La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/05/2024 | FRANCE | N°23/00542

France | France, Cour d'appel de Bourges, Chambre sociale, 31 mai 2024, 23/00542


SD/EC





N° RG 23/00542

N° Portalis DBVD-V-B7H-DRYH





Décision attaquée :

du 11 mai 2023

Origine : conseil de prud'hommes - formation paritaire de BOURGES





--------------------



M. [T] [V]





C/



S.A.S. CALIBRACIER



S.E.L.A.S. BMA, administrateur judiciaire de la société CALIBRACIER



Me [K] [R], madataire judiciaire de la société CALIBRACIER



CGEA DE [Localité 5]



--------------------


r> Expéd. - Grosse



Me PIGNOL 31.5.24



Me VAIDIE 31.5.24



BMA 31.5.24



M. [R] 31.5.24



CGEA [Localité 5] 31.5.24

















COUR D'APPEL DE BOURGES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 31 MAI 2024



N° 60 - 13 Pages



...

SD/EC

N° RG 23/00542

N° Portalis DBVD-V-B7H-DRYH

Décision attaquée :

du 11 mai 2023

Origine : conseil de prud'hommes - formation paritaire de BOURGES

--------------------

M. [T] [V]

C/

S.A.S. CALIBRACIER

S.E.L.A.S. BMA, administrateur judiciaire de la société CALIBRACIER

Me [K] [R], madataire judiciaire de la société CALIBRACIER

CGEA DE [Localité 5]

--------------------

Expéd. - Grosse

Me PIGNOL 31.5.24

Me VAIDIE 31.5.24

BMA 31.5.24

M. [R] 31.5.24

CGEA [Localité 5] 31.5.24

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 31 MAI 2024

N° 60 - 13 Pages

APPELANT :

Monsieur [T] [V]

[Adresse 4]

Présent, assisté de Me Pierre PIGNOL de la SELARL ALCIAT-JURIS, avocat au barreau de BOURGES

INTIMÉE :

S.A.S. CALIBRACIER

[Adresse 6]

Représentée par Me Stéphanie VAIDIE, substituée par Me Alain TANTON, de la SCP AVOCATS CENTRE, avocat postulant, du barreau de BOURGES

Ayant pour dominus litis Me Romain GUILLEMARD de la SELARL DELAHOUSSE ET ASSOCIÉS, du barreau d'AMIENS

ASSIGNÉS EN INTERVENTION FORCÉE :

S.E.L.A.S. BMA ADMINISTRATEURS JUDICIAIRES, Me [N] [U], administrateur judiciaire de la société CALIBRACIER

[Adresse 1]

Non représentée

Maître [K] [R], madataire judiciaire de la société CALIBRACIER

[Adresse 2]

Non représenté

CGEA DE [Localité 5]

[Adresse 3]

Non représenté

Arrêt n° 60 - page 2

31 mai 2024

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

PRÉSIDENT : Mme VIOCHE, présidente de chambre

ASSESSEURS : Mme de LA CHAISE, présidente de chambre

Mme CHENU, conseillère

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE

DÉBATS : À l'audience publique du 05 avril 2024, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 31 mai 2024 par mise à disposition au greffe.

ARRÊT : Réputé contradictoire - Prononcé publiquement le 31 mai 2024 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

FAITS ET PROCÉDURE :

La SAS Calibracier, qui a pour activité principale la fabrication et la commercialisation de barres et tubes de métaux calibrés sur mesure à destination des entreprises, emploie plus de 11 salariés.

Suivant contrat à durée déterminée de 6 mois conclu à compter du 6 septembre 2004, M. [V], né le 20 mars 1979, a été engagé par cette société en qualité d'assistant commercial export, catégorie administratifs - techniciens, coefficient 365, niveau V de la convention collective applicable. Le contrat prévoit une rémunération brute mensuelle fixée à 2 335 euros, contre 156 heures de travail effectif par mois.

Selon avenant en date du 4 mars 2005, les parties ont convenu du renouvellement du contrat jusqu'au 4 septembre 2005, la classification de M. [V] étant portée au niveau V échelon 4 coefficient 395 à compter du 1er mars 2005.

La relation salariale s'est ensuite poursuivie dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée du 5 septembre 2005.

Après avoir occupé le poste de responsable export, cadre position II indice 125, et selon un nouvel avenant au contrat de travail en date du 20 janvier 2014, M. [V] était promu directeur général adjoint, non-mandataire social, cadre position III A, indice 135, poste qu'il occupait au dernier état de la relation contractuelle.

L'avenant prévoyait, en son article 8, une rémunération mensuelle brute forfaitaire de 4 583,33 euros sur la base d'un forfait annuel de 218 jours de travail et une rémunération variable, dont le montant et les modalités de calcul et de versement sont déterminés par l'employeur. La convention collective applicable était alors la convention collective des ingénieurs et cadres de la métallurgie.

En dernier lieu, M. [V] percevait un salaire brut mensuel de 5 289,65 euros.

À compter du 27 avril 2018, à la suite de la cession de la SAS Calibracier par le groupe IMS, la

Arrêt n° 60 - page 3

31 mai 2024

présidence de la société a été assurée par la société Tem Holding.

Le salarié a été placé en arrêt maladie le 27 novembre 2018 et a saisi le conseil de prud'hommes de Bourges le 6 décembre 2018, en invoquant des faits constitutifs d'un harcèlement moral et sollicitant, notamment, la résiliation judiciaire de son contrat de travail. Cette procédure est enrôlée au répertoire général sous le n° 20/00090.

Le 12 décembre 2018, M. [V] a été déclaré inapte à tous postes dans l'entreprise par le médecin du travail. L'entretien préalable à un éventuel licenciement fixé le 13 décembre 2018, et auquel M. [V] avait été convoqué par courrier du 4 décembre 2018, ne s'est pas tenu.

Convoqué à un nouvel entretien préalable le 4 janvier 2019, le salarié a été licencié pour inaptitude par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 janvier 2019.

Invoquant la nullité de son licenciement et sollicitant le paiement de diverses sommes au titre de l'exécution et la rupture de la relation contractuelle, M. [V] a saisi de nouveau, le conseil de prud'hommes de Bourges, section encadrement, le 17 janvier 2020. Cette procédure, dont la cour est ici saisie, est enrôlée au répertoire général sous le n° 20/00011.

Par jugement en date du 29 octobre 2020, statuant sur la procédure enrôlée sous le numéro 20/00090, le conseil de prud'hommes de Bourges, section encadrement, a :

- dit que la convention de forfait-jours conclue entre M. [V] et la SAS Calibracier était privée d'effet à l'égard de ce dernier,

- dit que M. [V] a été victime de faits constitutifs d'un harcèlement moral au sein de la SAS Calibracier,

- prononcé la résiliation judiciaire, à compter du 21 janvier 2019, du contrat de travail conclu le 6 septembre 2004 entre M. [V] et la SAS Calibracier, aux torts de cette dernière, et dit que cette résiliation produira les effets d'un licenciement nul,

- condamné la SAS Calibracier à payer à M. [V] les sommes suivantes :

- 58 973,21 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, outre 5 897,32 € au titre des congés payés afférents,

- 39 516,36 € au titre des contreparties obligatoires en repos, outre 3 951,64 € au titre des congés payés afférents,

- 7 500 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait du harcèlement moral,

- 100 000 € à titre d'indemnité pour licenciement nul,

- 26 374,23 € à titre d'indemnité conventionnelle de préavis, outre 2 637,43 € à titre de congés payés afférents,

-10 325,51 € à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- débouté M. [V] de ses demandes de rappel de primes variables et de congés payés afférents, de dommages-intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait jours et d'indemnité pour travail dissimulé,

- ordonné à la SAS Calibracier de remettre à M. [V] une attestation Pôle emploi conforme au présent jugement sous peine d'astreinte de 50 € par jour de retard pendant une durée de 6 mois, passé un délai d'un mois suivant la notification du présent jugement,

- réservé sa compétence pour l'éventuelle liquidation de l'astreinte prononcée,

- condamné la SAS Calibracier à payer à M. [V] la somme de 2 500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

- débouté M. [V] du surplus de ses demandes,

- débouté la SAS Calibracier de l'ensemble de ses demandes, en ce compris sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS Calibracier aux dépens de l'instance.

Selon jugement du tribunal de commerce de Valenciennes en date du 14 décembre 2020, la SAS Calibracier a été placée en redressement judiciaire, la SELARL BMA, prise en la personne de Me [U] étant désignée en qualité d'administrateur judiciaire et Me [K] [R] en

Arrêt n° 60 - page 4

31 mai 2024

qualité de mandataire judiciaire.

Dans le cadre de la procédure enregistrée au répertoire général sous le n° 20/00011, et par jugement en date du 18 février 2021, le conseil de prud'hommes a ordonné un sursis à statuer dans l'attente de la décision de la cour d'appel dans la procédure enrôlée au répertoire général sous le numéro 20/00090.

Statuant sur le recours formé à l'encontre de la décision du 29 octobre 2020 (RG n°20/00090), la cour d'appel de Bourges a, par un arrêt du 10 décembre 2021 :

- reçu Me [R], ès-qualités de mandataire judiciaire de la SAS Calibracier et la SELARL BMA, ès-qualités d'administrateur judiciaire de la SAS Calibracier, en leurs interventions volontaires,

- confirmé la décision déférée, sauf en ce qu'elle a débouté M. [V] de sa demande de rappel de prime, statué sur le quantum des sommes allouées au titre de la contrepartie obligatoire en repos, à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ainsi que des congés payés afférents, au titre du complément d'indemnité de licenciement, outre en ce qu'elle a débouté le salarié de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait en jours,

- statuant à nouveau et y ajoutant :

- fixé comme suit les créances à inscrire au passif du redressement judiciaire de la SAS Calibracier :

- 15 250 euros à titre de rappel de primes, outre la somme de 4 406,20 euros au titre des congés payés y afférents,

- 5 000 euros de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait en jours,

- 30 264,88 euros au titre des contreparties obligatoires en repos,

- 10 000 euros de dommages et intérêts pour harcèlement moral,

- 30 186,72 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 3 018,67 euros au titre des congés payés afférents,

- 17 886,95 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- reçu la SAS Calibracier, Me [R] ès-qualités de mandataire judiciaire de la SAS Calibracier et la SELARL BMA ès-qualités d'administrateur judiciaire de celle-ci en leur demande reconventionnelle en répétition des sommes versées au titre des journées de Récupération du Temps de Travail (RTT) octroyées,

- condamné M. [V] à payer à la SAS Calibracier la somme de 7 196,84 euros correspondant aux sommes qui lui ont été indûment versées au titre des RTT,

- rappelé que les sommes allouées à titre indemnitaire sont exonérées de cotisations sociales dans les conditions légales et réglementaires applicables, que les condamnations concernant des créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de la convocation devant le bureau de conciliation, que les condamnations à titre de dommages et intérêts portent intérêts au taux légal dans les conditions prévues par l'article 1231-7 du code civil et que l'ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts,

- ordonné à la SAS Calibracier de remettre à M. [V] un bulletin de paye rectifié et des documents de fin de contrat conformes au présent arrêt dans les 15 jours de sa notification,

- condamné d'office la SAS Calibracier à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [V] du jour de son licenciement au jour de l'arrêt, ce, dans la limite de six mois d'indemnités,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- déclaré son arrêt opposable à l'UNEDIC Délégation AGS - CGEA de [Localité 5],

- condamné la SAS Calibracier aux dépens ainsi qu'à payer à M. [V] une somme complémentaire de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement en date du 4 juillet 2022, le tribunal de commerce de Valenciennes a notamment arrêté le plan de redressement de la SAS Calibracier, d'une durée de 10 ans, mis fin à la mission d'administrateur judiciaire de la SELARL BMA, prise en la personne de Me [N] [U], avant

Arrêt n° 60 - page 5

31 mai 2024

de le désigner commissaire à l'exécution du plan et a maintenu Me [K] [R] en qualité de mandataire judiciaire jusqu'à l'achèvement des opérations de vérification de créances.

Dans le cadre de la procédure enrôlée au répertoire général sous le numéro 20/00011, réenrolée à la demande du conseil de M. [V], le conseil de prud'hommes de Bourges, section encadrement, a, par jugement en date du 11 mai 2023 :

- dit que M. [V] était présent à l'effectif de l'entreprise au 31 décembre 2018,

- condamné la SAS Calibracier placée sous procédure de redressement judiciaire à régler à M. [V] les sommes suivantes :

- 7 500 euros au titre de la prime de présence,

- 7 307,06 euros au titre de la prime sur objectifs,

- 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- fixé ces créances au plan de redressement de la SAS Calibracier,

- dit qu'à ce titre ces sommes seront incorporées à l'état des créances salariales de la procédure judiciaire par Me [R], ès-qualités de mandataire judiciaire de la SAS Calibracier et de Me [U], représentant la SELARL BMA, ès-qualités d'administrateur judiciaire de la SAS Calibracier,

- dit la décision opposable au CGEA de [Localité 5] en qualité de gestionnaire de l'AGS dans la limite de ses garanties, telles qu'énoncées aux articles L. 3253-6 et L. 3253-8 du code du travail,

- débouté la SAS Calibracier de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SAS Calibracier aux dépens.

Le 2 juin 2023, M. [V] a régulièrement relevé appel de cette décision, laquelle lui avait été notifiée le 13 mai 2023.

Par acte de commissaire de justice en date du 4 décembre 2023, la SAS Calibracier a assigné en intervention forcée le CGEA de [Localité 5], la SELARL BMA en qualité de commissaire à l'exécution du plan dans le cadre de la procédure collective ouverte à son égard, et Me [K] [R] en sa qualité de mandataire judiciaire.

Par décision du 13 mars 2024 (Soc, 13 mars 2024, n°22-11.708), la chambre sociale de la Cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt rendu le 10 décembre 2021 par la cour d'appel de Bourges, mais seulement en ce qu'il a :

- condamné la société Calibracier à payer à M. [V] les sommes de 58 973,21 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre 5 897,32 euros de congés payés afférents, de 100 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul et à rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour de l'arrêt dans la limite de six mois d'indemnités,

- ordonné à la société Calibracier de remettre à M. [V] des documents de fin de contrat conformes à ces dispositions,

- fixé les créances à inscrire au passif du redressement judiciaire de la société Calibracier aux sommes de 30 264,88 euros pour contreparties obligatoires en repos, de 30 186,72 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre les congés payés afférents, de 17 886,95 euros à titre de complément d'indemnité conventionnelle de licenciement,

- reçu la société Calibracier, Me [R], pris en qualité de mandataire judiciaire, et la société MBA prise en qualité d'administratrice judiciaire en leur demande reconventionnelle en répétition des sommes versées à M. [V] au titre des journées de récupération du temps de travail (RTT)

- condamné ce dernier au paiement de la somme de 7 196,84 euros correspondant aux sommes indûment versées au titre des RTT.

La Cour a par ailleurs :

- dit n'y avoir lieu à renvoi du chef de la condamnation à une indemnité pour licenciement nul,

Arrêt n° 60 - page 6

31 mai 2024

- fixé au passif de la société Calibracier la créance au titre de l'indemnité pour licenciement nul à la somme de 100 000 euros brut,

- remis, sur les autres points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel d'Orléans ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 24 janvier 2024, et signifiées par acte de commissaire de justice en date des 29 janvier et 2 février 2024 à l'AGS CGEA de [Localité 5], à la SELARL BMA et à Me [R], aux termes desquelles M. [V] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS Calibracier à lui payer les sommes de 7 500 euros au titre de la prime de présence et 700 euros au titre de l'article 700 et en ce qu'il a fixé ces créances au plan de redressement de la SAS Calibracier,

- l'infirmer pour le surplus,

- statuant à nouveau :

- condamner la SAS Calibracier à lui payer, et fixer les créances correspondantes au plan de redressement, les sommes suivantes :

- 30 000 euros au titre des primes variables, outre 3 000 euros au titre des congés payés afférents,

- 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la SAS Calibracier de l'ensemble de ses demandes,

- dire qu'au visa de l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, la condamnation nette doit lui revenir et que la SAS Calibracier assurera le coût des éventuelles charges sociales dues,

- constater que le salaire mensuel moyen des 3 derniers mois aurait dû être de 12 463,24 euros,

- condamner la SAS Calibracier à lui remettre une nouvelle attestation Pôle Emploi dans un délai de 8 jours à compter de la notification de la décision, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,

- condamner la même en tous les dépens.

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 décembre 2023, et signifiées par acte de commissaire de justice en date du même jour à l'AGS- CGEA de [Localité 5], à la SELARL BMA et à Me [R], aux termes desquelles la SAS Calibracier demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en ses dispositions faisant droit à la demande de règlement de sa prime de présence par M. [V], le confirmer pour le surplus, et statuant à nouveau :

- limiter à la somme de 7 307,06 € bruts le rappel sur prime variable que pourrait réclamer M. [V] pour l'année 2018 et le débouter de sa demande de rappel sur prime de présence,

- à titre subsidiaire, limiter à la somme totale et maximale de 30 000 euros bruts les rappels sur prime variable et prime de présence qui seraient accordés à M. [V],

- débouter M. [V] du surplus de ses prétentions,

- condamner le CGEA à garantir l'ensemble des condamnations qui seraient prononcées à son encontre, lesquelles devront être inscrites au passif du redressement judiciaire de la société, ouvert suivant jugement du tribunal de commerce de Valenciennes du 14 décembre 2020,

- condamner M. [V] à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Vu l'ordonnance de clôture en date du 6 mars 2024 ;

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

1) Sur la demande en paiement au titre de la prime de présence de l'année 2018 :

En vertu de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

Arrêt n° 60 - page 7

31 mai 2024

En l'espèce, la SAS Calibracier, qui poursuit l'infirmation du jugement déféré dans le cadre de son appel incident, souligne que la prime réclamée, intégrée au contrat de travail de M. [V] pour la première fois en 2018, avait pour objet de s'assurer de sa présence aux fonctions de directeur adjoint au 31 décembre 2018 dans le contexte très particulier du projet de cession de l'entreprise en cours.

Elle invoque l'esprit dans lequel cette clause a été rédigée et considère que la liste des situations de démission et préavis n'est pas limitative pour définir les cas d'exclusion de versement de cette prime.

Elle note que M. [V] n'assurait plus, de facto, ses fonctions de directeur général adjoint au 31 décembre 2018 dès lors qu'il avait lui-même sollicité la résiliation judiciaire de son contrat de travail en saisissant le conseil de prud'hommes de Bourges le 6 décembre 2018 et que son contrat était suspendu dès le 13 décembre 2018 du fait de son inaptitude.

Enfin, la SAS Calibracier soutient que la prime de présence prévue par le contrat de M. [V] appartient à un tout indissociable, composé de cette prime de présence, mais également des primes sur objectifs fixées par l'écrit du 20 février 2018, le tout étant plafonné à un montant global de 30 000 euros.

M. [V] réplique que les premiers juges ont valablement apprécié la situation en retenant qu'il était présent dans l'effectif de l'entreprise au 31 décembre 2018.

Il relève qu'il ne faisait l'objet d'aucun préavis à cette date et que n'ayant jamais été démissionnaire, il n'a été licencié que le 21 janvier 2019. Il soutient qu'il devait, dès lors, bénéficier de la prime contractuellement prévue, écartant le plafonnement invoqué par l'employeur, applicable, selon lui, aux seules primes sur objectifs composant la part variable de sa rémunération.

Il est acquis que les parties ont convenu, par un écrit du 20 février 2018, qu'au titre de l'année 2018, la rémunération de M. [V] comprendrait une prime de présence, selon les modalités suivantes : 'Si vous êtes présent dans l'effectif de Calibracier le 31 décembre 2018 (non démissionnaire, ni en préavis), il vous sera versé en janvier 2019 une prime de 7 500 euros brut'.

L'employeur invoque vainement la saisine, par M. [V], du conseil de prud'hommes de Bourges en résiliation de son contrat de travail du 6 décembre 2018, la convocation de ce dernier à un entretien préalable fixé au 13 décembre 2018, ou encore l'avis d'inaptitude à tout poste dans l'entreprise en date du 12 décembre 2018, alors même qu'aucune décision judiciaire n'avait été rendue à cette date dans le cadre de l'instance engagée quelques semaines plus tôt, que la convocation à l'entretien préalable du 13 décembre 2018 est restée sans suite, et l'avis d'inaptitude rendu ayant en réalité eu pour effet de mettre un terme à la suspension du contrat de travail, contrairement à ce que soutient l'employeur. Aussi, ces éléments ne sont pas de nature à induire une sortie des effectifs de la société Calibracier au 31 décembre 2018.

Dès lors, c'est de façon pertinente, et sans méconnaître la commune intention des parties lors de la rédaction de cet avenant au contrat de travail, que les premiers juges ont retenu que M. [V] était présent à l'effectif de la SAS Calibracier au 31 décembre 2018, son licenciement pour inaptitude ayant été notifié postérieurement, par courrier recommandé en date du 21 janvier 2019.

Par ailleurs, une lecture attentive de l'écrit du 20 février 2018 permet de constater que la prime de présence, de nature distincte et répondant à un contexte spécifique, fait l'objet d'un paragraphe propre et que le plafonnement à 30 000 euros de la rémunération variable de M. [V], invoqué par l'employeur, concerne en réalité le seul cumul des primes sur objectifs, à savoir la prime sur marge brute, le profit bonus et le bonus qualitatif.

Arrêt n° 60 - page 8

31 mai 2024

Il s'en évince que le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a retenu que la prime de présence prévue pour l'année 2018 était due à M. [V] et a fixé de ce chef sa créance au passif de la SAS Calibracier à la somme de 7 500 euros.

La décision déférée sera, en revanche, infirmée en ce qu'elle a condamné la SAS Calibracier au paiement de cette somme, compte tenu de la procédure collective en cours, la présente décision ne pouvant avoir pour objet que la constatation de la créance et la fixation de son montant.

2) Sur la demande en paiement au titre des primes sur objectifs :

En application de l'article 1103 du code civil, une clause du contrat de travail peut prévoir une variation de la rémunération dès lors qu'elle est fondée sur des éléments objectifs indépendants de la volonté de l'employeur, qu'elle ne fait pas porter le risque d'entreprise sur le salarié et qu'elle n'a pas pour effet de réduire la rémunération en dessous des minima légaux et conventionnels. Ces objectifs doivent être réalistes et réalisables.

Le contrat de travail peut prévoir que les objectifs seront fixés unilatéralement par l'employeur dans le cadre de l'exercice de son pouvoir de direction ou qu'ils seront déterminés contractuellement, en vertu d'un accord entre l'employeur et le salarié et renégociés périodiquement.

En application de l'article 1353 du code civil, il appartient à l'employeur de communiquer les éléments nécessaires au calcul de la part de rémunération variable d'un salarié et, lorsqu'il se prétend libéré du paiement de cette part variable, de rapporter la preuve du fait qui a éteint son obligation.

En l'espèce, M. [V] expose qu'il n'a perçu aucune somme au titre de sa rémunération variable en 2018 alors qu'il s'agissait de la meilleure année pour l'entreprise, et soutient que les objectifs fixés n'étaient pas réalisables.

Il rappelle qu'il appartient à l'employeur de justifier du caractère réaliste et réalisable des objectifs fixés et le cas échéant, du fait que leur non-atteinte soit imputable au salarié, de sorte qu'il est fondé à bénéficier de l'intégralité de la rémunération variable fixée, soit la somme de 30 000 euros, en l'absence de justification de l'intimée à ce titre.

Il reproche aux premiers juges d'avoir pris les résultats de l'entreprise en considération pour minimiser sa rémunération variable, en méconnaissance de la nature et des modalités de calcul de ces primes prévues par l'avenant au contrat de travail.

Il fait également grief à la SAS Calibracier d'avoir amputé son résultat net avant impôt, base de calcul de la prime basée sur l'EAFI, en provisionnant la somme de 250 000 euros en prévision de la condamnation intervenue le 29 octobre 2020, reportant ainsi les conséquences de ses propres manquements sur son salarié et méconnaissant sa liberté fondamentale d'agir en justice.

S'agissant enfin de la prime qualitative, M. [V] note l'avoir obtenue en quasi-totalité depuis 2011 et argue d'une implication sans faille dans son travail malgré le harcèlement moral dont il a été victime, attesté selon lui par le chiffre d'affaires historique de la SAS Calibracier pour l'année 2018. Écartant le pouvoir discrétionnaire de fixation du quantum de la prime retenue par les premiers juges, il avance encore qu'elle doit être fixée au regard d'éléments objectifs.

La SAS Calibracier fait valoir qu'il ne lui appartient pas de démontrer le caractère réalisable des objectifs fixés à son salarié, mais simplement de communiquer les éléments de nature à établir qu'ils l'étaient.

À ce titre, tout en rappelant que la cour a précédemment retenu le caractère réalisable des

Arrêt n° 60 - page 9

31 mai 2024

objectifs fixés à M. [V] pour la période 2015-2017 dans le cadre de l'instance déjà évoquée (RG n°20/00090), l'intimée détaille que les objectifs sur marge brut n'ont quasiment pas évolué pour l'année 2018 et que l'objectif dit 'profit bonus' est resté fixé à 5%.

Elle ajoute également que les critères ainsi retenus ont permis à M. [V] d'atteindre une part de plus en plus importante des objectifs sur la période 2015 -2018 et de bénéficier d'une rémunération en constante progression, s'approchant de la rémunération maximale.

Au regard des résultats de l'entreprise, elle reconnaît être redevable de la somme de 5 800 euros au titre de la prime sur marge brute et de 1 507,06 euros au titre de la prime dite 'profit bonus'au titre de l'année 2018.

Enfin, l'employeur invoque les stipulations du contrat de travail prévoyant des primes annuelles déterminées unilatéralement par la direction, tant dans leur montant que dans leurs conditions d'obtention, pour prétendre qu'il est seul décisionnaire quant au montant de la prime qualitative revenant à M. [V] pour l'année 2018. Il s'appuie sur la procédure de licenciement engagée à son encontre, avant l'avis d'inaptitude du 14 décembre 2018, pour s'opposer à l'octroi de cette prime.

Les parties conviennent que l'avenant au contrat de travail de M. [V] en date du 20 janvier 2014, en vertu duquel le salarié est devenu directeur général adjoint, prévoyait, en son paragraphe 8, une part variable de sa rémunération, constituée d'une part 'qualitative' et d'une part 'quantitative', selon des objectifs unilatéralement déterminés par l'employeur.

Le courrier du 20 février 2018 par lesquels les objectifs pour l'année 2018 au titre de la part variable de la rémunération de M. [V] lui ont été notifiés, définit les modalités de calcul suivantes :

- une 'prime basée sur les objectifs de marge brute IFRS hors provision stock de Calibracier, plafonnée à 10 000 euros bruts'

$gt; 5,0 M€ : 10 000 €

$gt; 4,2 M€ : 5 000 €

4,0 M€ : 0 €

- un 'profit bonus ('PB') de 5% sur l'EAFI (Earning After Financial Interests) de Calibracier, selon les modalités habituelles et les règles en vigueur dans le Groupe, d'une montant plafonné annuellement à 10 000 euros (brut)'

- un 'bonus qualitatif, plafonné à 10 000 euros (brut)'

'Le montant de la prime sera décidé la discrétion de la direction, notamment basée sur les critères suivants (non exhaustifs) tels que votre implication, le management du personnel, la mise en place et le suivi des stratégies commerciales et de production, le maintien de l'activité export (visites clients) en parallèle de la direction de la société la maîtrise des coûts d'intérim et d'outillage, la tenue et le suivi des inventaires, votre collaboration aux éventuelle projets spéciaux qui seraient décidés par la Direction'

La Cour de cassation a rappelé, notamment dans un arrêt publié du 15 décembre 2021 (Soc., 15 décembre 2021, n° 19-20.978 FS-B), qu'il appartient à l'employeur de produire les éléments de nature à établir que les objectifs qu'il avait fixés au salarié à titre de condition de versement d'une rémunération variable étaient réalisables.

L'employeur n'est pas démenti lorsqu'il précise que ces objectifs ont peu évolué sur la période 2015 à 2018, le taux de 5% concernant le profit bonus étant resté constant, et qu'ils ont permis à M. [V] de bénéficier d'une rémunération variable en augmentation entre 2016 et 2017. C'est également avec pertinence qu'il rappelle que les objectifs fixés par les années 2016 et 2017 ont été considérés comme réalistes et réalisables par la décision de la cour d'appel de Bourges du 10 décembre 2021, rendue entre les parties et définitive sur ce point.

Arrêt n° 60 - page 10

31 mai 2024

Les critères d'attribution de la prime sur objectifs de marge brute ont permis à M. [V] de percevoir la somme de 6 121 euros en 2017, sur un montant maximal de 10 000 euros, comme en atteste sa pièce n°9. À ce titre, la SAS Calibracier reconnaît être redevable de la somme de 5 800 euros pour l'année 2018, au regard d'une marge brute de 4,4M€ établie par sa pièce n° 25 de sorte que les montants de prime atteints au fil des années démontrent le caractère réalisable des objectifs.

Par ailleurs, les modalités de calcul de cette prime, qui permettent de valoriser les montants de marge brute compris entre 4,2 et 5 M€, en excluant ainsi tout effet de seuil, participent de l'adaptation des objectifs à la réalité de l'activité de l'entreprise et favorise leur atteinte.

S'agissant de la fixation d'un taux de 5% au titre du profit bonus, M. [V] ne saurait soutenir que l'objectif n'était ni réaliste ni réalisable alors même qu'il conclut que les bons résultats de l'entreprise pour l'année 2018, devaient le conduire à percevoir la somme maximale de 10 000 euros, sous réserve d'exclure la provision pour litige imputée à hauteur de 250 000 euros.

Il en est, de même, de la prime dite qualitative dont M. [V] reconnaît lui-même qu'il a bénéficié à plusieurs reprises du montant maximal contractuellement prévu, preuve de l'adaptation des objectifs qualitatifs définis.

Il s'en évince que les différents objectifs, portés à la connaissance du salarié en février 2018 n'étaient ni irréalistes, ni irréalisables, de sorte que la somme, non utilement contestée, de 5 800 euros, correspondant à la prime sur marge brute de l'année 2018 doit être retenue comme étant due à M. [V].

M. [V] ne saurait, par ailleurs, reprocher à la SAS Calibracier d'avoir imputé une provision pour litige avant de déterminer son résultat net avant impôt, alors même que cette démarche, qui répond au principe de prudence en matière comptable, vise à favoriser l'exécution d'une décision judiciaire à venir, notamment dans ses aspects pécuniaires, et ne saurait être de nature à entraver la liberté d'agir en justice du salarié, comme il le prétend. Dès lors, la somme due à M. [V] au titre du 'bonus profit' de l'année 2018 doit être fixée à la somme de 1 507,06 euros.

S'agissant de la prime qualitative pour l'année 2018, la SAS Calibracier prétend que M. [V] ne peut en bénéficier compte tenu de la convocation à un entretien préalable dont il a fait l'objet le 4 décembre 2018, tandis que le salarié conteste l'appréciation des critères qualificatifs réalisée par son employeur en invoquant son engagement professionnel et les résultats obtenus.

Il incombe à l'employeur, qui allègue que les objectifs définis unilatéralement n'ont pas été atteints en totalité par le salarié pour justifier du non-paiement de la prime annuelle sur objectifs, d'en rapporter la preuve.

Si la SAS Calibracier fonde son refus d'octroi d'une prime qualitative au titre de l'année 2018 sur la convocation de M. [V] en entretien préalable à un éventuel licenciement au cours de la période de référence, il convient de souligner que la dégradation de la relation contractuelle s'inscrit en réalité dans un contexte de harcèlement moral judiciairement établi et mis en évidence à compter d'août 2018 à l'occasion de la mise en oeuvre d'un projet de réorganisation de l'entreprise par M. [H].

Ainsi, cette convocation, qui est non seulement restée sans suite compte tenu de l'avis d'inaptitude du 14 décembre 2018 mais plus encore a été retenue par la cour, dans sa décision du 10 décembre 2021 définitive sur ce point également, comme ayant participé à un processus d'éviction et de dénigrement du salarié, ne saurait permettre à l'employeur de justifier de la non-atteinte des objectifs qualitatifs fixés à M. [V].

Arrêt n° 60 - page 11

31 mai 2024

L'employeur a par ailleurs produit une série d'attestations dont il résulte :

- selon le témoignage de M. [I] [G], cadre responsable maintenance et délégué du personnel (pièce 36 de l'intimée), que M. [V] a 'personnellement piloté et organisé' le projet CE pour tous,

- selon le témoignage de Mme [L] [F], assistante de direction (pièce 48 de l'intimée), que'jusqu'à son départ de Calibracier, M. [V] a assuré [ses] responsabilités tant au niveau du pilotage de l'équipe commerciale, qu'au niveau de la direction générale de l'entreprise', 'il supervisait plus particulièrement le marque des UAB (Vis à billes a l'export) en gérant les approvisionnement ainsi que le suivi du planning de fabrication avec les équipes de productions', 'en octobre et novembre 2018, M. [V] , à la demande du Président, a mis en place, en coopération avec le délégué du personnel Mr [G], et le président :

un comité d'entreprise pour tous en remplacement de l'accord d'intéressement en vigueur dans l'entrepris

- un nouvel accord sur le temps de travail en remplacement de l'accord sur les 35h datant de 2000

'il supervisait avec l'aide des différents responsables de service, l'administratif, les opérations, la production, la maintenance, la qualité, les achats'

Les témoignages de M. [X], responsable commercial et de M. [W] [Z] (pièces n°49 et 50 de l'intimée) confirment les missions générales et la responsabilité importante au sein de la SAS Calibracier de l'appelant mais également son implication dans les négociations mises en oeuvre en 2018 au sein de la société.

Les éléments détaillés, produits par l'employeur lui-même, sont de nature à mettre en évidence les efforts mis en oeuvre par M. [V] pour répondre aux critères fixés par l'employeur, en terme d'implication, de management du personnel, de mise en place et du suivi des stratégies commerciales et de production ou encore de collaboration aux projets spéciaux décidés par la Direction.

Il sera également utilement relevé que M. [V] a bénéficié de la somme de 10 000 euros à ce titre en 2017, soit le maximum contractuellement prévu, et qu'il n'est pas démenti lorsqu'il affirme avoir perçu la même somme en 2016. Il convient, en outre, de noter que lors de la notification de la rémunération variable de l'année 2017 à l'occasion du courrier du 20 février 2018 fixant les objectifs pour l'année suivante, M. [V] s'est vu confirmer l'attribution d'une prime exceptionnelle de 5 000 euros, signe du bon déroulement de la relation contractuelle et de la qualité de prestation fournie par le salarié.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, il convient de retenir que l'employeur échoue à établir que M. [V] n'a pas atteint en totalité les objectifs qu'il avait unilatéralement fixés pour justifier du non-paiement de la prime qualitative annuelle, de sorte que le salarié est fondé à réclamer le paiement de la somme de 10 000 euros à ce titre.

Au regard de ce qui précède, la décision déférée sera infirmée :

- en ce qu'elle a condamné la SAS Calibracier à payer à M. [V], la somme de 7 307,06 euros au titre de prime sur objectifs, compte tenu de la procédure collective en cours, la présence décision ne pouvant avoir pour objet que la constatation de la créance et la fixation de son montant,

- en ce qu'elle a fixé la créance de M. [V] au passif de la SAS Calibracier au titre de la prime sur objectifs à la somme de 7 307,06 euros, cette dernière devant être fixée au total à la somme de 17 307,06 euros (5 800 euros + 1 507,06 euros + 10 000 euros).

Il y a lieu, par ailleurs, par voie d'ajout à la décision déférée, de fixer la créance du salarié au titre des congés payés congés afférents à la prime sur objectifs, à la somme de 1 730,70 euros.

En application de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, pour le calcul des cotisations

Arrêt n° 60 - page 12

31 mai 2024

de sécurité sociale, les primes étant considérées comme des rémunérations et les condamnations prononcées l'étant en brut, la SAS Calibracier assurera le coût des éventuelles charges sociales dues.

3) Sur les autres demandes, les dépens et les frais irrépétibles :

Compte tenu de ce qui précède, la demande de remise d'une attestation France Travail conforme à la présente décision est fondée. Il y sera donc fait droit, par voie d'ajout à la décision déférée qui n'a pas statué sur ce point, sans qu'il y ait lieu toutefois de prononcer une astreinte.

M. [V] sera débouté, par voie d'ajout à la décision déférée qui n'a pas statué sur ce point, de sa demande visant à voir fixer un salaire de référence, la cour n'étant pas saisie d'une prétention nécessitant le calcul de celui-ci et son montant répondant à des critères et des modes de calcul différents en fonction de la prétention à laquelle il se rapporte.

Le jugement déféré est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles, sauf à retenir qu'il appartenait uniquement à la juridiction de fixer la créance au passif de la SAS Calibracier, sans qu'il y ait lieu de condamner au paiement.

La SAS Calibracier succombant principalement, il y a lieu de condamner Me [K] [R], en sa qualité de mandataire judiciaire de la SAS Calibracier, aux dépens d'appel.

De même, l'issue de l'appel et l'équité commandent de faire droit à la demande du salarié au titre de l'article 700 du code de procédure civile, dans la limite de 2 500 euros, et compte tenu de la procédure collective en cours, de fixer cette créance au passif de l'employeur.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition du greffe :

CONFIRME le jugement déféré en ses dispositions soumises à la cour SAUF en ce qu'il a condamné la SAS Calibracier à régler à M. [T] [V] la somme de 7 500 € au titre de la prime de présence, de 7307,06 € au titre de la prime sur objectifs et de 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il a fixé la créance de M. [V] au titre de sa rémunération variable de l'année 2018 à la somme de 7 307,06 € ;

STATUANT À NOUVEAU DES CHEFS INFIRMÉS et AJOUTANT:

FIXE au passif de la SAS Calibracier les créances de M. [T] [V] suivantes :

- 17 307,06 € au titre de sa rémunération variable de l'année 2018, et 1 730,70€ au titre des congés payés afférents,

- 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DIT qu'en application de l'article L. 242-1 du code de la sécurité sociale, la SAS Calibracier assurera le coût des éventuelles charges sociales dues ;

CONDAMNE la SAS Calibracier à remettre à M. [T] [V] une attestation France Travail conforme à la présente décision dans le mois de sa signification et DIT n'y avoir lieu à astreinte ;

DÉBOUTE M. [T] [V] de sa demande visant à voir fixer un salaire de référence ;

Arrêt n° 60 - page 13

31 mai 2024

CONDAMNE Me [K] [R], en sa qualité de mandataire judiciaire de la SAS Calibracier, aux dépens de première instance et d'appel, et DÉBOUTE la SAS Calibracier de sa demande en paiement d'une indemnité de procédure.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. DELPLACE C. VIOCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 23/00542
Date de la décision : 31/05/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-05-31;23.00542 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award