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12/05/2022 | FRANCE | N°21/00454

France | France, Cour d'appel de Bourges, 1ère chambre, 12 mai 2022, 21/00454


CR/RP



















































































COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- Me Dominique LACROIX

- Me Florence BOYER





LE : 12 MAI 2022

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE



ARRÊT DU 12 MAI 2022



° 252 - 7 Pages





N° RG 21/00454 - N° Portalis DBVD-V-B7F-DLAV



Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de NEVERS en date du 17 Février 2021



PARTIES EN CAUSE :



I - M. [R] [S]

né le 10 Juillet 1952 à ST ETIENNE (42000)

55 route de Corcelles

58180 MARZY



- Mme [W] [T] épouse [S]

née le 27 Mars 1953 à ST ETIENNE (42000)

55 route de Corcelle...

CR/RP

COPIE OFFICIEUSE

COPIE EXÉCUTOIRE

à :

- Me Dominique LACROIX

- Me Florence BOYER

LE : 12 MAI 2022

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 12 MAI 2022

N° 252 - 7 Pages

N° RG 21/00454 - N° Portalis DBVD-V-B7F-DLAV

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal Judiciaire de NEVERS en date du 17 Février 2021

PARTIES EN CAUSE :

I - M. [R] [S]

né le 10 Juillet 1952 à ST ETIENNE (42000)

55 route de Corcelles

58180 MARZY

- Mme [W] [T] épouse [S]

née le 27 Mars 1953 à ST ETIENNE (42000)

55 route de Corcelles

58180 MARZY

Représentés par Me Dominique LACROIX, avocat au barreau de BOURGES

timbre fiscal acquitté

APPELANTS suivant déclaration du 22/04/2021

INCIDEMMENT INTIMÉS

II - S.A. CAISSE D'EPARGNE DE BOURGOGNE FRANCHE COMTE, agissant poursuites et diligences de son représentant légal pris en son siège social :

1 Rond Point de la Nation - BP 23088

21088 DIJON CEDEX 9

N° SIRET : 352 483 341

Représentée par Me Florence BOYER, avocat au barreau de NEVERS

timbre fiscal acquitté

INTIMÉE

INCIDEMMENT APPELANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Mars 2022 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. PERINETTI, Conseiller chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. WAGUETTEPrésident de Chambre

M. PERINETTIConseiller

Mme CIABRINIConseiller

***************

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme MAGIS

***************

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

**************

Exposé :

[W] [S] et [R] [S] ont souscrit auprès de la Caisse d'Epargne et de prévoyance de Bourgogne les trois prêts suivants :

- un prêt numéro 3250018 d'un montant de 45 000 € en date du 17 mai 2007 ayant fait l'objet d'un avenant le 22 juillet 2013

- un prêt numéro 3064951 d'un montant de 186 176 € en date du 28 février 2006, ayant fait l'objet d'un avenant le 22 juillet 2013

- un prêt numéro 3269083 d'un montant de 60 000 € en date du 23 mai 2008, ayant fait l'objet d'un avenant le 22 avril 2010.

Monsieur et Madame [S] ont interpellé la Caisse d'Epargne sur les modalités de calcul des intérêts de leurs prêts.

Cette dernière leur a répondu par courrier du 3 novembre 2017 que le calcul des intérêts conventionnels était conforme.

Par acte du 20 juillet 2018, [W] et [R] [S] ont assigné la Caisse d'Epargne et de prévoyance de Bourgogne devant le tribunal judiciaire de Nevers, sollicitant principalement à titre principal que celui-ci déclare abusive la clause de stipulation des intérêts conventionnels des prêts et des avenants qui leur ont été consentis par la Caisse d'Epargne et prononce, en conséquence, la nullité des stipulations contractuelles relatives aux intérêts conventionnels avec substitution du taux d'intérêt légal et restitution des intérêts trop perçus et, à titre subsidiaire, ordonne la déchéance du droit aux intérêts conventionnels au détriment de la banque dans une proportion qui ne saurait être inférieure à 50 %.

Par jugement rendu le 17 février 2021, le tribunal a toutefois débouté Monsieur et Madame [S] de l'intégralité de leurs demandes, les condamnant aux dépens et rejetant, par ailleurs, la demande formée par la Caisse d'Epargne et de prévoyance de Bourgogne au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Monsieur et Madame [S] ont interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée le 22 avril 2021 et demandent à la cour, dans leurs dernières écritures en date du 16 juillet 2021 à la lecture desquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 du code de procédure civile, de :

- INFIRMER le jugement du Tribunal Judiciaire de Nevers en date du 17 février 2021 en toutes ses dispositions

STATUANT de nouveau :

- JUGER que les intérêts des prêts et de leurs avenants n'ont pas été calculés sur la base d'une année civile ;

- JUGER que les taux effectifs globaux mentionnés dans les offres de prêt et leurs avenants sont erronés de plus d'une décimale ;

PAR CONSÉQUENT :

- PRONONCER la déchéance du droit aux intérêts conventionnels et condamner la banque populaire à restituer la somme correspondant au trop perçu s'agissant des offres de prêt et leurs avenants ;

-CONDAMNER La Caisse d'Epargne à établir un nouveau tableau d'amortissement annuel :

Substituant au taux contractuel le taux légal année par année jusqu'à la fin du prêt ;

CONDAMNER la banque à leur payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

La Caisse d'Epargne de Bourgogne Franche-Comté, intimée et appelante incidente, demande quant à elle à la cour dans ses dernières écritures notifiées par RPVA le 13 octobre 2021, à la lecture desquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des moyens en application de l'article 455 précité, de :

Infirmer le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de NEVERS en date du 17 février 2021 en ce qu'il a :

-débouté la CAISSE d'EPARGNE de sa demande au titre des frais irrépétibles

Statuant à nouveau :

Condamner les époux [S] à payer à la CAISSE d'EPARGNE la somme de 2000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile

Confirmer le jugement querellé en ce qu'il a :

- débouté les époux [S] de l'ensemble de leurs demandes

- condamné ces derniers aux entiers dépens

En tout état de cause :

Condamner les époux [S] à verser à la CAISSE d'EPARGNE à la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel

Condamner les mêmes aux entiers dépens

Et dire que, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile, Maître Florence Boyer pourra recouvrer directement les frais dont il a fait l'avance sans en avoir reçu provision.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 15 février 2022.

SUR QUOI :

Il résulte de l'article L 312 - 8 du code de la consommation, dans sa rédaction issue de la loi du numéro 2010 - 737 du 1er juillet 2010, que l'offre de prêt doit comprendre, pour les offres de prêt dont le taux d'intérêt est fixe, un échéancier des amortissements détaillant pour chaque échéance la répartition du remboursement entre le capital et les intérêts et doit indiquer, outre le montant du crédit susceptible d'être consenti, et, le cas échéant, celui de ses fractions périodiquement disponibles, son coût total, son taux défini conformément à l'article L 313 - 1 ainsi que, s'il y a lieu, les modalités de l'indexation.

Selon l'article L 312 - 33 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi numéro 2014 - 344 du 17 mars 2014, le prêteur ou le bailleur qui ne respecte pas l'une des obligations prévues aux articles L 312 - 7 et L 312 - 8, à l'article L 312 - 14 deuxième alinéa ou à l'article L 312 - 26 pourra être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En application de l'article R 313 - 1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance numéro 2016 - 301 du 14 mars 2016, le taux effectif global est dénommé « taux annuel effectif global » et calculé à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires, selon la méthode d'équivalence définie par la formule figurant en annexe à cet article, laquelle prévoit que « l'écart entre les dates utilisées pour le calcul est exprimé en années ou en fractions d'années. Une année compte 365 jours ou, pour les années bissextiles, 366 jours, 52 semaines ou 12 mois normalisés. Un mois normalisé compte 30,4166 jours (c'est-à-dire 365/12), que l'année soit bissextile ou non » ; l'annexe à cet article prévoit, en outre, que « le résultat du calcul est exprimé avec une exactitude d'au moins une décimale ».

Il résulte de ces textes que la mention, dans une offre de prêt, d'un taux conventionnel calculé sur la base d'une année autre que l'année civile, est sanctionnée exclusivement par la déchéance du droit aux intérêts dans les termes de l'article L 312 - 33 du code de la consommation précitée, lorsque l'inexactitude du taux entraîne, au regard du taux stipulé, un écart supérieur à une décimale.

Il résulte, en l'espèce, des pièces versées aux débats que [W] [S] et [R] [S] ont souscrit auprès de la Caisse d'Epargne et de prévoyance de Bourgogne les trois prêts suivants :

- un prêt numéro 3250018 d'un montant de 45 000 € en date du 17 mai 2007 ayant fait l'objet d'un avenant le 22 juillet 2013, en vue du financement de travaux d'amélioration d'un immeuble situé sur la commune de Neussargues Moissac (17)

- un prêt numéro 3064951 d'un montant de 186 176 € en date du 28 février 2006, ayant fait l'objet d'un avenant le 22 juillet 2013, puis d'un nouvel avenant le 23 mai 2016, en vue de l'acquisition d'un logement neuf situé sur la commune de Fréjus (83)

- un prêt numéro 3269083 d'un montant de 60 000 € en date du 23 mai 2008, ayant fait l'objet d'un avenant le 22 avril 2010 puis de deux avenants respectivement les 3 juillet 2013 et 23 mai 2016, en vue de l'acquisition d'un logement situé sur la commune de Le Crest (63).

Ces contrats et avenants font apparaître la mention suivante : « durant le préfinancement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. Durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours. ».

Les appelants demandent à la cour de prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels après avoir retenu que ces derniers n'ont pas été calculés sur la base d'une année civile et que les taux effectifs globaux mentionnés dans les offres de prêt et leurs avenants sont erronés de plus d'une décimale ; il sera, à cet égard, remarqué, qu'ils ne sollicitent plus, comme cela était le cas devant le premier juge, qu'il soit dit que les clauses de stipulation des intérêts conventionnels présentent un caractère abusif dès lors qu'elles créent un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au sens des dispositions de l'article L 132 ' 1 du code de la consommation.

Au soutien de leurs prétentions, ils produisent un document de 47 pages intitulé « rapport d'analyses mathématiques sur une offre de prêt » établi de façon non contradictoire par la SASU LAURANAEL le 16 juin 2021, relatif à l'offre de prêt de 186 176 € et à ses avenants (pièce numéro 8) ainsi que deux autres rapports relatifs au prêt de 60 000 € (pièce numéro 17) ainsi qu'au prêt de 45 000 € (pièce numéro 24).

Les conclusions de ces documents - qui mêlent diverses considérations d'ordre juridique à des calculs purement mathématiques - sont les suivantes :

- S'agissant de l'offre de prêt numéro 3064951 en date du 28 février 2006 d'un montant de 186 176 € et de ses avenants : le taux de période réel, en tenant compte de tous les frais de dossier, s'établit à 0,39161864 % ; le TEG indiqué dans l'offre n'est pas calculé sur la base du montant exact des intérêts et n'a donc pas été calculé sur la base d'une année civile de 365 jours ; la différence entre les deux TEG ( TEG réel et celui indiqué par le prêteur) s'établit à 0,07 % (soit 4,777 - 4,70) ; cette différence entre le TEG réel et celui indiqué par le prêteur s'établit, de la même façon, à 0,07 % s'agissant de l'avenant en date du 8 juillet 2013 et de celui du 10 mai 2016 (respectivement : 4,4398 - 4,367 et 4,0294 - 3,963)

- S'agissant de l'offre de prêt numéro 3269083 d'un montant de 60 000 € en date du 23 mai 2008 et des avenants apportés à celle-ci en 2010, 2013 et 2016 : le taux de période réel, en tenant compte de tous les frais, s'établit à 0,4849623 % ; le TEG indiqué dans l'offre n'est pas calculé sur la base du montant exact des intérêts et n'a donc pas été calculé sur la base d'une année civile de 365 jours ; la différence entre les deux TEG (TEG réel et celui indiqué par le prêteur) s'établit à : 5,9165 - 5,82 = 0,0965 % ; la différence entre le TEG réel et le TEG indiqué par le prêteur s'établit respectivement, pour les avenants de 2010, 2013 et 2016 dont a fait l'objet ledit prêt, à 0,09 % (soit 5,5668 - 5, 48), 0,09 % (soit 5, 267 - 5,180) et 0,08 % (soit 5,0981 - 5,015)

- S'agissant de l'offre de prêt numéro 3250018 d'un montant de 45 000 € en date du 17 mai 2007 et de son avenant du 8 juillet 2013, le taux de période réel, en tenant compte de tous les frais, peut être déterminé à 0,4328503 % ; le TEG mentionné dans l'offre n'est pas calculé sur la base du montant exact des intérêts et n'a pas été calculé sur la base d'une année civile de 365 jours ; la différence entre le TEG réel et le TEG indiqué par le prêteur s'établit à 0,09 % (soit 5, 2807 - 5, 19) s'agissant de l'offre initiale et également à 0,09 % s'agissant de l'avenant (soit : 5, 245 - 5, 159).

Il résulte de l'ensemble de ces éléments, en tout état de cause, que l'écart entre le TEG réel et le TEG indiqué par la banque dans le contrat n'est pas supérieur à la décimale prescrite par l'ancien article R 313 ' 1 du code de la consommation précitée.

En conséquence, les demandes de Monsieur et Madame [S], tendant à ce qu'il soit jugé que « les taux effectifs globaux mentionnés dans les offres de prêt et leurs avenants sont erronés de plus d'une décimale » et que soit prononcée la déchéance du droit aux intérêts conventionnels avec condamnation de la banque à établir un nouveau tableau d'amortissement annuel substituant au taux contractuel le taux légal, ne pourront qu'être rejetées.

Le jugement dont appel devra donc, pour ces motifs, être confirmé, y compris en ce qu'il a rejeté la demande de la Caisse d'Epargne de Bourgogne Franche-Comté formée au titre des frais irrépétibles exposés en première instance.

L'équité commandera, en outre, d'allouer à la Caisse d'Epargne de Bourgogne Franche-Comté une indemnité d'un montant de 1500 € au titre des frais irrépétibles que cette dernière a dû exposer en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme le jugement entrepris

Y ajoutant

Déboute Monsieur et Madame [S] de l'intégralité de leurs demandes

Condamne Monsieur et Madame [S] à verser à la Caisse d'Epargne de Bourgogne Franche-Comté une indemnité de 1500 € sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Condamne Monsieur et Madame [S] aux dépens de l'instance d'appel et autorise Maître Florence Boyer, avocat, à recouvrer directement ceux dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision préalable et suffisante.

L'arrêt a été signé par L.WAGUETTE, Président et par Mme MAGIS, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

S.MAGISL. WAGUETTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bourges
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21/00454
Date de la décision : 12/05/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-05-12;21.00454 ?
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