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12/07/2024 | FRANCE | N°23/01000

France | France, Cour d'appel de Bourges, Chambre sociale, 12 juillet 2024, 23/01000


SD/CV





N° RG 23/01000

N° Portalis DBVD-V-B7H-DS6B





Décision attaquée :

du 19 septembre 2023

Origine :

conseil de prud'hommes - formation paritaire de CHÂTEAUROUX







--------------------





M. [C] [M]





C/



SAS ALCURA FRANCE



SAS ALLIANCE HEALTHCARE GROUP FRANCE











--------------------





Expéd. - Grosse



Me VERNAY-

AUMEUNIER 12.7.24r>


Me LE ROY

DES BARRES 12.7.24



















COUR D'APPEL DE BOURGES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 12 JUILLET 2024



N° 81 - 12 Pages





APPELANT :



Monsieur [C] [M]

[Adresse 2]



Représenté par Me Pascal VERNAY-AUMEUNIER, substitué par Me Margaux JOFFR...

SD/CV

N° RG 23/01000

N° Portalis DBVD-V-B7H-DS6B

Décision attaquée :

du 19 septembre 2023

Origine :

conseil de prud'hommes - formation paritaire de CHÂTEAUROUX

--------------------

M. [C] [M]

C/

SAS ALCURA FRANCE

SAS ALLIANCE HEALTHCARE GROUP FRANCE

--------------------

Expéd. - Grosse

Me VERNAY-

AUMEUNIER 12.7.24

Me LE ROY

DES BARRES 12.7.24

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 12 JUILLET 2024

N° 81 - 12 Pages

APPELANT :

Monsieur [C] [M]

[Adresse 2]

Représenté par Me Pascal VERNAY-AUMEUNIER, substitué par Me Margaux JOFFRE, de la SCP SOREL, avocat postulant, du barreau de BOURGES

et par Me Philippe RENAUD, de la SELARL RENAUD & ASSOCIES, avocat plaidant, du barreau de l'ESSONNE

INTIMÉES :

1°) SAS ALCURA FRANCE

[Adresse 3]

2°) SAS ALLIANCE HEALTHCARE GROUP FRANCE

[Adresse 1]

Représentée par Me Adrien-Charles LE ROY DES BARRES, avocat postulant, du barreau de BOURGES

et par Me Nicolas CHAVRIER, substitué par Me COTTIN Anne-Laure, de la SCP FROMONT BRIENS, avocat plaidant, du barreau de LYON

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Mme VIOCHE, présidente de chambre, rapporteur

en l'absence d'opposition des parties et conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE

Arrêt n° 81 - page 2

12 juillet 2024

Lors du délibéré : Mme VIOCHE, présidente de chambre

Mme de LA CHAISE, présidente de chambre

Mme CHENU, conseillère

DÉBATS : À l'audience publique du 31 mai 2024, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 12 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.

ARRÊT : Contradictoire - Prononcé publiquement le 12 juillet 2024 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE :

La SAS Alcura France, dont la SAS Alliance Healthcare Groupe France est la holding et qui employait plus de 11 salariés au moment de la rupture, a pour activité, notamment, l'achat, la vente ainsi que la location d'appareils médicaux de réadaptation et de rééducation.

Suivant contrat à durée indéterminée en date du 16 novembre 2018, M. [C] [M] a été engagé par la SAS Alliance Healthcare Groupe France à compter du 19 novembre suivant en qualité de directeur général de la SAS Alcura France, statut cadre dirigeant, moyennant un salaire brut annuel de 155 000 €, puis de 170 000 € à compter du 1er décembre 2019, outre un treizième mois et une rémunération variable annuelle.

En dernier lieu, M. [M] percevait un salaire brut mensuel de 13 076,93 €, outre un avantage en nature.

La convention collective nationale de la répartition pharmaceutique s'est appliquée à la relation de travail.

Par lettre en date du 27 mai 2020, M. [M] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé le 11 juin suivant.

Il a été licencié par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 juin 2020 pour insuffisance professionnelle.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er juillet 2020, M. [M] a contesté son licenciement et demandé des précisions sur le véritable motif de la rupture.

Le 16 juillet 2020, M. [R], président de la SAS Alliance Healthcare Groupe France et de la SAS Alcura France, lui a répondu qu'il maintenait la mesure tout en lui demandant de préciser les motifs qu'il ne comprenait pas.

Le 8 juillet 2021, M. [M] a saisi le conseil de prud'hommes de Châteauroux, section encadrement, en contestation de son licenciement et paiement de diverses sommes.

Les SAS Alcura France et SAS Alliance Healthcare Group France, toutes deux attraites en la cause, ayant soulevé in limine litis l'incompétence territoriale du conseil de prud'hommes de Châteauroux, celui-ci s'est déclaré incompétent au profit du conseil de prud'hommes de Lyon par jugement du 15 juin 2021. Par arrêt du 19 novembre 2021, la chambre sociale de la présente cour,

Arrêt n° 81 - page 3

12 juillet 2024

saisie de l'appel de M. [M], a annulé la décision déférée, a dit que le conseil de prud'hommes de Châteauroux était territorialement compétent pour connaître du litige, et disant n'y avoir lieu à évocation, a renvoyé les parties devant celui-ci pour qu'il soit statué au fond, a réservé et joint au fond les dépens ainsi que les demandes formées par les parties pour leurs frais de procédure.

Par jugement du 19 septembre 2023 , auquel il est renvoyé pour plus ample exposé, le conseil de prud'hommes a débouté M. [M] de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à payer à la SAS Alcura France la somme de 1 000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.

Le 19 octobre 2023, par la voie électronique, M. [M] a régulièrement relevé appel de cette décision.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour se réfère expressément à leurs conclusions.

1 ) Ceux de M. [M] :

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 22 mai 2024, poursuivant l'infirmation en toutes ses dispositions du jugement dont appel, il demande à la cour, statuant à nouveau,

- d'annuler le jugement du conseil de prud'hommes,

- à titre principal, de dire que son licenciement est nul et ordonner en conséquence de le réintégrer dans son emploi, sous astreinte de 500 euros par jours de retard,

- de condamner solidairement la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France à lui payer l'intégralité des salaires dus en exécution du contrat de travail pendant la période de nullité, soit, jusqu'à l'arrêt à intervenir, provisoirement la somme de 680 000 euros, outre 68 000 euros de congés payés afférents, avec intérêts légaux et capitalisation desdits intérêts,

- à titre subsidiaire, de dire que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse et qu'il est en droit de réclamer le bénéfice des dispositions de l'article L. 1235-11 du code du travail,

- de condamner solidairement la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France à lui payer la somme de 85 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts légaux et capitalisation desdits intérêts,

- en tout état de cause,de condamner solidairement la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France à lui verser la somme de 124 666,66 euros à titre de rappel de rémunération variable, outre 12 466,66 euros de congés payés afférents, et à défaut celle de 50 000 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 5000 euros de congés payés afférents, avec intérêts légaux à compter du 8 janvier 2021 et capitalisation desdits intérêts.

Il réclame enfin la condamnation des deux sociétés à lui verser chacune la somme de 4 500 euros pour ses frais de procédure ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais éventuels d'exécution.

2 ) Ceux de la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France :

Arrêt n° 81 - page 4

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Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 27 mai 2024, elles demandent à la cour de déclarer irrecevable la demande de nullité du jugement formée par M. [M], de juger en tout état de cause que la décision déférée n'est pas nulle et de la confirmer en toutes ses dispositions.

Elles réclament à titre principal qu'en conséquence, M. [M] soit débouté de l'ensemble de ses demandes.

À titre subsidiaire, si la cour jugeait que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, elles sollicitent que le salaire mensuel moyen de M. [M] soit fixé à 13 510,24 euros et qu'il soit alloué à celui-ci des dommages et intérêts réduits à de plus justes proportions.

Elles demandent en outre sa condamnation au paiement à chacune d'une indemnité de procédure de 4 500 euros ainsi qu'aux entiers dépens.

* * * * * *

La clôture de la procédure est intervenue le 29 mai 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1) Sur la nullité du jugement du conseil de prud'hommes :

M. [M], se prévalant des dispositions des article 339 du code de procédure civile et

L. 111-7 du code de l'organisation judiciaire ainsi que de l'article 6 § 1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, soutient que le jugement dont appel a été rendu par le conseil de prud'hommes composé de deux conseillers qui auraient dû s'abstenir de juger l'affaire dès lors qu'ils avaient déjà statué le 15 juin 2021 contre ses intérêts et que le jugement, qui a été rendu dans des conditions ne garantissant pas son impartialité, doit en conséquence être annulé.

Il considère à cet effet que le conseil de prud'hommes, qui avait tranché le 15 juin 2021 le litige en se déclarant incompétent, n'aurait pas dû comprendre dans sa composition les deux mêmes conseillers lorsqu'il a statué 19 septembre 2023, que le jugement contient des termes ironiques sur les arguments qu'il développait devant les premiers juges ce qui démontre le manque d'impartialité, qu'en outre il lui a été reproché de n'avoir communiqué aucune pièce alors qu'au contraire, il en a produit de nombreuses.

Les sociétés intimées prétendent que cette demande est irrecevable dès lors qu'en application de l'article 342 du code de procédure civile, la partie qui veut récuser un juge doit le faire dès qu'elle a eu connaissance de la cause justifiant sa demande, ce qui correspond pour M. [M], qui n'a pas assisté à l'audience, à la réception du rôle de celle-ci, et qu'en tout état de cause, cette prétention ne peut jamais être formée après la clôture des débats.

M. [M] conteste que lors de l'audience de jugement la composition de la juridiction ait été portée à sa connaissance, et il ne peut être établi avec certitude qu'il a pu la lire sur le rôle de l'audience. Il invoque en outre la partialité du jugement dans sa motivation. Il s'ensuit que sa demande est recevable.

Cependant, il n'explique pas sur quel fondement des conseillers prud'hommes qui auraient statué sur une exception d'incompétence ne pourraient plus ensuite, sauf à se montrer partiaux, juger le fond, après infirmation de leur décision.

Arrêt n° 81 - page 5

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Les intimées prétendent que la décision déférée est parfaitement motivée et concluent au rejet du moyen de nullité.

Néanmoins, s'il ne peut être soutenu, comme le fait le salarié, que le conseil de prud'hommes n'a pas analysé les pièces qu'il a produites du seul fait qu'il ne les a pas visées dans sa décision, en se contentant de dire qu'il ne verse 'strictement aucune pièce probante de la qualité de son travail', ce qui ne signifie pas qu'il n'en a versé aucune sur d'autres sujets, la motivation du jugement attaqué est empreinte à plusieurs endroits de jugements de valeur qui ne lui donnent pas une apparence d'impartialité.

Dès lors, chaque partie ayant droit à un procès équitable, le jugement déféré doit être annulé.

La cour évoque donc le dossier.

2) Sur le licenciement :

L'article L. 1235-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, et au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute existe, il profite au salarié.

La cause réelle est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte ce qui oblige le juge à vérifier que d'autres faits allégués par le salarié ne sont pas la véritable cause du licenciement. La cause sérieuse est celle d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.

L'insuffisance professionnelle est l'incapacité objective, non fautive et durable pour un salarié à occuper son poste et à remplir ses fonctions de manière satisfaisante. Elle doit reposer sur des éléments précis et objectifs vérifiables et imputables au salarié.

En l'espèce, la lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, fixe les limites du litige et est ainsi rédigée :

'Monsieur,

(...) Les motifs de ce licenciement sont ceux qui vous ont été exposés lors de l'entretien précité à savoir :

Stratégie de la société ALCURA :

Dans le cadre de votre mission de Directeur Général d'ALCURA, vous deviez définir un cadre stratégique afin que nous posions vous et moi, les bases de la discussion stratégique de développement d'ALCURA sur le marché français avec nos actionnaires.

Pour cela, lors du séminaire qui a réuni l'ensemble du Comité Exécutif à [Localité 4] en juillet 2019, la société ALCURA a été définie comme priorité stratégique du groupe.

Dans ce cadre, en tant que Directeur Général, il vous a été demandé de présenter un dossier de développement sur le marché afin de convaincre nos actionnaires d'investir dans ALCURA.

Les attendus étaient :

- Opportunités du marché (taille des différents marchés où nous sommes présents, analyse de notre part de marché, les acteurs en présence)

- Potentiel développement qualitatif

- Potentiel de développement financier

- Investissements nécessaires pour capter ces marchés

- Plan de marche à 3 ans pour devenir un acteur de référence sur ces marchés

Pour la présentation de ce plan, un créneau a été mobilisé dans le cadre du Comex projets du 29 janvier 2020, afin que vous présentiez à l'ensemble des membres du Comex le plan de développement, 6 mois après la décision de prioriser votre société en termes d'investissement pour le groupe Alliance Healthcare France.

Arrêt n° 81 - page 6

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Afin de vous aider, [S] [W], Directeur du département Projets (ex-Directeur Marketing de Coopers, diplômé d'un MBA de l'INSEAD), a été mandaté pour vous soutenir.

Du fait de votre incapacité à organiser les idées, à clarifier votre discours, et surtout à dégager du temps dans votre agenda pour ce sujet crucial pour l'avenir de la société que vous dirigez, il a demandé à sortir du projet, faute de leadership clair de votre part.

Résultat de votre manque de préparation, la présentation que vous avez faite au Comex a été rejetée par l'ensemble des participants par son manque de clarté.

Vous nous avez présenté un ensemble de souhaits d'action et de positionnement, sans donner de vision claire sur les raisons de ces positionnements ni des forces en présence.

Aucune analyse de comment nous allions prendre une place prépondérante sur ces marchés, ni de vision des investissements nécessaires pour se positionner et encore moins de retour sur investissement possible.

Vous vous êtes contenté de présenter des idées générales, sans chiffres, sans analyse, sans réflexion.

Très clairement, ce travail n'était ni à la hauteur des attentes, ni montrable à nos actionnaires pour soutenir un plan d'investissement pour les convaincre de nous soutenir dans notre démarche de croissance.

Le résultat de cette absence de proposition de valeur a eu pour conséquence l'obligation de décaler d'autant la présentation à nos actionnaires d'un plan de développement à moyen terme de la société pourtant bien nécessaire après la restructuration en cours.

Accompagnement des équipes dans le processus de restructuration :

Lors de votre arrivée dans le groupe, mon prédécesseur et le directeur des Ressources Humaines du groupe vous ont présenté le plan de restructuration en cours, que vous deviez mener durant vos premiers mois à la tête de ALCURA.

Selon vos dires, ce projet ne vous avait pas été présenté au moment de votre recrutement.

Vous avez, malgré vos désaccords (vous avez notamment, dans de nombreux forums, exprimé le fait que vous étiez en désaccord avec le plan), pris en charge la restructuration et mené les discussions avec les représentants du personnel de ALCURA.

Cependant, il est regrettable que vous ayez parfois confondu vitesse et précipitation, mettant en danger à la fois la conclusion des discussions sur le volet du plan social concernant ALCURA, mais aussi mettant en danger les discussions en cours sur Alliance Heathcare Repartition.

Lors de la dernière réunion de discussion avec les représentants du personnel, vous avez pris la décision unilatérale d'envoyer les documents 3 jours ouvrables avant la tenue de la réunion, le 3 juillet 2019, prenant le risque que les représentants du personnel n'aient pas le temps nécessaire pour prendre connaissance des documents. Compte tenu de l'enjeu, vous avez fait courir le risque à ALCURA que la réunion d'information consultation soit considérée irrégulière par l'administration du travail.

La DIRECCTE n'a pas manqué de souligner ce point dans son courrier du 26 juillet 2019, officialisant le refus d'homologation du PSE d'ALCURA.

L'homologation du PSE de la société ALCURA était cruciale dans le processus en cours. En effet, dans le dispositif de restructuration du groupe actuel, ALCURA était la première société devant homologuer le plan de sauvegarde impliquant l'ensemble des activités du groupe.

Cette erreur dans le processus nous a forcé collectivement à devoir mobiliser des ressources durant le mois d'août 2019, afin de trouver un accord à la rentrée avec les représentants du personnel, reprendre partiellement les étapes précédentes, et rétablir le climat social.

Reprendre le processus nous a obligé à retarder de plus de 80 jours le processus (homologation reçue finalement le 18 octobre 2019), mais aussi et surtout cela a entaché la crédibilité de la direction, en donnant à nos collaborateurs le sentiment que le plan de restructuration était rejeté pour défaut de contenu, et jetant le trouble sur l'avenir de la société à moyen terme.

Etant la première société du groupe lancée dans le processus de restructuration, cela a impacté l'ensemble des sociétés du groupe en donnant le sentiment que notre position était fragile, et que le processus pouvait être remis en question.

En synthèse, vos manquements amenant à un refus d'homologation du PSE d'ALCURA a jeté un trouble, et créé des inquiétudes pour les salariés, jeté le discrédit sur l'ensemble des équipes de direction de ALCURA. Cela a également eu des effets collatéraux pour les autres sociétés du groupe, mettant en doute la pertinence du processus, et engendré un retard ayant des conséquences économiques et financières importantes pour le Groupe.

Compte tenu de votre position et de votre expérience, ce mode de gestion est inadmissible.

Pilotage commercial et financier d'ALCURA

Dans le cadre de votre mission d'optimisation commerciale de l'activité de ALCURA, vous deviez élaborer une stratégie commerciale permettant d'uniformiser les pratiques et de pouvoir dégager des synergies opérationnelles en capitalisant sur des savoir-faire existants, sur des bases régionales, pour les étendre nationalement.

Arrêt n° 81 - page 7

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Le diagnostic que vous en avez dressé, était clair et partagé.

Cependant, vous n'avez jamais été en mesure de mettre en place les mesures correctives et de coordonner les actions de votre Comité de Direction, afin de corriger cela.

Les enjeux sont importants et font partie d'un plan de relance commercial mais force est de constater que vous n'avez jamais ni formalisé les plans d'action pour atteindre cet objectif, ni coordonné l'action des équipes commerciales et opérationnelles pour que nos collaborateurs se mobilisent autour de ce sujet.

Par ailleurs, dans le cadre du plan de réorganisation en cours, le volet connu sous le nom de SALESFORCE a été mis en place.

Une partie des secteurs commerciaux non rentables de ALCURA a été transféré vers l'activité commerciale de la répartition afin de profiter de synergies entre les 2 sociétés.

Ces secteurs non rentables devaient faire l'objet d'une attention accrue de votre part afin d'accompagner le changement et de vous assurer que vos intérêts seraient pleinement défendus.

Quelle ne fut pas ma surprise lors du Comex Projets du 23 avril 2020, de constater qu'aucun indicateur de suivi n'avaient été mis en place pour suivre la performance des équipes commerciales transférées.

Votre mission en tant que Directeur Général, garant de la transformation d'ALCURA, était de s'assurer que les commerciaux de la répartition prennent en main l'activité transférée, pour assurer la défense de votre activité sur ces 9 secteurs commerciaux.

L'absence d'indicateurs économiques de suivi démontre très clairement une absence de pilotage de votre part, nuisible à la fois à la performance commerciale de la société que vous dirigez mais aussi mettant en péril les engagements pris avec les partenaires sociaux dans le cadre des négociations du 2e semestre 2019.

Cette absence de formalisation, de suivi et de coaching des équipes commerciales explique en partie le retard de chiffres d'affaires observé sur ALCURA au cours de cet exercice fiscale 2020 où la tendance de décroissance n'a pu être inversée.

Autre exemple d'absence de suivi financier mettant en péril la société que vous dirigez, durant l'exercice de préparation budgétaire 2019 pour la période triennale 2020-2023, vous nous aviez présenté un niveau d'ambition de résultats réduisant le résultat économique ( AOI) de près de 4,2 Millions d'€, passant de 5,7 Millions d'€ en 2019 à une proposition de 1,58 Millions d'€ pour l'année à venir, c'est à dire 2020.

Bien évidemment, comme à votre habitude, aucune explication rationnelle et de justification économique détaillée à l'appui de la décroissance massive du résultat.

Nous avons refusé cette proposition, et bien nous en a pris puisque l'entreprise pour l'exercice fiscal 2020 se terminant en août 2020 devait délivrer un résultat de l'ordre de 5,8 Millions d'euros (AOI) : cet exemple montre s'il en était besoin que vous ne maîtrisez pas les chiffres de l'entreprise que vous dirigez.

Cette absence claire de pilotage commercial et économique démontre des limites préjudiciables au développement de la société ALCURA et des risques pris dans le respect des engagements pris vis-à-vis de nos salariés, clients, fournisseurs et actionnaires.

Ce constat démontre une incapacité à occuper votre poste de Directeur Général de la société ALCURA, ce qui nous conduit aujourd'hui à vous notifier votre licenciement pour insuffisance professionnelle (...)'.

M. [M] soutient, en premier lieu, que son licenciement est nul dès lors que l'employeur n'a pas complété les motifs exprimés dans la lettre de rupture, qui ne comportait pas selon lui de motifs précis, en dépit de la demande qu'il a formée dans les quinze jours de la notification de celle-ci comme il en avait le droit en application de l'article L. 1235-2 du code du travail.

Ce texte prévoit que les motifs énoncés dans la lettre de licenciement peuvent après la notification de celui-ci, être précisés par l'employeur, soit à son initiative soit à celle du salarié. La lettre de licenciement, précisée le cas échéant par l'employeur, fixe les limites du litige en ce qui concerne les motifs du licenciement.

Ce texte poursuit en précisant que l'irrégularité que constitue une insuffisance de motivation de la lettre de licenciement ne prive pas celui-ci de cause réelle et sérieuse mais constitue seulement une irrégularité de procédure. Il en résulte qu'à supposer même que l'employeur n'ait pas efficacement précisé les motifs de la lettre de licenciement dans sa réponse ainsi que l'appelant le soutient, celui-ci est mal fondé à invoquer en conséquence la nullité de la rupture de son contrat de travail. Dès lors, son moyen de nullité et les demandes qu'il forme en conséquence, notamment celle relative à sa réintégration dans son emploi et aux rappels de salaires qui seraient dus dans cette attente, ne peuvent prospérer.

Arrêt n° 81 - page 8

12 juillet 2024

M. [M] conteste, en second lieu, chacun des griefs qui lui sont faits dans la lettre de licenciement, qui ne sont pour lui que des accusations mensongères destinées à l'évincer dans le but de réaliser des économies dans un contexte marqué par la crise sanitaire et dans lequel la société mère avait décidé de procéder à de nombreuses suppressions de postes, de sorte que son licenciement repose sur un motif économique déguisé.

Il précise que son véritable employeur était la SAS Alcura France.

Il soutient qu'en dépit de l'intitulé de son poste, il était directeur opérationnel et non directeur général, statut qui n'existe pas dans une SAS, et pas davantage mandataire social. Il prétend en tout cas qu'aucune disposition contractuelle ne prévoyait clairement ses missions et qu'il agissait sous l'autorité du Président, M. [R], de sorte qu'il lui est imputé des manquements qui ne relevaient ni de ses compétences ni de son champ d'intervention.

Il soutient ainsi qu'il relevait seulement de ses missions de représenter son Président dans le cadre de la négociation du PSE qui avait été décidé avant son embauche et qui prévoyait de nombreuses suppressions de poste, de reprendre en main les équipes commerciales et de permettre sur une période d'au moins deux ans un redressement du chiffre d'affaires de l'entreprise.

Il met en outre en avant qu'il ne peut lui être reproché des manquements en matière de management des équipes s'occupant de la 'finance' qui relevaient de la compétence du Directeur Administratif et Financier ni en matière de bilan financier qui relevait de la compétence de

celui-ci et non de la sienne puisqu'il n'était pas directeur général mandataire.

Son contrat de travail stipulait en son article 3 :

'Monsieur [C] [M] est engagé en qualité de Directeur Général Alcura France, statut cadre dirigeant, coefficient hiérarchique 700.

Son statut sera celui de cadre dirigeant au sens de l'article L. 3111-2 du code du travail (...).En cette qualité et dans le cadre des possibilités et directives générales définies au niveau de la société, Monsieur [C] [M] devra apporter sa collaboration dans tous les domaines de sa compétence. Enfin, et d'une façon plus générale, Monsieur [C] [M] devra tout mettre en oeuvre pour remplir ses missions dans le cadre de la politique de management de la société. Monsieur [C] [M] exercera ses fonctions sous l'autorité et selon les directives du Président, Monsieur [B] [G]'.

Il en résulte que si ses missions ne sont pas clairement définies, il est précisé qu'il les exerçait sous le contrôle du président de la société, qui définissait la politique de management.

Les SAS Alcura France et SAS Alliance Healthcare Group France répliquent que le licenciement est parfaitement fondé et que M. [M] ne verse aucun élément probant à l'appui de sa contestation.

Comme elles le rappellent, la charge de la preuve est partagée en matière de licenciement pour insuffisance professionnelle, de sorte qu'il appartient à l'employeur de démontrer que l'insuffisance invoquée repose sur des faits objectifs, précis et vérifiables.

Or, à cet égard, les intimées produisent :

- l'ordre du jour de la réunion du Comex projet qui s'est tenue le 29 janvier 2020, dont il résulte seulement que M. [M] devait présenter la stratégie de la société Alcara pendant 30 minutes, et que des actions devaient être menées par lui, avec mention d'une 'deadline',

- un document appelé 'Comex projets 29 janvier 2020", dont il ne peut être déduit aucun manquement,

Arrêt n° 81 - page 9

12 juillet 2024

- la décision prise par la Dirrecte le 26 juillet 2019, qui mentionne que la procédure d'information-consultation du CSE est irrégulière 'en ce cens que cette institution représentative du personnel a été destinataire , 3 jours ouvrables seulement avant la seconde réunion du 3 juillet 2019, des documents d'informations destinés à recueillir son avis, ne permettant pas au CSE de se prononcer valablement,' sans qu'aucun autre élément ne permette d'imputer ce retard à M. [M],

- trois attestations de Mme [L] [D], DRH, de M. [J] [V], Directeur Administratif et Financier et de M. [S] [W], Directeur PMO/ Marketing et Commercial, qui sont dénuées de valeur probante dès lors qu'elles ont été établies par des personnes qui sont les représentants de l'employeur, ne satisfont donc pas au principe de loyauté de la preuve nécessaire pour établir l'insuffisance alléguée, et ce même si la preuve est libre en matière prud'homale, ni au principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à lui-même.

Il en résulte que la preuve de l'insuffisance professionnelle reprochée à M. [M] n'est pas rapportée, de sorte que son licenciement est sans cause réelle et sérieuse.

Le juge étant lié par la nature du motif invoqué à l'appui du licenciement, il ne peut lui substituer une autre cause, si bien que M. [M] n'est pas fondé à réclamer le bénéfice des dispositions de l'article L. 1235-11 du code du travail.

M. [M] prétend que son employeur était en réalité la SAS Alcura France, dont le président est le même que la SAS Alliance Healthcare Group France.

Les intimées précisent que cette dernière société était une holding composée de 'huit sociétés opérationnelles' au nombre desquelles figurent la SAS Alcura France, mais ne contestent pas vraiment le co-emploi allégué. Dès lors qu'il n'est pas démontré que la SAS Alliance Healthcare Group France avait une activité propre, autre que la détention de parts sociales de ces huit sociétés, l'employeur de M. [M] était également la SAS Alcura France, qui emploie plus de 11 salariés.

Aux termes de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, dans une entreprise employant habituellement plus de 11 salariés, le juge octroie au salarié, en l'absence de réintégration, une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre 1 et 2 mois de salaire brut pour un salarié ayant une année complète d'ancienneté, comme c'est le cas de M. [M].

Au regard des sommes portées sur l'attestation Pôle emploi établie par l'employeur, le salaire moyen de référence, en intégrant le treizième mois, doit être fixé à la somme de 14 166,67 euros ainsi que demandé.

Dès lors, au regard des éléments portés à la connaissance de la cour, et notamment de l'âge du salarié lors de la rupture (53 ans), du niveau de sa rémunération, de la durée de la relation contractuelle, des circonstances de la rupture et du fait que l'intéressé a très rapidement retrouvé un emploi équivalent, l'allocation de la somme de 18 000 euros brut apparait suffisante pour réparer entièrement le préjudice résultant de la perte injustifiée de son emploi.

En leur qualité de co-employeurs, la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France seront solidairement condamnées à lui payer cette somme à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

3) Sur la demande en paiement d'un rappel de rémunération variable :

Arrêt n° 81 - page 10

12 juillet 2024

Celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Il en résulte que lorsque les objectifs sont définis unilatéralement par l'employeur dans le cadre de son pouvoir de direction, celui-ci peut les modifier dès lors qu'ils sont réalisables et qu'ils ont été portés à la connaissance du salarié en début d'exercice. À défaut, le montant maximum prévu pour la part variable doit être payé intégralement comme s'il avait réalisé ses objectifs.

En l'espèce, M. [M] réclame paiement de la somme de 124 666, 66 euros à titre de rappel de rémunération variable, outre 12 466,66 euros de congés payés afférents.

Il précise que deux rémunérations variables étaient prévues contractuellement, l'une appelée 'bonus cible' ou 'SMIP' et l'autre, au titre d'un 'plan rémunération long terme', non contractuel et discrétionnaire, et ce alors que l'employeur ne pouvait en réalité s'abstenir de payer une rémunération variable qui bénéficie à tous les cadres dirigeants. Il soutient pour prospérer en sa demande de rappel de salaire, que l'employeur ne lui a jamais fixé d'objectifs, ni à son arrivée en 2018, ni en 2019, ni en 2020, et que dès lors, la somme de 77 916,66 euros lui est due pour la totalité de la relation contractuelle pour le SMIP, et celle de 46 750 euros pour la part complémentaire, outre les congés payés afférents.

Les sociétés intimées, s'opposent à cette prétention et soutiennent en substance d'une part, que M. [M] en sa qualité de Directeur Général fixait lui-même ses objectifs et d'autre part, qu'ils n'ont pas été atteints, et qu'enfin, M. [M] ne s'est jamais plaint de ne pas recevoir de rémunération variable, y compris lorsqu'il a reçu son solde de tout compte.

Cependant, d'une part, l'absence de réclamation ne vaut pas renonciation à se prévaloir d'un droit, et d'autre part, il résulte de la pièce 50 des intimées que l'appelant a, par courrier du 18 décembre 2020 adressé à M. [R], président des deux sociétés intimées, réclamé, après avoir appris que les autres membres du Comex les avaient perçues, le paiement de deux parts de rémunérations variables pour l'exercice fiscal allant du 1er septembre 2019 au 31 août 2020.

La cour relève que les exercices fiscaux étaient fixés du 1er septembre de l'année au 31 août de l'année suivante.

Le contrat de travail de M. [M] prévoyait à l'article 6 le versement d'une rémunération variable dans les termes suivants :

'Rémunération variable

En complément, Monsieur [C] [M] bénéficiera d'une rémunération variable annuelle, et ce dans le cadre des règles en vigueur au sein du Groupe.

Ce bonus cible, appelée SMIP (Senior Managers Incentive Plan) correspondra à 25% de la rémunération annuelle brute fixe de base si l'ensemble des objectifs individuels et commerciaux est atteint. Il pourra atteindre un maximum de 50% de la rémunération annuelle brute fixe conformément aux règles applicables dans l'entreprise.

Ce bonus sera réglé dans les conditions en vigueur au sein du Groupe, soit à ce jour au mois de décembre suivant la clôture de l'exercice.

Ensuite, les règles propres à ce bonus seront fixées d'années en années, dans les conditions fixées par le Groupe.

En outre, sur décision du Groupe et pas avant la fin de la période d'essai, il sera proposé à la Division :

- D'une part l'éligibilité de Monsieur [C] [M], au Plan de rémunération long terme selon les modalités définies par le Groupe Walgreens Boots Alliance (DAB-Defered Annuel Bonus). Cet avantage, non contractuel et discretionnaire, est cible de paiement de 30% avec un maximum de 45% du salaire annuel brut fixe sur une période de deux ans suivant la fin de l'année de référence. Il est subordonné à l'atteinte des objectifs de la société fixés dans le plan.

- D'autre par la nomination de Monsieur [C] [M] comme mandataire de la société Alcura.'

Arrêt n° 81 - page 11

12 juillet 2024

Il ne résulte donc pas de cette clause que M. [M] fixait lui-même ses objectifs, et aucun élément ne le démontre. Il est au contraire écrit, s'agissant de la part complémentaire de rémunération variable, qu'elle est accordée de manière discrétionnaire et est subordonnée à l'atteinte d'objectifs fixés dans un plan par le Groupe Walgreens Boots Alliance.

Dès lors, il ne résulte d'aucune pièce que des objectifs ont été fixés à M. [M] durant la relation contractuelle.

S'agissant du 'SMIP', il résulte du courrier précité qu'il ne réclamait rien à son employeur au titre de l'exercice allant du 1er septembre 2018 au 31 août 2019, et de la pièce 26 des intimées que M. [M] a écrit lui même, en sa qualité de directeur général, à un autre cadre senior de la Société Alcura que le seuil de déclenchement du bonus, fixé pour l'année 2019 à 85% de rentabilité minimum n'avait pas été atteint, de sorte qu'il est mal fondé à réclamer qu'il lui soit payé s'agissant de l'exercice fiscal 2018-2019. Par ailleurs, il est établi par la pièce 23 de l'employeur que ce bonus, payable avec la paie de novembre, n'est pas dû lorsque les salariés participants, au nombre desquels figure le Directeur Général, quittent l'entreprise, pour quelque raison que ce soit, avant l'échéance du paiement.

Le salarié ne démontrant pas qu'il était prévu ou d'usage de procéder à un paiement prorata temporis et la rupture de son contrat de travail étant intervenue le 27 mai 2020 après la fin de son préavis, il avait quitté la société avant l'échéance ainsi fixée, de sorte que cette rémunération variable n'est pas non plus due pour l'exercice fiscal allant du 1er septembre 2019 au 31 août 2020.

S'agissant de la part complémentaire prévue par le 'Plan de rémunération long terme selon les modalités définies par le Groupe Walgreens Boots Alliance (DAB-Defered Annuel Bonus)', les intimées produisent seulement, en pièce 46, un courrier de M. [R] adressé à M. [M] lui indiquant qu' 'aucun paiement DAB n'a été effecté pour l'année 2019" compte tenu d'un exercice difficile. Cependant, alors que M. [M] démontre avoir été éligible à ce bonus, les intimées ne produisent aucun élément établissant ses conditions d'attribution, que le seuil de déclenchement n'a pas été atteint pour les exercices fiscaux considérés, ou encore qu'un salarié quittant l'entreprise en cours d'exercice ne pouvait y prétendre.

Dès lors, il sera fait droit à la demande de M. [M] qui a calculé que sur la base de 30% de son salaire brut annuel, et au prorata du temps passé dans l'entreprise, la somme de 46 750 euros devait lui revenir au titre de ce 'plan rémunération long terme'.

Faute de stipulation contractuelle en ce sens, cette somme doit être, contrairement à ce que soutiennent les intimées, assortie des congés payés afférents

4) Sur les autres demandes :

Les créances salariales produiront intérêts au taux légal à compter de la demande, c'est-à-dire de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation, soit le 8 janvier 2021, et les créances indemnitaires à compter de leur prononcé.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée dans les conditions de l'article 1243-2 du code civil.

Les deux sociétés intimées, qui succombent, seront condamnées aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris ceux qui ont été réservés par arrêt du 19 novembre 2021, et déboutées de leur demande d'indemnité de procédure.

En équité, elles devront verser chacune à M. [M] une indemnité de procédure de 2 000 euros.

Arrêt n° 81 - page 12

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PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition du greffe :

ANNULE le jugement du conseil de prud'hommes de Châteauroux rendu le 19 septembre 2023 ;

ÉVOQUANT :

DIT que le licenciement de M. [C] [M] est sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France solidairement à lui payer les sommes suivantes :

- 18 000 € brut à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 46 750 € brut à titre de rappel de rémunération variable, outre 4 675 € brut au titre des congés payés afférents ;

DIT que les créances salariales sont assorties de l'intérêt au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes, soit le 8 janvier 2021, et les créances indemnitaires à compter de l'arrêt ;

ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière dans les conditions de l'article 1243-2 du code civil ;

DÉBOUTE M. [M] de ses autres prétentions ;

CONDAMNE la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France à payer à M. [M] chacune la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS Alcura France et la SAS Alliance Healthcare Group France aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris ceux qui ont été réservés par arrêt du 19 novembre 2021, et les déboute de leur demande d'indemnité de procédure.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. DELPLACE C. VIOCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/01000
Date de la décision : 12/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 21/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-12;23.01000 ?
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