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03/11/2022 | FRANCE | N°21/01108

France | France, Cour d'appel de Bourges, 1ère chambre, 03 novembre 2022, 21/01108


CR/RP



















































































COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :



- la SELARL LIANCIER - MORIN-MENEGHEL

- la SCP GALLON-MAURY





LE : 03 NOVEMBRE 2022

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU

03 NOVEMBRE 2022



N° - Pages









N° RG 21/01108 - N° Portalis DBVD-V-B7F-DMTN



Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de NEVERS en date du 01 Septembre 2021



PARTIES EN CAUSE :



I - M. [R] [F]

né le 15 Mars 1975 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représenté par la SELARL LIANCIER - MORIN-MENEGHEL, avocat au barreau de NEVER...

CR/RP

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- la SELARL LIANCIER - MORIN-MENEGHEL

- la SCP GALLON-MAURY

LE : 03 NOVEMBRE 2022

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 03 NOVEMBRE 2022

N° - Pages

N° RG 21/01108 - N° Portalis DBVD-V-B7F-DMTN

Décision déférée à la Cour :

Jugement du tribunal judiciaire de NEVERS en date du 01 Septembre 2021

PARTIES EN CAUSE :

I - M. [R] [F]

né le 15 Mars 1975 à [Localité 7]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par la SELARL LIANCIER - MORIN-MENEGHEL, avocat au barreau de NEVERS

timbre fiscal acquitté

APPELANT suivant déclaration du 07/10/2021

II - S.C.I. EMAS, agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié en cette qualité au siège social :

[Adresse 2]

[Localité 3]

N° SIRET : 890 674 325

Représentée par la SCP GALLON-MAURY, avocat au barreau de NEVERS

timbre fiscal acquitté

INTIMÉE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 20 Septembre 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. PERINETTI, Conseiller chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. WAGUETTEPrésident de Chambre

M. PERINETTIConseiller

Mme CIABRINIConseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme SERGEANT

***************

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

**************

EXPOSÉ :

Selon acte sous seing privé en date du 7 octobre 2020, [Y] [Z] et [V] [I] épouse [Z] ont acheté à [R] [F] un bâtiment à usage d'entrepôt situé [Adresse 5] moyennant un prix de 200 000 €, avec faculté de substitution des acquéreurs.

Malgré plusieurs convocations, l'acte authentique n'a jamais été signé.

La SCI EMAS, substituant les acquéreurs, a fait assigner [R] [F] devant le tribunal judiciaire de Nevers afin d'obtenir sa condamnation à réitérer la vente à son profit et à signer l'acte de vente devant notaire.

[R] [F], qui a fait assigner [Y] [Z] et [V] [I] épouse [Z] en intervention forcée, s'est opposé à de telles demandes, sollicitant à titre principal la caducité du compromis de vente et la condamnation de la SCI demanderesse à lui verser la somme de 20 000 € correspondant au montant de la clause pénale prévue au contrat.

Par jugement rendu le 1er septembre 2021, le tribunal judiciaire de Nevers a :

- Débouté [R] [F] de l'ensemble de ses demandes

- Constaté la réalisation de la vente de [R] [F] à la SCI EMAS dans les conditions fixées par le compromis de vente signé entre [R] [F] et [Y] [Z] et [V] [I] épouse [Z] le 7 octobre 2020 portant sur un bâtiment situé [Adresse 5]

- Dit que la décision tient lieu d'acte de vente

- Dit que la publicité foncière sera assurée par Me [P], notaire à [Localité 6]

- Dit n'y avoir lieu au prononcé d'une astreinte

- Condamné [R] [F] à verser à la SCI EMAS la somme de 3500 € à titre de dommages-intérêts

- Condamné [R] [F] à verser à la SCI EMAS la somme de 1500 € et à [Y] [Z] et [V] [I] épouse [Z] la somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens

- Rappelé que la décision est exécutoire de droit à titre provisoire.

[R] [F] a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée le 7 octobre 2021 et demande à la cour, dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 16 juin 2022, à la lecture desquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, de :

Vu les articles 1103, 1130, 1137, 1178, 1231-5, et 1240 du Code Civil ;

Vu les moyens qui précèdent et les pièces versées aux débats ;

REFORMER la décision attaquée dans l'intégralité de ses dispositions,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

PRONONCER la caducité du compromis de vente du 9 octobre 2020 aux torts exclusifs de la SCI EMAS ;

En conséquence,

CONDAMNER la SCI EMAS au paiement de la somme de 20 000 euros correspondant au montant de la clause pénale prévue au contrat ;

A titre subsidiaire,

PRONONCER la nullité du compromis de vente ;

CONDAMNER la SCI EMAS au paiement de la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts ;

En tout état de cause ;

CONDAMNER la SCI EMAS et Monsieur et Madame [Z] à payer à Monsieur [F] la somme de 4000 euros au titre des frais irrépétibles par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNER la SCI EMAS et Monsieur et Madame [Z] aux dépens de l'intégralité de l'instance.

Par ordonnance du 27 décembre 2021, le conseiller de la mise en état a constaté la caducité partielle de la déclaration d'appel faite le 7 octobre 2021 par [R] [F] à l'encontre de [V] [I] épouse [Z] et de [Y] [Z].

La SCI EMAS, intimée, demande quant à elle à la cour, dans ses dernières écritures notifiées par voie électronique le 19 août 2022, à la lecture desquelles il est pareillement expressément renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile précité, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et de condamner Monsieur [F] à lui verser une indemnité de 4000 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 23 août 2022.

SUR QUOI :

Selon l'article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L'article 1217 du même code dispose que " la partie envers laquelle l'engagement n'a pas été exécuté, ou l'a été imparfaitement, peut : refuser d'exécuter ou suspendre l'exécution de sa propre obligation ; poursuivre l'exécution forcée en nature de l'obligation ; obtenir une réduction du prix ; provoquer la résolution du contrat ; demander réparation des conséquences de l'inexécution. Les sanctions qui ne sont pas incompatibles peuvent être cumulées ; des dommages-intérêts peuvent toujours s'y ajouter ".

Par ailleurs, en application des articles 1583 et 1589 du même code, la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l'acheteur à l'égard du vendeur, dès qu'on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n'ait pas encore été livrée ni le prix payé ; la promesse de vente vaut vente, lorsqu'il y a consentement réciproque des deux parties sur la chose et sur le prix.

Il est constant, en l'espèce, que Monsieur [F], d'une part, et Monsieur et Madame [Z], d'autre part, ont signé un compromis de vente sous-seing privé daté du 7 octobre 2020 portant sur un bâtiment situé [Adresse 5] moyennant un prix de 200 000 € avec une régularisation par acte authentique au plus tard le 30 janvier 2021 et que, conformément à la faculté de substitution prévue en deuxième page de cet acte, la SCI EMAS s'est substituée à Monsieur et Madame [Z] par acte du 10 janvier 2021 (pièces numéros 1 et 3 du dossier de l'intimée).

Il résulte du dossier qu'en dépit de rendez-vous fixés à l'étude de Maître [P] les 26 janvier, 11 février et 8 mars 2021, l'acte authentique de vente n'a pu être signé, ce qui a conduit ce notaire à établir un procès-verbal de difficultés le 8 mars 2021 à 16 heures (pièce numéro 6).

[R] [F], appelant, soutient en premier lieu que le compromis de vente du 7 octobre 2020 serait frappé de caducité, dès lors que les acheteurs n'ont pas réglé la taxe foncière afférente à l'immeuble vendu pour l'année 2020, contrairement à ce qui avait été stipulé par les parties et alors même que ces dernières avaient fait de cette circonstance une condition essentielle à la signature de l'acte authentique.

Il doit être rappelé, à cet égard, que selon l'article 1186 alinéa premier du Code civil, dans sa rédaction issue des dispositions de l'ordonnance numéro 2016 - 131 du 10 février 2016 applicable aux faits de la cause, " un contrat valablement formé devient caduc si l'un de ses éléments essentiels disparaît (') ".

Il appartient dès lors à l'appelant de rapporter la preuve que le paiement de la taxe foncière pour l'année 2020 préalablement à la vente constituait, au sens de ce texte, un élément essentiel du contrat conclu par les parties.

À cet égard, la lecture du compromis de vente sous-seing privé du 7 octobre 2020 permet de constater que les parties avaient prévu, en page 10 de celui-ci, que : " l'acquéreur s'engage à prendre à sa charge la totalité des taxes foncières 2020 au vendeur pour les biens vendus, et remboursera le vendeur à première demande " [sic].

Il apparaît, toutefois, qu'une telle stipulation a été prévue dans le chapitre intitulé " charges et conditions " (pages 8 et suivantes du compromis), et non dans le chapitre intitulé " conditions suspensives " - ces dernières étant limitativement énumérées en pages 6 à 8 (purge des droits de préemption ou de préférence, casier judiciaire de l'acquéreur, condition suspensive d'obtention du prêt, origine de propriété, servitudes et situation hypothécaire).

Il ne saurait dès lors être retenu que le paiement de la taxe foncière 2020 par les acquéreurs aurait constitué une condition de réalisation de la vente, ni même qu'il aurait été prévu que ce paiement intervînt antérieurement à la réalisation de la vente par acte authentique, étant à cet égard observé que dans son courrier électronique du 18 mai 2021 (pièce numéro 9 du dossier de l'intimé), Maître [P] - notaire rédacteur du compromis de vente et chargé de la réalisation par acte authentique - indique expressément : " concernant les taxes foncières, il était convenu entre les parties qu'elles seraient réglées le jour de la vente directement entre eux, Monsieur et Madame [Z] avaient apporté leur chéquier pour les régler ".

C'est en conséquence à bon droit que le premier juge a rejeté la demande de [R] [F] - qui ne s'est pas présenté aux rendez-vous fixés par le notaire pour la signature de l'acte authentique les 26 janvier et 11 février 2021 et qui a refusé de signer l'acte en l'étude notariale le 8 mars 2021 (pièce numéro 4) - tendant à la caducité du compromis de vente ainsi que la demande subséquente de condamnation de la SCI EMAS au paiement de la somme de 20 000 € correspondant au montant de la clause pénale prévue au contrat.

En second lieu, l'appelant soutient à titre subsidiaire que le compromis de vente sous-seing privé doit être annulé en application de l'article 1137 alinéa premier du Code civil selon lequel " le dol est le fait pour un contractant d'obtenir le consentement de l'autre par des man'uvres ou des mensonges ".

Il fait valoir, à cet égard, qu'il n'a signé le compromis de vente litigieux que parce qu'il était prévu le paiement des loyers pour les mois d'occupation depuis l'entrée en jouissance dans le bâtiment de la société A2G ISOLATION, dont Monsieur [Z] est le gérant, reprochant au premier juge de ne pas avoir pris connaissance d'un courrier électronique du 8 octobre 2020.

Il doit toutefois être remarqué, en premier lieu, que le paiement des loyers afférents à l'immeuble dont s'agit pour la période antérieure à la vente concerne, non pas la SCI EMAS, mais la société A2G ISOLATION, laquelle a occupé les locaux avec l'accord du vendeur depuis le mois de décembre 2019.

Au demeurant, le courrier électronique du 8 octobre 2020 invoqué par l'appelant (pièce numéro 5 de son dossier) est établi à l'en-tête de la société A2G ISOLATION - qui n'est pas partie au compromis de vente - et il ne saurait, en tout état de cause, aucunement résulter des termes de ce dernier l'existence, au sens de l'article 1137 précité, de man'uvres ou des mensonges ayant déterminé le consentement à l'acte de [R] [F], dès lors qu'il est simplement indiqué : " il va falloir à un moment qu'on fasse le point sur la situation et surtout que vous renvoyiez le compromis de vente signé ! Nous avons rdv avec le banquier demain. Si nous n'avançons pas sur le sujet nous vous paierons un loyer depuis que nous sommes chez vous, mais face à de telles négligences de votre part, à 50 ans passés (pour notre part) nous n'allons pas pouvoir suivre (') ".

En l'absence, ainsi, de tout vice du consentement, c'est également à juste titre que le premier juge a écarté la demande formée par [R] [F] et tendant à la nullité du compromis de vente litigieux.

La décision de première instance devra donc être également confirmée sur ce point, ainsi qu'elle a subséquemment constaté la réalisation de la vente dans les conditions fixées par le compromis de vente litigieux et dit que le jugement tiendrait lieu d'acte de vente.

Selon l'article 1231 - 1 du Code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

Au cas d'espèce, il résulte de l'attestation précitée rédigée par le notaire en charge de la réalisation de l'acte authentique de vente, que [R] [F] ne s'est pas présenté aux deux premiers rendez-vous de signature qui avaient été initialement fixés en l'étude notariale les 26 janvier et 11 février 2021, et qu'il a refusé de signer l'acte de vente lors du dernier rendez-vous du 8 mars 2021 à 16 heures, alors même qu'il ne disposait d'aucun motif légitime lui permettant de refuser une telle signature.

Selon cette même attestation, les fonds ont ainsi dû être retournés au Crédit Agricole les 16 février et 9 mars 2021.

C'est en conséquence à juste titre, prenant également en compte le temps passé pour le déplacement aux différentes convocations, que le premier juge a alloué à la SCI EMAS une indemnité de 3500 € à titre de dommages-intérêts sur le fondement du texte précité.

Il résulte de ce qui précède que la décision de première instance devra être confirmée en toutes ses dispositions.

Il conviendra par ailleurs de mettre à la charge de [R] [F], qui sera tenu aux entiers dépens d'appel, une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile que l'équité commande de fixer à 1500 € au titre des frais irrépétibles qui ont dû être exposés par la SCI EMAS devant la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour,

- Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement entrepris

Y ajoutant,

- Condamne [R] [F] à verser à la SCI EMAS une indemnité de 1500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.

L'arrêt a été signé par M.WAGUETTE, Président et par Mme SERGEANT, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,

V.SERGEANTL. WAGUETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/01108
Date de la décision : 03/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-03;21.01108 ?
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