VS/MMC
COPIE OFFICIEUSE
COPIE EXÉCUTOIRE
à :
- SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS
- SCP AVOCATS CENTRE
LE : 29 JUIN 2023
COUR D'APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 29 JUIN 2023
N° - Pages
N° RG 21/01026 - N° Portalis DBVD-V-B7F-DMNC
Décision déférée à la Cour :
Jugement du tribunal d'Instance de SAINT AMAND MONTROND en date du 03 Juillet 2019
PARTIES EN CAUSE :
I - M. [S] [X]
Né le 08 Juillet 1949 à [Localité 9]
[Adresse 8]
[Localité 11]
- Mme [K] [U] épouse [X]
Née le 05 Février 1946 à [Localité 10]
[Adresse 8]
[Localité 11]
Représentés et plaidant par la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES
timbre fiscal acquitté
APPELANTS suivant déclaration du 19/07/2019
II - M. [Y] [Z] pris en sa qualité d'héritier de M. [O] [Z]
[Adresse 8]
[Localité 11]
Représenté et plaidant par la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de BOURGES
timbre fiscal acquitté
ASSIGNÉ EN INTERVENTION FORCÉE suivant acte d'huissier du 16/09/2021
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mai 2023 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme CIABRINI, Conseillère chargée du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CLEMENT Présidente de Chambre
M. PERINETTI Conseiller
Mme CIABRINI Conseillère
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme SERGEANT
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ARRÊT : CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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EXPOSÉ
M. [O] [Z] est propriétaire, sur la commune de [Localité 11], de deux parcelles cadastrées n°[Cadastre 6] et [Cadastre 7] contiguës à la parcelle n°[Cadastre 4], propriété de M. [S] [X] et de Mme [K] [U] épouse [X].
M. [Z] est également propriétaire sur la même commune d'une parcelle cadastrée n°[Cadastre 3] jouxtant la parcelle cadastrée n°[Cadastre 2], propriété de M. et Mme [X].
Ces derniers affirment subir d'importants dégâts et désagréments du fait de la présence de deux sorties de drainage, installées sur les parcelles n°[Cadastre 3] et [Cadastre 7] de M. [Z], dont ils assurent qu'elles amènent la cour de leur maison et les abords de leur étang à être régulièrement inondés par les eaux collectées en amont.
Suivant jugement en date du 26 octobre 2016, le Tribunal d'instance de Saint Amand Montrond, saisi par M. et Mme [X], a ordonné avant dire droit une mesure d'expertise confiée à M. [P], avec mission de décrire le système de drainage et ses effets, notamment en termes de risque d'inondation et de marécage affectant les parcelles appartenant aux demandeurs, et d'indiquer les travaux de nature à remédier aux inconvénients éventuellement constatés.
M. [P] a déposé son rapport le 24 janvier 2018.
Lors de l'audience tenue le 15 mai 2019, M. et Mme [X] ont demandé pour l'essentiel au Tribunal de :
condamner M. [Z] à faire exécuter, par tel entrepreneur de son choix, dans les trois mois suivant la signification de la décision définitive à intervenir, tous les travaux nécessaires consistant à reprendre la sortie du premier drain se trouvant sur la parcelle n°[Cadastre 7] et celle du second drain se trouvant sur la parcelle n°[Cadastre 3], afin de remédier à l'aggravation de la servitude naturelle d'écoulement des eaux, soit sur la sortie de drainage côté habitation en l'aménagement d'un busage permettant de recevoir et diriger toutes les eaux du premier collecteur vers le fossé communal, et sur la sortie de drainage côté étang en l'aménagement d'un regard de diamètre très important pour recevoir toutes les eaux de sortie de drainage et les contenir sur la propriété de M. [Z] ;
dire et juger que ces aménagements devront empêcher définitivement toute évacuation des systèmes de drainage, situés en amont de la propriété des époux M. et Mme [X] et qu'il pourra en être dressé constat à tout moment ;
dire et juger que ces aménagements devront être effectués sous astreinte de 150 € par jour de retard, passé un délai de 2 mois à compter de la signification de la décision définitive à intervenir ;
à titre subsidiaire, désigner un nouvel expert afin de dresser un contre-rapport sur la même mission que précédemment ;
condamner M. [Z] à payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts en considération de sa résistance abusive et des premiers préjudices de jouissance subis ;
condamner M. [Z] à leur payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens ;
ordonner l'exécution provisoire de sa décision.
En réplique, M. [Z] a demandé au Tribunal de débouter M. et Mme [X] de l'ensemble de leurs demandes et de les condamner aux entiers dépens, ainsi qu'au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par jugement contradictoire en date du 3 juillet 2019, le Tribunal d'instance de Saint Amand Montrond a :
déclaré irrecevables les demandes de M. et Mme [X] dirigées contre M. [Z], concernant l'aggravation de leur servitude d'écoulement des eaux sur leur parcelle numéro [Cadastre 2] ;
débouté M. et Mme [X] de leur demande de contre-expertise ;
constaté que les travaux réalisés par M. [Z] sur la parcelle numéro [Cadastre 7] pendant les opérations d'expertise, avaient remédié à l'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux sur la parcelle numéro [Cadastre 5] ;
en conséquence, débouté M. et Mme [X] de leur demande de travaux sous astreinte sur la sortie de drainage côté habitation ;
condamné M. [Z] à payer à M. et Mme [X] la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi sur leur parcelle numéro [Cadastre 4] ;
ordonné l'exécution provisoire ;
débouté les parties de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
condamné M. [Z] aux dépens qui comprenant le coût de l'expertise judiciaire et la moitié des constats d'huissier des 30 janvier 2013 et 23 juillet 2014.
Le Tribunal a notamment retenu que les eaux se déversant sur la parcelle n°[Cadastre 2] de M. et Mme [X] provenaient de la parcelle n°[Cadastre 1] appartenant à M. [J] par le biais du drainage passant par la parcelle de M. [Z], que M. [J] n'était pas dans la cause, que les travaux de busage réalisés par M. [Z] durant le déroulement de la mission d'expertise permettaient désormais la collecte de l'intégralité des eaux de drainage et leur déversement dans le fossé communal, que l'expert judiciaire avait constaté l'efficience de cette installation et que la pluviométrie exceptionnelle de la fin de l'année 2017 avait eu pour conséquence un ruissellement des eaux pluviales naturelles sur la propriété de M. et Mme [X] conforme à la servitude dont leur fonds était grevé.
M. et Mme [X] ont interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 19 juillet 2019.
Par arrêt avant-dire droit du 21 janvier 2021, la cour d'appel de Bourges a ordonné une mesure d'expertise aux fins notamment d'être éclairée sur plusieurs points faisant l'objet de contestations entre les parties, à savoir l'origine des eaux qui se déversent sur les parcelles [Cadastre 2] (étang) et [Cadastre 5] (cour de la maison d'habitation) appartenant à M. et Mme [X], l'efficacité du système de busage et fossé collecteur mis en 'uvre par M. [Z] pour évacuer les eaux de drainage de la parcelle n°[Cadastre 7], la réalité de l'aggravation alléguée de la servitude d'écoulement des eaux du fait des installations de drainage mises en place ainsi que la nécessité de travaux supplémentaires destinés à y remédier.
Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par RPVA le 2 mai 2023, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'ils développent, M. et Mme [X] demandent à la Cour, au visa des articles 640 et 641, 702, 1382 et 1384 du code civil, de :
RECEVOIR Ies époux [X] en Ieur appel et leurs demandes et Ies déclarer bien fondés.
INFIRMER le jugement rendu le 3 juillet 2019, par le TRIBUNAL D'lNSTANCE de SAINT-AMAND-MONTROND, en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau et réformant :
DECIDER que Ies installations de drainage ou de redirection de drainage se trouvant sur la propriété de M. [Z], installées tant par son père que par M. [J], qu'elles soient immeubles ou immeubles par destination, se déversent sur la propriété des époux [X] et aggravent par là-même Ia servitude d'écoulement des eaux naturelles.
DECIDER que Ies nouvelles installations aménagées au cours de la 1ère expertise par M. [O] [Z], avant tout jugement au fond, s'avèrent impropres à remédier totalement aux désordres et préjudices d'aggravation de servitude.
CONDAMNER M. [Y] [Z] à supporter le coût de tous Ies travaux nécessaires consistant à remédier définitivement à l'aggravation de la servitude naturelle d'écoulement des eaux, savoir :
0 Concernant l'installation se déversant vers l'habitation des époux [X] :
Les travaux permettant de conduire Ies eaux drainées par le premier collecteur vers le fossé communal longeant la parcelle [Cadastre 6] et sans que ces travaux ne touchent le fonds inferieur des époux [X].
Ceci en retenant Ies premières préconisations de I'expert judiciaire, avant corrections, indiquant qu'il convient de :
~ procéder au remplacement du collecteur annelé sur un linéaire de 5 m environ par une canalisation en PVC Iiste de même diamètre (100 mm) ;
~ procéder au remplacement de la canalisation PVC de diamètre 100 reliant le regard au chemin rural par une canalisation en PVC lisse d'un diamètre de 150 mm.
0 Concernant l'installation se déversant vers l'étang des époux [X] :
Les travaux permettant d'installer sur la propriété de M. [Z], le plus en amont et à I'ouest possible, un ou plusieurs collecteurs dont un bassin de régulation, dimensionné convenablement pour récupérer Ies eaux des fonds supérieurs drainés, sur Ia base d'un minimum de 3 ha drainés, et sans que ces travaux ne touchent le fonds inferieur des époux [X] et sans que Ies collecteurs et le bassin de régulation ne soient reliés de quelque manière que ce soit à l'étang des époux [X].
DECIDER que ces aménagements devront empêcher définitivement toute évacuation et/ou redirection des systèmes de drainage, situés en amont de la propriété des époux [X] et qu'à défaut, qu'il pourra en être dressé constat à tout moment.
CONDAMNER M. [Y] [Z] à faire exécuter ces travaux par tout professionnel de BTP de son choix et à justifier de la réception de ces travaux par tout moyen aux époux [X].
Et DECIDER que ces aménagements devront être effectués sous astreinte de 150 € par jour de retard, passé un délai de 3 mois à compter de la signification de I'arrêt à intervenir.
RESERVER au besoin, la liquidation de cette astreinte.
DECIDER qu'en aucun cas, ces travaux ne pourront consister en la réalisation d'un nouvel ouvrage sur le fonds des époux [X] et constituer ainsi une nouvelle servitude, encore plus aggravante.
A défaut et subsidiairement
ORDONNER la remise du fonds supérieur en son état initial, en supprimant purement et simplement tous Ies ouvrages aggravant la servitude naturelle d'écoulement, également par Ies soins d'un professionnel compètent en la matière, aux frais de M. [Z] et aux mêmes conditions.
ET dans tous Ies cas,
DEBOUTER M. [Y] [Z] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.
CONDAMNER M. [Y] [Z] à payer la somme de 10.000 € à M. et Mme [X], à titre de dommages et intérêts, en considération de la résistance abusive, des préjudices de jouissance et des préjudices moraux, subis par ces derniers depuis plus de 10 ans.
CONDAMNER M. [Y] [Z] à payer à M. [S] [X] et Mme [K] [U], épouse [X] la somme de 15.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du CPC, en considération de l'ensemble des procédures, expertises, et assignation forcée qu'ils ont dû mener pour faire valoir leurs droits pendant toutes ces années.
CONDAMNER le même aux entiers dépens de première instance et d'appel, comprenant le coût total des deux constats d'huissier, du rapport de M. [L] [T] et des deux expertises judiciaires.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 28 avril 2023, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'il développe, M. [Z] demande à la Cour de :
Confirmer le jugement rendu par le tribunal d'instance de Saint Amand Montrond le 3 juillet 2019 en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes des époux [X] relatives à leur parcelle n° [Cadastre 2], les a déboutés de leur demande de contre-expertise et a constaté que les travaux réalisés par M. [Z] ont mis fin à l'écoulement des eaux sur la parcelle n° [Cadastre 5] et, en conséquence, les a déboutés de leur demande de travaux sur la sortie de drainage côté habitation.
Réformant ledit jugement pour le surplus,
Débouter les époux [X] de l'intégralité de leurs demandes plus amples ou contraires.
Condamner les époux [X] aux entiers dépens de première instance comme d'appel et les condamner à payer à M. [Y] [Z] la somme de 6.000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture est intervenue le 2 mai 2023.
MOTIFS
A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir « dire et juger », « rappeler » ou « constater » ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu'il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n'y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt. Il en va de même de la demande de « donner acte », qui est dépourvue de toute portée juridique et ne constitue pas une demande en justice.
Sur les demandes fondées sur l'aggravation d'une servitude d'écoulement :
Aux termes de l'article 640 du code civil, les fonds inférieurs sont assujettis envers ceux qui sont plus élevés à recevoir les eaux qui en découlent naturellement sans que la main de l'homme y ait contribué.
Le propriétaire inférieur ne peut point élever de digue qui empêche cet écoulement.
Le propriétaire supérieur ne peut rien faire qui aggrave la servitude du fonds inférieur.
L'article 641 du même code énonce que tout propriétaire a le droit d'user et de disposer des eaux pluviales qui tombent sur son fonds.
Si l'usage de ces eaux ou la direction qui leur est donnée aggrave la servitude naturelle d'écoulement établie par l'article 640, une indemnité est due au propriétaire du fonds inférieur.
La même disposition est applicable aux eaux de sources nées sur un fonds.
Lorsque, par des sondages ou des travaux souterrains, un propriétaire fait surgir des eaux dans son fonds, les propriétaires des fonds inférieurs doivent les recevoir ; mais ils ont droit à une indemnité en cas de dommages résultant de leur écoulement.
Les maisons, cours, jardins, parcs et enclos attenant aux habitations ne peuvent être assujettis à aucune aggravation de la servitude d'écoulement dans les cas prévus par les paragraphes précédents.
Les contestations auxquelles peuvent donner lieu l'établissement et l'exercice des servitudes prévues par ces paragraphes et le règlement, s'il y a lieu, des indemnités dues aux propriétaires des fonds inférieurs sont portées, en premier ressort, devant le juge du tribunal judiciaire du canton qui, en prononçant, doit concilier les intérêts de l'agriculture et de l'industrie avec le respect dû à la propriété.
S'il y a lieu à expertise, il peut n'être nommé qu'un seul expert.
Il y a lieu d'examiner successivement les demandes des parties en distinguant les deux secteurs qui subiraient l'aggravation de la servitude d'écoulement évoquée par M. et Mme [X] de la façon suivante, conformément au rapport d'expertise de M. [H] :
le regard n° 1 est implanté sur la zone correspondant aux parcelles n° [Cadastre 6] et [Cadastre 7] appartenant à M. [Z] et n°[Cadastre 4] appartenant à M. et Mme [X] (secteur à proximité de la maison d'habitation de M. et Mme [X]) ;
le regard n°2 est implanté sur la zone correspondant aux parcelles n°[Cadastre 2] appartenant à M. et Mme [X] et n°[Cadastre 3] appartenant à M. [Z] (secteur à proximité de l'étang).
Sur les demandes concernant le regard n°1
En l'espèce, M. [H], expert judiciaire, a recueilli les observations de MM. [N] et [L] [J], ancien et actuel exploitants de la parcelle C n° [Cadastre 1], selon lesquelles la parcelle C n° [Cadastre 7] appartenant à M. [Z] bénéficiait sur une surface estimée à 1 ha 50 du système de drainage qu'ils avaient mis en place.
L'expert a par ailleurs souligné que la ligne de talweg rattachée à la partie du bassin versant correspondant à la prairie drainée par M. [Z] se prolongeait sur la propriété de M. et Mme [X] dans une zone décaissée s'apparentant à une ancienne mare pour finalement aboutir à la cour de la ferme des appelants.
M. [H] a également observé la présence permanente, sur la propriété de M. et Mme [X], d'une forte hydrométrie allant jusqu'à la saturation des sols, confirmée par la présence de plantes hygrophiles sur toute la partie basse correspondant à ladite ligne de talweg qui réceptionne les eaux de ruissellement des fonds supérieurs.
Ayant examiné le regard n°1 et constaté l'existence d'un flash de 6 cm, l'expert a préconisé le remplacement du drain collecteur annelé (détérioré par surcroît durant les opérations d'expertise) sur un linéaire de 5 m par une canalisation en PVC lisse de diamètre 100 mm, tout en conservant une cote altimétrique du fil d'eau à 294,30 m en entrée du regard soit 4 à 5 cm au-dessus du fil d'eau de sortie (294,26 m).
Aux termes de l'erratum annexé au rapport d'expertise daté du 4 janvier 2023, M. [H] a indiqué que le diamètre de 120 mm de la canalisation en PVC reliant le regard n°1 au fossé du chemin rural répondait largement au débit potentiel de la canalisation amont de diamètre 100 quoique la pente de la partie amont ait une pente supérieure à celle de l'aval.
Il a par ailleurs relevé que M. [Z] se disait prêt à réaliser les travaux préconisés par ses propres moyens « et ce en présence et avec l'aide de M. [S] [X] ; ce dernier semble donner son accord de principe ».
M. [P], premier expert judiciaire désigné par le tribunal, a en outre estimé que depuis la mise en 'uvre de l'installation de drainage en son état actuel, il ne semblait pas que des eaux autres que celles naturelles des terrains puissent être à l'origine des excès d'eau constatés dans la cour de M. et Mme [X].
Il se déduit de ces éléments que les phénomènes d'inondation dénoncés par M. et Mme [X] résultent non d'un dysfonctionnement du système de drainage et du regard n°1, mais de la situation géographique et altimétrique des lieux, la cour située sur la parcelle n° [Cadastre 4] recueillant l'ensemble des eaux de ruissellement des parcelles supérieures, sans que l'existence du système de drainage décrit comme satisfaisant par l'expert n'ait d'influence péjorative sur ce point, les eaux recueillies par cette installation se déversant dans le fossé communal conformément à sa destination.
L'exécution par M. [Z] des travaux prescrits par M. [H] afin d'assurer la pleine effectivité du système de drainage et de le prémunir de toute montée en charge excessive en cas de forte pluviométrie sera de nature à empêcher définitivement toute aggravation de la servitude d'écoulement subie par le fonds [X].
Si M. [Z] assure avoir d'ores et déjà procédé au remplacement du drain collecteur tel que préconisé par l'expert, il ne peut qu'être constaté qu'il n'en justifie nullement en l'état. À cet égard, la pièce n° 8 intitulée « facture Gedimat du 23 février 2023 », susceptible de correspondre à de tels travaux et mentionnée au bordereau de pièces établi par M. [Z], ne figure pas au nombre des pièces effectivement communiquées par celui-ci.
Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que les travaux réalisés par M. [Z] sur la parcelle numéro [Cadastre 7] pendant les opérations d'expertise, avaient remédié à l'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux sur la parcelle numéro [Cadastre 5] et débouté en conséquence M. et Mme [X] de leur demande de travaux sous astreinte sur la sortie de drainage côté habitation.
M. [Z] sera condamné à procéder aux travaux prescrits par l'expert judiciaire, soit le remplacement du drain collecteur annelé (détérioré par surcroît durant les opérations d'expertise) sur un linéaire de 5 m par une canalisation en PVC lisse de diamètre 100 mm, tout en conservant une cote altimétrique du fil d'eau à 294,30 m en entrée du regard soit 4 à 5 cm au-dessus du fil d'eau de sortie (294,26 m), dans un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire d'assortir cette condamnation d'une astreinte au vu de l'absence de tout élément de nature à laisser supposer que M. [Z] n'exécute pas spontanément cette condamnation.
Eu égard à la localisation de l'ouvrage incriminé, ces travaux n'auront pas à implanter quelque partie d'ouvrage que ce soit sur le fonds de M. et Mme [X].
Il n'est par ailleurs pas opportun d'imposer à M. [Z] de faire exécuter ces travaux par un professionnel du BTP ainsi que le sollicitent M. et Mme [X], étant toutefois rappelé qu'il lui appartiendra de se mettre en mesure de disposer de justificatifs de nature à démontrer à la partie adverse la parfaite exécution de la condamnation ci-dessus prononcée à son encontre.
Sur les demandes concernant le regard n° 2
M. et Mme [X] soutiennent tout d'abord que l'installation de drainage n°2 évacue les eaux de pluie recueillies sur la parcelle exploitée par M. [J] mais également les eaux de la propriété de M. [Z] (soit la parcelle n° [Cadastre 3]).
Là encore, M. [H] a recueilli les observations de MM. [N] et [L] [J], ancien et actuel exploitants de la parcelle C n° [Cadastre 1], le premier ayant financé l'installation de drainage litigieuse, qui affirment qu'aucune partie de la parcelle n° [Cadastre 3] n'a été drainée par le biais de ladite installation, mise en place avec l'autorisation de M. [Z]. Il a estimé que M. et Mme [X] ne rapportaient pas la preuve d'un drainage de la parcelle n° [Cadastre 3] par le biais de l'installation incriminée.
L'expert a constaté que la sortie du collecteur du drainage de la parcelle exploitée par M. [J] était raccordée par le regard n°2 à un petit bassin supposé réguler les eaux, creusé par M. [Z], sans mentionner que ce système puisse servir à capter, même partiellement, les eaux de la parcelle n° [Cadastre 3].
M. [Z] a également fait part à l'expert de sa conviction qu'en aucun cas, la parcelle n°[Cadastre 3] ne faisait l'objet d'un drainage au moyen de cette installation.
[O] [Z], dans le courrier daté du 6 mars 2014 qu'il a adressé au conseil de M. et Mme [X], a précisé ne pas être maître du second drain, exécuté par M. [N] [J] afin de drainer son champ et de laisser écouler les eaux drainées par la pente naturelle, en passant par le terrain [Z] et en débouchant sur celui de M. et Mme [X]. Il a alors invité ces derniers à « négocier avec le seul interlocuteur compétent, soit le maître de cet ouvrage, à savoir M. [N] [J] »
Le premier expert judiciaire désigné, M. [P], a pour sa part clairement indiqué que ce drainage ne concernait pas directement la parcelle n° [Cadastre 3].
Aucun élément de preuve versé aux débats ne permet ainsi de considérer que l'installation de drainage aboutissant au regard n°2 serve en quelque proportion que ce soit au drainage de la parcelle n° [Cadastre 3] en sus de celui de la parcelle n° [Cadastre 1].
Il est de ce fait inexact de soutenir, ainsi que le font M. et Mme [X], que M. [Z] aurait profité de l'installation mise en place par M. [J], « aggravant encore la servitude d'écoulement en direction de l'étang des époux [X], en grossissant le flux ».
S'appuyant sur les dispositions de l'article 524 du Code civil, M. et Mme [X] arguent du caractère d'immeuble par destination que revêtirait l'installation de drainage litigieuse, qui appartiendrait ainsi à M. [Z], venant aux droits de [O] [Z].
Toutefois, il ne peut qu'être rappelé que ce texte dispose que sont immeubles par destination les biens que le propriétaire d'un fonds y a placés pour le service et l'exploitation de ce fonds.
En l'espèce, l'examen des pièces versées aux débats révèle que l'installation de drainage n'a pas été placée sur la parcelle n° [Cadastre 3] par [O] [Z], et ne sert nullement au service et à l'exploitation de ce fonds, son activité ne bénéficiant qu'à la parcelle n° [Cadastre 1]. Il sera à cet égard renvoyé à l'attestation rédigée par M. [L] [J], exploitant actuel de la parcelle n° [Cadastre 1], rapportant avoir « retiré entièrement mon drain d'évacuation qui était présent sur la parcelle cadastrée C n° [Cadastre 3] de M. [Z] ». La réalisation d'une telle action de retrait et l'emploi du pronom possessif laissent clairement apparaître la conviction de M. [J] d'être propriétaire de cet ouvrage, qui se trouve encore confirmée par le simple fait que M. [Z] ait laissé son voisin procéder à une telle opération sur sa propriété, ce qui ne saurait se concevoir dans l'hypothèse d'une installation qui lui appartiendrait en propre et/ou dont il aurait tiré profit.
Le caractère amovible sans dommage pour le fonds qui la supportait de l'installation de drainage vient encore renforcer l'impossibilité de la qualifier d'immeuble par destination. M. [Z] rappelle à juste titre à cet égard que ce système de drainage était constitué d'une succession de tuyaux d'évacuation d'eau ne bénéficiant d'aucun système d'ancrage, de fixation ou de fondation dans le sol mais s'y trouvant simplement posés, maintenus par leur propre poids.
M. et Mme [X] mentionnent également la qualification d'immeuble par nature pouvant être appliquée aux améliorations apportées à un fonds de terre par les pratiques culturales, qui ne peuvent être matériellement dissociées du fonds auxquelles elles ont profité, conformément aux dispositions de l'article 518 du Code civil.
Il doit néanmoins être relevé, là encore, que le système de drainage litigieux ne constituait pas une amélioration apportée à la parcelle n° [Cadastre 3] appartenant à M. [Z] mais ne profitait qu'à la parcelle n° [Cadastre 1], exploitée par M. [J], et que n'ayant au surplus jamais été matériellement incorporé au fonds auquel il profitait, il n'a pas eu à en être dissocié, avec ou sans dommage.
Il doit en conséquence être considéré que c'est à tort que M. et Mme [X] ont choisi de ne rechercher que la seule responsabilité de M. [Z] quant au préjudice d'aggravation de servitude d'écoulement des eaux qu'ils estiment subir du fait du fonctionnement de l'installation de drainage débouchant sur le regard n°2, M. [Z] n'étant pas propriétaire de cette installation qui appartenait, jusqu'à sa supposée suppression courant avril 2023, au propriétaire ou au fermier de la parcelle n° [Cadastre 1], lesquels n'ont pas été attraits en la cause.
Le premier juge a ainsi fait une exacte application du droit à la cause en déclarant irrecevable les demandes formulées à ce titre par M. et Mme [X] à l'encontre de M. [Z].
En considération de l'ensemble de ces éléments, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes de M. et Mme [X] dirigées contre M. [Z], concernant l'aggravation de leur servitude d'écoulement des eaux sur leur parcelle numéro [Cadastre 2].
Sur les demandes indemnitaires présentées par M. et Mme [X] :
Aux termes de l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il est constant que le droit d'agir ou de se défendre en justice ne dégénère en abus pouvant donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.
En l'espèce, il sera relevé que les demandes indemnitaires formées par M. et Mme [X] au titre de l'aggravation invoquée de la servitude d'écoulement des eaux du fait de l'installation de drainage n°2 sont irrecevables.
Il n'est par ailleurs pas caractérisé de refus fautif de [O] [Z] ni de M. [Y] [Z], son fils, de procéder à des travaux d'amélioration de l'installation de drainage n°1, puisque de tels travaux ont au contraire été réalisés durant le déroulement de la première expertise judiciaire et été estimés satisfaisants par les deux experts successifs.
Le refus des consorts [Z] de procéder à des travaux supplémentaires ne saurait être jugé abusif, la condamnation de M. [Z] à mettre en 'uvre les travaux d'ampleur modeste préconisés par M. [H] n'étant destinée qu'à réparer les dégradations survenues de façon involontaire durant l'expertise diligentée par celui-ci et à garantir tout risque éventuel de montée en charge de l'installation, sans qu'il soit démontré qu'un tel risque ait pu se concrétiser entre la réalisation des premiers travaux sur le regard n°1, durant les opérations d'expertise dirigées par M. [P], et le prononcé du présent arrêt.
La mauvaise foi et la résistance abusive que M. et Mme [X] entendent imputer à M. [Z] ne se trouvent nullement établies.
Il doit en revanche être admis, ainsi que l'a relevé le tribunal avec pertinence, que M. et Mme [X] ont été gênés dans l'utilisation de la cour située devant leur habitation, qui se trouvait inondée par temps de fortes pluies lorsque l'installation de drainage n°1 fonctionnait à plein débit, ainsi qu'en témoigne le procès-verbal de constat réalisé par Maître [I], huissier de justice, le 30 janvier 2013, jusqu'à la réalisation des travaux entrepris par [O] [Z] durant la première expertise judiciaire, soit au printemps 2017.
Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné M. [Z] au paiement d'une somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice de jouissance subi par M. et Mme [X].
Sur l'article 700 et les dépens :
L'équité et la prise en considération de l'issue du litige commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner M. et Mme [X], qui succombent en la plus grande partie de leurs prétentions, à verser à M. [Z] la somme de 3.000 euros au titre des frais exposés en cause d'appel et non compris dans les dépens.
Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie. Au vu de l'issue du litige déterminée par la présente décision, il y a lieu de condamner M. et Mme [X], d'une part, et M. [Z], d'autre part, à supporter respectivement 4/5èmes et 1/5ème de la charge des dépens de l'instance d'appel.
Le jugement entrepris sera enfin confirmé de ces chefs
PAR CES MOTIFS
La Cour,
- INFIRME partiellement le jugement rendu le 3 juillet 2019 par le Tribunal d'instance de Saint-Amand-Montrond en ce qu'il a constaté que les travaux réalisés par M. [Z] sur la parcelle numéro [Cadastre 7] pendant les opérations d'expertise, avaient remédié à l'aggravation de la servitude d'écoulement des eaux sur la parcelle numéro [Cadastre 5] et débouté en conséquence M. et Mme [X] de leur demande de travaux sous astreinte sur la sortie de drainage côté habitation ;
- CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus de ses dispositions ;
Et statuant de nouveau des chefs infirmés,
- CONDAMNE M. [Y] [Z], venant aux droits de [O] [Z], à procéder au remplacement du drain collecteur annelé situé sur la parcelle C n° [Cadastre 7] sur un linéaire de 5 m par une canalisation en PVC lisse de diamètre 100 mm, tout en conservant une cote altimétrique du fil d'eau à 294,30 m en entrée du regard soit 4 à 5 cm au-dessus du fil d'eau de sortie (294,26 m), dans un délai de trois mois à compter de la signification du présent arrêt ;
- DIT n'y avoir lieu d'assortir cette condamnation d'une astreinte ;
- DEBOUTE M. [S] [X] et Mme [K] [U] épouse [X] du surplus de leurs demandes relatives à l'exécution de ces travaux ;
Et y ajoutant,
- CONDAMNE M. [S] [X] et Mme [K] [U] épouse [X] à verser à M. [Y] [Z], venant aux droits de [O] [Z], la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;
- REJETTE toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;
- CONDAMNE M. [S] [X] et Mme [K] [U] épouse [X], d'une part, et M. [Y] [Z], venant aux droits de [O] [Z], d'autre part, à supporter respectivement 4/5èmes et 1/5ème de la charge des dépens de l'instance d'appel.
L'arrêt a été signé par O. CLEMENT, Président, et par S. MAGIS, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le président,
S. MAGIS O. CLEMENT