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14/12/2007 | FRANCE | N°389

France | France, Cour d'appel de bourges, Chambre sociale, 14 décembre 2007, 389


SD/NV

R.G : 07/00208

Décision attaquée :

du 24 mai 2006

Origine : conseil de prud'hommes de BOURGES

M. Hamid X...

C/

Société MANUFACTURE DE PNEUMATIQUES MICHELIN

Société ADECCO T.T.

Notification aux parties par expéditions le : 14/12/2007

copie - exp. - grosse

Me NONIN 14.12.07

Me TANTON 14.12.07

MeVACCARO 14.12.07

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2007

No 389 - 8 Pages

APPELANT :

Monsieur Hamid X...

...

18000 BO

URGES

Représenté par Me Serge NONIN (avocat au barreau de BOURGES)

INTIMÉES :

Société MANUFACTURE DE PNEUMATIQUES MICHELIN

B.P. 30

Rue des deux Ponts

18230 ST DOULCHARD

Représ...

SD/NV

R.G : 07/00208

Décision attaquée :

du 24 mai 2006

Origine : conseil de prud'hommes de BOURGES

M. Hamid X...

C/

Société MANUFACTURE DE PNEUMATIQUES MICHELIN

Société ADECCO T.T.

Notification aux parties par expéditions le : 14/12/2007

copie - exp. - grosse

Me NONIN 14.12.07

Me TANTON 14.12.07

MeVACCARO 14.12.07

COUR D'APPEL DE BOURGES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 14 DÉCEMBRE 2007

No 389 - 8 Pages

APPELANT :

Monsieur Hamid X...

...

18000 BOURGES

Représenté par Me Serge NONIN (avocat au barreau de BOURGES)

INTIMÉES :

Société MANUFACTURE DE PNEUMATIQUES MICHELIN

B.P. 30

Rue des deux Ponts

18230 ST DOULCHARD

Représentée par Me Alain TANTON, membre de la SCP POTIER, LAJOINIE-FONSAGRIVE, MONNOT, TANTON, FLEURIER et MORLON (avocats au barreau de BOURGES)

Société ADECCO T.T.

Les Terrasses d'Auron

12 rue Barbès

18000 BOURGES

Représentée par Mme TRANQUET, directrice d'agence, assistée de Me François VACCARO (avocat au barreau de TOURS) substitué par Me Sonia FUSCO, membre du cabinet VACCARO (avocate au barreau de PARIS)

14 décembre 2007

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats et du délibéré :

PRÉSIDENT : Mme VALLÉE

CONSEILLERS : Mme GAUDET

Mme BOUTET

GREFFIER D'AUDIENCE : Mme DELPLACE

DÉBATS : A l'audience publique du 16 novembre 2007, le président ayant pour plus ample délibéré, renvoyé le prononcé de l'arrêt à l'audience du 14 décembre 2007 par mise à disposition au greffe.

ARRÊT : contradictoire - Prononcé publiquement le 14 décembre 2007 par mise à disposition au greffe.

* * * * *

Monsieur Hamid X... a été embauché le 22 AVRIL 2002 par la SA ADECCO TRAVAIL TEMPORAIRE en qualité de monteur et mis à la disposition de la MANUFACTURE FRANÇAISE DES PNEUMATIQUES MICHELIN pour plusieurs missions d'intérim jusqu'au 25 JUILLET 2003, pour accroissement temporaire d'activité.

Monsieur X... a saisi le conseil de prud'hommes le 23 JUIN 2005 pour obtenir la requalification des missions d'intérim en contrat à durée indéterminée, voir dire que la rupture s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur et la société utilisatrice à lui verser une indemnité de requalification, l'indemnité de préavis et les congés payés, des dommages-intérêts pour licenciement abusif ainsi que pour non respect de la procédure de licenciement, outre une indemnité sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Par jugement du 24 MAI 2006, dont Monsieur X... a interjeté appel, le conseil de prud'hommes de BOURGES a retenu que les contrats avaient été régulièrement conclus pour des tâches précises et ponctuelles ayant pour cause un surcroît d'activité et a rejeté ses demandes.

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Les parties ont développé oralement leurs conclusions écrites au détail desquelles il est renvoyé et dont il résulte en substance ce qui suit :

Monsieur X... fait valoir que le nouveau type de pneumatiques mis au point par MICHELIN selon le système PAX avait été lancé dès 1998 et a équipé progressivement les grandes marques alors que ses missions se sont étalées d'AVRIL 2002 à JUILLET 2003. Un accroissement temporaire d'activité sur sept ans est donc exclu et ses contrats s'inscrivent en réalité dans un accroissement durable et constant de l'activité de l'entreprise, étant observé que le programme PAX existe toujours et que son lancement s'inscrit dans ce cadre général.

Par ailleurs, le salarié soutient ne pas avoir été affecté uniquement au programme PAX, sur lequel il a exercé son activité de monteur du 22 AVRIL au 21 DECEMBRE 2002, et qu'il a ensuite été affecté au montage comme monteur manutentionnaire puis en qualité de doseur gel-système PAX.

Il observe que MICHELIN ne produit aucun document concernant l'activité et permettant de justifier la charge de travail invoquée.

Monsieur X... fait encore valoir que les dispositions de l'article L 124-3 du code du travail n'ont pas été respectées et que la signature tardive d'un contrat de mission doit conduire à la requalification demandée.

La rupture de la relation de travail, intervenue sans respect des formes légales, s'analyse dans ces conditions comme un licenciement abusif.

Monsieur X... conclut en définitive à la condamnation des sociétés ADECCO et MICHELIN, ou l'une à défaut de l'autre, à lui verser :

- 1 467, 54 € à titre d'indemnité de requalification,

- 1 243, 78 € à titre d'indemnité de préavis et 124, 37 € au titre des congés payés,

- 14 800 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive et remise tardive des documents de rupture,

- 1 243, 78 € à titre de dommages-intérêts pour non respect de la procédure,

- 1 525 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

La MANUFACTURE FRANÇAISE DES PNEUMATIQUES MICHELIN réplique que tous les contrats de mission ont été conclus dans le cadre de la mise en production d'un nouveau produit PAX ayant nécessité diverses mises au point, avec un début de fabrication de type artisanal avant d'aboutir à une production en série. Les trois premiers contrats visent directement le poste de

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monteur PAX, le quatrième se justifie par la mise en place d'un système de surveillance et de vérification de pression des pneus ainsi fabriqués et le cinquième constitue la poursuite des activités antérieures. La société maintient que le véritable démarrage de la fabrication de pneus PAX SYSTEM a démarré pendant l'année 2002 pour équiper la voiture RENAULT SCENIC, après une période de mise au point ayant débuté en 1999, mais que cette situation n'a pas perduré puisqu'en 2003 cette fabrication a diminué de 83 % et le client RENAULT n'a pas renouvelé ses commandes, ce qui a conduit à la fin des missions de Monsieur X.... La fabrication des ensembles PAX a pris fin pour l'établissement MICHELIN de BOURGES après le 26 JUILLET 2003. Il ne s'agissait donc pas d'un accroissement durable et constant de son activité, étant précisé que celui-ci s'apprécie sur le site de BOURGES et non au niveau de la production mondiale de l'entreprise.

L'activité de Monsieur X... a coïncidé avec les premiers montages en 2002. La mise au point et le lancement d'un nouveau produit, même s'ils se placent au sein de l'activité normale et usuelle de l'unité où ont été affectés les intérimaires, constituent une charge de travail inhabituelle ne pouvant être absorbée par le personnel en place et justifient le recours à des contrats d'intérim.

Le libellé des contrats signés par Monsieur X... vise pour les deux premiers expressément la production et le montage de pneus PAX, le troisième "les ensembles montés" vise aussi les pneus PAX ainsi qu'il ressort de la description précise du poste, peu important qu'il s'agisse de postes différents à partir du moment où ils se situent dans cette chaîne de fabrication, le quatrième contrat vise la vérification de la conformité de ces pneus après deux ou trois jours de stockage, le cinquième vise la mise au point de nouvelles dimensions pour le montage de ces pneus sur différents véhicules.

Le défaut de respect du délai de carence entre les missions ne peut conduire à la requalification sollicitée dans la mesure où il ne figure pas dans les causes limitativement énumérées par l'article L 124-7 du code du travail.

Contrairement à ce qu'affirme le salarié, tous les contrats ont été signés dans les deux jours suivant leur entrée en vigueur.

Enfin, la société MICHELIN ne saurait être tenue pour responsable d'un quelconque retard dans la remise des documents de rupture qui revient à la société ADECCO.

L'intimée conclut donc à la confirmation pure et simple du jugement.

La SA ADECCO TRAVAIL TEMPORAIRE rétorque pour sa part que les griefs formulés par Monsieur X... visent la validité des motifs des contrats et qu'elle doit être mise hors de

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cause à ce titre, étant observé qu'il peut être pourvu à l'activité cyclique de l'entreprise par le recours à l'intérim, le caractère exceptionnel du surcroît d'activité n'étant pas nécessaire, que le non respect du délai de carence n'est pas une cause de requalification, que subsidiairement les demandes indemnitaires de Monsieur X... ne sont pas justifiées.

Tous les contrats de mission ont été établis parallèlement aux contrats de mise à disposition et adressés au salarié qui s'est contenté de ne pas retourner deux avenants de renouvellement . Or l'absence de signature des contrats, s'ils ont bien été établis et adressés au salarié, n'est pas susceptible d'entraîner la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée. Monsieur X... a été régulièrement payé et n'a jamais contesté son travail d'intérim. Sa demande de ce chef doit donc être rejetée.

La SA ADECCO TRAVAIL TEMPORAIRE conclut en conséquence à la confirmation du jugement et sollicite 3 000 € pour procédure abusive, la demande étant peu motivée avec peu de pièces au soutien, notamment au regard de la situation actuelle, et 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

SUR CE

Attendu qu'il résulte de l'article L 124-2 du code du travail que le contrat de travail temporaire ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice, qu'un utilisateur ne peut faire appel à des salariés intérimaires que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire dénommée mission, seulement pour les cas énumérés à l'article L 124-2-1, notamment en cas d'accroissement temporaire d'activité ;

Attendu qu'en l'espèce le motif du recours au travail temporaire est l'accroissement temporaire d'activité mentionné dans tous les contrats de mise à disposition de Monsieur X... à la société MICHELIN ;

qu'ils précisent :

- celui du 22 AVRIL 2002 et son renouvellement du 3 MAI 2002 : formation au poste monteur PAX suite à nouvelle production PAX client RENAULT pour respecter délai réduit,

- celui du 27 MAI 2002 et son renouvellement du 20 JUIN 2002 : suite à nouvelle production PAX client RENAULT pour respecter délai réduit,

- celui du 19 AOUT 2002 et son renouvellement du 20 SEPTEMBRE 2002 : dû à prise en compte nouvelle dimension sur

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ensembles montés nécessitant renfort de personnel pour respecter délai réduit,

- celui du 2 JANVIER 2003 : dû à mise au point prototypes de traitement non conformités marche courante nécessitant renfort de personnel,

- celui du 1er MAI 2003 : dû à mise au point pour nouvelles dimensions pour LANCIA, BMW, ROLLS et RENAULT nécessitant un renfort de personnel;

que cependant la société MICHELIN ne produit aucun élément au soutien de ses affirmations concernant le système PAX et son évolution entre 2002 et 2003, de nature à conforter sa position suivant laquelle sa mise en place générait un accroissement temporaire d'activité ; qu'en effet elle ne communique qu'un tableau récapitulatif émanant du directeur du site de BOURGES sur l'affaiblissement de la production du site entre 2002 et 2003, dépourvu de force probante suffisante ;

que dans ces conditions le jugement doit être infirmé et qu'il sera fait droit à la demande de requalification et d'indemnité subséquente qui sera fixée à un mois de salaire sur la base du dernier salaire soit 1 266, 94 € ;

Attendu que la rupture intervenue à l'issue du dernier contrat s'analyse comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse ni respect de la procédure de licenciement ;

qu'il sera fait droit à la demande de versement de l'indemnité de préavis et des congés payés afférents, dont le montant n'est pas contesté ;

que le préjudice subi par Monsieur X... sera indemnisé, au regard de son ancienneté et des circonstances de la cause, par l'allocation de 5 200 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la rupture abusive et 1 000 € en réparation de celui né du défaut de respect de la procédure ;

Attendu que les dispositions de l'article L 124-7 du code du travail qui sanctionnent l'inobservation par l'entreprise utilisatrice des dispositions des articles L 124-2 à L 124-2-4 n'excluent pas la possibilité pour le salarié d'agir contre l'entreprise de travail temporaire pour obtenir sa condamnation in solidum avec l'entreprise utilisatrice, lorsque les conditions, à défaut desquelles toute opération de prêt de main d'oeuvre est interdite, n'ont pas été respectées ;

qu'en l'espèce le seul élément invoqué par Monsieur X... est l'absence de signature du contrat dans le délai de 48 heures suivant la mise à disposition du salarié ainsi que prévu par l'article L 124-3 du code du travail ;

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que cependant l'analyse des contrats de mise à disposition et des avenants fait ressortir que tous les documents ont été signés en temps utile par les deux sociétés ;

qu'en effet le contrat signé le 28 JUIN 2002 est l'avenant prolongeant le contrat ayant débuté le 27 MAI et prorogé à compter du 1er JUILLET 2002, celui signé le 20 SEPTEMBRE 2002, l'avenant prolongeant le contrat du 19 AOÛT et prorogé à compter du 23 SEPTEMBRE 2002 ; que le salarié ne prétend pas ne pas les avoir reçus dans le délai ainsi redéfini ;

qu'en l'absence d'élément de fait, la demande de condamnation in solidum des deux intimées doit donc être rejetée ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que Monsieur X... n'a pas poursuivi de procédure abusive et que la demande à ce titre doit être rejetée ;

Attendu que la MANUFACTURE FRANÇAISE DES PNEUMATIQUES MICHELIN, qui succombe, supportera les dépens et versera à Monsieur X... 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;

qu'il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de la SA ADECCO TRAVAIL TEMPORAIRE de ce dernier chef ;

PAR CES MOTIFS :

LA COUR

STATUANT publiquement et contradictoirement,

INFIRMANT le jugement,

ORDONNE la requalification des contrats de travail temporaire de Monsieur X... en contrat à durée indéterminée et DIT que la rupture de la relation de travail produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE en conséquence la MANUFACTURE FRANÇAISE DES PNEUMATIQUES MICHELIN à verser à Monsieur X... :

- 1 266, 94 € à titre d'indemnité de requalification,

- 1 243, 78 € à titre d'indemnité de préavis et 124, 37 € au titre des congés payés,

- 5 200 € à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive,

- 1 000 € pour défaut de respect de la procédure de rupture,

- 1 200 € sur le fondement de l'article 700 du NCPC,

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REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la MANUFACTURE FRANÇAISE DES PNEUMATIQUES MICHELIN aux entiers dépens,

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Mme VALLÉE, président, et Mme DELPLACE, greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE, LE PRÉSIDENT,

S. DELPLACE N. VALLÉE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 389
Date de la décision : 14/12/2007
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION - Travail temporaire - Contrat de mission - Validité - Conditions - Inobservation - Recours du salarié - Etendue - / JDF

Les dispositions de l'article L 124-7 du Code du Travail qui sanctionnent l'inobservation par l'entreprise utilisatrice des dispositions des articles L 124-2 à L 124-2-4 n'excluent pas la possibilité pour le salarié d'agir contre l'entreprise de travail temporaire pour obtenir sa condamnation in solidum avec l'entreprise utilisatrice, lorsque les conditions, à défaut desquelles toute opération de prêt de main d'oeuvre est interdite, n'ont pas été respectées. Le seul élément invoqué par l'intérimaire est l'absence de signature du contrat dans le délai de 48 heures suivant la mise à disposition du salarié ainsi que prévu par l'article L 124-3 du code du travail. Cependant l'analyse des contrats de mise à disposition et des avenants fait ressortir que tous les documents ont été signés en temps utile par les deux sociétés et que le salarié ne prétend pas ne pas les avoir reçus dans le délai ainsi redéfini. En l'absence d'élément de fait, la demande de condamnation in solidum des deux intimées doit donc être rejetée.


Références :

Décision attaquée : Conseil de prud'hommes de Bourges, 24 mai 2006


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bourges;arret;2007-12-14;389 ?
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