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06/06/2024 | FRANCE | N°23/00719

France | France, Cour d'appel de Bourges, 1ère chambre, 06 juin 2024, 23/00719


SM/OC













































































COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- Me Dominique LACROIX

- la SCP SOREL





Expédition TJ



LE : 06 JUIN 2024

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 06 JUIN 2024


>N° - Pages





N° RG 23/00719 - N° Portalis DBVD-V-B7H-DSIA



Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de BOURGES en date du 31 Mai 2023





PARTIES EN CAUSE :



I - Mme [Y] [G] épouse [O]

née le [Date naissance 6] 1946 à [Localité 9]

[Adresse 4]

[Localité 2]



Représentée par Me Dominique LACROIX, avocat au barreau de BOURGES



timbre fisca...

SM/OC

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- Me Dominique LACROIX

- la SCP SOREL

Expédition TJ

LE : 06 JUIN 2024

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 06 JUIN 2024

N° - Pages

N° RG 23/00719 - N° Portalis DBVD-V-B7H-DSIA

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de BOURGES en date du 31 Mai 2023

PARTIES EN CAUSE :

I - Mme [Y] [G] épouse [O]

née le [Date naissance 6] 1946 à [Localité 9]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Dominique LACROIX, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

APPELANTE suivant déclaration du 17/07/2023

II - M. [P] [B]

né le [Date naissance 1] 1953 à [Localité 9]

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représenté par la SCP SOREL, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

INTIMÉ

06 JUIN 2024

N° /2

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Avril 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. PERINETTI, Conseiller chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Odile CLEMENT Présidente de Chambre

M. Richard PERINETTI Conseiller

Mme Marie-Madeleine CIABRINI Conseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS

***************

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

**************

EXPOSE DU LITIGE

[R] [D] [G] et [N] [B], mariés le [Date naissance 3] 1951 sous le régime de la communauté de biens meubles et acquêts, sont décédés respectivement les 23 mai 2017 et 4 août 2018 à [Localité 9] (18).

Ils ont eu ensemble un fils, M. [P] [B], né le [Date naissance 1] 1953.

[R] [G] avait eu d'une précédente relation une fille, Mme [Y] [G], épouse [O], née le [Date naissance 6] 1946.

Au décès de [N] [B], Maître [H], notaire, a porté à la connaissance de [P] [B] et [Y] [G] l'existence d'un testament en date du 26 mars 1964 , qui a fait l'objet d'un procès-verbal de dépôt établi par le notaire le 12 décembre 2018, par lequel [N] [B] indique que ses biens seront partagés à parts égales entre ses enfants et [Y] [G].

M. [P] [B] a par la suite indiqué avoir découvert un second testament, qu'il a déposé chez le notaire le 27 février 2019, ainsi rédigé, (sans correction orthographique) :

« 1/ Je souhaite que l'usufruit des biens et droits immobiliers et mobiliers composant ma succession reviennent à Madame [D] [G], mon épouse.

2/ la nue-propriété de la maison d'habitation et dépendances situées à [Localité 9], route de la Châtre avec la petite maison deux pièces, le chantier les hangars et les terres attenantes reviendront à Monsieur [P] mon fils [B].( Sic)

3/ la nue-propriété des deux maisons situées à [Localité 9] avec le terrain qu'elle habite depuis 1970 gratuitement reviendront à Madame [Y] [O], la fille de mon épouse.

Pour les meubles je souhaite que notre chambre à coucher en bois de noyer l'armoire le lit une table de nuit et une commode reviennent à ladite Madame [Y] [O] suite au décé du survivant d'entre mon épouse et moi-même. Ce legs fait à Madame [U] [O] est effectué hors part successoral. »

Mme [G] a contesté ce testament.

M. [B] a alors sollicité l'ouverture des opérations de partage des deux successions et demandé que soit déclaré valable le second testament de [N] [B].

Mme [G] a conclu à la nullité du testament qui ne serait pas écrit par [N] [B] et qui n'est pas daté. Elle a par ailleurs sollicité une expertise aux fins d'évaluation des biens mobiliers, immobiliers et liés à l'exploitation de la scierie.

Elle a également sollicité l'attribution préférentielle du bien qu'elle occupe situé à [Localité 9], [Adresse 4] et, en cas de désaccord de M. [B] sur les attributions ou sur une vente amiable, a demandé le tirage au sort des lots.

Par jugement du 31 mai 2023, le tribunal judiciaire de Bourges a :

- Ordonné l'ouverture des opérations de liquidation partage des successions d'[R] [D] [G] et de [N] [B] ,

- Désigné pour y procéder le Président de la Chambre des notaires du Cher et de l'Indre avec faculté de délégation, à l'exclusion de Maître [H] ;

- Commis un juge pour surveiller les opérations de partage et faire rapport en cas de difficultés ;

- Dit qu'est valide le testament déposé le 27 février 2019 en l'étude de Maître [H] ;

- Débouté Mme [G] de sa demande d'annulation de ce testament ;

- Dit que dans le cadre des comptes entre les indivisaires devra s'appliquer le testament, objet du dépôt du 27 février 2019, à l'exclusion du testament du 23 mars 1964 ;

- Débouté Mme [G] de sa demande d'expertise des biens mobiliers et immobiliers composant la succession ;

- Dit qu'à défaut d'accord sur les attributions immobilières et mobilières, des lots seront constitués et tirés au sort ;

- Débouté M. [B] de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation partage.

Suivant déclaration du 17 juillet 2023, Mme [G] a relevé appel de ce jugement sauf en ses dispositions ordonnant l'ouverture des opérations partage.

Dans ses dernières conclusions signifiées le 17 janvier 2024, Mme [G] demande à la cour de :

- Infirmer le jugement :

' en ce qu'il a débouté Mme [Y] [G] épouse [O] de sa

demande d'annulation du testament déposée le 27 février 2019 en l'Etude de Maître [H], en ce qu'il a déclaré valide ledit testament comme devant seul s'appliquer pour l'établissement des comptes entre les indivisaires,

' et en ce qu'il a également débouté Mme [G] épouse [O] de sa

demande d'expertise des biens immobiliers et mobiliers composant les successions.

Statuant à nouveau :

- Déclarer nul le document objet du dépôt reçu par Maître [H] le 27 Février 2019,

- Ordonner à titre subsidiaire une vérification d'écritures sur le fondement des articles 287, 288 et 292 du code civil ou l'organisation d'une expertise judiciaire graphologique, afin d'étude de l'écrit reçu par Maître [H] le 27 févier 2019,

- Dire que le technicien ou l'expert désigné se rendra chez Maître [H] ès qualité de dépositaire de l'écrit litigieux, les parties dument convoquées pour se faire remettre l'original du testament, outre communication de tous les documents possibles par le défunt [N] [B],

- Ordonner une expertise de l'ensemble des biens immobiliers et mobiliers, et de ceux liés à l'exploitation d'une scierie en application des articles 145 et 1362 du code de procédure civile,

- Condamner M [P] [B] aux entiers dépens d'appel ainsi qu'à une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile de 3.000 €.

Par conclusions signifiées le 13 mars 2024, M. [B] présente les demandes suivantes :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a :

Dit qu'est valide le testament déposé le 27 février 2019 en l'étude de Maître [H] ;

Débouté Mme [G] de sa demande d'annulation de ce testament ;

Dit que dans le cadre des comptes entre les indivisaires devra s'appliquer le testament, objet du dépôt du 27 février 2019, à l'exclusion du testament du 23 mars 1964 ;

Subsidiairement , sur ce point,

Désigner un expert graphologue aux fins que soit vérifiée l'écriture du testament déposé le 27 février 2019 ;

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme [G] de sa demande d'expertise des biens immobiliers et mobiliers composant les successions,

- Débouter Mme [G] du surplus de ses demandes,

- Infirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [B] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner Mme [G] à payer à M. [B] une somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

La condamner aux dépens.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux dernières conclusions des parties pour le développement de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 26 mars 2024.

MOTIFS

Sur la demande en nullité du testament déposé au rang des minutes du notaire le 27 février 2019

Aux termes de l'article 288 du code civil, il appartient au juge de procéder à la vérification d'écriture au vu des éléments dont il dispose après avoir, s'il y a lieu, enjoint aux parties de produire tous documents à lui comparer et fait composer, sous sa dictée, des échantillons d'écriture

Il doit tout d'abord être constaté que l'écriture du testament de [N] [B] du 23 mars 1964 n'est pas semblable à celle du testament retrouvé par M. [B] après le décès de son père en 2018. Cela s'explique par le fait qu'en 1964, [N] [B] était âgé de seulement 35 ans et qu'au fil du temps et en vieillissant, l'écriture se modifie.

M. [B] produit quatre documents de comparaison dont il n'est pas contesté qu'ils ont été écrits par son père à une période plus récente :

- une déclaration de détention d'arme du 3 mai 1996

- un courrier du 23 février 2005, relatif au non renouvellement de son action de chasse

- un courrier du 4 octobre 2010 autorisant Mme [O] à le représenter pour des opérations de constatations

- une attestation de vente d'une chaudière datée du 14 janvier 2010.

Dans ces documents de comparaison, l'écriture est inclinée vers la droite, tout comme le testament querellé, les lettres sont séparées et l'écriture apparaît d'emblée similaire à celle du testament.

Ainsi le 'L' majuscule de '[Localité 9]' est identique dans le testament et dans les documents de comparaison.

Le 's' minuscule est particulièrement caractéristique . Il peut parfois être écrit de façon habituelle mais l'est aussi très souvent comme un 5 sans la barre horizontale. Le 'b' minuscule a rarement une boucle. Le 'r' a toujours une boucle. La barre du 'd' est remontante et non descendante. La partie inférieure des 'g' et ' f' est également caractéristique et se retrouve de la même manière dans le testament et dans les documents de comparaison. Les signatures sont similaires. S'ajoute à titre de comparaison pour la signature un document de 'rappel à la loi' signé de [N] [B] le 1er octobre 2013.

Il se déduit de ces observations, aisément réalisées, que le scripteur du testament litigieux est le même que celui des documents de comparaison produits, à savoir [N] [B], ce que le premier juge a exactement dit, sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise graphologique.

Mme [G] soulève l'absence de date du testament déposé par M. [B] chez le notaire le 27 février 2019.

Un testament olographe non daté n'encourt pas la nullité dès lors que des éléments intrinsèques à l'acte, corroborés par des éléments extrinsèques, établissent qu'il a été rédigé au cours d'une période déterminée et qu'il n'est pas démontré qu'au cours de cette période le testateur ait été frappé d'une incapacité de tester ou ait rédigé un testament révocatoire ou incompatible. ( Cass civ 1ère, 10 mai 2007, n°05-14.366).

C'est de manière pertinente que M. [B] fait valoir que le testament a été rédigé après 1970 puisqu'il fait état de ce que Mme [O] réside dans les deux maisons de [Localité 9] gratuitement depuis 1970, peu important que la réalité soit depuis 1973, comme celle-ci le soutient, étant donné qu'il sera exposé ci-après que le testateur a rédigé ce second testament plus de 40 ans après le début de l'occupation gratuite de l'appelante et qu'il a pu ne pas se souvenir de l'année exacte, sans pour autant être atteint de troubles du discernement.

M. [B] produit en outre deux modèles de testament dactylographiés, l'un pour [D] [R] [G] et l'autre pour [N] [B], les deux contenant des dispositions ayant le même objet.

Il fait valoir que les deux modèles ont été dans un premier temps signés par chaque époux puis [N] [B] a recopié le testament de sa main, sans doute sur les conseils du notaire consulté, ce que n'a pas pu faire sa femme, puisqu'aucun testament n'est rédigé de manière manuscrite par elle et que par un courrier du 7 février 2014, [N] [B] écrit :' Madame [D] [G] femme [B] née le [Date naissance 5] 1929 à [Localité 10] est dans l'impossibilité d'écrire sont testament. Je vous prie, Maître, l'expression de mes sentiments distingués'. Il se déduit de ce document que le testament a été rédigé à cette même période et au plus tard le 7 février 2014. L'écriture de ce courrier et sa signature sont d'ailleurs elles aussi parfaitement similaires à celles du testament.

Cette analyse est corroborée par le fait qu'un différend est survenu entre [N] [B] et Mme [Y] [G] épouse [O] et que le premier a fait l'objet d'un rappel à la loi le 1er octobre 2013 pour des violences légères, étant observé que [N] [B] a néanmoins effectué des legs au bénéfice de Mme [O].

Il existe donc tant des éléments intrinsèques que des éléments extrinsèques venant les corroborer, permettant de dater le testament du mois de février 2014.

Mme [O] n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations d'insanité d'esprit de [N] [B].

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a déclaré valable le testament déposé le 27 février 2019 chez Maître [H], Notaire à [Localité 11], et t dit qu'il devra seul s'appliquer, à l'exclusion du testament du 23 mars 1964.

Sur la demande d'expertise des biens immobiliers successoraux

Aux termes de l'article 146 du code de procédure civile, 'une mesure d'instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l'allègue ne dispose pas d'éléments suffisants pour le prouver. En aucun cas une mesure d'instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l'administration de la preuve.'

Il dépendait de la communauté ayant existé entre [R] [G] et [N] [B] des biens immobiliers situés à [Localité 9], [Adresse 4], évalués à 30 000 €, occupés par Mme [O], un autre bien situé à [Localité 9], [Localité 8], évalué à 110 000 € et trois parcelles.

Mme [O] se borne à contester l'évaluation de la maison située [Adresse 4], tout comme devant le premier juge, sans apporter à hauteur d'appel, des éléments permettant de remettre en cause cette évaluation et de justifier sa demande d'expertise.

C'est dès lors exactement que le tribunal l'a déboutée de sa demande d'expertise.

Sur les autres demandes

Mme [O] a fait appel du chef de la décision disant qu'à défaut d'accord sur les attributions immobilières et mobilières, des lots seront constitués et tirés au sort.

Elle ne développe pas son appel sur ce point, de sorte que le jugement sera confirmé de ce chef.

Le jugement sera de même confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [O] succombant en son appel, elle sera condamnée aux dépens.

L'équité conduit à allouer à M. [B] une somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;

CONDAMNE Mme [G] épouse [O] à verser à M. [P] [B] une somme de 2 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE Mme [G] épouse [O] aux dépens d'appel.

L'arrêt a été signé par O. CLEMENT, Présidente, et par S. MAGIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,

S. MAGIS O. CLEMENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23/00719
Date de la décision : 06/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-06;23.00719 ?
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