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18/11/2022 | FRANCE | N°21/01356

France | France, Cour d'appel de Bourges, Chambre sociale, 18 novembre 2022, 21/01356


SD/OC





N° RG 21/01356

N° Portalis DBVD-V-B7F-DNGE





Décision attaquée :

du 09 décembre 2021

Origine :

conseil de prud'hommes - formation paritaire de BOURGES







--------------------





M. [K] [F]





C/



UGECAM









--------------------





Expéd. - Grosse



Me LACROIX 18.11.22



Me LESIMPLE-

COUTELIER 18.11.22



















COUR D'APPEL DE BOURGES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2022



N° 174 - 11 Pages





APPELANT :



Monsieur [K] [F]

[Adresse 1]



Représenté par Me Dominique LACROIX, substitué par Me Jean-François TRUMEAU, avocats au barreau de BOURGES







INTIMÉE :



UGECAM

[Ad...

SD/OC

N° RG 21/01356

N° Portalis DBVD-V-B7F-DNGE

Décision attaquée :

du 09 décembre 2021

Origine :

conseil de prud'hommes - formation paritaire de BOURGES

--------------------

M. [K] [F]

C/

UGECAM

--------------------

Expéd. - Grosse

Me LACROIX 18.11.22

Me LESIMPLE-

COUTELIER 18.11.22

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 18 NOVEMBRE 2022

N° 174 - 11 Pages

APPELANT :

Monsieur [K] [F]

[Adresse 1]

Représenté par Me Dominique LACROIX, substitué par Me Jean-François TRUMEAU, avocats au barreau de BOURGES

INTIMÉE :

UGECAM

[Adresse 2]

Représentée par Me Catherine LESIMPLE-COUTELIER de la SELARL LESIMPLE-COUTELIER & PIRES, avocat au barreau de TOURS

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats :

PRÉSIDENT : Mme CLÉMENT, présidente de chambre, rapporteur

en l'absence d'opposition des parties et conformément aux dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE

Lors du délibéré : Mme VIOCHE, présidente de chambre

Mme de LA CHAISE, présidente de chambre

Mme CLÉMENT, présidente de chambre

DÉBATS : A l'audience publique du 30 septembre 2022, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 18 novembre 2022 par mise à disposition au greffe.

Arrêt n° 174 - page 2

18 novembre 2022

ARRÊT : Contradictoire - Prononcé publiquement le 18 novembre 2022 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [K] [F], née le 4 juin 1958, a été embauché par l'Union pour la gestion des établissements de caisses d'assurance maladie (UGECAM) en qualité d'ouvrier d'entretien suivant contrat de travail à durée indéterminée du 24 juin 2013.

Les UGECAM gèrent des établissements de santé et les établissements de santé privés d'intérêt collectif de l'Assurance maladie, notamment les soins de suite et la réadaptation, le secteur médico-social et la réinsertion professionnelle des travailleurs handicapés.

M. [F] a été affecté à l'ITEP (Institut thérapeutique, éducatif et pédagogique) de [Localité 4] qui accueille des enfants et des jeunes de 6 à 20 ans présentant des troubles du comportement.

Il a été promu cadre référent entretien maintenance en avril 2014 et exerçait ses fonctions en étant rattaché hiérarchiquement à M. [J].

En juin 2018, M. [F] a été placé en arrêt maladie pour une opération à l'épaule. Il a repris à mi-temps thérapeutique en novembre 2018. M. [J] a été alors remplacé par M. [P].

La rémunération brute mensuelle de M. [F] s'élevait en dernier lieu à 2 494,07 €.

Le 15 mars 2019, l'employeur a adressé à M. [F] un courrier lui reprochant son comportement déloyal et lui demandant de normaliser ses relations de travail avec ses collègues.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 4 octobre 2019, M. [F] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 15 octobre 2019, avec mise à pied conservatoire.

Le conseil de discipline, réuni le 4 novembre 2019, s'est abstenu sur chacune des questions posées.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 5 novembre 2019, M. [F] a été licencié pour faute grave.

Contestant son licenciement, M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Bourges le 16 juillet 2020 aux fins de voir juger son licenciement nul pour discrimination syndicale et pour harcèlement moral et ordonner sa réintégration.

Par jugement du 9 décembre 2021, le conseil des Prud'hommes de Bourges, disant que le licenciement de M. [F] n'était pas entaché de nullité mais qu'il était sans cause réelle et sérieuse :

- l'a débouté de ses demandes en paiement de dommages et intérêts pour nullité du licenciement ainsi que de réintégration et de ses différentes demandes afférentes,

- a condamné l'UGECAM à payer à M. [F] les sommes de :

$gt; 4 644,51 € au titre de l'indemnité légale de licenciement,

$gt; 5 716,32 € au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

$gt; 571,63 € au titre des congés payés afférents,

Arrêt n° 174 - page 3

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$gt; 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

$gt; 2 110, 08 € au titre de l'indemnité compensatrice de mise à pied conservatoire

$gt; 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- a dit que l'UGECAM devra remettre à M. [F] une attestation Pôle emploi conforme au jugement dans un délai de 15 jours à compter de sa notification,

- condamné l'UGECAM aux dépens.

Vu l'appel régulièrement interjeté par M. [F] le 22 décembre 2021 à l'encontre de la décision prud'homale, qui lui a été notifiée le 15 décembre 2021, sur l'ensemble des chefs jugés, expressément détaillés dans la déclaration d'appel ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 21 janvier 2022 aux termes desquelles M.[F] demande à la cour de :

'- Infirmer le jugement du 10 septembre 2021 en ce qu'il a dit que le licenciement n'est pas entaché de nullité, l'a débouté sa demande en paiement de dommages et intérêts pour nullité du licenciement, de réintégration et de ses différentes demandes afférentes, et dit que la rupture du contrat de travail est dépourvue de cause réelle et sérieuse,

- Réévaluer quant au quantum des sommes allouées,

- Dire et juger que son licenciement est entaché de nullité,

- Subsidiairement , dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- Condamner l'UGECAM à lui payer les sommes de :

$gt; 12 158,60 € au titre de l'indemnité compensatrice de licenciement,

$gt; 17 148,96€ au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ,

$gt; 1 714,90 € au titre des congés payés afférents,

$gt; 80 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, et subsidiairement pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

$gt; 2 110,08 € au titre du salaire durant la mise à pied conservatoire,

$gt; 211,00 € au titre des congés payés afférents;

$gt; 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- ordonner sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, la remise du bulletin de salaire et de l'attestation Pôle Emploi modifiée conformément à l'arrêt ;

- Condamner l'UGECAM aux dépens et à lui payer la somme de 4 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel.

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 avril 2022 aux termes desquelles l'UGECAM demande à la cour de :

- Confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que le licenciement n'était pas nul, à défaut de discrimination et de harcèlement moral,

- L'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau, dire que le licenciement repose sur une faute grave, avec les conséquences de droit,

- Subsidiairement, ramener les condamnations à de plus justes proportions,

- Condamner M. [F] à lui payer la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu' aux dépens.

Vu l'ordonnance de clôture du 31 août 2022,

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.

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MOTIFS

1) Sur la nullité du licenciement

a) à raison d'une situation de candidature imminente aux élections professionnelles

En application de l'article L.2411-7 du code du travail, les candidats aux fonctions de membre élu au CSE bénéficient d'une protection contre le licenciement.

Un salarié peut bénéficier de la protection légale dès lors qu'il peut rapporter la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature, même avant que celle-ci soit officialisée, avant sa convocation à l'entretien préalable à son éventuel licenciement.

Si un doute subsiste, il ne profite pas au salarié.

En l'espèce, M. [F] fait valoir que l'employeur n'ignorait pas, lors de l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable en date du 4 octobre 2019, qu'il allait se présenter aux prochaines élections professionnelles prévues le 31 octobre 2021 (en réalité le 29 novembre 2019, le 31 octobre étant le début de la négociation du protocole d'accord préélectoral), qu'en effet l'autorisation d'absence qu'il a obtenue au titre de l'article 8-21 du protocole d'accord sur l'exercice du doit syndical, en vue d'une réunion préparatoire visant à établir les listes des candidats a été remise à l'employeur le 1er octobre 2021, que le même jour, les listes étaient finalisées et qu'il était sur la liste du 2ème collège en tant que titulaire.

L'employeur réplique qu'il ne pouvait avoir connaissance de la candidature de M. [F] avant le 31 octobre 2021, date à laquelle les syndicats étaient conviés afin de négocier le protocole préélectoral et que ce n'est qu'après cette date que les listes ont été constituées sur lesquelles M. [F] ne figurait d'ailleurs pas. Il fait au surplus valoir que M. [F] s'est intéressé au syndicat Force ouvrière en octobre 2019 et rappelle qu'il n'y a pas de lien entre les autorisations d'absence au titre de l'exercice du droit syndical et les élections professionnelles à venir.

M. [F] produit une attestation de M. [W], qui certifie avoir établi le 28 septembre 2021 'les articles 8-21" pour M. [F] et d'autres élus du CSE du CPOM du Berry en vue d'une réunion préparatoire le 9 octobre 2019 afin d'établir les listes aux prochaines élections du CSE, et qui ajoute que ces autorisations d'absence au titre de l' article 8-21 ont été remises par Mme [A] au secrétariat de la direction le 1er octobre 2019.

Mme [A] atteste avoir remis les autorisations d'absence à M. [X] le 1er octobre 2021, lequel les auraient déposées sur le bureau de M. [S] (directeur) à l'IME Le Châtelier.

L'attestation de M. [H], délégué syndical, précise qu'il a demandé à M. [W] d'établir 'des courriers afin de pouvoir bénéficier d'article 8-21", qu'une réunion était organisée le 9 octobre 2019 à l'Union départementale de [Localité 3] afin d'apprendre le mode de fonctionnement d'un CSE'. Puis : ' Ce même jour, les listes pour les élections professionnelles étaient finalisées et M. [F] était sur la liste du 2ème collège en tant que titulaire. Les courriers ont été remis à M. [S], (directeur) le 1er octobre 2019"

Il ressort de ces pièces que si l'employeur a eu éventuellement connaissance des autorisations d'absence le 1er octobre 2019, sans certitude puisqu'elles ont été remises à M. [X], dont la qualité n'est pas précisée, autorisations d'absence qui peuvent être au demeurant accordées tout au long de l'année 'pour permettre à l'organisation syndicale de fonctionner', elles ne préjugent nullement de l'intention de leurs bénéficiaires d'être candidats aux élections professionnelles. En outre, la réunion n'avait pas pour objet les élections professionnelles mais une information sur le rôle du CSE.

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Au surplus, selon M. [G], et contrairement à ce que soutient M. [F], ce n'est que lors de la réunion du 9 octobre 2019 que les listes ont été établies (bien qu'elles ne soient pas produites, la pièce 75 ne constituant nullement une liste), soit postérieurement au 4 octobre 2019, date de l'envoi à M. [F] de la convocation à l'entretien préalable.

En conséquence, M. [F] ne rapporte pas la preuve de la connaissance par l'employeur de son éventuelle candidature imminente aux élections professionnelles avant l'envoi de la lettre de convocation à l'entretien préalable en vue d'un éventuel licenciement, ce qu'a justement décidé le conseil de prud'hommes dont la décision sera confirmée de ce chef.

b) en raison d'une discrimination syndicale

Aux termes de l'article L.1132-1 du code du travail, aucune personne ne peut être écartée d'une procédure de recrutement ou de l'accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l'article 1 er de la loi numéro 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d'adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l'article L 3221-3, de mesures d'intéressement ou de distribution d'actions, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses m'urs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

En vertu de l'article L. 1134-1 du code du travail, lorsqu'un litige survient en raison d'une discrimination syndicale, le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, M. [F] se plaint d'un comportement discriminatoire de l'employeur en soutenant que les 'difficultés' ont commencé dès qu'il a adhéré au syndicat Force ouvrière en janvier 2019. Il invoque le fait que d'anciens salariés, M. [L] et M. [J], auraient vécu la même situation d'isolement et de mise au placard.

Il convient tout d'abord de relever que bien que ce moyen ait été soulevé devant lui, le conseil de prud'hommes n'a pas explicitement distingué du moyen tiré de la nullité du licenciement à raison de l'imminence de la candidature de M. [F], examinée ci-dessus.

M. [F] ne rapporte pas la preuve de son adhésion au syndicat dès le mois de janvier 2019 mais seulement qu'il était à jour de ses cotisations pour l'année 2019, sans plus de précision sur la date de son adhésion.

En outre les 'difficultés' invoquées ( 'manoeuvres d'isolement, perte de ses attributions') sont datées par lui à compter de son retour de son arrêt maladie le 19 novembre 2018, date à laquelle il n'était pas syndiqué.

Il a été par ailleurs établi ci-dessus que la convocation à l'entretien préalable était sans lien

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avec les élections professionnelles.

Dès lors, M. [F] ne présente aucun élément de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination syndicale, de sorte que la nullité du licenciement pour ce motif ne peut prospérer.

c) en raison d'un harcèlement moral

Il résulte de l'article L. 1152-1 du code du travail, que le harcèlement moral est constitué, indépendamment de l'intention de son auteur, dès lors que sont caractérisés des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité du salarié, d'altérer sa santé ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, lorsque le salarié présente des éléments de fait précis et concordants laissant supposer selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits et d'apprécier si pris dans leur ensemble, ils permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral, et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Aux termes de l'article L. 1152-3 du code du travail, toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul.

En l'espèce, M [F] conteste la validité de son licenciement en prétendant avoir fait l'objet d'un harcèlement moral à compter de son retour d'arrêt maladie au mois de novembre 2018, ce que l'employeur dément.

Au soutien du harcèlement moral allégué, M. [F] fait valoir les faits suivants, qui l'ont conduit selon lui à être placé en arrêt de travail à compter du 25 mars au 26 avril 2019 :

- la réduction de ses attributions dans le cadre de la réorganisation du service logistique pendant son arrêt de travail en 2018,

- l'absence d'information et de directive de la direction, l'amenant à organiser seul son temps de travail à son retour,

- le fait qu'il n'a été reçu par la direction que le 28 novembre 2018, à sa demande expresse,

- le fait qu'il lui a été donné l'ordre de ne plus fournir de consignes ou de directives aux personnels de la logistique, qu'il dirigeait pourtant depuis septembre 2015,

- le fait de n'avoir pu obtenir une nouvelle fiche de poste que sur intervention de son médecin,

- le fait qu'il a été demandé aux autres salariés de ne plus lui adresser la parole,

- le fait d'avoir été l'objet de rumeurs (accusation de vol, d'avoir un comportement inapproprié avec des collègues, de recevoir chez lui un délégué syndical, de s'être fait opérer en juin exprès pour 'planter' le système).

La réduction de ses attributions est matériellement établie par la comparaison de la fiche de poste initiale et la fiche de poste 'mise à jour au 15 mars 2019". Toutefois, M. [F] n'indique pas en quoi cette réduction serait constitutive de harcèlement moral alors même qu'elle répond aux préconisations du médecin du travail lors de la visite de pré-reprise du 6 novembre 2018 puis de la visite de reprise du 29 novembre 2018, celle-ci indiquant : 'temps partiel thérapeutique 50%. Activités ne dépassant pas plus de 4h d'affilée par jour. Eviter le port de charges lourdes supérieures à 5 kg et efforts équivalents pousser/tirer. Eviter les gestes répétés/prolongés des membres supérieurs au dessus de la hauteur des épaules. Il est recommandable de ne pas réaliser le transport des usagers'. Le contenu des missions de M. [F] a été convenu avec l'employeur

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à son retour et lors d'une réunion d'information avec l'ensemble du personnel d'entretien le 30 novembre 2018 (mail du directeur du 15 février 2019). Par la suite, à sa demande, M. [F] a pu à nouveau être reçu en entretien le 26 février 2019 afin d'en rediscuter ; ce fait ne peut donc laisser supposer un harcèlement moral à son encontre.

Quant aux 2ème et 3ème faits, ils ne sont pas établis matériellement.

S'agissant de l'ordre donné à M. [F] de ne plus fournir de consignes ou de directives aux personnels de la logistique, il relève du pouvoir de direction de l'employeur de faire respecter les rapports hiérarchiques entre les salariés, ce dont M. [F] a convenu lorsqu'ila été repris par le directeur de l'établissement, ainsi qu'il ressort des attestations de Mme [Y] et de M. [B], directeurs adjoints.

Ce fait n'est donc pas non plus constitutif d' un harcèlement moral.

Sur la demande faite aux salariés de ne plus lui adresser la parole, M. [F] ne produit qu'une seule attestation, celle de M. [D], embauché en juin (2019 ') qui confirme qu'il lui a été demandé de ne pas adresser la parole à M. [F]. Cette attestation a été rédigée de manière dactylographiée et non manuscrite, sans retranscription des peines prévues en cas de fausse attestation. Il convient à la demande de l'employeur qui soulève l'irrégularité de l'attestation, de l'écarter des débats.

Quant aux rumeurs qu'invoque M. [F] à l'encontre de M. [P], elles ne résultent que de ses propres écrits et ne peuvent donc être considérées comme établies. Si M. [F] n'a pas admis le remplacement de M. [J] par M. [P], qui est devenu responsable logistique, cette situation ne constitue pas davantage un fait de harcèlement moral.

Enfin, les pièces médicales ne font pas état d'un contexte laissant présumer un harcèlement moral, étant précisé que l'attestation de M. [I] [N], médecin, n'est pas une pièce médicale et doit au surplus être écartée en ce qu'elle ne respecte pas les conditions de régularité de forme prévues à l'article 202 du code de procédure civile, et ce d'autant que ce médecin n'est resté que deux mois dans l'établissement.

Il en résulte que le salarié n'établit pas la matérialité de faits qui, pris dans leur ensemble,

permettent de présumer qu'il a subi un harcèlement moral de la part de son employeur.

En conséquence, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté la demande de M. [F] en nullité du licenciement.

2) sur la contestation du motif de licenciement

Il résulte de l'article L. 1235-1 du code du travail que le juge à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

La cause réelle est celle qui présente un caractère d'objectivité. Elle doit être existante et exacte ce qui oblige le juge à vérifier que d'autres faits allégués par le salarié ne sont pas la véritable cause du licenciement. La cause sérieuse est celle d'une gravité suffisante pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles.

La faute grave, enfin, est une cause réelle et sérieuse mais d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Seuls les manquements volontaires à une obligation professionnelle ou les erreurs professionnelles consécutives à la mauvaise volonté délibérée du salarié peuvent être

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considérés comme fautifs.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, M. [F] a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception en date du 5 novembre 2019, contenant les griefs suivants :

- d'avoir adopté, malgré les alertes et encore par écrit le 15 mars 2019, un comportement vis-à vis du directeur de l'établissement et de certains collègues constituant une violation de l'obligation de loyauté inhérente au contrat de travail,

- d'avoir depuis son retour d'arrêt de travail, dénigré M. [P] publiquement, allant jusqu'à l'accuser de le rendre responsable de la crevaison du pneu de son véhicule et de lui avoir envoyé des mails sur un ton extrêmement autoritaire alors même qu'il n'a aucun lien hiérarchique avec ce salarié,

- d'avoir fait preuve d'autoritarisme envers plusieurs salariés qui sont venus se plaindre,

- d'avoir rencontré des difficultés avec Mme [Y], directrice adjointe, à qui il aurait reproché de l'avoir accusé d'avoir cambriolé l'établissement, d'avoir demandé un rendez-vous en urgence à M. [S] et Mme [Y] qui ont expliqué qu'il n'avait à aucun moment été mis en cause,

- de n'avoir pas suivi les recommandations de M. [S] de 'normaliser ses relations avec ses collègues' et d'avoir continué à dénigrer publiquement M. [P],

- d'avoir, après qu'il lui a été répondu que le point de situation fait avec le directeur le 28 août 2019 à son retour d'arrêt de travail puis de congés, ne donnait pas lieu à un compte-rendu, adressé un mail à M. [S] le 11 septembre 2019, le malmenant, l'apostrophant de façon injuste et agressive,

- d'avoir adressé un nouveau mail au directeur le 1er octobre 2019, intitulé 'codes sociaux' dans lequel M. [F] lui reprocherait de ne plus le saluer alors que c'est lui-même qui aurait pris l'initiative de ne plus lui serrer la main,

étant précisé que ces mails faisaient l'objet d'une diffusion large,

- lors de la notification de la mise à pied à titre conservatoire, d'avoir tenté d'emporter des dossiers professionnels en prétextant qu'il contenait des éléments personnels, alors qu'après vérifications, il s'agissait de documents nécessaires au bon fonctionnement de l'établissement ( procédure de modification des codes des alarmes),

- d'avoir produit, lors de l'entretien relatif à ces faits, un document dont il n'aurait pas dû être détenteur.

Pour justifier de la matérialité du grief relatif à l'envoi de mails autoritaires à M. [P], son supérieur hiérarchique, l'employeur produit un mail du 15 février 2019 de M. [F] à M. [P] contenant les phrases suivantes : 'Depuis le 18 décembre 2018, je t'ai envoyé un certain nombre de mails, 35 pour être précis. (...) En ta qualité de responsable logistique tu dois a minima répondre à mes mails et surtout me donner des éléments de réponse. En effet, pour des raisons de suivi, de traçabilité et de contrôle, j'ai besoin de savoir quelles sont les mesures prises, les travaux en cours ou qui seront réalisés, par qui et dans quels délais. (...)J'espère que tu es conscient de tes obligations en tant que responsable logistique et que à l'avenir, tes réponses seront claires, précises, concises et exhaustives et cela dans des délais raisonnables'.

Il ressort de ce mail que M. [F] s'adresse à son supérieur hiérarchique sur un ton autoritaire comportant des injonctions qui n'ont pas lieu d'être compte tenu de son lien de subordination. Le grief est ainsi établi.

Concernant l'autoritarisme de M. [F] à l'égard d'autres salariés, il ressort de l'attestation de M. [R] du 11 février 2019 qu' 'à l'époque du changement de responsable logistique, M. [P] étant le nouveau responsable, M. [F] a continué à me donner des tâches et des ordres de travail de manière harcelante, ce qui m'a mis dans une situation de stress' .

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Sa contre attestation en date du 26 février 2021 sera écartée dès lors que M. [R] a été licencié pour faute grave le 2 mars 2020 pour avoir conduit pendant plus de trois ans un véhicule de transport d'enfants sans permis de conduire.

Selon l'attestation de Mme [Y], directrice adjointe, le 26 février 2019, M. [F] a été reçu par le directeur et elle-même en entretien, faisant suite aux difficultés d'un agent du service entretien leur ayant indiqué 'être empêché dans ses actions par les interventions incessantes de M. [F] alors qu'il n'a plus autorité sur lui'. Le directeur a alors demandé à M. [F] de se recentrer sur ses missions. 'M [F] a dit alors comprendre mais profita de l'entretien pour dénigrer M. [P] auprès de la direction' .

L'attestation de M. [O] [B], directeur adjoint et également présent lors de l'entretien du 26 février 2019 atteste de même qu' 'il a été reprécisé à M. [F] qu'il ne disposait pas d'un statut hiérarchique concernant les professionnels de la logistique'.

Le grief est ainsi établi.

S'agissant du dénigrement de M. [P], outre l'attestation de Mme [Y] en témoignant, ce dernier atteste que M. [F] faisait courir des rumeurs à son égard depuis deux ans, auprès de ses collègues et de la direction, en ces termes : 'Ma femme est décédée d'un accident domestique en 2015 et M. [F] fait courir la rumeur que je l'ai asassinée', ' J'ai travaillé 10 ans en pays catalan et soit-disant j'ai fui la région car la mafia catalane était à ma recherche', 'M. [F] a soutenu que j'abusais de mes relations professionnelles afin de bénéficier de largesses de celles-ci en échange d'attributions de marché de travaux' (...) 'Ces agissements répétés constituent une atteinte à mes droits et à ma dignité et ont des conséquences préjudiciables sur ma santé et mon travail'.

L'employeur rapporte donc la preuve de la matérialité du grief.

Concernant les mails adressés les 11 septembre et 1er octobre 2019 par M. [F] à M. [S], directeur de l'établissement, ils contiennent les propos suivants: ' A haute et intelligible voix, je vous ai dit bonjour. Vous m'avez regardé mais vous ne m'avez pas répondu ou salué en retour. (...) En qualité de directeur de l'Institution, vous exigez expressément que les salarié de l'ITEP du Cher respectent et appliquent les codes sociaux, ce que vous ne faites pas vous-même' (...) ; Je vous serai(sic) gré de bien vouloir me préciser en retour qu'elle attitude je dois adopter lors de nos prochaines rencontres en ce qui concerne l'application des codes sociaux entre vous et moi'. Par un mail du 2 octobre 2019, M. [F] a renchéri sur près de deux pages en revenant sur le serrage de mains de manière insolente.

En lui adressant de tels propos, M. [F] a fait preuve à l'égard du directeur de l'établissement dans lequel il travaillait d'un irrespect fautif.

De plus, M. [F] a diffusé ses mails à plusieurs personnes, ce qui a généré une atmosphère délétère au sein de l'établissement.

L'attestation de M. [S] confirme la réalité des faits, de même que l'attestation de Mme [E] rédigée en ces termes : 'Depuis son retour d'arrêt maladie, M. [F] a opté pour une attitude très distante, réimpliquant le vouvoiement et une traçabilité constante par mails des échanges et/ou demandes professionnelles. Son attitude à mon égard est devenue très rigide au point où il me salue simplement par un petit hochement de tête. (...) Sa mise à distance et sa manière plus que procédurale de relationner dans le cadre professionnel engendrent un climat déstabilisant et très désagréable'.

Enfin, concernant le grief relatif aux faits survenus lors de la mise à pied conservatoire, Mme [Y] atteste que M. [F] a voulu reprendre des affaires personnelles, que M. [S] et elle-même l'ont accompagné à son bureau, que M. [F] a 'pris sous une pile de documents, une chemise bleue en indiquant qu'elle lui appartenait. Il lui a été demandé de la voir. Il a dans un

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premier temps refusé. M. [S] a réitéré sa demande et M. [F] a ouvert cette chemise. Elle contenait des plans des sites et l'ensemble des codes d'accès informatique et alarmes. Puis M. [F] a voulu prendre un classeur qui contenait l'ensemble des procédures et codes d'accès des sites'.

Le grief est établi et corrobore la déloyauté dont a fait preuve M. [F] envers l'employeur.

Le salarié ne produit pas d'éléments permettant de contredire la réalité des faits invoqués dans la lettre de licenciement, les attestations qui le décrivent comme un collègue agréable et professionnel étant sans effet sur la preuve amplement rapportée de manquements invoqués dans la lettre de licenciement.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que l'employeur apporte la preuve de l'existence de faits d'une importance telle qu'ils étaient de nature à empêcher le maintien de M. [F] dans l'entreprise - la lettre de convocation à l'entretien préalable ayant été envoyée le 4 octobre 2019, soit juste après l'échange de mails des 1er et 2 octobre 2019- et à caractériser la faute grave fondant le licenciement.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il a dit, au demeurant sans motivation, que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et en ce qu'il a alloué à M. [F] les sommes de 5 716,32 € au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés et de 571,63 € au titre des congés payés y afférents, la somme de 10 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et la somme de 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

3) Sur les autres demandes, les dépens et les frais irrépétibles

Il résulte de ce qui précède que la demande de remise sous astreinte d'un bulletin de salaire et d'une attestation Pôle Emploi n'est pas fondée et doit être rejetée.

M. [F], qui succombe en l'intégralité de ses demandes, est condamné aux dépens de première instance et d'appel et débouté de sa demande d'indemnité de procédure.

L'équité commande de débouter l'UGECAM de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME la décision déférée en ce qu'elle a dit que le licenciement n'est pas nul et a débouté M. [F] de sa demande de dommages et intérêts pour nullité du licenciement ;

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT que le licenciement pour faute grave est fondé ;

DÉBOUTE M. [F] de ses demandes ;

DÉBOUTE L'UGECAM de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE M. [F] aux dépens de première instance et d'appel et le déboute de sa propre

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demande d'indemnité de procédure.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. DELPLACE C. VIOCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 21/01356
Date de la décision : 18/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-18;21.01356 ?
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