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09/12/2022 | FRANCE | N°22/00374

France | France, Cour d'appel de Bourges, Chambre sociale, 09 décembre 2022, 22/00374


SD/CV





N° RG 22/00374

N° Portalis DBVD-V-B7G-DOET





Décision attaquée :

du 07 mars 2022

Origine : conseil de prud'hommes - formation paritaire de NEVERS







--------------------



S.A. SAPEM





C/



M. [H] [M]







--------------------



Expéd. - Grosse



Me GONCALVES 9.12.22



Me MAUGUERE 9.12.22





















COUR

D'APPEL DE BOURGES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 09 DÉCEMBRE 2022



N° 198 - 8 Pages





APPELANTE :



S.A. SAPEM

[Adresse 2]



Ayant pour avocate Me Martine GONCALVES de la SELAS ELEXIA ASSOCIES, du barreau de NEVERS









INTIMÉ :



Monsieur [H] [M]

[Adresse 1]



Ayant pour avocate ...

SD/CV

N° RG 22/00374

N° Portalis DBVD-V-B7G-DOET

Décision attaquée :

du 07 mars 2022

Origine : conseil de prud'hommes - formation paritaire de NEVERS

--------------------

S.A. SAPEM

C/

M. [H] [M]

--------------------

Expéd. - Grosse

Me GONCALVES 9.12.22

Me MAUGUERE 9.12.22

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 09 DÉCEMBRE 2022

N° 198 - 8 Pages

APPELANTE :

S.A. SAPEM

[Adresse 2]

Ayant pour avocate Me Martine GONCALVES de la SELAS ELEXIA ASSOCIES, du barreau de NEVERS

INTIMÉ :

Monsieur [H] [M]

[Adresse 1]

Ayant pour avocate Me Isabelle MAUGUERE de la SELARL Isabelle MAUGUERE, du barreau de NEVERS

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

PRÉSIDENT : Mme VIOCHE, présidente de chambre

ASSESSEURS : Mme de LA CHAISE, présidente de chambre

Mme CLÉMENT, présidente de chambre

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE

DÉBATS : A l'audience publique du 28 octobre 2022, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 9 décembre 2022 par mise à disposition au greffe.

ARRÊT : Contradictoire - Prononcé publiquement le 9 décembre 2022 par mise à disposition au greffe.

Arrêt n° 198 - page 2

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EXPOSÉ DU LITIGE

La SA Sapem est spécialisée dans le secteur d'activité de la fabrication de matériel de levage et de manutention, et employait au moment de la rupture plus de 11 salariés.

M. [H] [M], né le 14 février 1978, a été embauché à compter du 10 octobre 2011 par la SA Sapem en qualité d'ingénieur au bureau d'études, statut cadre, suivant contrat de travail à durée indéterminée du même jour.

Cet emploi relève de la convention collective nationale des ingénieurs et cadres de la métallurgie du 13 mars 1972.

Le 1er septembre 2017, M. [M] a été promu au poste de responsable du bureau d'études.

En dernier lieu, il percevait un salaire brut mensuel de 3 418,14 euros contre 169 heures de travail effectif par mois.

Par courrier du 20 septembre 2019, remis en main propre contre décharge, M. [M] a été convoqué à un entretien préalable à son éventuel licenciement fixé au 1er octobre 2019 et mis à pied à titre conservatoire.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 14 octobre 2019, il a été licencié pour faute grave, l'employeur lui reprochant principalement des manquements dans le traitement d'une commande d'un client important, un comportement agressif à l'égard de l'un de ses collègues et son absence d'implication lors d'une réunion de travail.

Contestant son licenciement, M. [M] a saisi le 3 janvier 2020 le conseil de prud'hommes de Nevers, lequel, par jugement du 7 mars 2022, a :

- dit que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société Sapem à lui payer les sommes suivantes :

$gt; 2 010,75 euros à titre de rappel de salaire pendant la mise à pied conservatoire, outre 201,07 euros au titre des congés payés afférents,

$gt; 11 342 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre 1 134,20 euros au titre des congés payés afférents,

$gt; 7 540 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement,

$gt; 13 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- ordonné à la société Sapem de lui remettre un certificat de travail et une attestation Pôle Emploi rectifiés conformément au jugement, dans un délai d'un mois suivant la notification dudit jugement, sans qu'il ne soit néanmoins nécessaire de prononcer une astreinte à cette fin,

- dit que sa demande de rémunération supplémentaire en contrepartie de trois inventions brevetées formulée est irrecevable,

- débouté M. [M] de sa demande en paiement de la somme de 6 000 euros au titre de la rémunération supplémentaire en contrepartie de trois inventions brevetées,

- condamné la société Sapem à payer à M. [M] la somme de 1 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société Sapem de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Sapem aux entiers dépens de la procédure,

- dit y avoir lieu à ordonner le remboursement par la société Sapem à Pôle Emploi des indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour du jugement et ce dans la limite de trois mois d'indemnité,

- débouté les parties de toute demande différente, plus ample ou contraire.

Vu l'appel régulièrement interjeté le 5 avril 2022 par la société Sapem à l'encontre de la décision prud'homale, qui lui a été notifiée le 11 mars 2022, sauf en ce qu'elle a déclaré irrecevable la demande de rémunération supplémentaire en contrepartie de trois inventions brevetées formulée par M. [M], et a débouté ce dernier de ses demandes en paiement de la

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somme de 6 000 euros à ce titre et sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 octobre 2022 aux termes desquelles la société Sapem demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté M. [M] de sa demande au titre des brevets,

- infirmer ledit jugement pour le surplus,

statuant à nouveau,

- dire et juger le licenciement pour faute grave de M. [M] justifié,

- en conséquence, débouter M. [M] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner M. [M] à lui payer une somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le même aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 26 septembre 2022 aux termes desquelles M. [M] demande à la cour de :

- débouter la société Sapem de sa demande de réformation du jugement entrepris,

- confirmer le jugement entrepris dans son intégralité,

- condamner la société Sapem aux entiers dépens ainsi qu'au versement d'une indemnité de 3 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 26 octobre 2022 ;

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.

SUR CE

1) Sur la contestation du licenciement et les demandes indemnitaires afférentes

a) Sur les griefs

Il résulte de l'article L. 1235-1 du code du travail que le juge à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

La cause réelle est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte ce qui oblige le juge à vérifier que d'autres faits allégués par le salarié ne sont pas la véritable cause du licenciement. La cause sérieuse est celle d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.

La faute grave, enfin, est une cause réelle et sérieuse mais d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Seuls les manquements volontaires à une obligation professionnelle ou les erreurs profes-sionnelles consécutives à la mauvaise volonté délibérée du salarié peuvent être considérés comme fautifs.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, la lettre de licenciement pour faute grave datée du 14 octobre 2019 comporte les motifs de licenciement suivants :

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- il est premièrement reproché à M. [M] de ne pas avoir traité la demande urgente que la société Orano, un client important, a adressée à la société Sapem le 9 septembre 2019, tout en laissant croire au PDG que les difficultés étaient réglées puis en en reportant la responsabilité sur le service production,

- il lui est deuxièmement fait grief d'avoir claqué violemment la porte du bureau de M. [S],

- enfin, il aurait, lors d'une réunion d'action du 12 septembre 2019, manqué d'intérêt et de participation.

- Sur la matérialité des griefs

Pour justifier de la matérialité du premier grief, l'employeur produit un courriel du 9 septembre 2019 émanant d'une salariée de la société Orano, comportant un appel d'offres dématérialisé pour la réalisation en sous-traitance de deux palonniers, en vue d'une livraison au plus tard le 22 octobre 2019. M. [C] [O], PDG de la société Sapem, a transféré ce courriel le même jour à Mme [T] [D], responsable du service commercial, et l'a mis en copie M. [X] [S], responsable du service production, et M. [M]. Par courriel du 12 septembre 2019 envoyé à Mme [D] et M. [S], avec M. [O] en copie, M. [M] a demandé si la livraison au 22 septembre était envisageable. Mme [D] lui a répondu le même jour en demandant s'il y avait de la reconception à prévoir et sous combien de semaines le dossier de fabrication pouvait être lancé, tout en indiquant qu'une fois ces éléments communiqués, le service production pourrait confirmer le délai. Enfin, par courriel du 17 septembre 2019, M. [M] a écrit à M. [O] et Mme [D], en plaçant M. [S] en copie, que le problème de délai avait été vu avec M. [S], tout en demandant, à propos de la date de livraison exigée par le client, si celle-ci était négociable.

L'employeur accompagne ces échanges de courriels de l'attestation de M. [S], qui affirme que le service de production aurait pu prévoir la fabrication des pièces demandées par le client en les intercalant dans le planning de production, qu'il était en attente d'informations de la part du bureau d'études pour se prononcer sur la possibilité de tenir le délai de livraison, que le 13 septembre 2019, il a indiqué de vive voix à M. [M] qu'il avait besoin de connaître le temps d'étude nécessaire pour pouvoir donner un délai de fabrication et que ce dernier a alors répondu que 'de toute manière, la production était chargée jusqu'à fin octobre'. L'attestation de Mme [D] corrobore ces différentes affirmations.

Il résulte tout d'abord de ces pièces que, contrairement à ce que soutient l'employeur, la société Orano n'a pas adressé de commande mais un simple appel d'offres à la société Sapem.

La cour relève que la procédure de licenciement a été engagée dès le 20 septembre 2019, soit à peine 11 jours après la réception de l'appel d'offres et plus d'un mois avant l'expiration du délai de livraison souhaité par le client. Or, au 20 septembre 2019, les éléments produits par l'employeur ne permettent pas d'établir de manquements de la part de M. [M] dans le traitement de la demande de la société Orano. En effet, la société Sapem ne saurait conclure que M. [M] 'n'a jamais répondu aux sollicitations légitimes de Mme [D] et de M. [S]', alors qu'aucun délai n'avait été fixé en interne pour répondre à l'appel d'offres et que le dernier échange entre les différents cadres de l'entreprise faisait apparaître que M. [M] se renseignait sur le caractère négociable du délai de livraison contenu dans l'appel d'offres, au motif que le service de production ne pourrait pas traiter la commande dans le délai demandé.

Par ailleurs, il ne peut être déduit des termes du courriel du 17 septembre 2019 envoyé par M. [M] à M. [O] et Mme [D] que le salarié aurait cherché à tromper la direction en laissant croire que les difficultés de délai étaient résolues, dès lors que par ce courriel, il s'enquérait justement du caractère négociable dudit délai.

Enfin, le fait que M. [M] ait affirmé le 13 septembre 2019 à M. [S] que le planning de production était complet jusqu'à la fin du mois d'octobre 2019 ne permet pas, à lui seul, d'établir que le salarié aurait cherché à reporter la responsabilité de ses propres carences sur le service de production.

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Ainsi, l'employeur échoue premièrement à apporter la preuve que M. [M] n'aurait pas traité la demande de la société Orano avec l'urgence requise, qu'il aurait laissé croire à M. [O] que les difficultés étaient réglées et qu'il en aurait reporté la responsabilité sur le service de production.

Concernant le deuxième grief, relatif à la porte claquée avec violence par M. [M], M. [S] et Mme [D] attestent que le 13 septembre 2019, à l'issue de l'échange verbal relatif au délai de livraison requis par l'appel d'offres de la société Orano, M. [M] a quitté le bureau de M. [S] en claquant 'très violemment' la porte qui sépare son bureau de celui du bureau d'études.

M. [M] prétend ne pas se souvenir avoir claqué la porte du bureau mais que, s'il l'avait fait, il s'agirait d'un mouvement d'humeur regrettable ne justifiant pas la rupture du contrat de travail après huit années de collaboration.

Ainsi, au regard des attestations concordantes de M. [S] et Mme [D] et de l'absence de réelle contestation du salarié, le deuxième grief doit être considéré comme établi.

Cependant, les propos relatés dans les attestations de Mme [D], Mme [B] épouse [O] et M. [F], relatifs aux autres difficultés relationnelles qu'aurait posées le comportement de M. [M], ne peuvent être pris en considération, dès lors que la lettre de licenciement, qui fixe les limites du litige, n'en fait pas état au soutien du licenciement pour faute grave.

Pour prouver le dernier grief, relatif à l'absence d'implication lors de la réunion du 12 septembre 2019, l'employeur se réfère aux attestations de M. [S] et Mme [D], qui indiquent qu'interrogé par la direction sur ce qu'il considérait être les principaux axes de travail de son service, M. [M] a mentionné trois points, mais qu'il n'a présenté aucun document. M. [S] affirme que M. [M] s'est fait remarquer 'par sa passivité', qu'il ne montrait 'aucune motivation', et Mme [D] indique que M. [M] lui a 'donné l'impression' de ne pas participer à la réunion de manière 'constructive'. Ils déclarent qu'à la fin de la réunion, M. [O] a demandé aux participants de lui remettre les 'actions' qu'ils avaient préparées et que M. [M] a quitté la salle sans s'exécuter. Mme [D] ajoute que M. [M] a rédigé à la hâte, à l'issue de la réunion, un bref document informatique de quelques lignes reprenant ses actions, avant de le lui remettre, et qu'il a pris des notes durant la réunion qu'il n'a pas souhaité donner à la direction au motif qu'il s'agissait de ses notes personnelles.

La société Sapem produit également le courriel de convocation à la réunion, qui détaille l'ordre du jour et demande aux cadres de 'venir préparés avec les axes de travail que vous prévoyez pour votre service', ainsi qu'un document informatique sur lequel figurent quelques mots clés relatifs aux améliorations à apporter au bureau d'études, affirmant qu'il s'agit du document préparatoire remis par M. [M] à l'occasion de la réunion. Il verse encore aux débats un document intitulé 'amélioration continue du BE - REX des projets-méthodologie', remis par M. [O] à M. [M] en novembre 2018, ainsi que les notes prises par Mme [D] et M. [S] durant la réunion du 12 septembre 2019.

Sur la base de ces éléments, l'employeur ne saurait toutefois reprocher au salarié de ne pas être venu préparé à la réunion, étant observé, d'une part, que sur le courriel de convocation à celle-ci, il est simplement demandé aux cadres de venir en étant préparés, sans leur imposer de réaliser un support écrit devant être remis à l'issue de la réunion. D'autre part, l'absence de préparation écrite exhaustive ne signifie pas l'absence de qualité de la préparation, comme le soutient justement M. [M]. Or, l'employeur ne produit aucun compte-rendu de réunion ou autre document interne permettant d'apprécier la qualité des échanges ainsi que les apports qui ont pu oralement être faits par M. [M] lors de ladite réunion.

Il est encore sans pertinence que Mme [D] et M. [S] aient pris des notes durant celle-ci dès lors que l'employeur reconnaît dans ses propres écritures que M. [M] en a fait de même et qu'il n'est pas expliqué en quoi le salarié aurait eu l'obligation de remettre ses notes personnelles à

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son employeur.

Ainsi, il n'est pas démontré que M. [M] aurait été insuffisamment préparé pour la réunion du 12 septembre 2019 et qu'il aurait manqué d'intérêt durant cette dernière ; l'employeur échoue donc à apporter la preuve de la matérialité du troisième fait invoqué au soutien du licenciement.

- Sur la gravité des griefs

En ce qui concerne la gravité du seul grief dont l'employeur démontre la réalité au soutien du licenciement, il y a lieu de considérer, eu égard à l'ancienneté de près de huit années du salarié dans l'entreprise et à l'absence de toute sanction disciplinaire antérieure, que le fait d'avoir claqué une porte de bureau n'a pas rendu impossible le maintien de M. [M] dans l'entreprise.

Il en résulte que la faute grave n'est pas caractérisée, ni aucun manquement fautif susceptible de justifier un licenciement.

En conséquence, c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a jugé que le licenciement de M. [M] est dépourvu de cause réelle et sérieuse, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef.

b) Sur les conséquences financières du licenciement

M. [M] conclut à la confirmation du jugement sans énoncer de moyen au soutien de ses demandes relatives aux conséquences indemnitaires du licenciement, de sorte qu'il sera réputé s'approprier les motifs du jugement conformément à l'article 954, alinéa 6, du code de procédure civile.

- Sur la demande en paiement d'un rappel de salaire au titre de la mise à pied conservatoire et des congés payés afférents

Le licenciement de M. [M] ayant été déclaré sans cause réelle et sérieuse et l'employeur ne critiquant pas la somme allouée par le conseil de prud'hommes à titre de rappel de salaire portant sur la période de mise à pied conservatoire, il y a lieu de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a condamné la société Sapem à payer à M. [M] la somme de 2 010,75 euros, outre celle de 201,07 euros au titre des congés payés afférents.

- Sur la demande en paiement d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents

L'article 27, alinéa 3, de la convention collective applicable prévoit qu'après l'expiration de la période d'essai, le délai-congé réciproque est, sauf en cas de faute grave ou de convention dans la lettre d'engagement prévoyant un délai plus long, de :

- 1 mois pour l'ingénieur ou cadre de la position I pendant les 2 premières années de fonctions en cette qualité dans l'entreprise ;

- 2 mois pour l'ingénieur ou cadre de la position I ayant 2 ans de présence dans l'entreprise ;

- 3 mois pour tous les autres ingénieurs ou cadres.

En l'espèce, l'employeur ne contestant pas le montant retenu par le conseil de prud'hommes eu égard à la durée de préavis de trois mois et au salaire de référence de 3 780,53 euros bruts, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné la société Sapem à payer à M. [M] la somme de 11 342 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 1 134,20 euros au titre des congés payés afférents.

- Sur la demande en paiement de l'indemnité conventionnelle de licenciement

Aux termes de l'article 29 de la convention collective applicable :

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'Il est alloué à l'ingénieur ou cadre, licencié sans avoir commis une faute grave, une indemnité de licenciement distincte du préavis.

Le taux de cette indemnité de licenciement est fixé comme suit, en fonction de la durée de l'ancienneté de l'intéressé dans l'entreprise :

' pour la tranche de 1 à 7 ans d'ancienneté : 1/5 de mois par année d'ancienneté ;

' pour la tranche au-delà de 7 ans : 3/5 de mois par année d'ancienneté.

Pour le calcul de l'indemnité de licenciement, l'ancienneté et, le cas échéant, les conditions d'âge de l'ingénieur ou cadre sont appréciées à la date de fin du préavis, exécuté ou non. Toutefois, la première année d'ancienneté, qui ouvre le droit à l'indemnité de licenciement, est appréciée à la date d'envoi de la lettre de notification du licenciement. [...]

L'indemnité de licenciement est calculée sur la moyenne mensuelle des appointements ainsi que des avantages et gratifications contractuels, dont l'ingénieur ou cadre a bénéficié au cours de ses 12 derniers mois précédant la notification du licenciement [...]'

En l'espèce, la société Sapem fait grief au jugement attaqué d'avoir alloué à M. [M] une indemnité conventionnelle de licenciement d'un montant de 7 540 euros et soutient qu'au regard de la moyenne des douze derniers mois de salaire, s'élevant à 3 780,53 euros bruts, l'indemnité ne peut être supérieure à la somme de 4 292,16 euros.

Eu égard aux 8 années d'ancienneté du salarié dans l'entreprise à la date de la fin de son préavis, c'est cependant à juste titre que le conseil de prud'hommes a fixé le montant de l'indemnité conventionnelle de licenciement à la somme de 7 540 euros, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef.

- Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'article L. 1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, à défaut de réintégration dans l'entreprise employant habituellement au moins onze salariés, le juge octroie au salarié ayant une ancienneté d'au moins huit années complètes, comme c'est le cas de M. [M], une indemnité à la charge de l'employeur dont le montant est compris entre 3 mois et 8 mois de salaire brut.

En l'espèce, M. [M] était âgé de 41 ans au jour du licenciement. Au regard des éléments portés à la connaissance de la cour, et notamment le niveau de la rémunération et les conditions de la rupture, c'est à juste titre que le conseil de prud'hommes a condamné la société Sapem à lui payer la somme de 13 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement attaqué est confirmé de ce chef.

2) Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement querellé est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Partie principalement succombante, la société Sapem est condamnée aux dépens d'appel.

L'issue de la procédure et l'équité commandent par ailleurs de la condamner à payer à M. [M] une somme complémentaire de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de la débouter de sa propre demande d'indemnité de procédure.

***

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Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, il y a lieu, en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail qui l'imposent, d'ordonner d'office à l'employeur, par voie infirmative, de rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage versées à M. [M] du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME la décision déférée en toutes ses dispositions,

CONDAMNE la SA Sapem à rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à M. [H] [M] du jour de son licenciement au jour du prononcé de l'arrêt, dans la limite de six mois d'indemnités,

CONDAMNE la SA Sapem à payer à M. [H] [M] une somme complémentaire de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la SA Sapem aux dépens d'appel et la DÉBOUTE de sa propre demande d'indemnité de procédure.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. DELPLACE C. VIOCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00374
Date de la décision : 09/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-09;22.00374 ?
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