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29/09/2022 | FRANCE | N°22/00002

France | France, Cour d'appel de Bourges, 1ère chambre, 29 septembre 2022, 22/00002


SM/MMC























































































COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

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COPIE CERTIFIÉE CONFORME AUX PARTIES



LE : 29 SEPTEMBRE 2022





COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

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ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2022



N° - Pages



N° RG 22/00002 - N° Portalis DBVD-V-B7G-DNK3



Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de CHATEAUROUX en date du 07 Décembre 2021



PARTIES EN CAUSE :



I - M. [D] [W]

né le 25 Juin 1976 à [Localité 52] ([Localité 52])

[Adresse 40]



comparant assisté de la SCP SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avoc...

SM/MMC

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à-

COPIE CERTIFIÉE CONFORME AUX PARTIES

LE : 29 SEPTEMBRE 2022

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

BAUX RURAUX

ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2022

N° - Pages

N° RG 22/00002 - N° Portalis DBVD-V-B7G-DNK3

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux de CHATEAUROUX en date du 07 Décembre 2021

PARTIES EN CAUSE :

I - M. [D] [W]

né le 25 Juin 1976 à [Localité 52] ([Localité 52])

[Adresse 40]

comparant assisté de la SCP SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS

- G.F.A. 2 M-C, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :

[Adresse 45]

représentée de la SCP SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS

- M. [L] [W]

né le 21 Février 1978 à [Localité 52] ([Localité 52])

[Adresse 49]

comparant assisté de la SCP SCP WEDRYCHOWSKI ET ASSOCIES, avocat au barreau d'ORLEANS

APPELANTS suivant déclaration du 06/01/2022

II - M. [G] [Y]

né le 22 Mai 1969 à [Localité 43] ([Localité 43])

[Adresse 1]

- Mme [Z] [V] épouse [X]

née le 08 Juillet 1972 à [Localité 42] ([Localité 42])

La [Adresse 47]

comparants assistés de la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES

III - S.C.E.A. DE LA [Adresse 47], agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social :

La [Adresse 47]

assistée de Me Jean-christophe TREBOUS de la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES

IV - Me [J] [A] (de la S.C.P. [S] & [A]), ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de redressement de la S.C.E.A. [Adresse 47] et de Mme [T]

[Adresse 14]

[Localité 24]

non comparant

régulièrement convoqué par lettre recommandée en date du 12/01/2022 avec avis de réception signé le 17/01/2022

INTIMÉ

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 10 Mai 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant M. PERINETTI, conseiller chargé du rapport

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. WAGUETTEPrésident de Chambre,

M. PERINETTIConseiller

Mme CIABRINIConseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS

***************

ARRÊT : RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

***************

EXPOSE

Suivant trois actes d'échange reçus le 9 décembre 2020 par Me [U], notaire à [Localité 41], la SAFER du Centre a cédé :

- à M. [D] [W] : des terres et parcelles situées sur les communes de [Localité 46], cadastrées section A n° [Cadastre 2], [Cadastre 3], [Cadastre 17], [Cadastre 4], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 11], [Cadastre 18], [Cadastre 19], [Cadastre 22], [Cadastre 23], [Cadastre 26], [Cadastre 28], [Cadastre 29], [Cadastre 30], [Cadastre 34], [Cadastre 35], [Cadastre 36] et [Cadastre 37], de [Localité 44] section ZP n° [Cadastre 20] et de [Localité 48] section ZI n° [Cadastre 17] ;

- à M. [L] [W] : des terres et parcelles situées sur la commune de [Localité 46] cadastrées section A n° [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 15], [Cadastre 16], [Cadastre 21], [Cadastre 25], [Cadastre 27], [Cadastre 5], [Cadastre 6], [Cadastre 31] et [Cadastre 38] ;

- au groupement foncier agricole (GFA) 2 M-C : des terres et parcelles situées sur la commune de [Localité 46], cadastrées section A n° [Cadastre 10], [Cadastre 32], [Cadastre 33] et [Cadastre 39].

L'ensemble de ces terres avait été à l'origine donné à bail rural, suivant acte authentique du 4 mai 2007, par le GFA Indre 3 à M. [G] [Y] et à Mme [Z] [V], alors épouse [Y]. Le contrat de bail mentionnait dès l'origine l'autorisation donnée par le bailleur à M. [Y] et Mme [V] de mettre les biens loués à la disposition de la SCEA de la [Adresse 47].

Suivant acte reçu le 9 décembre 2020 par Me [U], le GFA Indre 3 a cédé à la SAFER du Centre l'ensemble des terres susvisées et M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C (ci-après dénommés 'les consorts [W]') sont ainsi devenus les bailleurs de M. [G] [Y] et Mme [Z] [V].

Par jugement rendu le 12 décembre 2016, le Tribunal de grande instance de Châteauroux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SCEA de la [Adresse 47] et désigné Me [J] [A] en qualité de mandataire judiciaire. Un jugement du 24 avril 2017 a étendu cette procédure à Mme [Z] [V].

Le plan de redressement par voie de continuation d'activité de la SCEA de la [Adresse 47] et de Mme [Z] [V] a été arrêté par jugement du 12 avril 2018.

Suivant acte d'huissier en date du 12 avril 2021, les consorts [W] ont fait assigner M. [G] [Y], Mme [Z] [V], la SCEA de la [Adresse 47] et Me [A] devant le Tribunal paritaire des baux ruraux de Châteauroux aux fins de voir, en l'état de leurs dernières demandes :

A titre principal,

- prononcer la résiliation du bail consenti le 4 mai 2007 sur le fondement de l'alinéa 3 de l'article L411-35 du code rural et de la pêche maritime,

- juger que, de ce fait, la mise à disposition des biens loués au profit de la SCEA de la [Adresse 47], prévue à l'article 8 du dit bail, cessera immédiatement,

- ordonner en conséquence l'expulsion de tous occupants du chef de M. [G] [Y], de Mme [Z] [V] et de la SCEA de la [Adresse 47],

- juger qu'avec l'assistance de la force publique si besoin est et en présence de la SCP [R] et [E], huissier de justice à [Localité 52], ou de tout autre huissier mandaté, ils seront autorisés à faire expulser tous les occupants du chef de M. [G] [Y], de Mme [Z] [V] et de la SCEA de la [Adresse 47] immédiatement après avoir fait signifier l'ordonnance et fait délivrer commandement de quitter les lieux,

- juger qu'il appartiendra à M. [G] [Y], à Mme [Z] [V] et à la SCEA de la [Adresse 47] de procéder spontanément à l'enlèvement de tous leurs effets personnels et véhicules,

- juger que faute d'y procéder, ils seront autorisés à faire retirer par toute entreprise de leur choix les effets mobiliers pouvant être restés sur place avec l'assistance de la force publique si besoin est et en présence de la SCP [R] et [E], huissier de justice à [Localité 52], ou de tout autre huissier mandaté,

à titre subsidiaire,

- prononcer la résiliation du bail consenti le 4 mai 2007 sur le fondement des dispositions du III de l'article L411-37 du code rural et de la pêche maritime, avec toutes conséquences de droit telles que rappelées dans la demande principale,

A titre plus subsidiaire,

- juger que le contrat de prestations de services agricoles de la société Agrotech Services avec la SCEA de la [Adresse 47] est en réalité une sous-location déguisée de l'exploitation consentie par la SCEA de la [Adresse 47] à la société Agrotech Services,

- prononcer la résiliation du bail consenti le 4 mai 2007, avec toutes conséquences de droit telles que rappelées dans la demande principale,

en tout état de cause,

- condamner solidairement la SCEA de la [Adresse 47], Mme [Z] [V] et M. [G] [Y] à leur payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la mauvaise exploitation des terres louées,

- condamner solidairement les mêmes à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Me [A] a indiqué par courrier s'en rapporter à droit.

En réplique, M. [G] [Y], Mme [Z] [V] et la SCEA de la [Adresse 47] ont demandé au Tribunal de :

- rejeter l'ensemble des demandes formées par M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C,

- condamner solidairement M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à leur verser la somme de 5.000 euros pour procédure abusive,

- condamner solidairement M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens,

à titre subsidiaire, si la résiliation devait être prononcée,

- écarter l'exécution provisoire du jugement à intervenir.

Par jugement réputé contradictoire du 7 décembre 2021, le Tribunal paritaire des baux ruraux de Châteauroux a :

- rejeté les demandes formées par M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C tendant à la résiliation du bail conclu le 4 mai 2007,

- débouté M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C de leur demande tendant à la condamnation solidaire de le SCEA de la [Adresse 47], de Mme [Z] [V] et de M. [G] [Y] au versement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la mauvaise exploitation des terres louées,

- déboute la SCEA de la [Adresse 47], Mme [Z] [V] et M. [G] [Y] de leur demande reconventionnelle tendant à ce que M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C soient solidairement condamnés à leur verser la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive,

- condamné M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C aux dépens,

- condamné M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à payer à la SCEA de la [Adresse 47], à Mme [Z] [V] et à M. [G] [Y] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé à la charge de M. [D] [W], de M. [L] [W] et du GFA 2 M-C les frais exposés par eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à ce que l'exécution provisoire du jugement soit écartée,

- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires.

Le Tribunal a notamment retenu que M. [G] [Y] était resté co-titulaire du bail, que le défaut de demande de poursuite du bail en son seul nom par Mme [Z] [V] ne constituait pas à lui seul une cause de résiliation du bail, que les demandeurs ne démontraient pas la commission par les preneurs d'agissements de nature à compromettre la bonne exploitation du bail, que Mme [Z] [V] exerçait de façon effective une activité agricole sur les terres données à bail, sans que son activité au sein de la société Alterlite ne l'en empêche, que la société Agritech était rémunérée en contrepartie des tâches accomplies pour la SCEA de la [Adresse 47], et qu'il n'était pas établi que la société Agritech se soit complètement substituée à la société TPN Avenir gérée par Mme [Z] [V] au sein de l'exploitation agricole.

Les consorts [W] ont interjeté appel de cette décision par déclaration reçue le 7 janvier 2022 au greffe de la Cour.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par courrier au greffe le 4 mars 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'ils développent, M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C demandent à la Cour de

- recevoir M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C en leur appel du jugement du Tribunal paritaire des baux ruraux de Châteauroux en date du 7 décembre 2021,

- les dire bien fondés,

- infirmer en toutes ses dispositions ledit jugement,

Et statuant à nouveau,

à titre principal,

- prononcer la résiliation judiciaire du bail rural du 4 mai 2007 par acte authentique reçu par Me [M] notaire à [Localité 50] ([Localité 50]), le 4 mai 2007 et consenti à M. [G] [Y] et Mme [Z] [V] par le GFA Indre 3 aux droits de laquelle se trouvent actuellement M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C avec toutes ses conséquences de droit,

- juger que la mise à disposition des biens loués au profit de la SCEA de la [Adresse 47], prévue à l'article 8 dudit bail, cessera immédiatement,

- ordonner en conséquence l'expulsion de tous occupants du chef de M. [G] [Y], Mme [Z] [V] et la SCEA de la [Adresse 47],

- juger qu'avec l'assistance de la force publique si besoin est et en présence de la SCP [R] et [E], huissier de justice à [Localité 52], ou de tout autre huissier mandaté, ils seront autorisés à faire expulser tous les occupants du chef de M. [G] [Y], de Mme [Z] [V] et de la SCEA de la [Adresse 47] immédiatement après avoir fait signifier l'ordonnance et fait délivrer commandement de quitter les lieux,

- juger qu'il appartiendra à M. [G] [Y], à Mme [Z] [V] et à la SCEA de la [Adresse 47] de procéder spontanément à l'enlèvement de tous leurs effets personnels et véhicules,

- juger que faute d'y procéder, ils seront autorisés à faire retirer par toute entreprise de leur choix les effets mobiliers pouvant être restés sur place avec l'assistance de la force publique si besoin est et en présence de la SCP [R] et [E], huissier de justice à [Localité 52], ou de tout autre huissier mandaté,

à titre subsidiaire,

- prononcer la résiliation du bail rural du 4 mai 2007 par acte authentique reçu par Me [M] notaire à [Adresse 51]), le 4 mai 2007 et consenti à M. [G] [Y] et Mme [Z] [V] par le GFA Indre 3 aux droits de laquelle se trouvent actuellement M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C avec toutes ses conséquences de droit telles que rappelées dans la demande principale,

plus subsidiairement encore,

- juger que le contrat de prestations de services agricoles de la société Agrotech Services avec la SCEA de la [Adresse 47] est en réalité une sous-location déguisée de l'exploitation consentie par la SCEA de la [Adresse 47] à la société Agrotech Services,

- prononcer la résiliation du bail consenti le 4 mai 2007, avec toutes conséquences de droit telles que rappelées dans la demande principale,

encore plus subsidiairement,

- prononcer la résiliation judiciaire du bail rural du 4 mai 2007 avec toutes ses conséquences de droit telles que rappelées dans la demande principale,

en toute hypothèse,

- condamner solidairement la SCEA de la [Adresse 47], Mme [Z] [V] et M. [G] [Y] à leur payer conjointement la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la mauvaise exploitation des terres louées (défaut d'entretien, défaut de reconstitution des sols),

- condamner solidairement les mêmes à leur payer conjointement la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par courrier au greffe le 28 avril 2022, auxquelles il conviendra de se reporter pour un exposé détaillé et exhaustif des prétentions et moyens qu'ils développent, Mme [Z] [V], M. [G] [Y] et la SCEA de la [Adresse 47] demandent à la Cour de :

Confirmer le jugement rendu le 7 décembre 2021 en ce qu'il a :

- rejeté les demandes formées par M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C tendant à la résiliation du bail conclu le 4 mai 2007,

- débouté M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C de leur demande tendant à la condamnation solidaire de le SCEA de la [Adresse 47], de Mme [Z] [V] et de M. [G] [Y] au versement de la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison de la mauvaise exploitation des terres louées,

- condamné M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C aux dépens,

- condamné M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à payer à la SCEA de la [Adresse 47], à Mme [Z] [V] et à M. [G] [Y] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé à la charge de M. [D] [W], de M. [L] [W] et du GFA 2 M-C les frais exposés par eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes demandes plus amples ou contraires,

Statuant à nouveau,

Condamner solidairement M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à verser à Mme [Z] [V], M. [G] [Y] et la SCEA de la [Adresse 47] la somme de 10.000 euros pour procédure abusive,

Les condamner solidairement à verser à Mme [Z] [V], M. [G] [Y] et la SCEA de la [Adresse 47] la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens,

Rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions des demandeurs.

L'affaire a été fixée pour être plaidée à l'audience du 10 mai 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler que les demandes tendant simplement à voir « dire et juger », « rappeler » ou « constater » ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu'il soit tranché un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n'y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt. Il en va de même de la demande de « donner acte », qui est dépourvue de toute portée juridique et ne constitue pas une demande en justice.

Sur la demande principale en résiliation du bail rural présentée par les consorts [W] :

Aux termes de l'article L411-31 du code rural et de la pêche maritime,

I.-Sauf dispositions législatives particulières, nonobstant toute clause contraire et sous réserve des dispositions des articles L. 411-32 et L. 411-34, le bailleur ne peut demander la résiliation du bail que s'il justifie de l'un des motifs suivants :

1° Deux défauts de paiement de fermage ou de la part de produits revenant au bailleur ayant persisté à l'expiration d'un délai de trois mois après mise en demeure postérieure à l'échéance. Cette mise en demeure devra, à peine de nullité, rappeler les termes de la présente disposition ;

2° Des agissements du preneur de nature à compromettre la bonne exploitation du fonds, notamment le fait qu'il ne dispose pas de la main-d'oeuvre nécessaire aux besoins de l'exploitation ;

3° Le non-respect par le preneur des clauses mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 411-27.

Les motifs mentionnés ci-dessus ne peuvent être invoqués en cas de force majeure ou de raisons sérieuses et légitimes.

II.-Le bailleur peut également demander la résiliation du bail s'il justifie d'un des motifs suivants :

1° Toute contravention aux dispositions de l'article L. 411-35 ;

2° Toute contravention aux dispositions du premier alinéa de l'article L. 411-38 ;

3° Toute contravention aux obligations dont le preneur est tenu en application des articles L. 411-37, L. 411-39, L. 411-39-1 si elle est de nature à porter préjudice au bailleur ;

4° Le non-respect par l'exploitant des conditions définies par l'autorité compétente pour l'attribution des biens de section en application de l'article L. 2411-10 du code général des collectivités territoriales.

Dans les cas prévus aux 1° et 2° du présent II, le propriétaire a le droit de rentrer en jouissance et le preneur est condamné aux dommages-intérêts résultant de l'inexécution du bail.

L'article L411-35 du même code énonce, en ses alinéas 3 et 4, que lorsqu'un des co-preneurs du bail cesse de participer à l'exploitation du bien loué, le co-preneur qui continue à exploiter dispose de trois mois à compter de cette cessation pour demander au bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception que le bail se poursuive à son seul nom. Le propriétaire ne peut s'y opposer qu'en saisissant dans un délai fixé par décret le tribunal paritaire, qui statue alors sur la demande. Le présent alinéa est applicable aux baux conclus depuis plus de trois ans, sauf si la cessation d'activité du co-preneur est due à un cas de force majeure.

A peine de nullité, la lettre recommandée doit, d'une part, reproduire intégralement les dispositions du troisième alinéa du présent article et, d'autre part, mentionner expressément les motifs allégués pour cette demande ainsi que la date de cessation de l'activité du co-preneur.

Il est constant que le défaut de notification au bailleur de la cessation d'activité de l'un des co-preneurs du bail constitue une contravention aux dispositions impératives de l'article L411-35 du code rural et de la pêche maritime de nature à permettre la résiliation de plein droit du bail (voir notamment en ce sens Cass. Civ. 3e, 3 novembre 2021, n°20-10.393).

Il est également admis que l'article L411-31, II, 1°, du code rural et de la pêche maritime permet au bailleur de demander la résiliation du bail s'il justifie de toute contravention aux dispositions de l'article L411-35 du même code, et que le défaut d'accomplissement de l'obligation d'information du propriétaire, en cas de cessation d'activité de l'un des co-preneurs, constitue un manquement aux obligations nées du bail et une violation du texte précité (voir notamment en ce sens Cass. Civ. 3e, 4 mars 2021, n°20-14.141).

En l'espèce, il n'est pas contesté que M. [Y] ait, le 7 septembre 2013, cédé à Mme [V] les 772 parts qu'il possédait au sein de la SCEA de la [Adresse 47].

Le contrat de bail rural du 4 mai 2007 stipule, en son article 8 autorisant la mise à la disposition de la SCEA de la [Adresse 47] des biens loués, que tout changement intervenant dans la mise à disposition devra être porté à la connaissance du bailleur au plus tard dans les deux mois, par lettre recommandée avec avis de réception.

L'article 16 du même contrat offre au bailleur la possibilité de demander la résiliation du bail pour toute contravention aux dispositions de l'article L411-35 du code rural et de rentrer dans ce cas en jouissance des biens loués, le preneur étant par ailleurs condamné aux dommages-intérêts résultant de l'inexécution du bail.

Mme [V] ne soutient nullement avoir informé le ou les bailleur(s) de la cessation d'activité de M. [Y] ni avoir sollicité la poursuite du bail à son seul nom, que ce soit dans le délai prévu au contrat de bail ou dans celui que l'article L411-35 alinéa 3 édicte. M. [Y] n'a pas davantage informé le bailleur de sa cessation d'activité.

Si les intimés affirment en leurs écritures que M. [Y] est demeuré co-titulaire du bail, ils précisent également que l'intéressé avait cessé son activité agricole depuis 2013 et 'n'était plus exploitant agricole'.

Le manquement de Mme [V] et M. [Y] aux obligations légales et contractuelles qui leur incombaient en termes d'information du bailleur de la cessation d'activité de l'un des co-preneurs se trouve ainsi caractérisé.

Le fait que la famille [W] ait pu savoir, du fait de sa proximité géographique et de ses relations avec Mme [V] et M. [Y], que celui-ci avait cessé de prendre part à l'exploitation des terres données à bail est sans incidence sur la nécessité incombant au preneur restant de respecter les dispositions de l'article L411-35 précité afin d'obtenir la poursuite du bail en son seul nom (voir là encore en ce sens l'arrêt n°20-14.141 précité).

Le fait que les appelants aient acquis les terres données à bail auprès de la SAFER aux termes d'actes d'échange mentionnant une acquisition 'pour maintien de l'exploitant en place' qui les mettait en valeur avant de formuler en justice une demande de résiliation du bail, quelques mois plus tard, est de même sans emport, cette stipulation particulière ne privant en aucun cas les bailleurs de la faculté de se prévaloir des manquements éventuels des preneurs à leurs obligations envers eux. L'intention frauduleuse imputée par M. [Y], Mme [V] et la SCEA de la [Adresse 47] aux consorts [W] ne peut ainsi être jugée démontrée.

Il sera en outre précisé que bien qu'ils évoquent, dans le corps de leurs écritures, la prescription de la demande présentée par les consorts [W], les intimés ne saisissent pas la Cour d'une fin de non-recevoir sur ce fondement en leur dispositif et ne l'ont pas davantage fait en première instance.

Leur demande de rejet de la demande de résiliation des consorts [W] en raison de sa prescription (page 5 de leurs conclusions) n'est ainsi pas comprise dans leur demande de confirmation du jugement entrepris 'en ce qu'il a rejeté les demandes formées par M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C tendant à la résiliation du bail conclu le 4 mai 2007", et il n'y sera par conséquent pas répondu, la cour n'en étant pas régulièrement saisie.

Par ailleurs, la précision figurant dans l'acte notarié de cession de parts par M. [Y] à Mme [V] daté du 7 septembre 2013 selon laquelle faute pour les preneurs d'avoir pu obtenir l'accord du bailleur quant à la suppression de la co-titularité du bail (la recherche d'un tel accord n'étant au passage aucunement établie), le contrat de bail se poursuivrait aux mêmes charges et conditions tant pour Mme [V] que pour M. [Y] est indifférente à la solution du présent litige et ne peut, par surcroît, avoir réellement été suivie d'effet dans la mesure où le bail rural impose en son principe au preneur de prendre part à l'exploitation des terres louées de façon effective.

Ainsi le bailleur n'aurait-il pu attendre de M. [Y] qu'il continue, avec sa co-preneuse, de contribuer à la mise en valeur des terres données à bail dès lors que celui-ci avait mis fin à son activité agricole, réduisant d'autant les capacités d'exploitation pouvant légitimement être escomptées par le bailleur.

Il est ainsi faux d'affirmer en substance que cette cessation d'activité ne pouvait importer au bailleur puisque celui-ci conservait la faculté de rechercher la responsabilité de M. [Y] en cas de méconnaissance par Mme [V] des obligations nées du bail.

Enfin, il est constant que le bailleur agissant en résiliation du bail pour contravention aux dispositions de l'article L411-35 du code rural et de la pêche maritime n'est pas tenu de démontrer l'existence d'un préjudice, ni d'une atteinte à la bonne exploitation du fonds (voir là encore en ce sens les arrêts n°20-10.393 et n°20-14.141 précités).

L'ensemble de ces éléments permet de caractériser l'existence d'un manquement de Mme [V] aux dispositions impératives et d'ordre public de l'article L411-35 alinéas 3 et 4 du code rural et de la pêche maritime et d'un manquement des deux co-preneurs aux dispositions contractuelles formant la loi des parties, au titre desquels le bailleur peut légitimement solliciter la résiliation du bail en cause.

Il convient en conséquence d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté les demandes formées par les consorts [W] tendant à la résiliation du bail conclu le 4 mai 2007 et de prononcer la résiliation judiciaire du bail rural du 4 mai 2007 par acte authentique reçu par Me [M] notaire à [Localité 50] ([Localité 50]), le 4 mai 2007 et consenti à M. [G] [Y] et Mme [Z] [V] par le GFA Indre 3 aux droits de laquelle se trouvent actuellement M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C, de dire que la mise à disposition des biens loués au profit de la SCEA de la [Adresse 47], prévue à l'article 8 dudit bail, cessera immédiatement et d'ordonner en conséquence l'expulsion de tous occupants du chef de M. [G] [Y], Mme [Z] [V] et la SCEA de la [Adresse 47] des terres données à bail.

Sur la demande indemnitaire présentée par les consorts [W] :

Aux termes de l'article 1231-1 du code civil, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, s'il ne justifie pas que l'exécution a été empêchée par la force majeure.

En l'espèce, les consorts [W] ne démontrent en aucune façon avoir subi un préjudice du fait de la mauvaise exécution par les intimés de leurs obligations contractuelles, se bornant à indiquer à cet égard qu'ils 'pourraient exploiter eux-mêmes ces surfaces louées'.

Une telle affirmation est particulièrement insuffisante à caractériser l'existence du moindre préjudice qu'auraient pu subir les bailleurs du fait de l'abstention par Mme [V] de leur notifier la cessation d'activité de M. [Y] et de solliciter la poursuite du bail en son seul nom.

En outre, les pièces produites n'établissent aucun dommage causé aux terres données à bail par leur exploitation par Mme [V] et/ou la SCEA de la [Adresse 47].

La demande indemnitaire présentée par les consorts [W] sera en conséquence rejetée et le jugement entrepris confirmé en ce sens, par substitution de motifs.

Sur la demande indemnitaire pour procédure abusive présentée par M. [Y], Mme [V] et la SCEA de la [Adresse 47] :

L'article 1240 du code civil pose pour principe que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Il est constant que le droit d'agir ou de se défendre en justice ne dégénère en abus pouvant donner lieu à indemnisation que dans le cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, nul abus de droit n'est caractérisé à l'encontre des consorts [W] dans le cadre de la présente instance, qui a au contraire vu leur demande principale recevoir une suite favorable.

La demande indemnitaire formée à ce titre par M. [Y], Mme [V] et la SCEA de la [Adresse 47] sera en conséquence rejetée et le jugement entrepris confirmé sur ce point.

Sur l'article 700 et les dépens :

L'équité et la prise en considération de l'issue du litige déterminée par la présente décision commandent de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et de condamner in solidum M. [Y], Mme [V] et la SCEA de la [Adresse 47], qui succombent en l'essentiel de leurs prétentions, à payer aux consorts [W] la somme de 3.000 euros au titre des frais exposés tant en première instance qu'en cause d'appel qui ne seraient pas compris dans les dépens.

Aux termes de l'article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge de l'autre partie. M. [Y], Mme [V] et la SCEA de la [Adresse 47], succombant en l'essentiel de leurs prétentions, devront supporter la charge des dépens de première instance et d'appel.

Le jugement entrepris sera enfin infirmé de ces chefs.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME partiellement le jugement rendu le 7 décembre 2021 par le Tribunal paritaire des baux ruraux de Châteauroux en ce qu'il a

- rejeté les demandes formées par M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C tendant à la résiliation du bail conclu le 4 mai 2007,

- condamné M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C aux dépens,

- condamné M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à payer à la SCEA de la [Adresse 47], à Mme [Z] [V] et à M. [G] [Y] la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- laissé à la charge de M. [D] [W], de M. [L] [W] et du GFA 2 M-C les frais exposés par eux au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus ;

Et statuant de nouveau des chefs infirmés,

PRONONCE la résiliation judiciaire du bail rural du 4 mai 2007 par acte authentique reçu par Me [M] notaire à [Localité 50] ([Localité 50]), le 4 mai 2007 et consenti à M. [G] [Y] et Mme [Z] [V] par le GFA Indre 3 aux droits de laquelle se trouvent actuellement M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C avec toutes ses conséquences de droit,

DIT que la mise à disposition des biens loués au profit de la SCEA de la [Adresse 47], prévue à l'article 8 dudit bail, cessera immédiatement,

ORDONNE l'expulsion de tous occupants du chef de M. [G] [Y], Mme [Z] [V] et la SCEA de la [Adresse 47],

AUTORISE M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à faire expulser tous les occupants du chef de M. [G] [Y], de Mme [Z] [V] et de la SCEA de la [Adresse 47] immédiatement après avoir fait signifier le présent arrêt et fait délivrer commandement de quitter les lieux, avec l'assistance de la force publique si besoin est et en présence de la SCP [R] et [E], huissier de justice à [Localité 52], ou de tout autre huissier mandaté par eux ;

AUTORISE M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C à faire retirer par toute entreprise de leur choix les effets mobiliers pouvant être restés sur place avec l'assistance de la force publique si besoin est et en présence de la SCP [R] et [E], huissier de justice à [Localité 52], ou de tout autre huissier mandaté, si M. [G] [Y], Mme [Z] [V] et la SCEA de la [Adresse 47] n'y ont pas eux-mêmes procédé;

Et y ajoutant,

CONDAMNE in solidum M. [G] [Y], Mme [Z] [V] et la SCEA de la [Adresse 47] à payer à M. [D] [W], M. [L] [W] et le GFA 2 M-C la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toutes autres demandes, plus amples ou contraires ;

CONDAMNE M. [G] [Y], Mme [Z] [V] et la SCEA de la [Adresse 47] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

L'arrêt a été signé par L.WAGUETTE, Président et par Mme MAGIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

S.MAGISL. WAGUETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22/00002
Date de la décision : 29/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-29;22.00002 ?
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