AFFAIRE : N RG 06/01218 Code Aff. : ARRÊT N ALF NP ORIGINE : APPEL EN LA FORME DE CONTREDIT CONTRE LA DECISION en date du 05 Avril 2006 du Tribunal de Commerce de CAEN COUR D'APPEL DE CAENPREMIÈRE CHAMBRE - SECTION CIVILE ET COMMERCIALEARRÊT DU 30 NOVEMBRE 2006 APPELANTE EN LA FORME DE CONTREDIT :LA SAS CSFZI route de Paris14120 MONDEVILLEprise en la personne de son représentant légal représentée par la SCP CREANCE, avocats au barreau de CAENINTIMEE EN LA FORME DE CONTREDIT :LA SARL NOVIDIS18 boulevard Albert 1er20000 AJACCIO (CORSE)prise en la personne de son représentant légal représentée par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avouésassistée de Me Alain PIREDDU, avocat au barreau de PARISCOMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :Monsieur LE FEVRE, Président, rédacteur Madame HOLMAN, Conseiller, Madame BOISSEL DOMBREVAL, Conseiller DÉBATS : A l'audience publique du 19 Octobre 2006 Rapport oral de M. LE FEVRE, Président,
GREFFIER : Mme LE GALL, greffier, lors des débatsARRÊT prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 30 Novembre 2006 et signé par Monsieur LE FEVRE, Président, et Mme LE GALL, Greffier
La Cour,
Vu l'ordonnance du 5 avril 2006 du Président du Tribunal de commerce de CAEN qui, statuant sur une difficulté de constitution de tribunal arbitral à l'occasion d'un litige entre la SAS CSF et la SARL NOVIDIS relatif à l'exécution d'un contrat de franchise, a notamment donné acte à NOVIDIS de ce qu'elle avait désigné le professeur Didier FERRIER en qualité d'arbitre, récusé le professeur Patrick X... en qualité d'arbitre désigné par CSF, condamné CSF à payer à NOVIDIS 2.500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu le recours en la forme du contredit formé par la SAS CSF, limité Ã
la disposition de l'ordonnance qui a récusé l'arbitre désigné par elle, M. X... et ses conclusions du 11 octobre 2006 par lesquelles elle demande à la Cour de prononcer la nullité de l'ordonnance en ce qu'elle a récusé le professeur X... ; condamner NOVIDIS à lui payer 2.500 ç sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Vu les conclusions du 14 septembre 2006 de la SARL NOVIDIS qui demande à la Cour de déclarer irrecevable le contredit et subsidiairement la voie de recours exercée par CSF ; subsidiairement débouter CSF de toutes ses demandes, plus subsidiairement, évoquant, lui donner acte de ce qu'elle désigne le professeur Didier FERRIER en qualité d'arbitre et réclame en tout état de cause 5.000 ç au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ; * * *
Attendu que CSF fonde son recours en annulation sur l'excès de pouvoir, alléguant d'une part que seul le président du Tribunal de grande instance et non celui du Tribunal de commerce, était compétent pour prononcer la récusation d'un arbitre, d'autre part que cette récusation ne pouvait être prononcée sans que l'arbitre soit appelé en la cause ; que NOVIDIS reconnaît qu'en dépit des termes de l'article 1457 du nouveau code de procédure civile le recours en annulation pour excès de pouvoir est possible, en application des principes directeurs du procès, même lorsque l'ordonnance n'a pas dit n'y avoir lieu à désignation d'un arbitre, mais qu'elle soutient que le contredit est irrecevable ;
Attendu que l'article 1457 du nouveau code de procédure civile définissant la forme du recours est applicable à tout recours contre une ordonnance statuant sur une difficulté de constitution du Tribunal arbitral ; que cette forme est l'appel "formé, instruit et jugé comme en matière de contredit de compétence" ; que CSF a inexactement qualifié son recours dans son acte initial de
"contredit", erreur rectifiée dans les conclusions du 11 octobre 2006, et même en page 2 de l'acte de "contredit" du 19 avril 2006 où le recours est qualifié d'appel nullité en la forme du contredit ; mais que dès lors que les formes du contredit ont été respectées, que le recours est instruit et jugé comme en matière de contredit, l'erreur initiale de vocabulaire n'a causé aucun préjudice à NOVIDIS, qui n'en allègue d'ailleurs pas ; que le recours est recevable ;
Attendu que le président du Tribunal de commerce de CAEN a, par l'ordonnance susvisée, prononcé la récusation de M. X... sur demande de NOVIDIS ; que la récusation d'un arbitre est prévue par l'article 1463 du nouveau code de procédure civile ; qu'il dispose que les difficultés sur ce point sont portées devant le président du Tribunal compétent ; que ce tribunal, en l'absence d'attribution d'une compétence exclusive au président du Tribunal de grande instance en matière de récusation, est celui qui est compétent pour connaître des difficultés de composition du Tribunal arbitral en application de l'article 1444 du même code ; qu'il n'est pas contesté que la clause compromissoire, reproduite dans les conclusions de NOVIDIS, ait donné compétence au Président du Tribunal de commerce de CAEN pour désignation des arbitres faute d'accord des parties ; qu'aucun texte, principe général du droit ou du procès ou toute autre règle n'exclut la compétence du président du Tribunal de commerce compétent en application de l'alinéa 2 de l'article 1444 du nouveau code de procédure civile pour statuer sur la demande de récusation d'un arbitre ;
Attendu qu'un arbitre exerce des fonctions de juge ; que les règles applicables à la récusation d'un juge sont définies aux article 341 et suivants du nouveau code de procédure civile ; qu'aucun texte ne prévoyant de règles spéciales dérogatoires pour les arbitres, sous réserve de ce qui est dit précédemment, ces règles sont applicables
aux arbitres ; qu'il est constant qu'en cas de récusation, le juge n'est pas partie à la procédure ;que la récusation est essentiellement un incident de la procédure principale relative au litige que le juge ou l'arbitre doit ou devait juger ; que ce dernier ne saurait avoir un procès avec une partie à l'occasion du litige à juger, ce qui serait un cas de récusation en application du 4o de l'article 341 du nouveau code de procédure civile ; que le fait qu'un arbitre, contrairement à un juge "étatique" soit spécialement rémunéré pour l'arbitrage et ait donc un intérêt personnel à siéger, ne saurait suffire à fonder une dérogation à ces règles ; que le Président du Tribunal de commerce n'avait pas à appeler en la cause M. X... ; qu'il pouvait l'entendre ou lui demander de présenter des observations dans une note écrite mais qu'ayant fondé sa décision, non sur des fautes de comportement, mais exclusivement sur des éléments objectifs et des faits incontestables, la multiplicité des désignations -trente quatre par des sociétés du groupe CARREFOUR selon les déclarations incontestées de NOVIDIS- et les revenus qu'elles ont générés, le Président, qui disposait au surplus selon toute vraisemblance des courriers échangés entre M. X... et le conseil de NOVIDIS reproduits dans les conclusions de NOVIDIS devant la Cour et dans lesquels M. X... prend position, n'a commis aucun excès de pouvoir en s'en abstenant ;
Attendu qu'il résulte de ce qui précède que le recours de CSF est infondé ; qu'il doit être rejeté ; qu'il est équitable d'accorder à NOVIDIS 2.500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;PAR CES MOTIFS
- Dit recevable le recours, constituant un appel en la forme du contredit, de la SAS CSF contre l'ordonnance susvisée du 5 avril 2006 du Président du Tribunal de commerce de CAEN ;
- Le dit non fondé ;
- Déboute la SAS CSF de toutes ses demandes autres que sur la recevabilité de son appel ;
- La condamne à payer à la SARL NOVIDIS la somme supplémentaire de 2.500 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.LE GREFFIER
LE PRESIDENTN. LE GALL
A. LE FEVRE