CR/VA
COPIE OFFICIEUSE
COPIE EXÉCUTOIRE
à
- la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS
- Me Nathalie GOMOT-PINARD
LE : 29 SEPTEMBRE 2022
COUR D'APPEL DE BOURGES
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 29 SEPTEMBRE 2022
N° - Pages
N° RG 21/00909 - N° Portalis DBVD-V-B7F-DME6
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal du Judiciaire de CHÂTEAUROUX en date du 04 Février 2021
PARTIES EN CAUSE :
I - M. [T] [O]
né le 28 Février 1957 à [Localité 14]
[Adresse 24]
[Localité 14]
Représenté par de la SCP AVOCATS BUSINESS CONSEILS, avocat au barreau de BOURGES
timbre fiscal acquitté
APPELANT suivant déclaration du 12/08/2021
II - Mme [S] [F]
née le 25 Septembre 1960 à [Localité 19]
[Adresse 5]
[Localité 13]
Représentée par Me Nathalie GOMOT-PINARD, avocat au barreau de CHÂTEAUROUX
timbre fiscal acquitté
INTIMÉE
29 SEPTEMBRE 2022
N° /2
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Juin 2022, hors la présence du public, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme ALLEGUEDE, Conseiller chargé du rapport.
Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
M. TESSIER-FLOHICPrésident de Chambre
Mme DE LACHAISEConseiller
Mme ALLEGUEDEConseiller
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GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS
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ARRÊT : CONTRADICTOIRE
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
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Mme [F] et M. [O] se sont mariés le 25 avril 1981 à [Localité 14] (36). Ils ont fait précéder leur union d'un contrat de mariage selon le régime de la séparation de biens, reçu par Maître [E], notaire à [Localité 26], le 22 avril 1981.
Une requête en divorce a été introduite par Mme [F] le 26 juin 2008.
Une ordonnance de non-conciliation en date du 24 juillet 2008, rendue par le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Châteauroux a principalement :
- attribué la jouissance du domicile conjugal à l'époux jusqu'à la vente de l'immeuble ;
- attribué la jouissance du véhicule Mercedes immatriculé 6483 RZ 36 à l'époux ;
- et constaté :
- l'accord de l'époux pour verser une somme de 40'000 € à l'épouse, à titre de provision à valoir sur ses droits, avant le 1er août 2008,
- l'accord des parties pour le choix d'un notaire afin qu'il élabore un projet de liquidation du régime matrimonial et de formation des lots à partager.
Par jugement du 13 décembre 2012, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Châteauroux a :
- prononcé le divorce entre les époux aux torts exclusifs de M. [O],
- ordonné la liquidation et le partage des intérêts patrimoniaux des époux et désigné Maître [I], notaire à [Localité 25], pour y procéder et un juge pour les surveiller,
- condamné M. [O] à payer à Mme [F] la somme de 1000 € sur le fondement de l'article 266 du code civil,
- rejeté la demande de prestation compensatoire formée par l'épouse.
Par arrêt du 28 novembre 2013, la cour d'appel de Bourges a infirmé partiellement la décision du premier juge et a :
' désigné Maître [L], notaire à [Localité 18], pour procéder aux opérations de liquidation et partage du régime matrimonial ayant existé entre les époux,
' condamné M. [O] à payer à Mme [F] une prestation compensatoire en capital d'un montant de 60'000 €.
Le 20 août 2015, Maître [W] [L] a dressé procès-verbal de carence (carence de M. [O]) auquel il a annexé le projet d'état liquidatif et les dires de Mme [F].
Par arrêt en date du 19 octobre 2016, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par M. [O] qui portait principalement sur la prestation compensatoire (moyens n'ouvrant pas droit à cassation).
Le 31 août 2018, Mme [F] a fait assigner M. [O] devant le tribunal de grande instance de Châteauroux essentiellement aux fins d'homologation du projet d'état liquidatif établi par le notaire, sous réserve de modification.
Par jugement en date du 4 février 2021, dont appel, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Châteauroux a :
' rejeté la demande présentée par chacune des parties tendant à ce que soit ordonnée une expertise comptable relative à l'EARL de [Localité 17],
' dit que M. [O] est redevable envers l'indivision existant avec Mme [F] d'une indemnité d'occupation de l'immeuble situé [Adresse 20], à [Localité 14], à hauteur de 4 024 € pour la période du 24 juillet 2008 au 13 février 2009,
' fixé à l'actif de l'indivision existant entre les parties :
deux parcelles de terre situées à [Localité 14] et cadastrées :
-section B numéro [Cadastre 16]-La prairie de [Localité 14] pour une contenance de 47 a 60 centiares,
-section B numéro [Cadastre 4]-[Localité 22] pour une contenance de 01 ha 53 ares et 57 centiares,
le solde créditeur du compte joint ABS numéro [XXXXXXXXXX01] à hauteur de la somme de 31'728,96 €,
le véhicule Mercedes immatriculé [Immatriculation 15] pour une valeur nulle,
les intérêts de conciliation sur le prix de vente de l'immeuble indivis resté séquestré chez le notaire commis jusqu'à la date du partage définitif,
' dit qu'il appartiendra au notaire commis d'évaluer la valeur vénale des deux parcelles de terre située à [Localité 14] dans les conditions de l'article 829 du code civil,
' fixé au passif de l'indivision existante entre les parties la créance de M. [O] à la somme de 196 € au titre des taxes foncières réglées de 2010 à 2018,
' dit que M. [O] dispose à l'encontre de Mme [F] d'une créance de 99'360,03 € au titre de la prise en charge des emprunts souscrits pour l'acquisition de la propriété de [Localité 17] et ordonné en conséquence la rectification du projet d'état liquidatif annexé au procès-verbal de carence établi par Maître [W] [L] le 20 août 2015 qui mentionnait à ce titre une créance de 50'831,92 € en ce sens,
' homologué pour le surplus le projet d'état liquidatif établi par Maître [W] [L] et annexé au procès-verbal de carence du 20 août 2015 sous réserve des correctifs apportés par la présente décision,
' renvoyé les parties devant le notaire pour la poursuite et l'achèvement des opérations de liquidation conformément aux dispositions qui précèdent,
' rejeté toutes les demandes plus amples ou contraires présentées par les parties,
' dit n'y avoir lieu à exécution provisoire de la décision,
' ordonné l'emploi des dépens en frais généraux de partage et supportés par les copartageants dans la proportion de leurs parts dans l'indivision.
Le 12 août 2021 M. [O] a interjeté appel de l'ensemble des chefs de la décision du 4 février 2021.
Par conclusions notifiées le 29 avril 2022, il demande à la Cour :
- la désignation d'un expert judiciaire, avec une mission qu'il détaille, dans le but de liquider la société et de répartir le boni de liquidation selon les parts détenues par M. [O] et Mme [F],
- de dire et juger que les frais de l'expertise comptable seront supportés par les parties,
- et subsidiairement, si l'expertise n'était pas ordonnée, de dire et juger :
que M. [O] détient une créance à l'égard de Mme [F] de 31 136,56 € au titre de la vente des DPU (droits de préemption urbains),
que M. [O] détient une créance à l'égard de Mme [F] de 25 154,09 € au titre des parts sociales de l'EARL de [Localité 17] détenues par Mme [F] et non réglées,
- de fixer l'indemnité d'occupation due par M. [O] à la somme de 206,46 € et subsidiairement à la somme 399,60 €,
- de dire et juger que M. [O] détient une créance à l'égard de Mme [F] de 9 000 € au titre du déménagement et du stockage des meubles meublants,
- de dire et juger qu'il convient d'intégrer dans la masse active la parcelle B1683 située sur la commune de [Localité 14] pour une valeur de 3 000 €,
- dire et juger que M. [O] détient une créance de 196 € au titre des taxes foncières des parcelles situées sur la commune de [Localité 14] à parfaire jusqu'au jour du partage,
- dire et juger qu'il convient d'intégrer dans la masse active le solde du compte joint ABS pour un montant de 31 728,96 €,
- dire et juger qu'il convient d'intégrer dans la masse active le véhicule Mercèdes immatriculé [Immatriculation 15] pour une valeur nulle,
- dire et juger qu'il convient d'intégrer dans la masse active les intérêts produits du fait des sommes séquestrées chez le notaire et notamment ceux produits postérieurement à 2013 et jusqu'au jour du partage,
- dire et juger que Mme [F] ne détient aucune créance au titre de l'acquisition de la [Adresse 21] et subsidiairement fixer celle-ci à la somme de 507 800 €,
- dire et juger que M. [O] détient une créance à l'égard de Mme [F] d'un montant de 266 689,69 € au titre de l'acquisition du [Adresse 20],
- dire et juger que Mme [F] ne détient aucune créance au titre du financement du tracteur,
- dire et juger que les intérêts issus de la vente du [Adresse 20] seront répartis entre les parties au prorata de leurs droits,
- dire et juger qu'il sera attribué une avance sur liquidation de 240 000 € pour chaque partie sur les fonds bloqués,
- dire et juger que le projet d'état liquidatif ne pourra qu'être homologué sous réserve des rectifications engendrées par l'arrêt,
- de confirmer le jugement rendu le 4 février 2021 par le tribunal judiciaire de Châteauroux en ses dispositions non critiquées par M. [O],
- de condamner Mme [F] à payer à M. [O] la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions d'intimé, avec appel incident, signifiées le 2 février 2022, Mme [F] demande à la Cour de :
- confirmer le jugement rendu le 4 février 2021, pour l'essentiel de ses dispositions,
- déclarer M. [O] mal fondé en toutes ses critiques renouvelées en cause d'appel et l'en débouter,
- déclarer recevable et bien fondé l'appel incident de Mme [F] et ains voir infirmer la valeur de l'indemnité d'occupation due par M. [O], et en conséquence, condamner M. [O] au paiement de la somme initialement demandée de 6500 € à titre tant d'indemnité d'occupation pour la partie habitation que pour le fermage dont il a récolté personnellement les fruits du [Adresse 20] sur 204 jours du 24 juillet 2008 au 13 février 2009,
- de le condamner à lui verser la somme de 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, soit 4 000 € par infirmation du jugement déféré pour la première instance et 4 000 € en cause d'appel.
* * *
La clôture a été fixée au 30 mai 2022 et l'affaire appelée à l'audience du 13 juin 2022. La décision a été mise en délibéré au 8 septembre 2022, et le délibéré a été prorogé au 29 septembre 2022.
SUR CE,
Sur la recevabilité de l'appel
En l'espèce, l'appel interjeté par M. [T] [O] est recevable. L'appel incident interjeté par Mme [S] [F] est pareillement recevable.
Au fond
L'article 267 du code civil dans sa version en vigueur jusqu'au 16 janvier 2016 dispose qu'à défaut d'un règlement conventionnel par les époux, le juge, en prononçant le divorce, ordonne la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux, qu'il statue sur les demandes de maintien dans l'indivision ou d'attribution préférentielle, qu'il peut aussi accorder à l'un des époux ou aux deux une avance sur sa part de communauté ou de biens indivis et enfin que si le projet de liquidation du régime matrimonial établi par le notaire désigné sur le fondement du 10° de l'article 255 contient des informations suffisantes, le juge, à la demande de l'un ou l'autre des époux, statue sur les désaccords persistant entre eux.
Sur la désignation d'un expert judiciaire (expert-comptable)
En vertu de l'article 1536 du code civil, lorsque les époux ont stipulé dans leur contrat de mariage qu'ils seraient séparés de biens, chacun d'eux conservant l'administration, la jouissance et la libre disposition de ses biens personnel.
Il sera d'abord rappelé que dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial des époux [O]-[F], les biens dont ils sont propriétaires relèvent du régime de la séparation de biens selon l'acte passé au moment du mariage.
En l'espèce, M. [T] [O] demande la désignation d'un expert comptable aux fins de procéder à la réévaluation des parts sociales et de la répartition des bénéfices qui en a résulté et de procéder à la validation des comptes pour les exercices 2007 et 2008, dans le but de liquider l'Entreprise Agricole à Responsabilité Limité de [Localité 17] (EARL de [Localité 17]).
M. [O] et Mme [F] sont associés au sein de l'EARL qu'ils ont créée ensemble par acte du 20 avril 1995. Les époux sont d'accord pour dire que c'est par erreur que trois prêts contractés auprès du Crédit agricole ont été intégrés au passif apporté par M. [O] au capital de la société et qu'ainsi sa part aurait dû être fixée à 50,41 % au lieu de 41,88 %.
Le capital social est actuellement de 774 300 francs [soit 132 673,36 €], selon l'article 8 des statuts mis à jour lors de l'assemblée générale du 15 mars 2010, réparti de la façon suivante :
- 3 243 parts pour M. [O], numérotées de 1 à 3 243,
- 4 500 parts pour Mme [F], numérotées de 3 244 à 7 743.
Il se déduit des status de l'EARL (pièce 1 produite par monsieur) que les parts sociales dont ils sont titulaires, individualisées par une numérotation, relèvent de leurs biens personnels et non d'une indivision.
Ainsi, les désaccords qui subsistent entre eux dans le cadre de l'EARL ne relèvent pas de la compétence du juge de la liquidation du régime matrimonial, lequel ne peut pas davantage procéder à la désignation d'un expert comptable aux fins de faire réévaluer leurs parts respectives au capital de la société.
Il s'infère des motifs précédents que la créance que M. [O] prétend détenir à l'égard de Mme [F] à hauteur de 31 136,56 € au titre de la vente des DPU relève pareillement du contentieux entre les deux associés dès lors que la répartition du prix de vente de ces droits de préemption urbains a résulté de la répartition actuelle du capital entre chacun des deux associés, répartition litigieuse qui ne relève pas des désaccords relatifs à la liquidation du régime matrimonial.
C'est ainsi à juste titre que le premier juge n'a pas fait droit à cette demande.
Sa décision de rejeter la demande d'expertise comptable sera ainsi confirmée.
Sur le financement de parts sociales de Mme [F] par M. [O]
M. [O] prétend détenir une créance à l'égard de Mme [F] à hauteur de 25 154,09 € au titre des parts sociales de l'EARL du [Localité 17] détenues par l'ex-épouse mais qu'il aurait contribué à financer en apportant des éléments d'une exploitation qui lui appartenait en propre.
A hauteur d'appel, M. [O] produit une attestation de CERFRANCE Indre à [Localité 19] dans laquelle l'expert-comptable déclare 'à l'examen de ces chiffres nous attestons par la présente que les apports de Mme [F] [S] dans l'EARL de [Localité 17] sont issus de l'exploitation individuelle de M. [O] [T]. Le montant 450 000 francs correspond à 9 lignes d'immobilisation antérieurement présentes dans l'exploitation individuelle de M.[O] [T] (pièce 46 de monsieur établie postérieurement à la décision du premier juge).
L'article 6 des statuts de l'EARL de [Localité 17], s'agissant des apports de Mme [F], détaille en effet neuf apports de biens matériels (tuyaux et accessoires, draînage, silo, caisse frigo, pompe à lait, aménagement stabulation, herse Nodet, épandeur engrais et silo couloir) pour une valeur fixée à 450 000 francs représentant l'apport net de l'épouse.
Sur ce point, Mme [F] réplique que dans un acte en date du 21 août 1995, le couple a déclaré mettre à disposition de l'EARL, à titre onéreux, un ensemble de parcelles de terres avec bâtiments d'exploitation situé à [Localité 14] (36) leur appartenant aux deux noms. Or, les apports litigieux portent sur des biens matériels au moment de la création de l'EARL le 20 avril 1995 qui ont donné lieu à l'attribution de parts sociales tandis que l'acte de mise à disposition de terres et de bâtiment d'exploitation à l'EARL a donné lieu à rémunération sous la forme d'une indemnité annuelle d'une valeur de 5 quintaux de blé par hectare.
Ainsi, à hauteur d'appel, il doit être considéré que M. [O] rapporte la preuve qui lui faisait défaut devant le premier juge et qu'il démontre que les apports inscrits au nom de l'épouse d'une valeur de 450 000 € ont en réalité été réalisés à partir de biens matériels appartenant à l'époux.
M. [O] reconnaît toutefois que Mme [F] lui a versé la somme de 285 000 francs à titre d'un premier remboursement sur la somme de 450 000 francs, valeur totale de l'apport. Il reste donc une créance de 165 000 francs, soit la contrevaleur de 25 154,09 € en faveur de l'époux.
En conséquence, la décision du premier juge sera infirmée de ce chef et il sera dit que M. [O] détient à l'encontre de Mme [F] une créance d'un montant de 25 154,09 €.
Sur l'indemnité d'occupation due par M. [O]
En vertu de l'alinéa 2 de l'article 819-9 du code civil, l'indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d'une indemnité.
Il est de jurisprudence constante que l'indemnité, contrepartie du droit de jouir privativement, est due même en l'absence d'occupation effective des lieux.
En l'espèce, le premier juge a fixé l'indemnité d'occupation due par M. [O] à Mme [F] pour l'immeuble situé [Adresse 20] à [Localité 14] (36), pour la période allant du 24 juillet 2008 au 13 février 2009, à la somme de 4 024 €.
M. [O] ne conteste pas être redevable d'une indemnité d'occupation. En revanche, il conteste tant l'étendue des biens objets de l'indemnité litigieuse que la durée d'occupation retenues par le premier juge.
Sur la consistance du bien objet de l'indemnité
L'ordonnance de non-conciliation du 24 juillet 2008 a attribué la jouissance du 'domicile conjugal' à l'époux 'jusqu'à la vente de l'immeuble' qui devait initialement avoir lieu en août de la même année.
Sans autre précision, et alors même que les terres et bâtiments agricoles du [Adresse 20] d'une surface de 64 ha 57 a et 98 ca, avaient été mis à disposition par les époux, à l'EARL de [Localité 17], par convention en date du 21 août 1995 (pièce 32 de monsieur), il ne peut pas être valablement soutenu par Mme [F], comme l'a justement relevé le premier juge, que les biens à prendre en compte dans le calcul de l'indemnité d'occupation inclueraient, outre un local d'habitation, les divers bâtiments d'exploitation, des terres, près, bois et landes pour une superficie de 68 ha 08 a et 33 ca.
Ainsi, seul le domicile conjugal constitue l'assiette de l'indemnité d'occupation et la décision critiquée sera confirmée sur ce point.
Sur la durée de la jouissance privative
Le point de départ de l'indemnité d'occupation est la date d'entrée en jouissance, soit la date de l'ordonnance de non-conciliation, le 24 juillet 2008.
La vente effective du bien à un tiers est intervenue le 13 février 2009.
M. [O] prétend que le bien était libre de tout occupation dès le 9 septembre 2008, date retenue pour la signature d'un compromis de vente (pièce 5 de monsieur), alors que les acquéreurs vont se rétracter le 12 septembre 2008 et que la jouissance du bien lui avait été attribuée 'jusqu'à la vente de l'immeuble'.
Au cours de la période litigieuse, qui va du 24 juillet 2008 au 13 février 2009, M. [O] ne démontre pas qu'il n'avait pas la libre disposition du domicile conjugal. Quand bien même il ne l'occupait pas, le second invidivisaire n'en jouissait pas de son côté. Et la jurisprudence de la cour de cassation rappelle régulièrement que l'indemnité, contrepartie du droit de jouir privativement, est due même en l'absence d'occupation effective des lieux. Elle a pu également affirmer (selon Civ. 1re, 11 juill. 2019, n° 17-31.091) que l'indemnité d'occupation est due alors que le logement indivis, à défaut d'occupation privative, a été laissé libre d'occupation en vue de sa vente.
Ainsi, comme l'a retenu le premier juge, il y a lieu de considérer que l'indemnité d'occupation est due par l'époux pour la période du 24 juillet 2008 au 13 février 2009 (204 jours), date effective de la vente du bien indivis.
Sur le montant de l'indemnité d'occupation
M. [O] conteste la valeur locative retenue par le premier juge, de 600 €, tenant compte d'un abattement de 10 % en raison du caractère précaire de l'occupation. Mme [F] réclamait qu'elle fut fixée à 1 000 €.
Les deux époux ne contestent pas que ce bien immobilier comprenait une piscine.
A hauteur d'appel, M. [O] demande que soit retenue la valeur locative du bien en 2008, soit 160 €, et consent à une majoration pour la piscine. Il produit (pièce 34) l'avis d'un expert immobilier qui retient une fourchette de 5 à 20 % de majoration et demande que soit fixée à 186 € mensuels la valeur locative. Subsidiairement, il propose de retenir comme base de calcul la valeur du bien que louait alors Mme [F], soit 324 €, après déduction d'un abattement de 10 %. En première instance, il proposait une indemnité d'occupation à hauteur de 720 €.
De son côté, Mme [F] conteste ces montants et demande que soit arrêtée la somme totale de 6 500 € au titre de l'indemnité d'occupation, somme incluant le fermage dont il aura récolté personnellement les fruits. Or, l'indemnité d'occupation ne porte que sur le domicile à usage d'habitation comment arrêté supra.
Aussi, il résulte des éléments d'appréciation fournis par les parties que la somme telle que retenue par le premier juge et qui tient compte tant d'une décote pour occupation précaire que de la qualité du bien (avec piscine) a été justement appréciée à hauteur de 600 € mensuels.
Ainsi, rapportée à la période de 204 jours d'occupation privative, soit du 24 juillet 2008 au 13 février 2009, l'indemnité totale due par M. [O] au titre de l'indemnité d'occupation, et arrêtée à la somme de 4 024 € dans la décision critiquée, sera confirmée.
Sur les créances entre époux
Sur la créance de 9 000 € au titre du déménagement et du stockage des meubles meublant
A hauteur d'appel, pas plus que devant le premier juge, il y a lieu de constater que M. [O] n'apporte pas la preuve des frais qu'il aurait engagé pour le déménagement des meubles indivis.
La décision entreprise sera ainsi confirmée en ce qu'elle a débouté M. [O] de ce chef.
Sur la créance de 196 € due au titre des taxes foncières des parcelles situées sur la commune de [Localité 14] à parfaire jusqu'au jour du partage
Cette créance ne fait plus l'objet de contestations entre les parties et elle a été fixée à la charge de Mme [F]. La décision dont appel sera également confirmée de ce chef.
Sur la créance au titre du financement du tracteur
A hauteur d'appel, M. [O] persiste à contester que Mme [F] serait créancière de la somme de 19 818,37 € correspondant au prix d'acquisition d'un tracteur de marque FIAT en 2017. Or, il est parfaitement établi que cet engin a été acquis au moyen d'un prêt accordé par les parents de Mme [F] à M. [O] et que celui-ci a pu le rembourser (pièce 26) en prélevant la somme nécessaire, certes sur son compte personnel, mais sur lequel il est démontré que Mme [F] avait préalablement viré un don manuel de ses parents d'une valeur totale de 600 000 francs (annexe 7 et 8 du projet d'état liquidatif), les deux opérations, virement des 600 000 francs et remboursement de diverses sommes dont le prêt de 130 000 francs, ayant été concomittantes à la date du 16 mars 1994.
En conséquence, la décision du premier juge sera confirmée de ce chef.
Sur la créance de M. [O] au titre de l'acquisition du [Adresse 20]
En vertu de l'article 1469 du code civil, la récompense est, en général, égale à la plus faible des deux sommes que représentent la dépense faite et le profit subsistant. Elle ne peut, toutefois, être moindre que la dépense faite quand celle-ci était nécessaire. Elle ne peut être moindre que le profit subsistant, quand la valeur empruntée a servi à acquérir, à conserver ou à améliorer un bien qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine emprunteur. Si le bien acquis, conservé ou amélioré a été aliéné avant la liquidation, le profit est évalué au jour de l'aliénation ; si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, le profit est évalué sur ce nouveau bien.
En l'espèce,M.[O] et Mme [F] ont fait l'acquisition, en indivision, de divers bâtiments d'habitation et d'exploitation, et de terres, le 22 mai 1992 tel que cela ressort de l'acte authentique en date du 22 mai 1992, pour un total de 800 000 francs. Par ailleurs, le surplus de la propriété du [Adresse 20] a été acquis par le couple le 6 mai 1994 pour la somme de 13 024,40 francs, soit un total de 813 024,40 francs (soit 406 512,20 francs chacun).
L'acquisition a été financée, en partie, par trois prêts souscrits auprès du Crédit agricole le 20 mai 1992 (pièce 9 de monsieur) pour un montant total de 660 000 francs (100 616,35 €) :
- un prêt n° 30755948830 : 300 000 francs,
- un prêt n° 30755948831 : 160 000 francs,
- un prêt n° 30755948832 : 200 000 francs.
Ces prêts ont été complétés par la somme de 180 744 francs résultant :
- d'une donation du père de M. [O] d'un montant de 100 000 francs (pièces 10 et 11),
- d'un prêt des parents de M. [O] au couple [O]/[F] de 80 744 francs.
Par la suite, il n'est pas contesté que M. [O] a remboursé seul le solde dû en capital de ces prêts à hauteur de 133 027,47 francs par intégration de cette somme au passif de ses apports lors de la constitution de L'EARL le 25 avril 1995 (annexe 15 du projet liquidatif-statuts de l'EARL). Mme [O] restait donc redevable de la moitié de cette somme soit 66 603,73 francs.
Au-delà de cette somme, le premier juge a retenu qu'il fallait seulement corriger le projet d'état liquidatif du notaire commis et retenir une créance de M. [O] à l'égard de Mme [F] d'un montant de 99 360,03 € pour l'acquisition de ce domaine. Il a ainsi pris en compte les annuités effectivement payées par l'époux à partir de ses comptes personnels en 1993 et 1994 mais, faute de preuve, il n'a pas pris en compte d'autres annuités dont M. [O] affirmait qu'il en avait assumé la charge de 1995 à 1996, outre des échéances de 1997 à 2004 à hauteur de 75 %.
Le premier juge n'a pas davantage retenu comme ouvrant droit à récompense pour M. [O] les sommes qui auraient été remboursées via l'EARL car il ne démontrait pas que les paiements effectués l'auraient été de ses deniers personnels.
A hauteur d'appel, Mme [F] demande la confirmation de l'appréciation du premier juge qui a arrêté la créance de M. [O] à son égard à la somme de 99 360,03 euros. Sans étayer aucunement ses allégations, elle se contente de relever le 'flou comptable' entretenu par M. [O] quant aux mouvements de fonds à partir de son compte courant d'associé.
De son côté, M. [O] produit, en date du 11 octobre 2021, soit postérieurement à l'arrêt dont appel, une attestation du cabinet CERFRANCE Indre (pièce 53 de monsieur), selon laquelle :
- les échéances en capital des années 1993 à 1996 ont été remboursées à partir du compte personnel de M. [O] pour un montant total de 287 151,51 francs ;
- 75 % des échéances en capital des années 1997 à 2004 sont comptabilisées au débit du compte d'associé de M. [O] dans l'EARL de [Localité 17] à hauteur de 277 873,35 francs, le règlement des échéances venant diminuer le montant enregistré sur ce compte (qui est par ailleurs alimenté par la part du résultat lui revenant),
- 25 % des échéances en capital, des années 1997 à 2004 ont été payées par l'EARL [Localité 17] soit 39 046,99 francs en faveur de M. [O] (soit 40 %, conformément à sa participation au capital de l'EARL), et 55 927,10 francs (soit 60 %, conformément à sa participation au capital de l'EARL) en faveur de Mme [F].
Il sera précisé que la jurisprudence considère que les deniers provenant du remboursement d'un compte courant d'associé ressortent du capital personnel (voir notamment 1re civ. 9 juin 2022 n° 20-21.277).
Au regard de tout ce qui précède, il y a lieu d'infirmer la décision du premier juge et de modifier ainsi qu'il suit le calcul retenu par le notaire :
- la part de Mme [F] dans le prix initial de l'acquisition est de 406 512, 20 francs (813 024,40/2)
- elle n'a asumé la charge de l'acquisition qu'à hauteur de 55 927,10 francs soit une quote part de 6,87 % (55 927,10/813 024,40)
- le [Adresse 20] a été revendu le 13 février 2009 pour un montant de 620 500 euros tel que cela ressort de la page 7 de l'acte notarié,
- l'épouse, propriétaire à hauteur de 50 %, reste ainsi redevable d'une créance de 43,13 % sur le montant du prix de revente du bien, soit 267 621,65 € (620 500 x 43,13/100).
Il y a ainsi lieu de considérer que M. [O] rapporte bien la preuve, à hauteur d'appel, qu'il détient une créance d'au moins 266 689,69 € à l'égard de Mme [F].
En conséquence, la décision dont appel sera infirmée de ce chef et la créance de M. [O] à l'égard de l'indivision arrêtée à la somme de 266 689,69 euros au titre de l'acquisition du [Adresse 20].
Sur la créance de Madame [F] au titre de l'acquisition de la [Adresse 21]
M. [O] a acquis la [Adresse 21] par adjudication sur préemption le 7 mai 1987 pour la somme de 315 000 francs.
Il reproche au premier juge d'avoir inversé la charge de la preuve et estime qu'il revient à Mme [F] de démontrer que l'acquisition de cette ferme aurait été réalisée au moyen d'un prêt accordé au couple par ses parents. M.[O] soutient en effet que c'est par une analyse erronée que Maître [L] a retenu que l'acquisition du domaine avait été financée au moyen d'un prêt d'un montant de 350 000 francs consenti par M. et Mme [F] aux époux [F]-[O] selon les termes d'un acte reçu par Maître [P] notaire à [Localité 23] le 5 mai 1987, en visant l'annexe 5 du projet d'état liquidatif.
- Sur l'existence de la créance
Il ressort de pièces produites par les parties que ladite annexe 5 ne comporte qu'une seule page tandis que M. [O] produit, en pièce 40, deux pages de l'acte de prêt litigieux constaté par devant notaire le 21 décembre 1987. L'avant dernier paragraphe de la première page de cette pièce est explicite sur la réalisation concomitante du prêt avec l'acquisition du domaine, soit le 5 mai 1987, en ce qu'il y est consigné que ' la somme de trois cent cinquane mille francs (350 000 frs) pour prêt que M. et Mme [F] leur ont fait directemement et en dehors de la comptabilité du notaire soussigné dès le cinq mai mil neuf cent quatre vingt sept par chèque sur le Crédit Agricole n° 1590771 (...)'. Somme finalement remboursée le 16 mars 1994 par virement bancaire selon mention manuscrite apposée par les parents de Mme [F].
Il n'est donc pas contestable, car démontré par Mme [F], que le prêt de 350 000 francs a bien été consenti au moment de l'acquisition de la [Adresse 21], quand bien même son affectation n'était pas mentionnée. Et les prêts que fait valoir M. [O] pour sa défense ont en réalité été contractés après l'acquisition litigieuse. Le remboursement de la somme de 315 000 € a ensuite été permis par l'utilisation d'un don manuel reçue par Mme [F] de la part de ses parents, comme détaillé dans le procès-verbal de carence avec dires et état liquidatif du 20 août 2015 produit par l'épouse (pièce 5, pages 3 à 5).
Ainsi, il y a lieu d'adopter le raisonnement du premier juge et de confirmer que Mme [F] détient une créance à l'égard de l'indivision pour l'acquisition de la [Adresse 21] dès lors qu'il est démontré que cette acquisition et ses améliorations ont été financées par des biens personnels de l'épouse.
- Sur l'évaluation de la créance
A titre subsidiaire, et accessoirement à la demande qui précède, M. [O] conteste les valeurs retenues pour certaines parcelles après avoir rappelé que le notaire a fait application de la règle du profit subsistant pour évaluer la créance de Mme [F] en retenant les éléments suivants :
- prix de vente d'une partie des terres soit la somme de 175 500 €
- valeur des terrains restés en possession ou aliénés à titre onéreux pour un montant de 386 000 €, soit une créance totale de 561 500 €.
A partir de l'expertise de la valeur vénale de terres par Mme [X], expert en évaluation immobilière et expert près la Cour d'appel (pièce 48) qu'il produit à hauteur d'appel, M. [O] considère que la créance de Mme [O] doit être arrêtée à la somme de 507 800 € au lieu de 561 500 € au motif d'une surévalation des terrains restés en sa possession :
- une parcelle de bois cadastrée section B n° [Cadastre 11] d'une contenance de 4 ha 13 a 50 ca qu'il évalue à10800 € au lieu de 16 000 € selon l'évaluation arrêtée par le notaire,
- le terrain sur lequel il a fait construire sa maison cadastrée section B n° [Cadastre 7] d'une contenance de 65 a 63 ca qu'il évalue à 69 500 € au lieu de 80 000 € comme retenu par le notaire,
- les parcelles B[Cadastre 6], [Cadastre 8], [Cadastre 9] et [Cadastre 10] dont il estime la valeur à 12 000 € au lieu des 50 000 € retenus par le notaire, étant précisé toutefois que les parcelles B[Cadastre 10] et B [Cadastre 9] sont également des parcelles de bois selon l'expertise,
soit un total de 332 300 € au lieu de 386 000 € comme retenu pour l'évaluation du profit subsistant pour Mme [F].
De son côté, sur ce point soulevé subsidiairement, Mme [F] se contente de demander confirmation de la valeur de sa créance à hauteur de 561 500 € sans répondre sur les prétendues surévaluations.
Il sera par ailleurs relevé qu'aucune des parties ne sollicite une expertise judiciaire.
Au vu de ces éléments, la différence entre le montant retenu initialement par le notaire et le montant tel qu'évalué par M. [O] à partir de l'expertise qu'il a pris l'initiative de faire réaliser est de 53 700 €.
Cet important écart de valeur justifie que le notaire procède à une nouvelle évaluation du prix des parcelles litigieuses dans le calcul du profit subsistant, l'expertise effectuée et produite n'étant pas contradictoire, sans pour autant être contestée par Mme [F].
Ainsi, la décision du premier juge sera confirmée en ce qu'elle a retenu l'existence d'une créance au profit de Mme [O] mais infirmée en ce qu'elle a arrêté la créance de l'intimée à la somme de 561 500 €.
Statuant à nouveau de ce chef, il sera ordonné que le notaire commis propose une nouvelle évaluation du montant de la créance de l'épouse à partir de l'expertise de Mme [X] et de ses propres éléments d'évaluation.
Sur l'intégration de diverses sommes à la masse active de l'indivision
Les époux ne contestent plus la décision du premier juge d'intégrer à la masse active :
- le solde du compte joint ABS pour un montant de 31 728,96 €,
- le véhicule Mercèdes immatriculé [Immatriculation 15] pour une valeur nulle,
- les intérêts produits du fait des sommes séquestrées chez le notaire et notamment ceux produits postérieurement à 2013 et jusqu'au jour du partage.
La décision entreprise seront donc confirmée de ces chefs.
Sur la valeur de la parcelle B1683 à intégrer à la masse active de l'indivision
L'article 829 du code civil dispose qu'en vue de leur répartition, les biens sont estimés à leur valeur à la date de la jouissance divise telle qu'elle est fixée par l'acte de partage, en tenant compte, s'il y a lieu, des charges les grevant. Cette date est la plus proche possible du partage. Cependant, le juge peut fixer la jouissance divise à une date plus ancienne si le choix de cette date apparaît plus favorable à la réalisation de l'égalité.
Par acte en date du 6 mai 1994, les époux avaient acquis les parcelles cadastrées B[Cadastre 12], B[Cadastre 16], B[Cadastre 2], B[Cadastre 3] et B[Cadastre 4] (pièce 6 de monsieur). Trois de ces parcelles ont été revendues selon l'acte notarié du 13 février 2019 (annexe 16 du projet liquidatif). Restaient donc les parcelles B[Cadastre 16] et B[Cadastre 4] en indivision. Or, les époux ont fait valoir que le notaire avaient omis de les intégrer à l'état liquidatif. Le premier juge a ainsi ordonné l'intégration à la masse active de l'invidivision des parcelles :
- section B [Cadastre 4] -[Localité 22] - d'une contenance de 01 ha 53 a et 57 ca
- section B [Cadastre 16] -La prairie de [Localité 14]- d'une contenance de 47 a et 60 ca
Toutefois, le premier juge n'en a pas fixé la valeur et dit qu'il appartiendrait au notaire commis de les évaluer, au motif qu'il ne disposait pas des éléments d'appréciation tandis que les parties n'avaient pas sollicité d'expertise judiciaire.
En première instance, M. [O] demandait l'intégration dans la masse active des deux parcelles litigieuses pour une valeur de 6 000 €.
A hauteur d'appel, Mme [F] indique que les parties s'accordent pour voir confirmer sur le principe cette réintégration pour une valeur de 6 000 €, tout en contestant la proposition de voir fixer à 3 000 € la valeur de la parcelle B[Cadastre 4] et en demandant la confirmation d'une évaluation confiée au notaire. De son côté, M. [O] précise que seule la parcelle B [Cadastre 4] manque à l'état liquidatif en ce que l'autre parcelle B [Cadastre 16] a été vendue, et qu'il convient de fixer la valeur de la parcelle manquante à 3 000 €.
Il sera d'abord relevé qu'en effet seule la parcelle B[Cadastre 4] reste propriété indivise des époux, la parcelle B[Cadastre 16], ayant été vendue le 24 octobre 2000 devant Me [V] notaire à [Localité 19] (pièce 48 de monsieur, p.5), ce qui ressort des conclusions des parties qui ne se positionne que sur cette parcelle.
En conséquence, il y a d'abord lieu de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a réintégré à la masse active de l'indivision la parcelle B[Cadastre 16] alors qu'elle ne fait plus partie de l'indivision.
S'agissant de la parcelle B[Cadastre 4], si le premier juge avait écarté le 'tableau du marché des terres et prés' établi par la SAFER en 2017 comme n'étant pas de nature à permettre une évaluation judiciaire de la valeur des terres dans les conditions de l'article 829 du code civil, il avait relevé par ailleurs que les parties ne sollicitaient pas d'expertise judiciaire, ni ne produisait d'élément d'évaluation. Il avait donc confié au notaire ladite évaluation.
A hauteur d'appel, M. [O] produit un avis de valeur vénale réalisé en date du 21 octobre 2021 par Mme [X], expert en évaluation immobilière et expert près la Cour d'appel, qui évalue à 3 000 € le prix de la parcelle B[Cadastre 4], parcelle de terre en zone non constructible. De son côté, Mme [F] s'oppose, par principe, à cette évaluation, n'en propose pas d'autre en retour et demande la confirmation d'une évaluation par notaire.
L'avis de valeur vénale retient un prix à l'hectare de 2 000 € en 2008 (les parties ayant convenu de fixer la jouissance divise à compter de la date de l'ordonnance de non conciliation), soit un prix de 3 071 € rapporté à la surface considérée (1 ha 53 a 57 ca).
Le 'tableau du marché des terres et prés' établi par la SAFER en 2017 (pièce 23 de monsieur) retenait un prix à l'hectare moyen de 3 830 € en 2010, soit 5 881,73 € pour la surface considérée. Il en résulte un écart important entre le prix moyen tel que recensé par la SAFER et l'analyse de l'expert.
Ainsi, la décision du premier juge sera confirmée en ce qu'elle a confié au notaire commis, le soin de proposer une évaluation de la parcelle section B[Cadastre 4].
Sur l'attribution d'une avance sur liquidation de 240 000 € pour chaque partie sur les fonds bloqués
En vertu de l'article 815-11 du code civil, alinéa 4, à concurrence des fonds disponibles, le président du tribunal judiciaire peut ordonner une avance en capital sur les droits de l'indivisaire dans le partage à intervenir.
En l'espèce, le projet d'état liquidatif tel qu'établi par le notaire fait apparaître que M. [O] est redevable d'une soulte.
Si les ajustements prévus par la présente décision sont de nature à modifier les droits de chacun des époux, et notamment ceux de l'époux, ils ne sont toutefois pas réalisés dans une telle proportion qu'ils permettent d'arrêter le montant d'une avance sur la liquidation à intervenir à hauteur de 240 000 €, le notaire ayant par aileurs à procéder à de nouvelles évaluations.
En conséquence, la décision du premier juge sera confirmée de ce chef.
Sur la répartition des intérêts issus de la vente du [Adresse 20] entre les parties au prorata de leurs droits
Le [Adresse 20] a été vendu par acte authentique en date du 13 février 2009 moyennant le prix de 620 500 €. Cette somme est séquestrée chez le notaire.
Les deux parties demandent l'actualisation du décompte des intérêts depuis l'année 2014 jusqu'au jour du partage.
Il y a lieu de faire droit à cette demande à laquelle rien ne s'oppose et pour laquelle ils sont tous deux d'accord.
Sur l'homologation du projet d'état liquidatif
L'article 1375 du code de procédure civile dispose que le tribunal statue sur les points de désaccord subsistant entre les copartageants et qu'il homologue l'état liquidatif ou renvoie les parties devant le notaire pour établir l'acte constatant le partage.
Conformément à la demande des deux parties, et sauf pour le notaire commis à procéder aux ajouts et retranchements résultant du présent arrêt, il y a lieu d'homologuer le projet d'état liquidatif établi par Maître [L], notaire à [Localité 18], annexé au procès-verbal de carence du 20 août 2015.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Chacune des parties succombant à son tour à hauteur d'appel, l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile tandis que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Sur la forme,
- Déclare l'appel de M. [T] [O] recevable ;
- Déclare l'appel incident de Mme [S] [F] recevable ;
Au fond,
- Confirme le jugement rendu par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Châteauroux le 04 février 2021 en ce qu'il a :
- rejeté la demande d'expertise comptable relative aux opérations passées entre les époux, associés de l'EARL de [Localité 17] ;
- déclaré M. [T] [O] redevable envers l'indivision d'une indemnité d'occupation à hauteur de 4 024 € pour l'immeuble situé [Adresse 20] à [Localité 14] pour la période du 24 juillet 2008 au 13 février 2009 ;
- débouté M. [T] [O] de sa demande de voir fixer au passif de l'indivision une créance de 9 000 € à l'égard de Mme [S] [F] au titre du déménagement et du stockage de meubles meublants ;
- arrêté à la somme de 196 € la créance de M. [T] [O] à l'égard de Mme [S] [F] au titre de taxes foncières de la période 2010-2018 des parcelles situées sur la commune de [Localité 14], à parfaire au jour du partage ;
- débouté M. [T] [O] de sa demande de voir fixer au passif de l'indivision une créance à l'égard de Mme [S] [F] pour le financement du tracteur de marque FIAT ;
- arrêté l'existence d'une créance de Mme [S] [F] à l'égard de M. [T] [O] pour l'acquisition de la [Adresse 21] ;
- fixé à l'actif de l'indivision existant entre les parties :
* la valeur de la parcelle -section B [Cadastre 4] - [Localité 22] - d'une contenance de 01 ha 53 a et 57 ca,
* le solde créditeur du compte joint ABS n° [XXXXXXXXXX01] à hauteur de la somme de 31 728,96 € ,
* le véhicule Mercedes immatriculé [Immatriculation 15] pour une valeur nulle,
*la parcelle de terre cadastrée section B n° [Cadastre 4] -[Localité 22]- pour une contenance de 01 ha 53 a 57 ca,
* les intérêts de consignation du prix de vente de l'immeuble indivis, séquestré chez le notaire commis jusqu'au jour du partage ;
- dit qu'il appartiendra au notaire commis pour procéder aux opérations de liquidation et partage d'évaluer la valeur vénale de la parcelle de terre cadastrée section B n° [Cadastre 4] -[Localité 22]- pour une contenance de 01 ha 53 a 57 ca dans les conditions de l'article 829 du code civil ;
- rejeté la demande d'une avance sur liquidation de 240 000 € pour chaque partie sur les fonds bloqués ;
- l'Infirme en ce qu'il a :
- rejeté la demande de M. [T] [O] de voir fixer sa créance à l'égard de Mme [S] [F] à hauteur de 25 154,09 € au titre du financement des parts sociales de l'EARL de [Localité 17] ;
- arrêté à la somme de 99 360,03 € la créance de M. [T] [O] au titre de l'acquisition du [Adresse 20] ;
- arrêté à la somme de 561 500 € la créance de Mme [S] [F] au titre de l'acquisition de la [Adresse 21]
- intégré à l'actif de l'indivision la parcelle section B n° [Cadastre 16] -La prairie de [Localité 14]- pour une contenance de 47 a 60 ca ;
et statuant à nouveau des seuls chefs infirmés :
- Fixe à la somme de 25 154,09 € la créance de M. [T] [O] à l'égard de Mme [S] [F] au titre du financement des parts sociales de l'EARL de [Localité 17] ;
- Fixe à la somme de 266 689,69 € la créance de M. [T] [O] à l'égard de Mme [S] [F] au titre de l'acquisition du [Adresse 20] ;
- Dit qu'il appartiendra au notaire commis pour procéder aux opérations de liquidation et partage de réévaluer le profit subsistant pour Mme [S] [O] dans l'acquisition de la [Adresse 21] au titre des terrains restés en possession de M. [T] [O] ;
- Constate que la parcelle section B n° [Cadastre 16] -La prairie de [Localité 14]- pour une contenance de 47 a 60 ca n'appartient plus à l'indivision et dit n'y avoir lieu à l'intégrer à la masse active de l'indivision ;
et y ajoutant :
- Dit que le notaire commis devra actualiser le décompte des intérêts du prix séquestré de la vente du [Adresse 20] à compter de l'année 2014 et jusqu'au jour du partage ;
- Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Ordonne l'emploi des dépens en frais généraux de partage et supportés par les co-indivisaires proportionnellement à leur part dans l'indivision.
L'arrêt a été signé par A.TESSIER-FLOHIC , Président et par Mme MAGIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,
S.MAGISA.TESSIER-FLOHIC