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10/11/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000007628411

France | France, Cour d'appel de Caen, Ct0107, 10 novembre 2006, JURITEXT000007628411


AFFAIRE : N RG 05/01823 Code Aff. : ARRET N C.P ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes de FLERS en date du 09 Mai 2005 COUR D'APPEL DE CAEN TROISIEME CHAMBRE - SECTION SOCIALE 1ARRET DU 10 NOVEMBRE 200 APPELANT :Monsieur Serge X... ... Comparant en personne, assisté de Monsieur Y..., délégué syndical INTIMEE :SA CP JARDIN 18 Rue Eugène Mascart 59570 BAVAY Représentée par Me LACHENY, substitué par Me GEORGES, avocats au barreau de LILLE DEBATS : A l'audience publique du 21 Septembre 2006, tenue par Monsieur POUMAREDE, Président, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a,

les parties ne s'y étant opposées, siégé en présence de Mm...

AFFAIRE : N RG 05/01823 Code Aff. : ARRET N C.P ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes de FLERS en date du 09 Mai 2005 COUR D'APPEL DE CAEN TROISIEME CHAMBRE - SECTION SOCIALE 1ARRET DU 10 NOVEMBRE 200 APPELANT :Monsieur Serge X... ... Comparant en personne, assisté de Monsieur Y..., délégué syndical INTIMEE :SA CP JARDIN 18 Rue Eugène Mascart 59570 BAVAY Représentée par Me LACHENY, substitué par Me GEORGES, avocats au barreau de LILLE DEBATS : A l'audience publique du 21 Septembre 2006, tenue par Monsieur POUMAREDE, Président, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé en présence de Mme PONCET, Conseiller, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré GREFFIER : Madame POSE.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur POUMAREDE, Président Madame CLOUET, Conseiller, Mme PONCET, Conseiller, rédacteur ARRET prononcé publiquement le 10 Novembre 2006 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile et signé par Monsieur POUMAREDE, Président, et Madame POSE, Greffier 05/1823 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No2 Faits et prétention des parties

Le 21 août 2001, Monsieur Serge X... a été embauché par la SA CP Jardin en qualité de délégué commercial.

Le 31 octobre 2003, il a adressé à son employeur un courrier l'informant de ce qu'il rompait le contrat de travail.

Le 20 avril 2004, Monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes de FLERS aux fins d'obtenir diverses sommes à titre de rappel de salaires et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le 9 mai 2005, le conseil de prud'hommes a débouté Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes.

Le 31 mai 2005, Monsieur X... a interjeté appel de ce jugement.

Vu les conclusions oralement soutenues de Monsieur X..., appelant ;

Vu les conclusions oralement soutenues de la SA CP Jardin, intimée.MOTIFS DE LA DECISION1) Sur les demandes de rappel de salaire

1-1 Sur la régularisation du salaire de base

* Par application du salaire minimum conventionnel

La convention collective "produits du sol - négoce et industrie" fixe un salaire minimum mensuel qui se calcule selon la formule suivante, pour les salariés qui bénéficient, comme Monsieur X..., d'un coefficient supérieur ou égal à 220 : salaire minimum mensuel = partie fixe + partie variable x (coefficient - 100).

Il convient donc d'intégrer, pour apprécier si le salaire versé respecte ce minimum, non seulement la partie fixe de salaire mais également la partie variable. En l'absence de restrictions sur ce point, l'ensemble des commissions et des primes doit, au titre de la partie variable, être pris en compte.

Dès lors, le salaire versé à Monsieur X... a toujours été

supérieur au minimum conventionnel. Aucun rappel de salaire n'est donc dû à ce titre.

* Par application des dispositions contractuelles

L'annexe au contrat de travail signée le 11 janvier 2002 prévoit un salaire de base mensuel fixe de 1.126,427 ç. Ce salaire est revalorisé chaque année par rapport à N - 1 en fonction du pourcentage d'augmentation du chiffre d'affaires.

Monsieur X... sollicite une revalorisation à ce titre de ses salaires d'août 2002 à novembre 2003.05/1823 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No3

La comparaison se fait sur les périodes du 1er août au 31 juillet suivant.

Du 1er août 2001 au 31 juillet 2002 le chiffre d'affaires du secteur de Monsieur X... a progressé de 33,24 % ; par rapport à la période précédente ce qui lui ouvre droit à une augmentation de son salaire de base de 106,71 ç.

En août 2002, il aurait donc dû percevoir : 1126,42 + 106,71 =

1233,13 ç et n'a perçu que 1035,92 ç soit un déficit de 197,21 ç. De septembre 2002 à juillet 2003 il aurait également dû percevoir mensuellement 1233,13 ç et n'a perçu que 1106,66 ç. Il a donc subi d'août 2002 à juillet 2003 un manque à gagner de 1588,38 ç.

Du 1er août 2002 au 31 juillet 2003 le chiffre d'affaires du secteur de Monsieur X... a progressé de 9,55 % lui ouvrant droit à une augmentation de son salaire de base de 45,73 ç. Il aurait donc dû percevoir d'août à novembre 2003 :

1233,13 + 45,73 = 1278,86 ç or il n'a perçu que 1152,33 ç en août 2003, et 1172,40 ç en septembre, octobre et novembre 2003. D'août à novembre 2003 son manque à gagner a été de 445,91 ç.

Au total, son manque à gagner est de 2034,29 ç. Cette somme sera ramenée au montant de la demande (1707 ç). S'y ajouteront les congés payés afférents (170,70 ç).

Le jugement sera réformé en ce qu'il a débouté Monsieur X... de cette demande.

1-2 Sur la prime d'objectifs

L'employeur ne conteste pas que l'annexe au contrat de travail signée le 11 février 2002 et intitulée "salaires de base + commissions + primes 2001/2002" a continué à être appliquée après août 2002 or régit donc, après cette date, les rapports entre les parties.

La prime d'objectif y est ainsi définie : "Une prime vous sera versée de 10 % sur le CA - CP - HT des ventes magasins supplémentaires à partir de 310 772,20 ç". Ce chiffre constitue certes le chiffre d'affaires 2000/2001 du secteur ainsi que cela ressort d'autres mentions de cette annexe. Toutefois, la seule référence de cette prime d'objectif c'est ce chiffre contrairement à d'autres primes pour lesquelles la progression à réaliser est définie par rapport à l'année N - 1.

Or l'employeur a choisi de continuer à appliquer cette annexe après la saison 2001-2002 plutôt que de soumettre la saison suivante une nouvelle annexe à la signature de ses salariés comme il l'avait fait l'année précédente. Il n'a pas non plus estimé utile d'actualiser cette annexe par un avenant. Dès lors, la prime d'objectif doit s'appliquer telle qu'elle a été écrite, sa rédaction dépourvue de toute ambigu'té, ne nécessitant pas d'interprétation.

Le chiffre d'affaires de Monsieur X... a été de 453 627 ç sur la période du 1er août 2002 au 31 septembre 2003 soit une progression par rapport au chiffre de référence de 142 854,80 ç ouvrant droit à une prime de 14 285,48 ç. 3955,20 ç lui ayant été réglés à ce titre, restent dus 10330,28 ç outre 1033,03 ç au titre des congés payés.

La SA CP Jardin sera condamné à lui payer ces sommes et le jugement sera réformé sur ce point.

1-3 Sur la prime d'été ou prime ponctuelle

L'annexe du contrat de travail prévoit "un capital national délégués" de 9146,94 ç "à définir au cours de la saison 01/02 pour attribution".05/1823 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No4

Les critères d'attribution de ce capital définis pour la saison 2001/2002 ne sont pas produits. Toutefois, en application de ces critères Monsieur X... qui s'était classé au 6 ème rang des 9 délégués a touché 121,96 ç en raison de la progression du chiffre d'affaires du 1er avril au 30 juin 2002 outre 76,22 ç lié au nombre de "box" vendues.

Par courrier daté du 6 juin 2003 Monsieur X... s'est plaint de n'avoir reçu aucune information concernant cette prime.

Par lettre datée du 24 juin 2003, son employeur répond : "Je fais suite à votre courrier du 6 juin 2006 ;a) prime ponctuelle sur l'avenant de votre contrat signé le 11 janvier 2001 vous trouverez ci-joint les conditions d'attribution de cette prime...".

Le document joint énonçant ces conditions d'attribution est daté du 26 juin 2003.

Dans son courrier daté du 24 juin 2003, la SA CP Jardin n'indique pas avoir antérieurement communiqué ces conditions à son salarié. Elle n'en a pas non plus apporté la preuve au cours de l'instance. Dès lors, le fait qu'existe un autre document du reste non daté où figurent ces mêmes conditions ne saurait permettre d'en conclure que Monsieur X... en avait eu connaissance avant l'envoi du courrier du 24 juin 2003.

Monsieur X... n'a, au vu des éléments produits, eu connaissance des conditions d'attribution de cette prime qu'après le 24 voire

après le 26 juin 2003 soit un mois environ avant la fin de la période de référence qui s'achevait en 2003 au 31 juillet 2003 (et non au 30 juin 2003 comme l'année précédente).

Trois des quatre mois concernés étaient donc déjà écoulés, en ce qui concerne la progression du chiffre d'affaires et deux des trois mois concernés en ce qui concerne la vente des "box".

En communiquant tardivement les conditions d'attribution de cette prime, la SA CP Jardin a manqué à ses obligations contractuelles.

Le préjudice de Monsieur X... n'équivaut pas à un neuvième du capital énoncé dans l'annexe du contrat de travail. En effet, à supposer que ce capital ait été le même pour la saison 2002/2003, et que ce capital soit nécessairement réparti en sa totalité entre les 9 délégués - ce que conteste l'employeur - il demeure que cette répartition n'est pas égalitaire et se fait en fonction des résultats de chacun. Dès lors, le préjudice de Monsieur X... est constitué non par la perte d'un neuvième de ce capital mais par la perte d'une chance d'obtenir un meilleur résultat en connaissant les critères primés par l'employeur.

Compte tenu de la prime obtenue en 2003 (82,26 ç) de celle obtenue en 2002 (198,18 ç) - primes auxquelles s'ajoutaient les congés payés afférents -, la perte de cette chance sera réparée par l'octroi de 130 ç, non comme sollicité, à titre de rappel de salaire mais à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera réformé sur ce point.2) Sur la rupture du contrat de travail

Monsieur X... a rompu le contrat de travail et invoque divers griefs à l'encontre de son employeur.

05/1823 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No5

Si ces griefs s'avèrent fondés et constituer des manquements suffisamment graves pour justifier une rupture, cette rupture produit

les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ; dans le cas contraire, elle produit les effets d'une démission.

Il convient non seulement d'examiner les griefs figurant dans le courrier de rupture envoyé par Monsieur X... mais également ceux qu'il a pu invoquer au cours de l'instance.

Monsieur X... s'est plaint dans sa lettre du 31 octobre 2003 de n'avoir reçu aucune réponse satisfaisante à son courrier du 26 juin 2003 concernant l'application de divers points de son contrat de travail, éléments repris dans un courrier du 10 octobre, et considère qu'il lui est en conséquence difficile de connaître ses conditions de rémunération. Dans ses écritures, Monsieur X... n'évoque aucun autre grief.

Dans un courrier daté du 2 octobre 2003, la SA CP Jardin évoque un entretien que Monsieur X... qui s'est déroulé le 4 septembre 2003 au cabinet comptable en présence notamment du dirigeant et au cours duquel ont été analysées les fiches de paie de Monsieur X... depuis juillet 2002.

A cette occasion, Monsieur X... a reçu certaines explications et au vu de son courrier du 10 octobre 2003 aurait obtenu la promesse d'une revalorisation de son salaire de base. Toutefois, dans ce dernier courrier il continue de poser des questions concernant le calcul de sa prime de progression et le versement de la prime d'été.

Des explications ont pu être données oralement à Monsieur X... lors de l'entretien du 4 septembre 2003. Toutefois, elles n'ont pas répondu à la totalité de ces questions. De surcroît, ces explications n'ont pu être satisfaisantes puisqu'il ressort des éléments analysés dans le chapitre concernant les rappels de salaires que la revalorisation du salaire de base en fonction de la progression du chiffre d'affaires n'a pas été faite, que la prime d'objectif n'a pas été calculée conformément aux prévisions contractuelles, enfin que

les critères d'attribution de la prime d'été n'ont pas été communiqués à Monsieur X... avant la période de référence.

Dès lors, Monsieur X... n'était pas en mesure comme il aurait dû l'être, de connaître son salaire de base et les critères d'attribution de ses primes à la lecture de son contrat de travail, de l'annexe applicable et en fonction de notes de service diffusées en temps utile.

Les griefs qu'il allègue sont donc réels. A tout le moins l'employeur a en effet fait preuve de négligences en ne communiquant pas en temps utile à son salarié les critères d'attribution d'une prime et a commis des erreurs en appliquant de manière erronée l'annexe du contrat de travail. Ces manquements sont graves en ce qu'ils ont privé le salarié de la connaissance nécessaire de sa rémunération et ont en outre conduit au versement d'une rémunération inférieure à ce que devait l'employeur. Ces griefs justifient la rupture du contrat de travail.

Cette rupture produira donc les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La somme réclamée au titre de l'indemnité légale de licenciement n'est pas contestée et sera donc retenue (388 ç).05/1823 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No6

La SA CP Jardin a plus de 11 salariés, Monsieur X... avait plus de deux ans d'ancienneté, l'indemnité qui sera octroyée à Monsieur X... est donc d'au moins six mois de salaire. Monsieur X... avait 36 ans au moment de la rupture du contrat de travail, il travaillait depuis 28 mois dans cette entreprise et ne fournit aucun élément sur sa situation depuis la rupture du contrat de travail.

Le salaire annuel brut en 2003 de Monsieur X... a été de 26.675,95 ç au vu du cumul figurant sur son bulletin de salaire de décembre 2003 ; et aurait dû être supérieur compte tenu des rappels de salaire alloués par la présente décision.

Compte tenu de ces divers éléments, il y a lieu de fixer l'indemnité à la somme demandée soit 16.180 ç.

Le jugement sera réformé sur ce point.

La rupture du contrat de travail étant intervenue à l'initiative du salarié, l'employeur ne pouvait organiser un entretien préalable à cette rupture. Monsieur X... sera donc débouté de sa demande indemnitaire pour non respect de la procédure, cette indemnité n'étant de surcroît pas cumulable avec l'indemnité précédemment allouée s'agissant d'un salarié ayant plus de deux ans d'ancienneté travaillant dans une entreprise employant au moins 11 salariés.

Le jugement sera confirmé sur ce point.3) Sur les points annexes

Les sommes allouées à titre de rappels de salaires produiront intérêts à compter du 22 avril 2004 date à laquelle la SA CP Jardin a accusé réception de sa convocation devant le bureau de conciliation.

Les sommes allouées à titre de dommages et intérêts produiront intérêts à compter de la notification de la présente décision.

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X... la charge de ses frais irrépétibles, de ce chef, la SA CP Jardin sera condamnée à lui verser 1.200 ç.PAR CES MOTIFSLA COURCondamne la SA CP

Jardin à verser à Monsieur X... :

- à titre de rappels de salaires :- 1707 ç outre 170,70 ç au titre des congés payés afférents pour la revalorisation du salaire de base ,- 10.330,28 e outre 1.033,03 ç au titre des congés payés afférents pour la prime d'objectifs avec intérêts au taux légal à compter du 22 avril 2004 ;Condamne la SA CP Jardin à verser à Monsieur X... à titre de dommages et intérêts :

- 130 ç,

- 16.180 ç,avec intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt ;05/1823 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No7Condamne la SA CP Jardin à verser à Monsieur X... 1.200 ç en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;Infirme en conséquence le jugement sur ces différents points ;Le confirme pour le surplus en ce qu'il a débouté Monsieur X... de ses autres demandes.LE GREFFIER

LE PRESIDENTV. POSE

A. POUMAREDE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Caen
Formation : Ct0107
Numéro d'arrêt : JURITEXT000007628411
Date de la décision : 10/11/2006

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : M. Poumarede, président

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.caen;arret;2006-11-10;juritext000007628411 ?
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