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28/03/2008 | FRANCE | N°07/00837

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre sociale, 28 mars 2008, 07/00837


AFFAIRE : N RG 07 / 00837 Code Aff. : ARRET N C. P ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes d'AVRANCHES en date du 23 Février 2007 RG no F06 / 00079

COUR D'APPEL DE CAEN TROISIEME CHAMBRE-SECTION SOCIALE 2 ARRET DU 28 MARS 2008

APPELANT :
Monsieur Jean-Pierre X... ......(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022007002153 du 12 / 09 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)

Représenté par Me Maurice LARVOL, avocat au barreau d'AVRANCHES
INTIME :
Monsieur Raymond Y... ......

Représenté par Me Serge

GUILLEVIN, avocat au barreau d'AVRANCHES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DE...

AFFAIRE : N RG 07 / 00837 Code Aff. : ARRET N C. P ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes d'AVRANCHES en date du 23 Février 2007 RG no F06 / 00079

COUR D'APPEL DE CAEN TROISIEME CHAMBRE-SECTION SOCIALE 2 ARRET DU 28 MARS 2008

APPELANT :
Monsieur Jean-Pierre X... ......(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 141180022007002153 du 12 / 09 / 2007 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de CAEN)

Représenté par Me Maurice LARVOL, avocat au barreau d'AVRANCHES
INTIME :
Monsieur Raymond Y... ......

Représenté par Me Serge GUILLEVIN, avocat au barreau d'AVRANCHES
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE :
Monsieur DEROYER, Président, Monsieur COLLAS, Conseiller, rédacteur Madame GUENIER-LEFEVRE, Conseiller,

DEBATS : A l'audience publique du 15 Février 2008

GREFFIER : Mademoiselle GOULARD

ARRET prononcé publiquement le 28 Mars 2008 à 14 heures par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile et signé par Monsieur DEROYER, Président, et Mademoiselle GOULARD, Greffier

Faits-Procédure :

Monsieur Raymond Y... exploite un Centre de formation à la conduite automobile et poids lourds, dont le siège est à ISIGNY LE BUAT et qui compte un certain nombre de bureaux annexes situés à ST HILAIRE DU HARCOUET, LE TEILLEUL, AVRANCHES et FOUGERES.
Il a embauché Monsieur Jean-Pierre X... en qualité de moniteur auto-école dans le cadre de deux contrats à durée déterminée successifs :- le premier, qui a pris effet le 13 décembre 2005, motivé par la nécessité de pourvoir au remplacement d'un salarié absent, a été conclu sans terme précis.- le second, qui était un contrat d'insertion revenu minimum d'activité, conclu le 25 janvier 2006, a pris effet le 1er février 2006 et son terme était fixé au 31 juillet 2006.

Par lettre du 13 juillet 2006, son employeur a notifié à Monsieur X... son licenciement pour faute grave.
Contestant la légitimité de son licenciement, ce dernier a saisi le 20 juillet 2006 le Conseil de prud'hommes d'AVRANCHES pour faire valoir ce qu'il estimait être ses droits nés tant de l'exécution que de la rupture de son contrat de travail.
Vu le jugement rendu le 23 février 2007 par le dit Conseil de prud'hommes qui a entièrement débouté Monsieur X... de ses demandes.
Vu les conclusions déposées le 14 février 2008 et oralement soutenues à l'audience par Monsieur Jean-Pierre X..., appelant.
Vu les conclusions déposées et oralement soutenues à l'audience par Monsieur Raymond Y..., intimé.

MOTIFS

-Sur la demande au titre de l'exécution du contrat de travail

Monsieur X... avait saisi les premiers juges, entre autre demandes, d'une demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires dont ceux-ci l'ont débouté.
Reconnaissant avoir été entièrement rempli de ses droits au titre de l'exécution de son contrat de travail, Monsieur X... renonce, en cause d'appel, à cette demande.
La Cour en prend acte.
- Sur le licenciement
Il est, aux termes de la lettre de son employeur lui notifiant son licenciement, reproché à Monsieur X... son absence injustifiée de son poste de travail depuis le 2 juin 2006 à 16 heures et de n'avoir pas assuré sa dernière leçon de conduite qui était programmée ce jour là à cette heure.

L'auteur de la lettre y estime que cette absence prolongée et injustifiée caractérise un abandon de poste incompatible avec la poursuite des relations contractuelles.

Aux termes de son contrat de travail applicable à l'époque des faits litigieux, Monsieur X... devait assurer l'exécution de sa prestation de travail sur le site de ST HILAIRE DU HARCOUET, localité distante de 60 Kms de GRANVILLE où, à cette même époque, il résidait et où il continue du reste de résider.
Il est entièrement acquis aux débats que Monsieur X... ne possédait, à l'époque où il était au service de Monsieur Y..., aucun véhicule personnel ou, à tout le moins, dont il aurait eu la disposition et que son employeur l'avait autorisé à utiliser son véhicule de fonction pour effectuer ses déplacements quotidiens entre son domicile et son lieu de travail, soit une distance quotidienne de 120 Kms.
Monsieur Y... fait valoir qu'il s'agissait là d'une simple tolérance qu'il avait consenti à son moniteur motivée à la fois par l'éloignement de sa résidence de son lieu de travail et par le fait qu'il ne disposait d'aucun véhicule personnel mais que cette tolérance à laquelle, en toute hypothèse, il n'a jamais décidé d'y mettre fin, ne pouvait être que temporaire, dans l'attente que celui-ci fasse l'acquisition d'un véhicule personnel, cette mise à disposition de son salarié du véhicule de fonction pour effectuer ses trajets domicile / lieu de travail, qui représentait pour lui un avantage non négligeable lui ayant été accordée sans aucune contrepartie, ce que ne conteste pas Monsieur X....
Sur cette question particulière, le contrat de travail de celui-ci stipulait qu'il rejoindrait par ses propres moyens le lieu d'exercice de ses fonctions, ST HILAIRE DU HARCOUET en l'occurrence.
Cette disposition est la négation même de ce que soutient le salarié, à savoir que la mise à sa disposition du véhicule de fonction pour effectuer ses déplacements domicile / lieu de travail aurait constitué l'un des termes de l'accord que les parties ont conclu lorsqu'il a été embauché.
Ce dernier ne saurait davantage se prévaloir d'un usage existant dans l'entreprise alors qu'il ne conteste pas même que les critères de généralité, constance et fixité nécessaires à son existence faisaient ici défaut.
Monsieur X... ne conteste pas, ainsi qu'il l'est énoncé à la lettre de licenciement avoir quitté son poste de travail le 2 juin 2006, lequel jour était un vendredi, à 16 heures et ne s'y être jamais représenté.
Il ne conteste pas davantage qu'il devait normalement travailler le lendemain, samedi 3 juin, puis à partir du lundi 5 juin.
Du reste, à cet égard, son contrat stipulait qu'il travaillait du mardi au vendredi de 10 heures à 12 heures et de 14 heures à 19 heures et le samedi de 9 heures à 12 heures et de 13 heures à 17 heures.
Il n'a jamais contesté que tels étaient ses horaires de travail.
Il prétend justifier son absence du 3 juin, ainsi du reste que celle des jours suivants, en arguant que son employeur s'est rendu le 3 juin à son domicile afin de reprendre possession du véhicule, de fonction, avec lequel, la veille, il avait regagné, comme tous les jours où il travaillait, son domicile.
Si ce fait est exact, c'est seulement le samedi 3 juin dans l'après-midi que Monsieur Y... est venu à son domicile récupérer le véhicule ainsi qu'en a attesté Monsieur Joël Z...le moniteur d'auto-école qui l'a accompagné jusqu'à GRANVILLE (pièce no9 de Monsieur Y...), ce que, du reste, Monsieur X... ne conteste pas.
Or, ce jour là, celui-ci devait normalement prendre le travail à 9 heures et son défaut à cet égard ne peut s'expliquer par l'absence de véhicule pour s'y rendre.
Monsieur Y... explique sa décision de récupérer, dans ces circonstances de temps, le véhicule resté en possession de Monsieur X..., lequel véhicule était nécessaire à l'activité de l'auto-école, par les multiples absences injustifiées de ce dernier au cours des jours précédents.
Monsieur X... reconnaît dans ses écritures la réalité de ses absences, non autorisées par son employeur, des mardi 23, mercredi 24, vendredi 26, samedi 27 et mardi 30 mai, étant précisé que le jeudi 25 mai était férié (Ascension).
A nouveau celui-ci prétend justifier celles-ci par le fait que son employeur avait repris possession du véhicule.
Or, ce fait ne l'empêchera pas de venir travailler le mercredi 31 mai et, ce jour là, il a donc fait son affaire personnelle de son déplacement jusqu'à ST HILAIRE DU HARCOUET, sans utiliser le véhicule de l'entreprise.
Lorsque, le samedi 3 juin au matin, une nouvelle fois Monsieur X... ne s'est pas présenté au travail sans l'avoir averti des raisons de son absence et de la durée prévisible de celle-ci, son employeur était en droit de récupérer le véhicule nécessaire à l'activité de l'auto-école, véhicule sur lequel Monsieur X... n'avait lui-même aucun droit de l'utiliser à titre privé, cette utilisation étant une simple tolérance de son employeur, laquelle devait être compatible avec l'objectif prioritaire d'une utilisation du véhicule conforme à sa destination naturelle, c'est-à-dire les leçons de conduite des candidats au permis.
L'absence non autorisée de Monsieur X... le samedi 3 juin 2006 n'avait donc aucun motif légitime.
Par lettre du mercredi suivant 7 juin, son employeur lui a fait part de son constat de son absence de son poste de travail depuis le vendredi précédent 2 juin à 16 heures, qu'il considérait celle-ci comme un abandon de poste et l'a mis en demeure de justifier des motifs de celle-ci.
Il n'est pas contesté par Monsieur X... qu'il n'a donné aucune suite à ce courrier de son employeur qu'il ne conteste pas avoir reçu.
Par lettre du 23 juin 2006, son employeur l'a convoqué le 6 juillet 2006 à l'entretien préalable à son licenciement envisagé.
Il ne conteste pas davantage avoir reçu ce courrier, n'y avoir donné aucune suite et ne pas avoir déféré à la convocation de son employeur.
Se trouve dès lors entièrement caractérisé son abandon de poste depuis le samedi 3 juin 2006 au matin.
L'agenda de l'auto-école fait mention de ce que le vendredi 2 juin 2006 à 16 heures, Monsieur X... devait donner une leçon de conduite à Mademoiselle Cindy A....
Il ne conteste pas ne pas avoir assuré celle-ci.
Il prétend s'exonérer de toute responsabilité à cet égard en faisant valoir que la mention de cette leçon sur l'agenda n'est pas de sa main, ce que ne conteste pas Monsieur Y... qui fait valoir qu'elle est de celle de la secrétaire.
Monsieur X... n'a pas utilement contesté, comme le soutient Monsieur Y..., que les mentions portées sur l'agenda l'étaient, soit par le moniteur lui-même, ce qui était le cas lorsqu'il fixait un rendez-vous à un élève à l'issue d'une leçon, soit par la secrétaire lorsque les candidats au permis de conduire téléphonaient ou se présentaient en personne au bureau pour prendre rendez-vous.
Alors que, à l'exception du jeudi où il terminait une heure plus tôt et du samedi où il terminait deux heures plus tôt, Monsieur X... terminait sa journée de travail à 19 heures, il lui appartenait donc, à l'issue, à 16 heures le vendredi 2 juin 2006, d'une leçon de conduite de passer au bureau afin d'y consulter l'agenda afin de s'assurer si, oui ou non, sa journée de travail était terminée et non pas de rentrer directement chez lui à GRANVILLE avec, de surcroît, le véhicule de fonction qui, de ce fait, était indisponible pour assurer la leçon en question.
Ce second fait énoncé à la lettre de licenciement, dont la réalité est établie, doit donc lui être imputé à faute.
Par définition, un abandon de poste, fautif par nature, est incompatible avec la poursuite de la relation de travail et est donc constitutif d'une faute grave.
Ajouté de surcroît au comportement général de Monsieur X... caractérisé par un mépris certain des obligations professionnelles qui étaient les siennes, au premier rang desquelles celle d'exécuter loyalement sa prestation de travail, il autorisait son employeur à rompre, de manière anticipée, son contrat de travail conclu pour une durée déterminée.
Le jugement entrepris sera donc confirmé et Monsieur X... sera lui-même débouté de ses demandes de nature indemnitaire.
- Sur les demandes reconventionnelles de l'employeur
-Sur celle de nature indemnitaire
Monsieur Y... demande, sur le fondement du dernier alinéa de l'article L 122-3-8 du Code du Travail, la condamnation de Monsieur X... à lui verser 3. 000 € à titre de dommages et intérêts.
L'employeur justifie que le comportement de son salarié, ses multiples absences injustifiées, ont désorganisé le fonctionnement de l'entreprise dans la mesure où elles l'obligeaient à pallier, en urgence, celles-ci.
Il a dû en outre consacrer du temps et exposer des frais pour, à deux reprises au moins, aller récupérer à GRANVILLE le véhicule de fonction resté en possession de son salarié défaillant.
L'attitude de celui-ci lui a incontestablement causé un préjudice, lequel sera justement évalué à 800 €.

- Sur la demande de remboursement d'un trop versé

Monsieur X... ne conteste pas, ainsi que le soutient Monsieur Y..., que ses durées quotidiennes effectives de travail variaient chaque jour en fonction du nombre de leçon de conduite à assurer.
Etant rémunéré sur la base constante de 35 heures par semaine, ces variations horaires imposaient un lissage périodique.
Monsieur Y... fait valoir que la rupture avant l'échéance de son terme, du contrat de Monsieur X... n'a pas permis ce lissage et qu'il a été payé de 10 heures qu'il n'a pas effectuées, soit 85 € dont il demande qu'il soit condamné à les lui rembourser.
Monsieur X... n'ayant présenté aucune observation par rapport à cette demande de son ex employeur, qu'il ne conteste donc pas, celle-ci sera considérée comme bien fondée et il y sera fait droit.
Monsieur X... avait été entièrement débouté de ses demandes par les premiers juges.
Il apparaît dans ces conditions équitable de mettre à sa charge une partie des frais de procédure irrépétibles que son appel infondé de leur décision a contraint Monsieur Raymond Y... à exposer.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement entrepris ;

Déboute en conséquence Monsieur Jean-Pierre X... de toutes ses demandes ;
Accueille Monsieur Raymond Y... en ses demandes reconventionnelles ;
Condamne Monsieur Jean-Pierre X... à lui payer :-800 € à titre de dommages et intérêts sur le fondement du dernier alinéa de l'article L 122-3-8 du Code du Travail ;-85 € en remboursement d'un trop perçu de salaire ;

Condamne Monsieur X... aux entiers dépens d'appel et à verser à Monsieur Y... une indemnité de 700 € au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
LE GREFFIERLE PRESIDENT
E. GOULARDB. DEROYER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 07/00837
Date de la décision : 28/03/2008
Type d'affaire : Sociale

Références :

ARRET du 20 octobre 2010, Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 20 octobre 2010, 09-40.703, Inédit

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes d'Avranches, 23 février 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.caen;arret;2008-03-28;07.00837 ?
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