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14/06/2024 | FRANCE | N°24/00064

France | France, Cour d'appel de Bourges, Chambre sociale, 14 juin 2024, 24/00064


SD/CV





N° RG 24/00064

N° Portalis DBVD-V-B7I-DTV3





Décision attaquée :

du 05 janvier 2024

Origine :

conseil de prud'hommes - formation paritaire de BOURGES







--------------------





Mme [T] [W]





C/



S.A.R.L. CL SHUNXIN









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Expéd. - Grosse



Me FOURCADE 14.6.24



CL SHUNXIN 14.6.24











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COUR D'APPEL DE BOURGES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 14 JUIN 2024



N° 66 - 6 Pages





APPELANTE :



Madame [T] [W]

[Adresse 1]



Représentée par Me Antoine FOURCADE de la SELARL ARENES AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES







INTIMÉE :



S.A.R.L. CL SHUNXIN

ayant ét...

SD/CV

N° RG 24/00064

N° Portalis DBVD-V-B7I-DTV3

Décision attaquée :

du 05 janvier 2024

Origine :

conseil de prud'hommes - formation paritaire de BOURGES

--------------------

Mme [T] [W]

C/

S.A.R.L. CL SHUNXIN

--------------------

Expéd. - Grosse

Me FOURCADE 14.6.24

CL SHUNXIN 14.6.24

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 14 JUIN 2024

N° 66 - 6 Pages

APPELANTE :

Madame [T] [W]

[Adresse 1]

Représentée par Me Antoine FOURCADE de la SELARL ARENES AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES

INTIMÉE :

S.A.R.L. CL SHUNXIN

ayant été située [Adresse 2]

Défaillante

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Mme VIOCHE, présidente de chambre, rapporteur

en l'absence d'opposition des parties et conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE

Lors du délibéré : Mme VIOCHE, présidente de chambre

Mme de LA CHAISE, présidente de chambre

Mme CHENU, conseillère

DÉBATS : À l'audience publique du 19 avril 2024, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 14 juin 2024 par mise à disposition au greffe.

Arrêt n° 66 - page 2

14 juin 2024

ARRÊT : Rendu par défaut - Prononcé publiquement le 14 juin 2024 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE :

La SARL CL Shunxin exploite une activité de restauration vente sur place et à emporter et emploie moins de 11 salariés.

Suivant contrat à durée indéterminée en date du 25 octobre 2017, Mme [T] [W] a été engagée par cette société en qualité de serveuse polyvalente, niveau I échelon I, moyennant un salaire brut mensuel de 1 683,50 €, contre 39 heures de travail effectif par semaine.

En dernier lieu, Mme [W] percevait un salaire brut mensuel de 1 966,85 € pour une durée du travail inchangée.

La convention collective nationale des Cafés Hôtels Restaurant s'applique à la relation de travail.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 14 septembre 2023, Mme [W] a réclamé à son employeur le paiement de 68 heures 45 supplémentaires. Le 13 octobre suivant, elle l'a mis en demeure de lui régler son salaire de septembre 2023.

Ses réclamation et mise en demeure étant restées vaines et invoquant l'urgence, Mme [W] a, par requête déposée le 17 octobre 2023, saisi le conseil de prud'hommes de Bourges en sa formation de référé afin d'obtenir paiement de son salaire de septembre 2023, d'un rappel de 68 heures 45 supplémentaires, le remboursement du coût des lettres recom-mandées envoyées et des frais bancaires exposés ainsi que des dommages et intérêts pour non-respect de son droit à congés payés, et obtenir la remise du bulletin de salaire de septembre 2023.

La convocation qui a alors été adressée à l'employeur étant revenue avec la mention 'pli avisé et non réclamé', Mme [W], l'a, par acte du 28 novembre 2023, fait citer aux mêmes fins devant la juridiction prud'homale.

Dans ses dernières écritures réitérées à l'audience, à laquelle la SARL CL Shuxin n'a pas comparu ni ne s'est fait représenter, Mme [W], par l'intermédiaire de son conseil, a réclamé les salaires de septembre à novembre 2023, sauf à parfaire, outre les congés payés afférents, un rappel d'heures supplémentaires ainsi que des dommages et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail. Elle a également sollicité qu'il soit ordonné à l'employeur, sous une astreinte dont le conseil de prud'hommes se réserverait la liquidation, de lui remettre ses bulletins de salaire pour les mois de septembre, octobre et novembre 2023 outre un bulletin de régularisation, ainsi qu'une indemnité de procédure.

Par ordonnance réputée contradictoire du 5 janvier 2024, auquel il est renvoyé pour plus ample exposé, le conseil de prud'hommes, en sa formation de référé, a condamné la SARL CL Shuxin à régler à Mme [W] les sommes suivantes :

- 2 139,05 euros au titre du salaire de septembre 2023, outre 213,91 euros de congés payés afférents,

- 902,30 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires non réglées entre les mois de janvier et d'août 2023, outre 90,23 euros de congés payés afférents,

- 55,46 euros à titre de dommages et intérêts pour courrier et frais bancaires.

Arrêt n° 66 - page 3

14 juin 2024

Il a en outre :

- ordonné à la SARL CL Shuxin de remettre à Mme [W] le bulletin de salaire du mois de septembre 2023,

- débouté la salariée de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant du non-respect du droit à congés payés,

- rejeté les conclusions de la salariée remises à l'audience du 15 décembre 2023,

- rappelé que l'ordonnance n'a pas au principal l'autorité de la chose jugée et qu'elle est exécutoire à titre provisoire.

Le 24 janvier 2024, Mme [W] a régulièrement relevé appel de cette décision par la voie électronique.

Elle a fait signifier à la SARL CL Shuxin sa déclaration d'appel ainsi que ses conclusions et pièces afférentes par acte du 2 février 2024, suivi d'un procès-verbal de recherches infructueuses, puis sa constitution d'avocat par acte du 5 avril suivant.

DEMANDES ET MOYENS DES PARTIES :

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions de la salariée, la cour se réfère expressément à ses conclusions.

1 ) Ceux de Mme [W] :

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 2 février 2024 et signifiées le même jour à l'employeur par acte de commissaire de justice, elle sollicite l'infirmation de la décision attaquée en ce qu'elle a minoré le rappel de salaire qui lui était dû à la somme de 2 139,05 euros, outre 213,91 euros de congés payés afférents, a rejeté ses écritures et l'a déboutée de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Elle poursuit en revanche la confirmation de l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a condamné l'employeur à lui payer la somme de 902,30 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 90,23 euros de congés payés afférents, ainsi que celle de 55,46 euros à titre de dommages et intérêts pour courrier et frais bancaires.

Elle demande ainsi que la cour, statuant de nouveau dans la limite des chefs qu'elle critique, condamne la SARL CL Shuxin à lui payer les sommes suivantes :

- 9 834,25 euros à titre de rappel de salaire des mois de septembre 2023 à janvier 2024, outre 983,42 euros au titre des congés payés afférents,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail.

Elle réclame enfin qu'il soit ordonné sous astreinte à l'employeur de lui remettre ses bulletins de salaire de septembre à novembre 2023 ainsi qu'un bulletin de régularisation, et que celui-ci soit condamné à lui payer la somme de 1 500 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens.

La SARL CL Shuxin ne s'est pas fait représenter.

Arrêt n° 66 - page 4

14 juin 2024

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En application de l'article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée.

En l'espèce, le commissaire de justice instrumentaire n'ayant pu effectuer la signification de la déclaration d'appel et des conclusions à personne du fait que la SARL CL Shunxin n'a pu être trouvée à l'adresse indiquée, il a, en application de l'article 659 du code de procédure civile, rendu compte de ses investigations et diligences accomplies pour tenter de retrouver le destinataire de l'acte et envoyé le même jour une copie de celui-ci à la dernière adresse connue, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et une lettre simple en application de l'article 658 du même code.

Dès lors, la signification de la déclaration d'appel et des conclusions de la salariée ayant été transformée en procès-verbal de recherches infructueuses, la demande est régulière et aucun élément ne motivant de relever d'office son irrecevabilité, il convient d'examiner si l'appel est fondé.

1) Sur les demandes en paiement de salaires et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

L'article R. 1455-5 du code du travail dispose que dans tous les cas d'urgence, la formation de référé peut, dans la limite de la compétence du conseil de prud'hommes, ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

L'article R. 1455-7 dispose quant à lui que dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

S'il appartient au demandeur d'établir l'existence du droit qu'il invoque, il incombe au défendeur de prouver que ce droit est sérieusement contestable.

En l'espèce, Mme [W] expose que la SARL CL Shunxin, dont l'activité a été reprise par M. [V] à compter du 28 avril 2022 et qui a refusé de lui payer ses heures supplémentaires à compter du mois de janvier 2023, ne lui a plus réglé ses salaires à compter du mois de septembre 2023, M. [V] ayant été placé en arrêt maladie et son fils ayant fermé le restaurant en demandant aux salariés de rentrer chez eux.

Elle précise que la mise en demeure qu'elle a adressée à son employeur par lettre recommandée avec accusé de réception reçue par lui le 8 novembre 2023 est restée vaine et que plus aucun salaire ne lui a été depuis versé, et ce alors qu'elle n'a été ni dispensée de son obligation de fournir un travail ni licenciée, et qu'elle se tient à la disposition de son employeur depuis le mois de septembre 2023. Elle réclame ainsi la somme à parfaire de 9 834,25 euros brut au titre des salaires dus entre le 1er septembre 2023 et le 31 janvier 2024, outre les congés payés afférents.

Elle reproche aux premiers juges d'avoir minoré la somme allouée au motif que ses conclusions du 15 décembre 2023, reprises à l'audience et par lesquelles elle formait des demandes en paiement de la somme de 5 900,55 euros au titre des salaires de septembre à novembre 2023

Arrêt n° 66 - page 5

14 juin 2024

et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, n'étaient pas recevables, et soutient qu'ils ont rejeté celles-ci au mépris du principe de la contradiction.

L'article 16 du code de procédure civile prévoit que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.

Il ne peut retenir, dans sa décision, les moyens, les explications et les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement.

Il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations.

En procédure orale, les moyens sont présumés, sauf preuve contraire, avoir été débattus contradictoirement à l'audience.

Or, il ressort de la lecture de l'ordonnance critiquée et de la note d'audience figurant au dossier transmis par le conseil de prud'hommes que les conclusions que lui a remises Mme [W] lors de l'audience du 15 décembre 2023, qui s'est tenue en l'absence de la SARL CL Shunxin, ont été rejetées sans que la salariée ait été en mesure de présenter ses observations sur le moyen d'irrecevabilité puisqu'il n'a pas été soulevé lors des débats. Il s'ensuit que c'est en méconnaissance du texte dont la violation est invoquée que le conseil de prud'hommes a statué comme il l'a fait, si bien qu'il convient d'infirmer la décision déférée de ce chef.

S'agissant de la demande en paiement des salaires dus du 1er septembre 2023 au 31 janvier 2024, à parfaire, Mme [W] produit son contrat de travail à durée indéterminée établissant qu'elle a été engagée en qualité de serveuse à compter du 26 septembre 2017 par la SARL CL Shunxin, son bulletin de salaire du mois d'août 2023 qui mentionne une rémunération mensuelle de 1 966,85 euros pour 39 heures de travail par semaine, ainsi qu'une mise en demeure de lui payer ses salaires du 13 octobre 2023. Elle établit donc l'existence du droit qu'elle invoque.

Il n'est par ailleurs pas sérieusement contestable que le paiement du salaire constitue une obligation essentielle de l'employeur.

Ainsi, il appartient à celui-ci, débiteur de l'obligation, de rapporter la preuve du paiement des salaires afférents au travail effectif accompli.

La SARL CL Shunxin, en ne comparaissant pas, est défaillante dans l'administration de cette preuve.

Le contrat de travail de Mme [W] n'ayant été rompu ni par celle-ci ni par l'employeur, il y a lieu, par voie infirmative et en l'absence de précision sur la date à partir de laquelle devrait être parfaite la somme allouée et de production d'un décompte à cette fin, de condamner la SARL CL Shunxin à payer à la salariée, à titre de provision à valoir sur ses salaires dus du 1er septembre 2023 au 31 janvier 2024, la somme de 9 834,25 euros, outre celle de 983,42 euros au titre des congés payés afférents.

En revanche, il ne rentre pas dans les pouvoirs du juge des référés de statuer sur une demande de dommages et intérêts. Dès lors, la demande formée de ce chef par Mme [W] au motif que l'employeur n'aurait pas respecté son obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail ne peut prospérer, et elle en sera déboutée par ajout à l'ordonnance qui a seulement statué sur sa demande initiale de dommages et intérêts pour préjudice moral résultant du non-respect de l'obligation à congés payés.

2) Sur les autres demandes :

Arrêt n° 66 - page 6

14 juin 2024

La somme allouée étant seulement provisionnelle, il n'y a pas lieu d'ordonner la remise des bulletins de salaire afférents à la période considérée.

La SARL CL Shunxin, partie succombante, est condamnée aux dépens d'appel, et en équité, condamnée à payer à Mme [W] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant sur les dispositions qui lui sont soumises, par arrêt prononcé par défaut et par mise à disposition au greffe :

INFIRME l'ordonnance déférée en ce qu'elle a condamné la SARL CL Shunxin à payer à Mme [T] [W] la somme de 2 139,05 euros au titre du salaire de septembre 2023, outre 213,91 euros au titre des congés payés afférents, et en ce qu'elle a rejeté les conclusions du 15 décembre 2023 déposées à l'audience par la salariée ;

STATUANT À NOUVEAU DES CHEFS INFIRMÉS et AJOUTANT:

CONDAMNE la SARL CL Shunxin à payer à Mme [T] [W], à titre de provision à valoir sur ses salaires dus du 1er septembre 2023 au 31 janvier 2024, la somme de 9 834,25 €, outre celle de 983,42 € au titre des congés payés afférents ;

DÉBOUTE Mme [W] de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail et visant à la remise sous astreinte par l'employeur de ses bulletins de salaire et de régularisation pour la période considérée ;

CONDAMNE la SARL CL Shunxin à payer à Mme [T] [W] la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SARL CL Shunxin aux dépens d'appel.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. DELPLACE C. VIOCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 24/00064
Date de la décision : 14/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-14;24.00064 ?
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