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30/01/2007 | FRANCE | N°06/2086

France | France, Cour d'appel de Caen, Chambre civile 1, 30 janvier 2007, 06/2086


AFFAIRE : N RG 06/02086Code Aff. : ARRET N J.V. J.B.

ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance d'ARGENTAN en date du 11 Mai 2006
COUR D'APPEL DE CAENPREMIERE CHAMBRE - SECTION CIVILEARRET DU 30 JANVIER 2007

APPELANTS :
Monsieur Edouard X... et Madame Mary Y... épouse X......

représentés par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avouéassistés de Me LEPELLETIER, avocat au barreau d'ARGENTAN

INTIMES :
Madame Bernadette A... épouse B......

représentée par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués à la Courassistée de la SCP GIROT - LE BRAS,

avocats au barreau d'ARGENTAN

Monsieur Pierre C... et Madame Geneviève D... épouse C......

repr...

AFFAIRE : N RG 06/02086Code Aff. : ARRET N J.V. J.B.

ORIGINE : Décision du Tribunal de Grande Instance d'ARGENTAN en date du 11 Mai 2006
COUR D'APPEL DE CAENPREMIERE CHAMBRE - SECTION CIVILEARRET DU 30 JANVIER 2007

APPELANTS :
Monsieur Edouard X... et Madame Mary Y... épouse X......

représentés par la SCP PARROT LECHEVALLIER ROUSSEAU, avouéassistés de Me LEPELLETIER, avocat au barreau d'ARGENTAN

INTIMES :
Madame Bernadette A... épouse B......

représentée par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués à la Courassistée de la SCP GIROT - LE BRAS, avocats au barreau d'ARGENTAN

Monsieur Pierre C... et Madame Geneviève D... épouse C......

représentés par la SCP TERRADE DARTOIS, avouéassistés de la SCP JOUBERT et ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS plaidant par Me NOSTEN

Maître Jacques F..., Notaire associé...

représenté par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avouéassisté de Me VALERY, avocat au barreau de CAEN

Vu la communication de la procédure à Monsieur le Procureur Général
DEBATS : A l'audience publique du 04 Décembre 2006 tenue, sans opposition du ou des avocats, par M. VOGT, Conseiller, chargé du rapport, qui a rendu compte des débats à la Cour
GREFFIER : Madame GALAND
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
M. BOYER, Président de Chambre, Madame BEUVE, Conseiller, M. VOGT, Conseiller, rédacteur,

ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 Janvier 2007 et signé par M. BOYER, Président de Chambre, et Madame GALAND, Greffier
Exposé de la procédure et des demandes
Par décision contradictoire en date du 11 mai 2006 (affaire no 05/00039), le Tribunal de Grande Instance d'Argentan a :* débouté les époux X... de leur demande tendant à voir déclarer parfaite à leur profit la vente de la parcelle B (située au bord nord-est d'une rivière formant lac à Rabodanges), et de leur demande en dommages et intérêts,* débouté Mme B... (propriétaire du terrain litigieux), de sa demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,* débouté les époux C... (acquéreurs des deux parcelles A et B, litigieuses) de leurs demandes en dommages et intérêts pour procédure abusive,* déclaré sans objet l'appel en garantie dirigé contre Me F... (notaire mandataire du vendeur, puis intervenu pour le compromis de vente sous seings privés du 21 décembre 2004),* débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,* condamné les époux X... à payer, outre les dépens de l'instance, les sommes suivantes sur le fondement de l'articles 700 du Nouveau Code de procédure civile- à Mme B..., 1500 EUR,- aux époux C..., 1500 EUR,- à Me F..., 1500 EUR.

Suite à l'appel des époux X..., régularisé le 6 juillet 2006 et à la demande de leur avoué, reçue le 26 juillet 2006, d'une issue rapide, information a été donnée par avis du 28 juillet 2006 de la fixation de l'affaire, en conseiller rapporteur, à l'audience du 4 décembre 2006, en application des dispositions des articles 910 et 760 du Nouveau Code de procédure civile.
Les dernières conclusions ont été régularisées* le 8 novembre 2006 par Mme Bernadette B..., intimée,* le 23 novembre 2006 par Me Jacques F..., intimé,* le 30 novembre 2006 par les époux Edouard X..., appelants,* le 4 décembre 2006, jour de l'audience, sans opposition des autres parties, par les époux C..., intimés.

Par visa du 29 novembre 2006, le M. le Procureur Général, à qui l'affaire a été communiquée, s'en est rapporté.
L'affaire a été plaidée en cet état à l'audience du 4 décembre 2006, sans opposition des parties.
Motivation
L'existence d'une publication de l'assignation à la Conservation des Hypothèques n'est pas discutée dans son principe (sous réserve de ce qui sera énoncé par le notaire).
Sur la chronologie des faits
Des pièces communiquées, résultent les données suivantes :
* 28 octobre 2004 : M. C... visite, en compagnie d'un négociateur » de l'Étude de Me F..., les deux terrains litigieux, pour lesquels il manifeste son intention de les acquérir, selon sa lettre manuscrite en date du 2 novembre 2004, que le notaire déclare lui avoir été alors remise.
* vendredi 29 octobre 2004 : le notaire écrit à diverses personnes intéressées, dont M. H... et M. X..., la lettre dont la teneur suit :
Je vous informe que Madame B... désire vendre son terrain situé au ROTOURS, de la façon suivante :Parcelle A pour une superficie d'environ 6750 m² au prix de 46 000 EUR net vendeur.Parcelle B pour une superficie d'environ 7050 m² au prix de 48 000 EUR net vendeur.Je vous joins le plan de la division future sur la parcelle dite B est visible, en bordure de route, à l'opposé de la rivière, une construction, selon le plan cadastral Compte-tenu du nombre d'acquéreurs, vous voudrez bien m'informer de votre décision.Restant à votre disposition pour tout renseignement complémentaire ».

* 5 novembre 2004 : M. Pierre C... écrit au notaire, par courriel dont la date et le texte même de l'envoi sont contestés par les appelants, en lui manifestant son intention d'acquérir la parcelle riveraine du lac sur laquelle est sise une maison en bordure de route pour le prix de 55 OOO euros net vendeur. Veuillez communiquer cette proposition au vendeur ».
* 5 novembre 2004 : le notaire envoie aux époux B... l'offre d'acquisition des époux C..., en se tenant à leur disposition pour tout renseignement complémentaire.
* 8 novembre 2004 : les époux X..., d'une part, les consorts H... et B... (mariage en cours de procédure ?), d'autre part, envoient, chacun de leur côté, une lettre recommandée au notaire dont l'accusé de réception postal a été signé le 9, pour l'acquisition, respectivement, de la parcelle A, et de la parcelle B ; pour autant, chaque couple déclare que son offre est indissociable de celle de l'autre, en précisant de façon identique : elles doivent donc être acceptées toutes les deux ».
* 10 novembre 2004 : un autre particulier, habitant sur place, fait une offre globale d'un montant de 102 000 EUR pour les deux parcelles, en précisant que son fils et son beau-frère sont également intéressés.
* 12 novembre 2004 : le notaire accuse réception de l'offre de M. H..., et donne une précision sur une question d'urbanisme.
* 2 décembre 2004 : M. H... (en y associant sa compagne) rappelle, par lettre recommandée adressée au Notaire (avec copie simple notamment à Mme B...), sa réponse à la proposition du 29 octobre 2004, en faisant valoir qu'il s'agissait d'une acceptation sans réserve » sur la chose et sur le prix, de sorte que rien ne s'opposerait, selon lui, à cette vente.
* 6 décembre 2004 : le notaire accuse réception du courrier de M. H... (en y associant sa compagne), et indique le transmettre à Mme B....
* 10 décembre 2004 : le notaire donne connaissance à Mme B... du résultat d'une consultation de son centre d'études juridiques (le CRIDON »), dont il résulte que, en matière d'offre et d'acceptation, c'est la théorie de l'émission qui prévaut », et que, d'autre part, les offres de Messieurs X... et H... sont assorties d'une condition à laquelle vous n'aviez pas soumis votre proposition ».
* 21 décembre 2004 : régularisation d'un compromis de vente d'immeubles entre Mme A..., retraitée, épouse de M. B..., venderesse, et M. Pierre C..., auteur illustrateur, et son épouse Mme Geneviève D..., coloriste, solidairement acquéreurs, portant sur les deux parcelles, pour un montant total de 110 000 EUR, le prix étant fixé à la moitié pour chacune des parcelles, frais d'acquisition en sus.
* 23 décembre 2004 : le notaire informe M. H... que Mme B... a accepté la première proposition reçue par elle, en précisant que la proposition écartée par ailleurs était assortie d'une condition suspensive ».
Sur la formation du contrat de vente
Les appelants soutiennent exactement que l'offre formulée le 29 octobre 2004 par le mandataire du vendeur n'est pas l'invitation à des pourparlers, mais, sur la base du prix fixé par le vendeur pour chacune des deux parcelles divisées, la demande faite aux personnes intéressées de l'informer de leur décision d'acquérir ou non, au moins l'une des parcelles décrites au prix spécifié.
S'agissant d'une matière soumise au consensualisme, l'échange des consentements marquant l'accord du vendeur et de l'acquéreur sur la chose et le prix peut se manifester d'une façon quelconque, dès lors que la méthode choisie est acceptée par l'autre partie.
Sur la base d'une première manifestation écrite du 2 novembre 2004, M. Pierre C... a envoyé le courriel discuté en date du 5 novembre 2004.
Cette formalisation, marquant un accord sur la chose et le prix aussi précis que l'offre du vendeur, existe en tant que fait juridique à l'égard des tiers (Civ. 3, 5 mai 1982, Bull. no 116 ; Civ. 3, 2 juillet 1997, Bull. no 161), à qui il incombe de démontrer sa fausseté.
Les appelants n'établissent pas cette fausseté au-delà de la pétition, indiscutable, selon laquelle tout fait commis par l'homme peut ne pas révéler une absolue vérité.
Dès lors que M. C..., si ce n'est aussi son épouse, est engagé, selon le vendeur, dans cet accord de volontés, les offres séparées mais indissociables des autres candidats acquéreurs se trouvent dépourvues d'effet (ainsi que le premier juge l'a retenu).
La proximité temporelle des différentes propositions reçues par le vendeur ont certes pu susciter de prudentes hésitations du notaire, au point de le conduire à consulter un organisme juridique spécialisé de référence, dont l'avis a d'ailleurs été suivi ; cette hésitation, somme toute compréhensible, ne remet pas en cause la validité de la position, finalement arrêtée, de vendre aux époux C..., au moins aux mêmes conditions de prix que celles offertes par l'acquéreur.
Ensuite, rien ne fait obstacle à ce que les époux C... et Mme B... décident de négocier les deux parcelles, selon leur convention du 21 décembre 2004, pour un prix globalement supérieur arrêté dans le cadre de leur libre discussion, résultant de l'avantage, pour l'acquéreur, d'obtenir une parcelle plus importante (tant pour la valorisation de l'ensemble que pour la tranquillité à l'égard du voisinage et des activités nautiques, notamment pour la création artistique qui est l'activité professionnelle des époux C...), mais, en contrepartie, à des conditions suspensives plus rigoureuses pour le vendeur, dans le cadre d'un équilibre contractuel redevenu à leur libre convention.
Il suffira d'ajouter* que le compromis du 21 décembre 2004 existe tout autant comme fait juridique à l'égard des tiers,* que la publication d'une assignation ne vaut pas vente en elle-même mais fournit une information sur le litige à ceux qui n'y sont pas partie, et, serait-elle régulière et complète, ne peut valoir vente, en l'espèce, dès lors que l'offre indissociable des autres acquéreurs est inopérante, la vente étant déjà parfaite pour l'une des parcelles.

De ce chef, le jugement entrepris sera donc confirmé.
Sur l'appel en garantie de Mme B... contre Me F...
Cette demande subsidiaire, présentée dans l'hypothèse où la vente litigieuse tournerait judiciairement à l'avantage des époux X..., est sans objet.
De ce chef, le jugement entrepris sera donc confirmé.
Sur la faute commise par le vendeur et son mandataire, selon les acquéreurs
Dans le cadre de leur demande subsidiaire, les appelants, débiteurs en preuve, n'indiquent pas en quoi les conditions de la formation du contrat de vente avec les époux C... constitueraient un comportement tout à fait déloyal de Madame B... et de son mandataire dans les négociations contractuelles ». Le grief étant supposé, mais non établi, le préjudice invoqué ne peut donner lieu à indemnisation.
Le jugement entrepris, en ce qu'il déboute les époux X... de leur demande de dommages et intérêts, sera confirmé.
Sur les demandes de Mme B... à l'encontre des époux X...
Mme B... fait valoir que l'acte de vente devait être signé le 31 janvier 2006. Elle ne précise pas en quoi l'existence d'un droit litigieux s'opposait à une telle signature, et moins encore depuis la décision du premier juge en date du 11 mai 2006, ayant autorité de la chose jugée dès son prononcé conformément à l'article 480 du Nouveau Code de procédure civile.
Elle sera donc déboutée de ses demandes indemnitaires, sauf l'appréciation, en équité, relative aux frais irrépétibles qu'elle a pu exposer.
De ce chef, le jugement entrepris sera donc confirmé.
Sur l'appel incident des époux C... à l'encontre des époux X...
Les époux C... expliquent avoir mis en vente leur maison de la région parisienne, compte-tenu de l'acquisition du terrain pour en faire leur résidence principale.
Le notaire (dont la responsabilité est recherchée à titre subsidiaire) observe que les époux C... produisent, à cet effet, un mandat de vente de leur immeuble, donné dès le 4 janvier 2004, en précisant que la maison serait libre en juillet (2004), soit à une date bien antérieure à la visite des parcelles litigieuses, déclarée faite le 28 octobre 2004.
De plus, les époux X... font justement valoir l'attentisme des époux C... à l'égard de Mme B..., dès lors que ces deux parties se prévalent de la régularité des conventions formées les 5 novembre puis 21 décembre 2004.
Ensuite, les époux C... voyaient leur situation confortée par l'autorité s'attachant au jugement contradictoire du 11 mai 2006, selon l'article 480 du Nouveau Code de procédure civile.
En conséquence, les époux C... ne justifient pas, la contestation des époux H... aurait-elle été fautive, d'un lien causal entre l'absence de réalisation du compromis de vente et leurs troubles de jouissance, notamment celle occasionnée à la création artistique.
Le jugement entrepris, en ce qu'il déboute les époux C... de leur demande de dommages et intérêts, sera donc confirmé.
Sur les autres demandes
Parties perdantes dans la substance de leur appel principal, les appelants seront tenus des dépens ainsi que de payer aux intimés une indemnité équitable pour les frais irrépétibles qu'ils ont pu exposer pour défendre sur l'instance.
Par ces motifsLa Cour,statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Rejette, en tant que de besoin, les demandes indemnitaires autres que celles présentées par les intimés au titre des frais irrépétibles,
Condamne solidairement Monsieur et Madame X... à payer sur le fondement des dispositions de l'articles 700 du Nouveau Code de procédure civile une indemnité complémentaire d'un montant de 1500 EUR, aux époux C... unis d'intérêt, et également à Mme Bernadette B... et à Me F..., à chacun d'eux,
Condamne solidairement Monsieur et Madame X... aux dépens d'appel,
Accorde* à la SCP Mosquet Mialon d'Oliveira et Leconte, Avoués,* à la SCP Terrade et Dartois, Avoués,* à la SCP Grandsard et Delcourt, Avoués,droit de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du Nouveau Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT
C. GALAND J. BOYER


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 06/2086
Date de la décision : 30/01/2007
Type d'affaire : Civile

Références :

Décision attaquée : Tribunal de grande instance d'Argentan, 11 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.caen;arret;2007-01-30;06.2086 ?
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