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14/10/2022 | FRANCE | N°22/00389

France | France, Cour d'appel de Bourges, Chambre sociale, 14 octobre 2022, 22/00389


SD/SLC





N° RG 22/00389

N° Portalis DBVD-V-B7G-DOFW





Décision attaquée :

du 25 mars 2022

Origine : conseil de prud'hommes - formation paritaire de CHÂTEAUROUX







--------------------



S.A.R.L. MSB ([Adresse 4])





C/



Mme [N] [M] [C] épouse [W]







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Expéd. - Grosse



Me MIGNARD 14.10.22



Me GUIET 14.10.22



















COUR D'APPEL DE BOURGES



CHAMBRE SOCIALE



ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2022



N° 153 - 8 Pages





APPELANTE :



S.A.R.L. MSB ([Adresse 4])

[Adresse 2]



Ayant pour avocat postulant Me Laura MIGNARD, du barreau de CHÂTEAUROUX

Représentée par Me Eric COURMONT de la SELA...

SD/SLC

N° RG 22/00389

N° Portalis DBVD-V-B7G-DOFW

Décision attaquée :

du 25 mars 2022

Origine : conseil de prud'hommes - formation paritaire de CHÂTEAUROUX

--------------------

S.A.R.L. MSB ([Adresse 4])

C/

Mme [N] [M] [C] épouse [W]

--------------------

Expéd. - Grosse

Me MIGNARD 14.10.22

Me GUIET 14.10.22

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 14 OCTOBRE 2022

N° 153 - 8 Pages

APPELANTE :

S.A.R.L. MSB ([Adresse 4])

[Adresse 2]

Ayant pour avocat postulant Me Laura MIGNARD, du barreau de CHÂTEAUROUX

Représentée par Me Eric COURMONT de la SELARL COURMONT, avocat plaidant, du barreau du VAL-DE-MARNE

INTIMÉE :

Madame [N] [M] [C] épouse [W]

[Adresse 1]

Représentée par Me Daniel GUIET de la SCP AVOCATS CENTRE, avocat au barreau de CHÂTEAUROUX

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

PRÉSIDENT : Mme VIOCHE, présidente de chambre

ASSESSEURS : Mme DE LA CHAISE, présidente de chambre

Mme CLÉMENT, présidente de chambre

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme DELPLACE

DÉBATS : A l'audience publique du 2 septembre 2022, la présidente ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 14 octobre 2022 par mise à disposition au greffe.

ARRÊT : Contradictoire - Prononcé publiquement le 14 octobre 2022 par mise à disposition au greffe.

Arrêt n° 153 - page 2

14 octobre 2022

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL MSB exploite l'Hôtel '[Adresse 5] et emploie moins de 11 salariés.

Mme [N] [M] [C] épouse [W], née le 21 octobre 1973, a été embauchée à compter du 2 novembre 2019 par la SARL MSB en qualité d'employée polyvalente, niveau 1, échelon 2, suivant contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 1er novembre 2019.

Cet emploi relève de la convention collective nationale des hôtels, cafés, restaurants (HCR) du 30 avril 1997.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 10 février 2021, Mme [W] a été convoquée à un entretien préalable fixé au 3 mars 2021, avec mise à pied à titre conservatoire.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 11 mars 2021, elle a été licenciée pour faute grave.

Contestant son licenciement, Mme [C] épouse [W] a saisi le 23 juillet 2021 le conseil de prud'hommes de Châteauroux, lequel, par jugement du 25 mars 2022, a :

- dit que le licenciement de Mme [M] [C] épouse [W] est dénué de cause réelle et sérieuse et condamné la société MSB à lui verser les sommes suivantes :

$gt; 24 278,79 euros bruts au titre d'arriérés de salaire,

$gt; 2 427,87 euros bruts au titre des congés payés afférents,

$gt; 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

$gt; 879,45 euros au titre de la mise à pied,

$gt; 935,34 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

$gt; 283,42 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

$gt; 1 700 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- dit que les sommes dues au titre des salaires porteront intérêts de droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes,

- condamné la société MSB à remettre à Mme [M] [C] épouse [W] l'attestation Pôle Emploi, le solde de tout compte ainsi que le certificat de travail conformes au jugement, sous astreinte de 50 euros par document et par jour de retard à compter du 15e jour après notification du jugement,

- dit qu'il se réserve le droit de liquider ladite astreinte,

- dit que les frais d'exécution du jugement seront à la charge de la société MSB,

- condamné la société MSB aux entiers dépens.

Vu l'appel régulièrement interjeté le 8 avril 2022 par la société MSB à l'encontre de la décision prud'homale, qui lui a été notifiée le 29 mars 2022, en l'intégralité de ses dispositions ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 6 août 2022 aux termes desquelles la société MSB demande à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé son appel,

- infirmer dans sa totalité le jugement entrepris,

- condamner Mme [M] [C] épouse [W] à payer la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Mme [M] [C] épouse [W] aux entiers dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 août 2022 aux termes desquelles Mme [M] [C] épouse [W] demande à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et débouter la société MSB de son appel,

- condamner la société MSB à lui payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article

700 du code de procédure civile,

- débouter la société MSB de toutes demandes plus amples ou contraires et la condamner aux

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entiers dépens ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 17 août 2022 ;

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et de l'argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux conclusions déposées.

SUR CE

1) Sur la demande en paiement d'un rappel de salaire

Aux termes de l'article L. 3121-9 du code du travail, une période d'astreinte s'entend comme une période pendant laquelle le salarié, sans être sur son lieu de travail et sans être à la disposition permanente et immédiate de l'employeur, doit être en mesure d'intervenir pour accomplir un travail au service de l'entreprise.

La durée de cette intervention est considérée comme un temps de travail effectif.

La période d'astreinte fait l'objet d'une contrepartie, soit sous forme financière, soit sous forme de repos.

Les salariés concernés par des périodes d'astreinte sont informés de leur programmation individuelle dans un délai raisonnable.

L'article VII du contrat de travail stipule à cet égard :

'En l'absence de dispositions conventionnelles applicables, Mme [W] [N] sera amenée à effectuer des astreintes conformément aux dispositions légales applicables et suivant les conditions fixées par les paragraphes ci-dessous.

En application de l'article L. 3121'12 du code du travail, ces conditions ont été fixées après information de l'inspection du travail.

Pendant la période d'astreinte, Mme [W] [N] s'engage à demeurer au domicile mis à sa disposition dans l'établissement afin d'être en mesure de répondre aux appels téléphoniques et/ou aux mails de l'employeur et de la clientèle :

- d'intervenir pour gérer les réservations des clients qui constitue un travail effectif au service de la société MSB, décompté et payé comme tel.

Les périodes d'astreinte sont fixées et organisées suivant le planning suivant :

- le samedi de 11h30 à 17h30 et de 22h30 à 07h30,

- le dimanche de 11h30 à 17h30 et de 22h30 à 06h30.

Toute modification de ce planning sera notifiée par écrit à Mme [W] [N] au moins 15 jours avant chaque période d'astreinte sauf circonstances exceptionnelle mais sous réserve, alors, du respect d'un délai minimum obligatoire de notification d'un jour franc à l'avance.

À la fin de chaque mois, la société MSB remettra à Mme [W] [N] un document récapitulatif du temps mensuel passé par lui en astreinte au cours du mois concerné et de la contrepartie dont il aura bénéficié'.

En l'espèce, Mme [M] [C] épouse [W] soutient que les astreintes prévues contractuellement constituent du temps de travail effectif dès lors qu'elle devait rester dans l'établissement pour pouvoir gérer les réservations des clients. Elle ajoute que même à considérer les périodes litigieuses comme des astreintes, elles n'ont pas fait l'objet d'une contrepartie obligatoire, en l'absence de laquelle les tribunaux doivent apprécier souverainement

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le montant de la rémunération de l'astreinte. Elle précise avoir dû être présente pendant 30 heures par semaine durant ces périodes.

La société MSB réplique que les périodes d'astreinte contractuellement prévues ne constituent pas du temps de travail effectif. Elle fait valoir que la contrepartie à la période d'astreinte était la mise à disposition gratuite d'une chambre dans l'établissement.

La cour observe que Madame [M] [C] épouse [W] a effectué des astreintes dans une chambre mise à sa disposition pour répondre à toute demande d'intervention relative à la réponse aux appels téléphoniques ou email et à la gestion des réservations des clients.

Il n'est néanmoins établi aucune intervention de la salariée pendant ses astreintes. En effet, Madame [M] [C] épouse [W] ne produit aucun document et fonde sa demande de qualification de sa présence en temps de travail effectif et rappel de salaires exclusivement sur la nécessité de sa présence au sein de l'établissement hôtelier, soit sur son lieu de travail.

Pour autant, même si le local mis à sa disposition était une chambre de l'hôtel, ce local lui était affecté à titre exclusif lorsqu'elle était d'astreinte et l'impossibilité de vaquer librement à des occupations personnelles durant les temps litigieux n'est pas caractérisée. Ainsi, l'obligation imposée à la salariée d'assurer une simple présence en se tenant dans une chambre de l'établissement doit recevoir la qualification d'astreinte. Il ne s'agit pas de temps de travail effectif ; le jugement doit donc être infirmé de ce chef.

La salariée intimée est donc déboutée de sa demande en paiement de la somme de 26 706,67 euros qu'elle réclame correspondant au paiement de 30 heures hebdomadaires effectuées entre le 02 novembre 2019 et le 08 mars 2021, outre les majorations au titre des congés payés.

Madame [M] [C] épouse [W] ne formulant aucune demande s'agissant d'une indemnisation du temps d'astreinte au-delà de la mise à disposition gratuite d'une chambre par son employeur, la cour n'a pas à apprécier si cette contrepartie est ou non suffisante.

2) Sur la demande en paiement de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail

Aux termes de l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

En l'espèce, Mme [M] [C] épouse [W] prétend que l'exécution déloyale du contrat de travail et l'arriéré très important de salaires qui lui restait dû lui ont nécessairement causé un préjudice.

Elle a néanmoins été déboutée de sa demande en paiement d'arriéré de salaires et ne présente aucun élément d'explication ni aucun justificatif au soutien de ses prétentions.

La preuve d'une faute de l'employeur, qui affirme que les périodes d'astreinte ont fait l'objet d'une contrepartie par la mise à disposition à titre gratuit d'un logement au profit de la salariée, ne se trouve ainsi pas rapportée.

La décision sera dès lors également infirmée et Mme [M] [C] épouse [W] déboutée de sa demande en paiement de la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts.

3) Sur la contestation du licenciement

Il résulte de l'article L. 1235-1 du code du travail que le juge à qui il appartient d'apprécier le caractère réel et sérieux des motifs de licenciement invoqués par l'employeur, forme sa

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conviction au vu des éléments fournis par les parties ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

L'employeur qui prend l'initiative de rompre le contrat de travail doit énoncer son ou ses motifs dans la lettre de licenciement, laquelle fixe les limites du litige. Les griefs avancés doivent être fondés sur des faits exacts, précis, objectifs et matériellement vérifiables. À défaut, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

La faute grave, enfin, est une cause réelle et sérieuse mais d'une gravité telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

Seuls les manquements volontaires à une obligation professionnelle ou les erreurs professionnelles consécutives à la mauvaise volonté délibérée du salarié peuvent être considérés comme fautifs.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

En l'espèce, la société MSB expose que le licenciement pour faute grave de Mme [M] [C] épouse [W] est motivé par de nombreuses plaintes du personnel et des clients sur la facturation et la gestion de la caisse. Elle lui reproche particulièrement de ne pas avoir toujours remis de factures aux clients, d'avoir exigé que ces derniers paient en espèces, sans toujours leur rendre la monnaie, d'avoir modifié les tarifs de la nuitée sans autorisation de son supérieur hiérarchique, d'avoir mal enregistré des réservations et d'avoir mal tenu la caisse. La société fait également grief à la salariée de ne pas avoir repris son poste après ses congés payés du mois de janvier 2021, soutenant que son arrêt de travail pour maladie délivré au Gabon était de complaisance.

Mme [M] [C] épouse [W], pour voir juger que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, soutient qu'alors que l'employeur a été informé des faits de vol du 19 décembre 2020 le 21 décembre 2020 et du non-respect des dates de congés payés le 28 janvier 2021, il n'a engagé la procédure de licenciement et prononcé la mise à pied conservatoire que le 10 février 2021. En raison du délai mis par l'employeur pour engager la procédure de licenciement, elle conclut à l'absence de faute grave. La salariée conteste par ailleurs les faits de vol, en expliquant que la cliente lui a remis une somme de 50 euros pour encaissement de la somme de 41,65 euros et que la différence correspondait à un pourboire, qu'elle a remboursé à l'hôtel une fois qu'on lui avait expliqué que tel n'était pas le cas. Sur le retour tardif de congés, elle explique enfin être tombée malade sur son lieu de vacances, ce qui a retardé de trois jours son retour en France.

La lettre de licenciement du 11 mars 2021, qui fixe ici les limites du litige, indique notamment :

'Nous procédons donc à votre licenciement pour fautes graves pour le motif suivant :

- Vol au préjudice de l'employeur

- Non-respect des dates de congés payés

Le samedi 19 décembre 2020 vous avez volé la somme de 8,35 € en espèces, effectivement le client de la chambre 17 au nom de Mme [X] vous a payé la somme de 50 € en espèces, vous avez enregistré en encaissement la somme de 41,65€. Mme [X] nous informe par téléphone le lundi 21 décembre 2020 des faits, vous ne lui avez pas rendu sa monnaie sous prétexte que vous n'en n'aviez plus. Nous vous avons donc contacté par téléphone le lundi 21 décembre 2020, selon votre version cette cliente vous avait laissé un pourboire, pour feindre la situation vous n'écrivez rien sur la main courante et emporté l'argent avec vous. Vous avez restitué la somme le 26 Décembre 2021. De plus la cliente a formalisé une plainte par écrit, nous ne pouvons tolérer ce genre de situation qui nuise à l'image de l'entreprise.

Nous vous avons accordé des congés payés du 04 au 23 Janvier 2021, congés que nous avons validé et acté. Le 28 janvier 2021 vous porté à notre connaissance vos réservations de billet d'avion, nous constatons alors que le 19 Décembre 2020 vous avez réservé un billet de retour pour le 26 Janvier 2021 sachant que vous deviez reprendre votre poste le 23 janvier 2021. Vous avez donc choisis délibérément de réserver votre retour à une date postérieure à votre reprise de poste.

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Nous procédons en conséquence a votre licenciement pour faute grave pour les motifs sus énoncés'.

Il ressort des pièces produites que l'employeur a eu connaissance des faits de vols reprochés le 21 décembre 2020 et du non respect des dates de congés payés le 28 janvier 2021.

Il invoque des congés et arrêt de travail de la salariée pour expliquer le délai important existant entre les faits et la convocation à l'entretien préalable.

En effet, la lettre de convocation à un entretien préalable, en date du 10 février 2021 a été adressée à Mme [M] [C] épouse [W] 50 jours après la connaissance des faits qualifiés de vol et 13 jours après la connaissance des faits qualifiés de non-respect des dates de congés payés, en vue d'un entretien fixé le 03 mars 2021.

Or, l'employeur qui entend rompre le contrat de travail en raison d'une faute grave doit respecter un délai restreint entre la connaissance des faits fautifs et la mise en oeuvre de la procédure de licenciement, et tel n'est pas le cas en l'espèce.

Il s'en déduit que nonobstant la mise à pied conservatoire également notifiée le 10 février 2021, l'employeur ne jugeait pas immédiatement impossible le maintien de la salariée dans l'entreprise.

En conséquence, c'est à bon droit que le jugement entrepris a écarté l'existence d'une faute grave.

Cependant, même si les griefs retenus à l'encontre de Mme [M] [C] épouse [W] ne peuvent constituer une faute grave, il est de l'office du juge de vérifier s'ils ne constituent pas une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Les faits par ailleurs évoqués par l'employeur s'agissant de nombreuses plaintes du personnel et des clients sur la facturation et la gestion de la caisse, la non remise de facture aux clients, l'exigence de paiement en espèces, sans toujours leur rendre la monnaie, la modification des tarifs de la nuitée sans autorisation de son supérieur hiérarchique, les erreurs d'enregistrement des réservations et de tenue de caisse, sont sans incidence sur les causes du licenciement, la lettre de licenciement du 11 mars 2021 fixant ici les limites du litige au seul vol au préjudice de l'employeur et non-respect des dates de congés payés reprochés.

L'employeur entend démontrer la réalité du vol attribué à Mme [M] [C] épouse [W] par la production du courrier adressé par la cliente Mme [X] le 26 décembre 2020 indiquant avoir remis la somme de 50 € en paiement d'une nuitée d'un coût de 41,65€, que l'employée n'a pu lui remettre la monnaie n'ayant pas l'appoint selon ses dires et indiquant qu'elle régulariserait le lendemain, ce qui n'a pas été fait. Elle souligne qu'elle n'a pas apprécié le fonctionnement de l'établissement. Mme [M] [C] épouse [W] explique avoir cru qu'il s'agissait d'un pourboire et qu'elle a rendu l'argent à première demande dès le 26 décembre 2020.

Les explications contradictoires données, la modicité de la somme et sa restitution immédiate, le caractère isolé du manquement en l'absence d'avertissement antérieur, ainsi que le défaut de réaction de l'employeur ne permettent pas de retenir d'une part, l'intention frauduleuse de la salariée et d'autre part, que ce fait est suffisamment sérieux pour fonder un licenciement.

S'agissant du second grief, Mme [M] [C] épouse [W] produit aux débats un certificat médical en date du 20 janvier 2021 lui prescrivant une nécessité de repos de 12 jours du 30 au 31 janvier 2021.

Qu'il ait été rédigé par un service des urgences de la polyclinique Le Rapha à Libreville au Gabon ne peut permettre de le qualifier a priori de 'complaisant' à défaut d'élément le démontrant. C'est donc inutilement que l'employeur invoque l'achat par sa salariée, avant son départ, de

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billets d'avion comportant un retour postérieur aux dates de congés octroyés puisqu'elle disposait d'un motif légitime pour revenir à son poste après cette date. La réalité de ce second grief n'est donc pas établie.

En conséquence, c'est à bon droit que le conseil des prud'hommes de [Localité 3] a dit que le licenciement de Mme [M] [C] épouse [W] est dénué de cause réelle et sérieuse.

La mise à pied n'étant en conséquence pas justifiée, elle est fondée à réclamer paiement de la retenue qui a été effectuée sur son salaire pendant cette mesure conservatoire, outre les congés payés afférents, soit la somme non contestée de 879,45 €.

Par ailleurs, la salariée a droit aux indemnités de rupture, soit l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents, et l'indemnité légale de licenciement réclamées, dont les montants ne font pas débat, soit 935,34 € et 283,42 €.

En outre, en vertu de l'article L. 1235-3 du code du travail, en l'absence de réintégration comme tel est le cas en l'espèce, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est, s'agissant d'une entreprise employant habituellement moins de 11 salariés et d'une salariée bénéficiant d'un an et quatre mois d'ancienneté, au minimum équivalent à 0, 5 mois de salaire brut.

A moment de la rupture, Mme [M] [C] épouse [W] était âgée de 47 ans. Elle produit une attestation de paiement de Pôle emploi pour le mois de juin 2022 faisant mention d'un montant de revenu d'activité prise en compte à hauteur de 908,90 € et d'un montant versé y compris rappel de 577,70 €. Ainsi, au regard des éléments dont dispose la cour, et notamment des conditions de la rupture, la SARL MSB est condamnée à lui payer la somme de 1 700 euros en réparation du préjudice moral et financier résultant du licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le code du travail précisant que le montant de l'indemnisation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est exprimé en mois de salaire brut, la condamnation est également en montant brut.

Le jugement du conseil des prud'hommes de [Localité 3] sera confirmé de ces chefs.

4) Sur les autres demandes, les dépens et les frais irrépétibles

Il sera ordonné à la société de remettre à Mme [M] [C] épouse [W] l'ensemble de ses documents de fin de contrat conforme au présent arrêt, dans un délai de 8 jours suivant la signification du dit arrêt, sans qu'il soit néanmoins nécessaire de prononcer une astreinte à cette fin.

Le jugement querellé est confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

La SARL MSB, qui succombe principalement, sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer en équité à Mme [M] [C] épouse [W] la somme complémentaire de 2 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL MSB sera en conséquence déboutée de sa propre demande d'indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant, par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME la décision déférée rendue par le conseil des prud'hommes de [Localité 3], sauf en

Arrêt n° 153 - page 8

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ce qu'elle a condamné la SARL MSB à verser à Mme [M] [C] épouse [W] les sommes de :

- 24 278,79 euros bruts à titre de paiement d'arriérés de salaire,

- 2 427,87 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

- 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- condamné la société MSB à remettre à Mme [M] [C] épouse [W] l'attestation Pôle Emploi, le solde de tout compte ainsi que le certificat de travail conformes au jugement, sous astreinte de 50 euros par document et par jour de retard à compter du 15e jour après notification du jugement,

- dit qu'il se réserve le droit de liquider ladite astreinte,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DÉBOUTE Mme [M] [C] épouse [W] de ses demandes en paiement d'arriérés de salaire, des congés payés afférents, et de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

ORDONNE à la SARL MSB de remettre à Mme [M] [C] épouse [W] l'ensemble de ses documents de fin de contrat conformes au présent arrêt, dans un délai de 8 jours suivant la signification du dit arrêt mais DIT n'y avoir lieu à astreinte,

CONDAMNE la SARL MSB à payer à Mme [M] [C] épouse [W] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

CONDAMNE la SARL MSB aux dépens d'appel et la déboute de sa demande d'indemnité de procédure.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VIOCHE, présidente de chambre, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

S. DELPLACE C. VIOCHE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 22/00389
Date de la décision : 14/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-14;22.00389 ?
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