SD/EC
N° RG 24/00037
N° Portalis DBVD-V-B7I-DTTU
Décision attaquée :
du 07 décembre 2023
Origine :
tribunal judiciaire de CHÂTEAUROUX (surendettement)
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M. [R] [O], débiteur
Mme [S] [N], débitrice
C/
26 créanciers
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Expéditions aux parties le :
22.8.24
Expéd. - Grosse
Me DOUADY 22.8.24
COUR D'APPEL DE BOURGES
CHAMBRE SOCIALE
ARRÊT DU 22 AOÛT 2024
N° 7 - 7 Pages
DÉBITEURS, APPELANTS :
Monsieur [R] [O]
[Adresse 13]
(bénéficie d'une aide juridictionnelle totale numéro C-18033-2024-1306 du 03/05/2024 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de BOURGES)
et
Madame [S] [N], débitrice
[Adresse 13]
Représentés par Me Aurore DOUADY, avocate au barreau de BLOIS, substituée par Me Aurore VILDY, avocate au barreau de BOURGES
CRÉANCIERS, INTIMÉS :
1) Monsieur [P] [D]
[Adresse 18]
Comparant en personne
2) TRÉSORERIE PAYS DE [Localité 49]
[Adresse 15]
3) [48]
[Adresse 7]
4) [25] CHEZ [Adresse 22]
[Adresse 22]
5) COMPAGNIE D'ASSURANCE [41]
[Adresse 28]
Arrêt n° 7 - page 2
22 août 2024
6) [23]
Chez [26] - [Adresse 29]
7) Société [37]
[Adresse 19]
8) ACTION LOGEMENT SERVICES - Service recouvrement
[Adresse 10]
9) [32] chez [26]
[Adresse 29]
10) [24] chez [44]
[Adresse 4]
11) [42] - Centre de gestion
[Adresse 12]
12) ACTION LOGEMENT SERVICES SERVICE SURENDETTEMENT
[Adresse 8]
13) Société [45]
[Adresse 3]
14) TRÉSORERIE HOSPITALIÈRE LOIR ET CHER
[Adresse 20]
15) SOCIÉTÉ [50] chez [38] [Adresse 46]
16) SAUR GRAND OUEST SERVICE RECOUVREMENT
[Adresse 9]
17) Monsieur [Z] [W]
[Adresse 14]
18) Société [27]
[Adresse 36]
[Localité 21]
19) [30] chez [38]
[Adresse 47]
20) SA [40]
[Adresse 2]
21) CABINET VÉTÉRINAIRE DE [Localité 33]
[Adresse 17]
22) Sosiété [43] M. [K] [C]
[Adresse 11]
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22 août 2024
23) [31] chez [39] - Service surendettement
[Adresse 5]
24) SCP [35]
[Adresse 1]
25) [34]
[Adresse 6]
26) FRANCE TRAVAIL CENTRE VAL DE LOIRE - Surendettement
[Adresse 16]
Non représentés
COMPOSITION DE LA COUR
Lors des débats :
PRÉSIDENTE : Mme CHENU, conseiller rapporteur
en l'absence d'opposition des parties et conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile.
GREFFIÈRE LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE
Lors du délibéré : Mme VIOCHE, présidente de chambre
Mme de LA CHAISE, présidente de chambre
Mme CHENU, conseillère
DÉBATS : À l'audience publique du 04 juillet 2024, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 22 août 2024 par mise à disposition au greffe.
ARRÊT : Réputé contradictoire - Prononcé publiquement le 22 août 2024 par mise à disposition au greffe.
* * * * *
EXPOSÉ DU LITIGE
Saisie à la demande de M. [R] [O] et de Mme [S] [N], la commission de surendettement des particuliers de l'Indre, a déclaré leur demande recevable le 3 janvier 2023 puis, estimant la situation de ces derniers irrémédiablement compromise, a ordonné l'ouverture d'une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire lors de sa séance du 23 mai 2023.
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22 août 2024
Par jugement en date du 7 décembre 2023, le juge des contentieux de protection du tribunal judiciaire de Châteauroux, statuant sur recours de M. [D], créancier, qui invoquait notamment la mauvaise foi des débiteurs, a déclaré la contestation de ce dernier recevable et prononcé la déchéance de la procédure de surendettement des particuliers de M. [R] [O] et de Mme [S] [N].
Ce jugement a été notifié aux créanciers et aux débiteurs, les accusés de réception ayant été signés par M. [R] [O] et Mme [S] [N], le 22 décembre 2023.
Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 5 janvier 2024, M. [R] [O] et Mme [S] [N] ont interjeté appel de ce jugement, en attribuant l'établissement d'un faux document à leur volonté de quitter rapidement le logement dont M. [D] était bailleur et non à une volonté de se dispenser du paiement de leur dette. Ils invoquent leur bonne foi et une situation financière ne permettant pas de faire face à leur endettement.
Les débiteurs ont, ainsi que les créanciers, été convoqués par les soins du greffe à l'audience du 4 avril 2024, au cours de laquelle les débiteurs, agissant par l'intermédiaire de leur conseil, ont sollicité un renvoi de l'affaire. L'affaire a ainsi été évoquée à l'audience du 4 juillet 2024.
La [23] a écrit à la cour par courrier en date du 7 février 2024 pour actualiser sa créance à la somme de 1 281 euros à cette date.
La SA [40] indique par courrier en date du 25 juin 2024 que la somme due par les débiteurs s'élève à 2 692,52 euros.
France Travail Centre-Val de Loire précise également par courrier en date du 28 mai 2024 que sa créance s'élève à la somme de 890,66 euros à l'égard des débiteurs.
À l'audience du 4 juillet 2024, M. [R] [O] et Mme [S] [N], représentés par leur conseil, se référant oralement à ses dernières conclusions déposées au greffe de la Cour le jour de l'audience, demande à la Cour de :
- infirmer le jugement déféré,
- déclarer la situation financière de M. [R] [O] et de Mme [S] [N] irrémé-diablement compromise,
- déclarer M. [R] [O] et de Mme [S] [N] comme étant accessibles à la procédure de surendettement et ordonner leur rétablissement personnel sans liquidation judiciaire,
- laisser les dépens à la charge de l'Etat.
Les débiteurs font valoir que le défaut de déclaration d'une dette n'entraîne la déchéance que s'il est établi que cette omission a été délibérée pour permettre au débiteur d'obtenir le bénéfice de la procédure de surendettement, ce qu'ils réfutent s'agissant de la non-déclaration de la dette de M. [D].
Sans contester avoir rédigé et fait usage d'une fausse attestation, ils expliquent que cette démarche, qui visait uniquement à bénéficier d'un nouveau logement moins onéreux auprès d'un bailleur social, n'est pas de nature à avoir influer sur l'appréciation de la commission de surendettement quant à leur situation de surendettement.
M. [R] [O] et de Mme [S] [N] détaillent les difficultés financières rencontrées et soulignent que l'omission d'une seule dette sur les 29 recensées par la commission ne remet pas en cause l'analyse globale qui a conduit cette dernière à retenir une situation de surendettement et imposer une procédure de rétablissement personnel.
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22 août 2024
M. [D], comparaissant en personne, sollicite la confirmation de la décision déférée en maintenant son argumentation quant à la mauvaise foi des débiteurs. Il souligne que ces derniers ne contestent pas avoir établi et fait usage d'un faux document au terme duquel il annulait leur dette locative, alors même que telle n'a jamais été sa volonté et que leur dette était déjà importante. Il relève qu'une décision de rappel à la loi est intervenue en matière pénale et que ce positionnement ne doit pas permettre aux débiteurs de bénéficier d'une procédure de surendettement.
M. [D] invoque, par ailleurs, l'inertie des débiteurs en relevant qu'aucun paiement volontaire n'est intervenu depuis 2021, alors même que sa créance s'élève à 6 946,83 euros, en principal, intérêts et frais au 6 septembre 2023.
L'affaire a été mise en délibéré le 22 août 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1°) Sur la recevabilité du recours :
Aux termes des articles R. 713-7 du code de la consommation et 932 du code de procédure civile, le délai d'appel est de quinze jours et est formé par une déclaration que la partie ou tout mandataire fait ou adresse par pli recommandé au greffe de la cour.
En l'espèce, le jugement entrepris a été notifié à M. [R] [O] et Mme [S] [N] qui ont signé les avis de réception le 22 décembre 2023 et ils en ont interjeté appel par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 janvier 2024, dans le respect des délais légaux.
L'appel est donc recevable.
2°) Sur la recevabilité de la demande de surendettement :
En vertu de l'article R. 741-4 du même code, une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection, dans un délai fixé par décret, le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire imposé par la commission.
Aux termes de l'article L. 711-1 du code de la consommation, la situation de surendettement des personnes physiques est caractérisée par l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir.
Le bénéfice d'un rétablissement personnel est également soumis à cette exigence de bonne foi du débiteur en application de l'article L. 742-3 du même code.
Il convient de rappeler que la bonne foi se présume et qu'il appartient au créancier qui invoque la mauvaise foi d'en rapporter la preuve. Elle doit s'apprécier, en outre, tant au regard des circonstances dans lesquelles l'endettement s'est constitué et du comportement du débiteur vis à vis de ses créanciers qu'au regard de son comportement à l'ouverture et au cours de la procédure de surendettement. Par ailleurs, la mauvaise foi doit être en rapport direct avec la situation de surendettement.
En application de l'article L. 761-1 du code du même code, la mauvaise foi procédurale est également sanctionnée en ce qu'est déchue du bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement toute personne :
Arrêt n° 7 - page 6
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1° ayant sciemment fait de fausses déclarations ou remis des documents inexacts,
2° ayant détourné ou dissimulé, ou tenté de détourner ou de dissimuler, tout ou partie de ses biens,
3° ayant, sans l'accord de ses créanciers, de la commission ou du juge, aggravé son endettement en souscrivant de nouveaux emprunts ou ayant procédé à des actes de disposition de son patrimoine pendant le déroulement de la procédure de traitement de la situation de surendettement ou de rétablissement personnel, ou pendant l'exécution du plan ou des mesures de traitement.
Le débiteur doit donc être de bonne foi pendant la phase d'endettement mais aussi au moment où il saisit la commission de surendettement, ce qui implique sa sincérité, et tout au long du déroulement de la procédure.
Le juge doit se déterminer au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis au jour où il statue. En vertu des dispositions de l'article L. 733-12 du code de la consommation, il peut vérifier, même d'office, la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées et s'assurer que le débiteur se trouve bien dans la situation définie à l'article L. 711-1.
En l'espèce, saisi par M. [D], créancier de M. [R] [O] et de Mme [S] [N], qui invoquait la mauvaise foi de ces derniers et leur volonté de dissimuler la réalité de leur situation, par l'établissement et l'usage d'un faux document, pour lequel il ont fait l'objet d'une décision judiciaire au plan pénal, le premier juge a retenu que l'omission de déclarer leur dette à l'égard de M. [D] caractérisait une volonté des débiteurs de tromper la commission de surendettement quant à l'état réel de leur endettement justifiant leur déchéance de la procédure de surendettement des particuliers.
Il est établi par les pièces versées aux débats par M. [D], et non contestés par les appelants, que ces derniers se sont vu notifier un rappel à la Loi par officier de police judiciaire le 30 mai 2022, pour des faits de faux et usage de faux en date du 11 mai 2021 concernant une attestation de loyer qu'il avait faussement attribué à M. [D].
Si ces faits ne sont pas à eux seuls de nature à caractériser un cas de déchéance, tel que limitativement énuméré par l'article L. 761-1 du code du même code, dès lors qu'il n'est pas établi que la fausse attestation a été produite dans le cadre de la procédure devant la commission de surendettement, ils s'inscrivent toutefois dans une démarche plus globale des débiteurs visant à cacher la réalité de leur situation locative.
C'est ainsi à raison que le premier juge relevait que les pièces versées aux débats établissent que M. [R] [O] et de Mme [S] [N] ont omis de mentionner la dette locative existant à l'égard de M. [D] lors de la saisine de la commission de surendettement des particuliers de l'Indre le 8 décembre 2022.
Si l'omission de déclaration d'une créance ne peut à, elle seule, justifier d'écarter le bénéfice de la procédure de surendettement à l'égard d'un débiteur, la cour retient, à l'instar du premier juge, que l'omission de la dette de M. [D], alors que les débiteurs avaient auparavant fait usage d'une fausse attestation visant à cacher la réalité de leur situation locative dans le cadre de la procédure d'attribution d'un logement social, s'inscrit en réalité dans une volonté claire et maintenue de tromper la commission sur la réalité, la nature et l'étendue de leur endettement.
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Ce faisant les débiteurs n'ont pas permis à la commission d'analyser la réalité de leur situation de surendettement, alors même que leur dossier comportait déjà des dettes locatives antérieures et que valablement informée, la commission n'aurait pas manqué de solliciter des explications quant à une aggravation de la situation d'endettement, pour des débiteurs ayant déjà bénéficié de mesures antérieures d'une durée de 48 mois.
Dès lors, il en résulte que les débiteurs ont sciemment fait de fausses déclarations lors de la saisine de la Commission, au sens de l'alinéa 1er de l'article L. 761-1 du code du code de la consommation, en vue d'obtenir le bénéfice de la procédure.
Il s'ensuit que le cas de déchéance retenu par le premier juge étant établi, le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.
Les dépens d'appel seront laissés à la charge du Trésor public.
PAR CES MOTIFS :
La cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, mis à la disposition des parties au greffe de la juridiction ;
Déclare recevable l'appel interjeté par M. [R] [O] et Mme [S] [N],
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 7 décembre 2023 par le juge du contentieux de la protection de Châteauroux.
Y ajoutant,
Laisse les dépens d'appel à la charge du Trésor public.
Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;
En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme CHENU, conseillère ayant participé aux débats et au délibéré, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE, LA CONSEILLÈRE,
S. DELPLACE E. CHENU