AFFAIRE : N RG 05/00911 Code Aff. : ARRET N D.C/MAGC ORIGINE :
Décision du Tribunal de Grande Instance d'AVRANCHES en date du 25 Novembre 2004 COUR D'APPEL DE CAEN PREMIERE CHAMBRE - SECTION CIVILE ARRET DU 12 SEPTEMBRE 2006 APPELANTES : Madame Marthe Marie X... épouse Y... ... Madame Marie Madeleine X... épouse Z... ... représentées par la SCP GRANDSARD DELCOURT, avoués assistées de Me LEVIONNAIS substituant la SELARL THILL - LANGEARD etamp; ASSOCIES, avocats au barreau de CAEN INTIMES : Madame Thérèse X... épouse A... ... Monsieur Julien X... ... représentés par la SCP MOSQUET MIALON D'OLIVEIRA LECONTE, avoués assistés de la SCP CHALARD JAGOU, avocats au barreau d'AVRANCHES Monsieur Alain X... ... non représenté, bien que régulièrement assigné Monsieur Eugène X... ... non représenté, bien que régulièrement assigné Madame Juliette X... épouse B... ... 35590 ST GILLES non représentée, bien que régulièrement assignée Madame Annick X... épouse C... ... non représentée, bien que régulièrement assignée Monsieur Hervé X... ... non représenté, bien que régulièrement assigné Madame Isabelle X... épouse D... ... non représentée, bien que régulièrement
assignée DEBATS : A l'audience publique du 01 Juin 2006 tenue, sans opposition du ou des avocats, par Mme CHERBONNEL, Conseiller, chargée du rapport, qui a rendu compte des débats à la Cour GREFFIER présent aux débats : Madame GALAND COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
M. BOYER, Président de Chambre, Mme CHERBONNEL, Conseiller, rédacteur Madame ODY, Conseiller, ARRET prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 12 Septembre 2006 et signé par M. BOYER, Président de Chambre, et Madame GALAND, Greffier
Vu le jugement du 25 novembre 2004, par lequel le Tribunal de grande instance d'AVRANCHES a :
- ordonné les opérations de compte, liquidation et partage de la succession de Juliette E... veuve X... décédée le 18 février 2002; - désigné pour y procéder Maître F..., Notaire à PONTORSON et Maître G..., Notaire à DUCEY ;
- dit que les notaires désignés calculeront et prendront en compte la créance de salaire différé de Madame Thérèse A... pour la période du 7 décembre 1966 jusqu'au 31 août 1975 après déduction des périodes suivantes :
- du 2 août 1971 au 22 novembre 1971
- du 3 février au 4 mars 1973
- janvier et février 1974
- du 13 au 29 mars 1974
- du 2 juillet au 25 août 1974
- du 4 janvier au 10 février 1975
- du 19 mars 1975 au 29 mars 1975 ;
- dit que la somme de QUATRE MILLE CINQ CENT SOIXANTE TREIZE EUROS QUARANTE SEPT CENTIMES (4.573,47 ç) déjà perçue par Madame Thérèse A... à titre d'avance sur sa créance de salaire différé sera déduite du total de la somme due ;
- dit que la somme de 60.000 Francs (9.146,94 ç) remise à chacun des enfants sauf Julien X... est dispensée du rapport à la succession;
- débouté les parties de leurs autres demandes ;
- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de partage.
Vu les conclusions prises :
- le 12 décembre 2005 pour Marthe X... épouse Y... et Marie-Madeleine X... épouse Z..., appelantes de cette décision ;
- le 7 mars 2006 pour Thérèse X... épouse A... et Julien X..., portant appel incident.
Régulièrement assignés Eugène X..., Juliette X... épouse B..., Annick X... épouse C..., Alain X..., Hervé X... et D...le X... épouse D..., n'ont pas constitué avoué.
Rapport a été fait à l'audience.
SUR CE,
- Quant à l'appel principal
Il porte sur la créance de salaire différé reconnue à Thérèse A... et il est soutenu que la demande est irrecevable pour cause de prescription, puisque formée plus de 30 ans après l'ouverture de la succession d'Eugène X... (père), ou à tout le moins infondée.
Mais il est attesté par la MSA de LA MANCHE que l'exploitation a d'abord été le fait d'Eugène X..., du 1er juillet 1952 à son décès survenu le 25 juillet 1969, puis de son épouse née Juliette E... du 26 juillet 1969 au 31 décembre 1981.
Ceux-ci ont donc été exploitants successifs et non co-exploitants, de sorte que, si la créance de salaire différé consécutive à un travail sur l'exploitation antérieur au décès d'Eugène X... constitue une dette de la succession de ce dernier, celle résultant de la participation directe et effective à l'exploitation dirigée par Juliette X... constitue une dette de sa succession.
Il s'en déduit que, si la demande de Thérèse A... est irrecevable pour la période du 7 décembre 1966 au 25 juillet 1969, en revanche elle est recevable pour la période postérieure ; qu'en outre, au cas où elle serait fondée, le calcul de la créance relèverait des dispositions de la loi 80-502 du 4 juillet 1980.
Au surplus, quant au fond, il est établi que Thérèse A... à été
immatriculée à la MSA en qualité d'aide familiale (mineure puis majeure) sur l'exploitation du 1er janvier 1965 au 31 août 1975 ; qu'en outre elle a participé, de manière directe et effective, à l'exploitation, hormis pendant les périodes délimitées par le jugement.
Cette participation n'est pas, du reste, en l'état précisément contestée par les appelantes.
Par ailleurs, il n'est pas soutenu que Thérèse A... aurait bénéficié d'une participation aux résultats de cette exploitation (dite d'environ 32 ha), ni même perçu un salaire, ce que ne révèlent pas les relevés de carrière émis tant par la MSA de LA MANCHE que par la CRAM de NORMANDIE.
En outre, il importe de relever que Thérèse est la seconde enfant d'une fratrie de 10, dont 5 étaient âgés de moins de 18 ans au 26 juillet 1969 ; qu'elle a dû périodiquement travailler à l'extérieur ; qu'il est prétendu que Julien a été réglé de sa créance de salaire différé en 1980, par compensation avec ce dont il était redevable à sa mère pour l'achat de son cheptel mort et vif.
Au surplus, alors qu'il doit être retenu que le versement effectué en 1989 par Juliette X... à chacun de ses enfants à l'exception de Julien d'une somme de 60.000 F constitue une libéralité, la circonstance que Thérèse A... n'ait jamais réclamé à sa mère d'être réglée de sa créance née de son travail sur l'exploitation ne peut à elle seule faire considérer qu'elle a été autrement remplie de ses droits, si ce n'est à concurrence de la somme de 30.000 F dite reçue en 1981 ou 1982.
Enfin, il n'est pas établi que Thérèse A... se serait montrée réticente à reconnaître ce règlement, ainsi qu'allégué.
L'appel est donc infondé, hormis s'agissant de la période susindiquée du 7 décembre 1966 au 25 juillet 1969.
- Quant à l'appel incident
Julien X... prétend voir juger que les dites donations de 60.000 F chacune devront être rapportées à la succession.
Il résulte de l'article 843 du Code civil que les donations sont en principe rapportables.
Or, d'une part, il n'a pas été allégué qu'il était dans l'intention de Juliette X... de traiter différemment ses enfants.
D'autre part, il n'a pas été démontré que Julien X... avait "reçu largement sa part" lorsqu'il a pris possession de la ferme laissée par sa mère, ainsi qu'il l'a été prétendu devant le Tribunal.
Du reste, Mesdames Y... et Z... ne le soutiennent plus en cause d'appel.
La demande de Julien X... sera donc accueillie. PAR CES MOTIFS LA COUR,
Réformant la décision entreprise,
Dit la demande de Thérèse A... irrecevable pour la période du 7 décembre 1966 au 25 juillet 1969 ;
Dit que Thérèse A... bénéficie d'une créance de salaire différé pour, sauf les déductions déterminées par la décision entreprise, la période du 26 juillet 1969 au 31 août 1975 ;
Dit en outre que cette créance doit être calculée conformément aux dispositions de la loi du 4 juillet 1980 susvisée ;
Dit que les donations de 60.000 F (9.146,94 ç) chacune faites par Juliette X... à ses enfants, Julien excepté, sont rapportables à la succession ;
Confirme la décision entreprise en ses autres dispositions;
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage ; Accorde aux avoués constitués le bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile. LE GREFFIER
LE PRESIDENT C. GALAND
J. BOYER