins notamment d'obtenir le paiement d'heures supplémentaires, le versement d'indemnités de rupture et des dommages et intérêts pour licenciement abusif.
Par jugement du 26 / 1 / 04, le conseil des prud'hommes a débouté M X... de toutes ses demandes à l'exception de celle relative au paiement des jours de repos et autorisé les parties à revenir devant le conseil en ce qui concerne la demande relative aux jours de repos sous réserve d'une demande précise et circonstanciée formulée dans les 15 jours de la notification du jugement.
M X... a interjeté appel de cette décision.
Vu le jugement rendu le 26 / 1 / 04 par le conseil des prud'hommes de Caen Vu les conclusions oralement soutenues de M X... appelant tendant à voir la SA Carrefour condamnée à lui verser 9015, 69 € d'indemnité compensatrice de préavis, 901, 57 € au titre des congés payés afférents, 28850 € d'indemnité légale de licenciement, 36000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse outre, au principal 71532, 06 € au titre des heures supplémentaires et 7153, 21 € au titre des congés payés afférents, subsidiairement 50000 € de dommages et intérêts en application de l'article L112-15-3 du code du travail et 3891, 95 € au titre des jours de repos travaillés et 3000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile Vu les conclusions oralement soutenues de la SA Carrefour intimée tendant au débouté de M X... de l'ensemble de ses demandes et à sa condamnation à lui verser 3500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1) Sur l'exécution du contrat de travail
1-1) Sur les heures supplémentaires
M X... étaye sa demande d'une part par l'attestation d'un collègue, responsable adjoint du rayon boulangerie et voisin de bureau qui écrit que M X... était présent de 5H30 / 6H à 19H- avec une pause à midi-, d'autre part par l'attestation d'une personne travaillant dans la galerie marchande qui indique avoir constaté que la présence au travail de M X... était très importante certainement au- delà de 8H par jour. M X... produit également des calendriers où figurent jour par jour les heures travaillées.
La SA Carrefour soutient que M X... était rémunéré au forfait, ce qui l'exclurait du dispositif des heures supplémentaires et qu'en toute hypothèse il ne travaillait pas le nombre d'heures prétendues.
- Sur la période du 23 / 10 / 97 au 1 / 6 / 99
Le contrat de travail signé le 23 / 10 / 97 stipule que sa rémunération est forfaitaire, que cette rémunération ne comporte aucune référence à un horaire défini, M X... s'engageantà consacrer le temps requis à l'exécution des tâches de (son) emploi Ce libellé est donc conçu pour laisser toute latitude quant au nombre d'heures travaillées. La limite est constituée, selon le contrat, par les dispositions de l'accord du 1 / 10 / 91 sur la réduction du temps de travail. Toutefois, cet accord s'il pose le principe selon lequel le plein exercice des responsabilités du personnel d'encadrement ne doit pas systématiquement aboutir à la mise en oeuvre régulière d'un horaire de présence exagéré ou non justifié n'en tire aucune conséquence pratique si ce n'est l'octroi de deux jours de repos compensateur par trimestre effectivement travaillé. Outre, cet accord expressément visé par le contrat de travail, s'applique l'avenant 66 à la convention collective nationale qui prévoit que la durée hebdomadaire effective du travail calculée sur une période quelconque de 12 semaines consécutives ne peut être supérieure en moyenne à 46H pour le personnel d'encadrement et que leur rémunération forfaitaire comprend notamment les majorations pour heures supplémentaires. M X... ne conteste pas avoir effectivement été rémunéré pour 46H hebdomadaires de travail, majorations pour heures supplémentaires comprises, et admet donc l'existence d'un forfait de salaire. La SA Carrefour a également considéré que son salarié travaillait 46H par semaine. En effet, les bulletins de salaire produits mentionnent cet horaire et l'appointement forfaitaire versé l'est jusqu'à 200, 10H soit environ 46H par semaine (46, 21H). Le travail n'étant pas organisé par cycle ni modulé, toute heure travaillée au- delà de 46H n'a donc pas été rémunérée par le salaire versé.
La SA Carrefour ne produit aucun élément concernant les horaires de M X... si ce n'est une attestation de M Y..., boucher, cosignée par les autres salariés du rayon boucherie qui écrit que M X... faisait les horaires d'un employé 7H- 19H avec une coupure de 12H à 17H. Cette attestation manque de crédibilité. En effet, dans la lettre de licenciement, l'employeur évoque l'arrivée de M X... sur son lieu de travail le 18 / 1 / 02 à 6H- et non à 7H-. M X... produit l'attestation d'un client qui indique avoir régulièrement vu M X... quand il faisait ses courses en début d'après- midi. Le plan d'action prioritaire établi suite à une visite du rayon boucherie les 14 et 15 / 1 / 02 mentionne l'arrivée de M X... le 14 à 8H30 et un départ à 20H, le 15 une arrivée à 6H et un départ à 18H sans qu'il soit mentionné une coupure de cinq heures au cours de la journée. Enfin, cela supposerait que la SA Carrefour ait rémunéré M X... pour une durée de travail de 46H alors qu'il n'effectuait au plus que 42H par semaine.
M X... produit pour justifier des heures travaillées outre les attestations déjà mentionnées notamment celle émanant d'un collègue qui indique qu'il occupait le bureau voisin du sien- ce qui n'est pas contesté par la SA Carrefour-, des calendriers où sont mentionnées jour par jour le nombre d'heures effectuées. Ces éléments qui ne sont pas utilement contredits par la SA Carrefour seront retenus. Il apparaît toutefois que les décomptes établis par M X... ne concordent pas avec ces calendriers. En effet, les mentions lisibles apparaissant sur ces calendriers produits en photocopie font ainsi apparaître du 2 / 11 / 97au 4 / 1 / 98 168 heures travaillées au- delà des 46H hebdomadaires rémunérées et non 180 heures et du 5 / 1 / 98 au 3 / 1 / 99 556 heures et non 647H comme mentionnées dans le décompte. En effet, outre des mentions illisibles, des erreurs ont régulièrement été commises quand une semaine était à cheval sur deux mois.
La durée légale du travail était alors de 39H. En application de l'article L 212-5 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur, les huit premières heures supplémentaires étaient majorées de 25 %, les heures suivantes de 50 %. Sept heures supplémentaires se trouvent donc déjà inclues dans le forfait. Du 2 / 11 / 97au 4 / 1 / 98- période pour laquelle la SA Carrefour ne soulève pas la prescription- 168H ont été effectuées et non rémunérées soit en moyenne 18, 66H par semaine. Ces heures doivent être majorées de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 17, 66 heures suivantes, et ce sur 9 semaines Du 5 / 1 / 98 au 3 / 1 / 99 de 556 heures non rémunérées ont été effectuées sur 47 semaines de travail, la moyenne des heures excédant le forfait de 46H s'établit à 11, 8H par semaine. Ces heures doivent être majorées de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 10, 8 heures suivantes, et ce sur 47 semaines Du 4 / 1 au 30 / 5 / 99, il ressort du calendrier que M X... a travaillé 159H au- delà de la durée du forfait sur 12 semaines- M X... se trouvant en arrêt maladie les autres semaines ou ayant travaillé au plus 46H-, soit en moyenne 13, 25H hebdomadaires. Ces 13, 25 heures non rémunérées doivent être majorées de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 12, 25 heures suivantes et ce sur 12 semaines. Les parties seront renvoyées à effectuer les calculs sur ces bases en retenant comme taux horaire de base, l'appointement forfaitaire versé divisé par 200, 10H.
- A compter du 1 / 6 / 99
Un avenant au contrat de travail a été conclu le 1 / 6 / 99 entre les parties. M X... a été promu manager métier et il a été prévu quela journée de travail serait désormais l'unité de décompte du temps de travail. Cet avenant se réfère expressément à un accord d'entreprise du 1 / 3 / 99 qui n'a été produit que de manière partielle par la SA Carrefour. Bien que cette précision ne figure pas dans l'extrait produit, il ressort des bulletins de salaire que le nombre annuel de jours de travail a été fixé à 214. En application de l'article L212-15-4 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 / 1 / 03, un régime de forfait en jours ne peut être appliqué qu'aux cadres dont la durée du travail ne peut être prédéterminée et qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps. M Z... responsable alimentaire au moment des faits certifie que de part sa fonction M X... avait toute latitude pour organiser son temps de travail. M Z... ne précise toutefois pas de quelle manière M X... pouvait pratiquement s'organiser, s'il était ou non libre de ses horaires et ne donne aucun exemple illustrant la liberté dont, selon lui, bénéficiait M X.... En outre, cette attestation est en contradiction avec celle de M Y... qui fait état d'horaires d'employé, identique chacun des jours travaillés. De surcroît, aucun des documents produits n'établit que la nature des fonctions exercées interdisait de prédéterminer la durée du travail. Dès lors, le régime du forfait en jours ne pouvait pas s'appliquer à M X....
En outre, l'avenant au contrat de travail signé par M X... ne constitue pas une convention individuelle de forfait. Elle ne précise pas même le nombre de jours de travail et hormis le nombre de jours supplémentaires de repos aucune précision n'y figure concernant les modalités d'application de ce forfait, enfin la liberté d'organisation dont le salarié est censé disposer n'est pas rappelée.
En conséquence, cet avenant instituant à tort une convention de forfait en jours n'a pas lieu des'appliquer.
Il convient donc d'appliquer les modalités antérieures, celle d'un forfait de salaire comprenant le paiement de 46H de travail, majorations pour heures supplémentaires comprises de la 40ième à la 46ième heure du 1 / 6 / 99 au 31 / 1 / 00 et majorations pour heures supplémentaires comprises à compter de la 36ième heure à compter du 1 / 2 / 00. La demande de M X... porte d'ailleurs uniquement sur le paiement des heures excédant 46H de travail sur cette période comme sur la précédente.
Du 31 / 5 / 99 au 29 / 1 / 00, M X... a travaillé au vu des calendriers produits 267H au- delà de la durée du forfait sur 25 semaines- M X... se trouvant en congé les autres semaines ou ayant travaillé au plus 46H-, soit en moyenne 10, 68H hebdomadaires. Ces 10, 68 heures non rémunérées doivent être majorées de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 9, 68 heures suivantes et ce sur 25 semaines.
Du 30 / 1 au 31 / 12 / 00, M X... a travaillé au vu des calendriers produits 308H au- delà de la durée du forfait sur 35 semaines- M X... se trouvant en congé les autres semaines ou ayant travaillé au plus 46H-, soit en moyenne 8, 8H hebdomadaires. Ces 8, 8 heures non rémunérées doivent toutes être majorées de 50 %, les huit premières heures majorées à 25 % étant inclues dans le forfait, et ce sur 35 semaines.
Du 1 / 1 au 31 / 12 / 01, M X... a travaillé au vu des calendriers produits 355H au- delà de la durée du forfait sur 38 semaines- M X... se trouvant en congé les autres semaines ou ayant travaillé au plus 46H-, soit en moyenne 9, 34H hebdomadaires. Ces heures non rémunérées doivent toutes être majorées de 50 %, et ce sur 38 semaines.
Aucune demande n'est formulée pour le mois de janvier 2002.
Les parties seront renvoyées à effectuer les calculs sur ces bases en retenant comme taux horaire de base, l'appointement forfaitaire versé divisé par 200, 10H.
La somme globale obtenue au titre des heures supplémentaires sera ramenée au montant de la demande (71532, 06 €) si elle s'avère dépasser cette somme. En outre, la SA Carrefour sera condamnée à verser à M X... 10 % de la somme ainsi obtenue au titre des congés payés afférents.
1-2) Sur les jours de repos travaillés
Au soutien de sa demande, M X... se prévaut des mentions figurant sur les calendriers produits. Ainsi apparaissent certains jours la mention R travaillé. Outre, le caractère peu probant de ces mentions, celles- ci sont en discordance avec la totalisation hebdomadaire des heures travaillées. En effet, ce total n'englobe que les autres heures effectuées dans la semaine sans tenir compte de celles qui auraient été effectuées ces jours de repos prétendument travaillés, ce qui permet de penser que la mention travaillé a été ajoutée a posteriori. En conséquence, cette demande sera rejetée
2) Sur le licenciement
Deux griefs figurent dans la lettre de licenciement :- le signalement le 17 / 1 / 02 à 7H30 de la présence dans le frigo PLS (produits libre service) de deux caddies remplis de marchandises de boucherie depuis plusieurs jours. La livraison des PAD boucherie chargés sur ces caddies plombés date du 2 / 1 / 02 " et il est fait mention sur ces PAD d'une date limite de consommation (DLC) du 17 / 1 / 02 ". Non seulement ces produits n'étaient nullement destinés à être vendus le jour même, mais en toute hypothèse en vertu des règles élémentaires durée de vie rayon et client J + 4, ils ne devaient plus se trouver en frigo depuis au moins le13 janvier 2002. Ces agissements mettant en péril l'entreprise comme la sécurité sanitaire même de ses consommateurs clients, sont particulièrement inacceptables de la part d'un cadre disposant au demeurant d'une ancienneté certaine et de toutes les capacités et moyens requis pour une gestion normale du rayon.- une incurie générale constatée depuis des mois au sein du rayon sans aucune action corrective satisfaisante mise en œ uvre malgré les divers audits effectués et plans d'actions prioritaires réclamés. Le contenu des rapports, contrôles, fiches de synthèse en novembre 2001, Qualité France en Novembre 2001, comme les interventions SILLIKER de Janvier, Mars, Mai, Juillet, Septembre 200l, relevant tous de multiples carences, confortent l'absence de caractère accidentel de ces faits constatés le 17 janvier qui s'inscrivent bien au contraire dans un engrenage déplorable d'absence de gestion du rayon dont vous avez la responsabilité.
- Sur le premier grief
Contrairement aux allégations figurant dans la lettre de licenciement, aucune DLC ne figure sur ces lots de viande stockés tels qu'ils ont été livrés. Il ressort d'ailleurs des documents produits que cette date est apposée lors du conditionnement de la viande. Seules figurent sur les casiers et les bons de livraison les dates d'abattage s'échelonnant entre le 17 et le 21 / 12. Le référentiel Carrefour précise refus des marchandises hors de ces critères. La viande VBF- qui serait ici en cause- est selon ce référentiel acceptée 9 à 18 jours après la date d'abattage.. Cette instruction vise non pas l'utilisation des marchandises comme le prétend la SA Carrefour mais leur réception. Au demeurant, un exemple concernant le veau PAD FQC confirme ce point. Cette viande doit être acceptée à J + 7 maxi, ainsi, indique l'exemple, un veau abattu le 15 / 7 doit être réceptionné au plus tard le 22 / 7. Les lots litigieux livrés le 2 / 1 / 02 ont donc été normalement acceptés. Le référentiel n'indique pas sous quel délai la viande doit être conditionnée or, DLC et date de retrait se calculent en fonction de la date de conditionnement (date de retrait = date de conditionnement + 1, DLC = date de conditionnement + 4). En conséquence ce référentiel ne permet pas de vérifier que la date de retrait ou la DLC étaient dépassées voire même atteinte le 17 / 1 / 02. La SA Carrefour produit également une attestation émanant d'un cadre, M A... qui indique avoir constaté le 17 / 1 / 02 la présence de roll de viande avec une DLC au 17 / 1 / 02 dans une chambre froide non balisé ni placé dans une zone d'isolement. Il convient toutefois de noter qu'aucune DLC ne figurait sur ces lots au vu du constat d'huissier ; or M A... n'indique pas qu'il aurait déduit cette DLC à partir des informations qui figuraient sur les casiers. Dès lors, son attestation, soit inexacte soit incomplète, ne saurait utilement étayer l'existence de ce grief. M Y..., atteste quant à lui avoir constaté le 18 / 1 à 5H30 la présence de deux caddies de viande périmée dans le frigo ultra frais et ce en présence de deux autres personnes dont M Z.... Il convient de souligner que M Y... a établi une autre attestation particulièrement défavorable à M X... puisqu'il l'accuse de malhonnêteté envers la société, les clients et toute l'équipe, d'incompétence et prétend qu'il ne travaillait que sept heures par jour, ce qui s'est avéré inexact. L'animosité dont a fait montre M Y... à l'égard de M X... affecte la crédibilité de son attestation. En outre, il ne précise pas la manière la manière dont il a pu s'assurer qu'il s'agissait de viande périmée. En conséquence, alors même que la SA Carrefour avait tous moyens nécessaires pour démontrer que le 17 / 1 / 02 la viande litigieuse avait atteint ou dépassé sa DLC, elle n'apporte aucun élément probant en ce sens. Il existe dès lors un doute sur la réalité de ce grief. Il est constant que le frigo concerné n'est pas accessible à la clientèle et que la viande a été stockée telle qu'elle avait été livrée sans transformation et n'était pas susceptible d'être vendue en l'état. A supposer même que la viande ait effectivement atteint ou dépassé la DLC, il n'existait donc pas de risque direct pour la clientèle.
- Sur le second grief
Les rapports, contrôles, fiches de synthèse visés dans la lettre de licenciement sont produits. Le dernier de ces documents portant sur un contrôle effectué en novembre 2001 par Qualité France a été transmis par courrier daté du 11 / 1 / 02. Les faits objet de ce rapport ont donc été portés à la connaissance de la SA Carrefour moins de deux mois avant la date de la lettre de convocation à l'entretien préalable (18 / 1 / 02) et ne sont pas prescrits. Ceux objets des documents établis précédemment visés dans la lettre de licenciement et portant sur des faits de même nature peuvent donc valablement être évoqués. Les documents établis par SILLIKER relèvent diverses non conformités et formulent des recommandations concernant le stockage en chambre froide, l'interdiction de prolonger la DLC en cas de transformation des denrées en aliments pour chiens (janvier 2001), le non respect des dates de retrait (mars 2001, mai 2001, juillet 2001, septembre 2001), à la tenue du personnel (mai 2001), au non respect sur un sachet d'une DLC dépassée de deux jours au moment du contrôle (septembre 2001). La fiche de contrôle établie par Qualité France le 7 / 11 / 01 ayant donné lieu à un rapport établi le 11 / 1 / 02 mentionne diverses non conformités : des anomalies dans la comptabilité matière, l'absence d'étiquettes sur certaines viandes en cours de préparation, le retrait de marchandises avec un jour de retard, des températures trop élevées de la viande en attente au laboratoire et dans le rayon. M B..., relais métiers au sein de la SA Carrefour sur la région Basse Normandie indique s'être entretenu à plusieurs reprises avec M X..., l'avoir informé des plans d'action à mettre en place pour corriger les anomalies et ce vainement selon lui. Aucun de ces plans n'est précisément visé dans la lettre de licenciement. Ceux produits correspondant à des contrôles effectués en septembre 2001, novembre 2001 et les 14 et 15 / 1 / 02. Ils font essentiellement état d'améliorations à apporter dans la gestion et la méthodologie.
La plupart des remarques figurant dans ces divers documents portent sur des points de détail et n'ont au demeurant jamais conduit la SA Carrefour à adresser à M X... ne serait- ce qu'une mise en garde. Les 54 à 56 heures hebdomadaires travaillées par M X... démontrent que sa charge de travail était excessive. En conséquence, les manquements de M X... à son devoir de surveillance et sa difficulté à corriger les anomalies constatées ne sauraient constituer un motif sérieux de licenciement.
Les sommes réclamées par M X... au titre des indemnités de rupture n'étant pas critiquées ne serait- ce qu'à titre subsidiaire par la SA Carrefour seront retenues. M X... produit comme seul élément sur sa situation les avis d'imposition sur les revenus 2001 à 2005 de son couple qui font apparaître une baisse de revenus. Compte tenu de cet élément, du fait que M X... était âgé de 41 ans au moment du licenciement, qu'il travaillait depuis 12 ans dans cette entreprise, que son salaire moyen a été de 4103, 08 € en 2001, il y a lieu de lui allouer 30000 € de dommages et intérêts.
3) Sur les points annexes
Les sommes allouées produiront intérêts au taux légal à compter du 25 / 12 / 02 à l'exception de celle accordée à titre de dommages et intérêts qui produira intérêt à compter de la notification de la présente décision. Il serait inéquitable de laisser à la charge de M X... ses frais irrépétibles. De ce chef, la SA Carrefour sera condamnée à lui verser 1800 €.
DÉCISION
PAR CES MOTIFS, LA COUR,
- Infirme le jugement
- Statuant à nouveau
- Condamne la SA Carrefour à verser à M X... un rappel de salaires pour heures supplémentaires sur la base suivante :- Du 2 / 11 / 97au 4 / 1 / 98 : 18, 66 heures au taux horaire majoré de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 17, 66 heures suivantes, et ce sur 9 semaines.- du 5 / 1 / 98 au 3 / 1 / 99 11, 8 heures au taux horaire majoré de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 10, 8 heures suivantes, et ce sur 47 semaines- Du 4 / 1 au 30 / 5 / 99, 13, 25 heures au taux horaire majoré de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 12, 25 heures suivantes et ce sur 12 semaines- Du 31 / 5 / 99 au 29 / 1 / 00, 10, 68 heures au taux horaire majoré de 25 % pour la première de ces heures et de 50 % pour les 9, 68 heures suivantes et ce sur 25 semaines- Du 30 / 1 au 31 / 12 / 00, 8, 8 heures au taux horaire majoré de 50 %, et ce sur 35 semaines- Du 1 / 1 au 31 / 12 / 01, 9, 34H au taux horaire majoré de 50 %, et ce sur 38 semaines.
- Renvoie les parties à effectuer les calculs en fonction des différents taux horaires appliqués au cours de cette période et obtenus en divisant le salaire mensuel par 200, 10H
- Dit que la somme ainsi obtenue sera ramenée à 71532, 06 € si elle dépasse cette somme
- Condamne la SA Carrefour à verser à M X... en outre 10 % de la somme ainsi obtenue au titre des congés payés afférents
- Dit que ces deux sommes produiront intérêts au taux légal à compter du 28 / 12 / 02
- Condamne la SA Carrefour à verser à M X...-9015, 69 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 901, 57 € au titre des congés payés afférents-28850 € au titre de l'indemnité légale de licenciement avec intérêts au taux légal à compter du 28 / 12 / 02
-30000 € de dommages et intérêts avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision
- Condamne la SA Carrefour à verser à M X... 1800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile
- Condamne la SA Carrefour aux entiers dépens de première instance et d'appel
LE GREFFIERLE PRÉSIDENT
V. POSEA. POUMAREDE