AFFAIRE : N RG 05/01635 Code Aff. : ARRET N C.P ORIGINE : Décision du Conseil de Prud'hommes d'ARGENTAN en date du 14 Avril 2005 COUR D'APPEL DE CAEN TROISIEME CHAMBRE - SECTION SOCIALE 1 ARRET DU 20 OCTOBRE 2006 APPELANTE : Madame Line X... ... Comparante en personne, assistée de Monsieur Y..., délégué syndical INTIMEE :
NORMANDIE FIXATIONS Zone Industrielle 61570 MORTREE Représentée par Me BLAIS, avocat au barreau d'ARGENTAN, en présence de Madame DE Z..., gérante DEBATS : A l'audience publique du 04 Septembre 2006, tenue par Madame CLOUET, Conseiller, Magistrat chargé d'instruire l'affaire lequel a, les parties ne s'y étant opposées, siégé seul, pour entendre les plaidoiries et en rendre compte à la Cour dans son délibéré GREFFIER : Madame A... COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : Monsieur POUMAREDE, Président, Madame CLOUET, Conseiller, rédacteur Mme PONCET, Conseiller, ARRET prononcé publiquement le 20 Octobre 2006 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinea de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile et signé par Monsieur POUMAREDE, Président, et Madame A..., Greffier 05/1635 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No2 Par contrat de travail à durée déterminée conclu pour une durée d'un an Madame X..., qui avait déjà travaillé pour le compte de cette société pendant un an, a été embauchée par la société NORMANDIE FIXATIONS à compter du 22 novembre 1999 en qualité d'opératrice de saisie. Plusieurs contrats de travail à durée déterminée se sont ensuite succédé sans solution de continuité puis, après l'échéance du dernier de ces contrats, les parties ont conclu un contrat à durée indéterminée à compter du 1er janvier 2001. Madame X... a été licenciée pour motif économique par lettre du 8 novembre 2003. Soutenant d'une part que les contrats de travail à durée déterminée qui s'étaient succédé sans respect de
la règle du tiers temps devaient être requalifiés en contrat à durée indéterminée et contestant la légitimité de son licenciement, le 23 mars 2004 elle a saisi la juridiction prud'homale pour faire valoir ses droits. Vu le jugement rendu le 10 mars 2005 par le conseil de prud'hommes d'Argentan qui a statué en ces termes : "Requalifie le contrat de travail du 22 novembre 1999 en contrat à durée indéterminée, Condamne la SA NORMANDIE FIXATIONS à payer à Madame Line X... :
- 1.241,57 ç (mille deux cent quarante et un euros et cinquante sept centimes) au titre des dommages et intérêts pour la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée et pour non respect de la procédure de licenciement ;
- un rappel de salaire au titre de la prime d'ancienneté à compter du 22 novembre 2001 de 3%, à compter du 22 novembre 2002 de 4% et à compter du 22 novembre 2003 de 5% et cela jusqu'au 9 janvier 2004 ;
- 150 ç (cent cinquante euros) au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile; Rejette le surplus de demandes de Madame Line X... ; Rappelle que l'exécution provisoire est de droit dans la limite de neuf mois de salaire ; Condamne la SA NORMANDIE FIXATIONS au paiement des entiers dépens".
Vu les conclusions déposées, régulièrement communiquées et oralement soutenues par Madame X..., appelante ; Vu les conclusions déposées, régulièrement communiquées et oralement soutenues par la société NORMANDIE FIXATIONS, intimée qui forme appel incident ; MOTIFS DE LA DÉCISION
- sur l'indemnité pour requalification Le contrat de travail à durée déterminée conclu le 22 novembre 1999 a fait suite à un contrat de travail à durée déterminée conclu pour une durée d'un an à compter du 28 octobre 1998. Il est ainsi manifeste que le délai de carence prévu par l'alinéa 1 de l'article L 122-3-11 du code du travail n'a pas été
respecté. La violation de ce texte doit, en application de l'article L 122-3-13 être sanctionnée par la requalification du contrat considéré et par l'octroi de l'indemnité de requalification allouée par les premiers juges. Le jugement déféré sera confirmé de ce chef. 05/1635 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No3 - sur la cessation des relations contractuelles
[* sur la procédure de licenciement Si la lettre de convocation à l'entretien préalable ne comportait pas l'adresse des services où la liste des conseillers du salarié peut être consultée ce qui constitue une irrégularité ayant nécessairement causé un préjudice à Madame X..., le jugement entrepris a justement considéré que ce préjudice était limité puisque l'intéressée avait pu se faire assister à l'entretien préalable et que la somme de 15 euros en constituait une juste réparation.
*] sur la cause du licenciement La lettre de licenciement est ainsi motivée : " notre société a fait l'objet d'une baisse d'activité importante, nous vous avons proposé un emploi à temps partiel, mais suivant les conseils de votre conseiller syndical Monsieur Didier Y... vous l'avez refusé. De plus nos difficultés de trésorerie ne vont qu'en augmentant du fait du résultat d'un contrôle fiscal. Nous sommes dans l'obligation de supprimer votre poste d'opératrice de saisie". Ce motif ne caractérise pas une cause réelle et sérieuse. En effet la baisse d'activité n'est pas établie puisqu'il résulte du bilan de l'année 2003 que cette année là le chiffre d'affaires net (624 908 euros ) a été supérieur de 58 739 euros à celui de l'année précédente ( 566 169 euros). Par ailleurs, s'il apparaît que cet exercice s'est révélé déficitaire ( - 36 034 ç), le résultat d'exploitation (47 892 ç) était en progression de 4 696 euros par rapport à l'année précédente et le résultat net de l'exercice résulte
essentiellement d'une progression des charges (+ 103 586 euros) constituées principalement de l'impôt sur les sociétés qui n'avait pas été payé au cours de l'exercice 2002 et de charges exceptionnelles dont certaines ne sont nullement explicitées (charges exceptionnelles sur opérations en capital). Si, comme l'énonçait la lettre de licenciement, la société NORMANDIE FIXATIONS avait été réellement confrontée à une baisse importante d'activité ainsi qu'à existence concomitante de difficultés de trésorerie, il aurait pu être admis qu'elle connaissait des difficultés économiques justifiant le licenciement économique de Madame X.... Mais les éléments précités démontrent que tel n'était pas le cas.
Il en résulte que le licenciement n'est pas causé. Du fait de son licenciement intervenu alors qu'elle était âgée de 45 ans Madame X... a perdu le bénéfice d'une ancienneté de trois ans dans un emploi qui lui assurait une rémunération mensuelle de l'ordre de 1200 ç. Elle justifie avoir perçu des allocations de retour à l'emploi jusqu'en juin 2004 soit pendant dix huit mois. Au vu de ces éléments il lui sera alloué la somme de 10 000 euros par application de l'article L 122-14-5 du code du travail . Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
05/1635 TROISIEME CHAMBRE SECTION SOCIALE 1 PAGE No4
- sur la demande au titre du rappel de prime d'ancienneté Il résulte de la combinaison des articles 44 et 37 de la convention collective des industries de la métallurgie de l'Orne qu'après trois ans passés au service de l'employeur le salarié a droit à une prime d'ancienneté de 3% et qu'après quatre ans il a droit à une prime de 4%. Les premiers juges ont donc justement retenu que Madame X... pouvait prétendre à une telle prime à partir du 22 novembre 2001. La décision entreprise doit être confirmée de ce chef. - sur la demande au titre de la priorité de réembauchage L'analyse du registre d'entrée et de
sortie du personnel révèle que l'entreprise n'a procédé à aucune embauche pendant la période durant laquelle Madame X... bénéficiait d'une priorité de réembauchage. Le jugement doit également être confirmé de ce chef.
- sur le solde d'indemnité de licenciement
Il doit être donné acte à la société NORMANDIE FIXATIONS de ce qu'elle a indiqué lors des débats qu'elle acceptait de régler la somme de 270,44 euros à ce titre.
- sur les dépens et les frais irrépétibles Partie perdante la société NORMANDIE FIXATIONS supportera les dépens et il n'est ni inéquitable ni économiquement injustifié de la condamner au paiement d'une indemnité sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
DÉCISION
La Cour,
Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a débouté Madame X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;
Le réformant de ce chef,
Condamne la société NORMANDIE FIXATIONS à payer à Madame X... la somme de 10000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif ;
Donne acte à la société NORMANDIE FIXATIONS de ce qu'elle accepte de verser à Madame X... la somme de 270,44 euros à titre de solde d'indemnité de licenciement;
Y ajoutant,
Condamne la société NORMANDIE FIXATIONS aux entiers dépens et à payer à Madame X... la somme de 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER
LE PRESIDENT V. A...
A. POUMAREDE