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07/04/2006 | FRANCE | N°JURITEXT000006950108

France | France, Cour d'appel de bourges, Chambre sociale, 07 avril 2006, JURITEXT000006950108


Madame Martine X... a été embauchée le 5 JUIN 1977 en qualité de secrétaire comptable par la société PERRIN.

Cette dernière a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de BOURGES Le 12 MARS 2004. La SARL PERRIN ALUMINIUM a présenté le 24 MARS 2004 une proposition de reprise du fonds de commerce, des actifs et du personnel qui a été agréée par le juge commissaire.

Madame X... a été convoquée le 19 MAI 2004 à un entretien fixé au 27 MAI avec le responsable de la SAS HOLDING FERMETURES, entretien au cours duquel lui a été proposé u

n emploi à temps partiel dans cette société qu'elle a refusé par courriers des 17...

Madame Martine X... a été embauchée le 5 JUIN 1977 en qualité de secrétaire comptable par la société PERRIN.

Cette dernière a fait l'objet d'une liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de BOURGES Le 12 MARS 2004. La SARL PERRIN ALUMINIUM a présenté le 24 MARS 2004 une proposition de reprise du fonds de commerce, des actifs et du personnel qui a été agréée par le juge commissaire.

Madame X... a été convoquée le 19 MAI 2004 à un entretien fixé au 27 MAI avec le responsable de la SAS HOLDING FERMETURES, entretien au cours duquel lui a été proposé un emploi à temps partiel dans cette société qu'elle a refusé par courriers des 17 JUIN et 22 JUILLET 2004.

Elle a été convoquée le 26 JUILLET 2004 à l'entretien préalable à son licenciement fixé au 2 AOUT suivant et a été licenciée pour motif économique le 9 AOUT 2004.

Madame X... a saisi le conseil de Prud'hommes le 13 SEPTEMBRE 2004 pour obtenir des rappels de salaires et les congés payés afférents, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et une indemnité sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

Par jugement du 1er JUIN 2005, dont les parties ont interjeté appel, le conseil de prud'hommes de BOURGES a déclaré le licenciement de Madame X... nul au motif que la cession du fonds de commerce n'est intervenue que par acte notarié du 19 NOVEMBRE 2004 et que ce licenciement aurait dû être conduit par la liquidation judiciaire. Il a donc rejeté les demandes de la salariée.

Les parties ont développé oralement à l'audience leurs conclusions écrites au détail desquelles il est renvoyé et dont il résulte en substance ce qui suit :

Madame X... fait valoir qu'elle effectuait 169 heures de travail

par mois, horaire commun à l'ensemble du personnel, et n'a pas été rémunérée à partir du mois d'AVRIL de ses heures supplémentaires, qu'elle n'a pas accepté de travailler à temps partiel pour le compte de la SAS HOLDING FERMETURES. Elle sollicite donc l'allocation d'un rappel de 292, 73 ç par mois, soit un total de 2 049, 11 ç jusqu'au mois d'OCTOBRE 2004, outre 204, 91 ç au titre des congés payés.

L'employeur, qui avait repris son contrat de travail par application des dispositions de l'article L 122-12 du Code du travail, lui a proposé une modification dudit contrat, d'une part en envisageant son passage au sein d'une autre société, la SAS HOLDING FERMETURES, d'autre part, en lui offrant un travail à temps partiel. Elle était libre d'accepter ou de refuser. L'employeur ayant décidé de procéder à son licenciement pour motif économique devait mettre en place les mesures de reclassement, ce qu'il a omis de faire, la modification proposée ne pouvant en tenir lieu. Le poste d'assistante à temps plein occupé par Madame Y..., embauchée en JUILLET 2004, pouvait lui être proposé. Par ailleurs, la motivation de la lettre de licenciement fait état de mesure d'économie dans le souci d'une réorganisation rentable de la société alors que le licenciement pour motif économique ne peut être envisagé que dans le cadre de la sauvegarde de la compétitivité, et non dans celui d'une économie, et que ni l'employeur, ni son groupe ne justifient de la nécessité d'une telle sauvegarde. L'ordre des licenciements n'a pas été bien appliqué dans la mesure où la catégorie des employés à laquelle elle appartenait devait comporter plusieurs personnes.

L'allégation suivant laquelle elle n'aurait pas rempli en totalité des fonctions de secrétaire comptable est erronée, notamment au regard des tâches énumérées qui ne lui revenaient pas en totalité.

Madame X... demande en définitive la condamnation de la SARL PERRIN ALUMINIUM à lui verser :

- 84 340, 44 ç à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1 525 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

La SARL PERRIN ALUMINIUM réplique que sa proposition de reprise du personnel portait sur les 17 salariés étant précisé que deux d'entre eux seraient repris par une autre société du groupe (PLASTIFERM ou HOLDING FERMETURES)

L'employeur fait valoir que Madame X... n'a pas été licenciée pour avoir refusé la modification de son contrat de travail, qui devait se poursuivre en application des dispositions de l'article L 122-12 du Code du travail, ce qui ne lui interdisait cependant pas de proposer une modification ou de procéder à un licenciement pour motif économique. Conformément à son offre de reprise, elle a proposé un reclassement à la salariée à l'intérieur du groupe puis l'a licenciée pour sauvegarder sa compétitivité. Le poste de l'intéressée a bien été supprimé et elle n'a pas été remplacée par Mademoiselle Y..., assistante technique et commerciale, et non secrétaire comptable, étant précisé que toute la comptabilité du groupe a été centralisée sur un seul poste au sein de la SAS HOLDING FERMETURES. L'offre d'un emploi dans cette dernière société constitue une proposition de reclassement et non une modification du contrat de travail. Pour les raisons précédemment évoquées le poste de Mademoiselle Y..., embauchée pour réaliser des études analytiques dans le suivi des chantiers, ne pouvait être offert à Madame X..., qui avait clairement indiqué qu'elle voulait conserver les mêmes fonctions qu'antérieurement. Enfin, l'ordre des licenciements ne peut être contesté puisque la SA PERRIN n'employait qu'une personne en qualité de secrétaire administrative et comptable.

Sur la demande de rappel de salaire, la société fait valoir qu'au moment de la reprise Madame X... a établi une fiche pour chaque

salarié indiquant les principaux éléments de rémunération et notamment pour elle-même un salaire sur la base de 151, 67 heures par semaine. Les heures supplémentaires n'étaient donc pas contractualisées et l'intéressée n'a jamais fait état d'heures supplémentaires dans ses envois à l'expert comptable, d'autant que le service administratif manquait de travail. La note de service du 14 AVRIL 2004 qu'elle invoque était affichée dans l'atelier et non dans le service administratif. L'attestation contraire produite par la salariée, irrégulière en la forme, doit être écartée.

Madame X... doit donc être déboutée de ses demandes et condamnée à verser à la SARL PERRIN ALUMINIUM 500 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC.

SUR CE

Attendu que s'agissant du même litige, il convient de prononcer la jonction des instances inscrites au rôle de la Cour d'Appel sous les numéros 05/01056 et 05/01129 ;

1. Sur la demande de rappel de salaire

Attendu qu'il ressort des bulletins de salaire produits que jusqu'au 31 MARS 2004 Madame X... a été rémunérée sur la base d'un salaire de 2 050 ç par mois pour 151, 67 heures, avec une majoration de 25 % pour heures supplémentaires ;

que la note de service no2004/002 du 14 AVRIL 2004 prévoit que l'horaire hebdomadaire serait dorénavant de 39 heures ;

qu'est portée la mention manuscrite non contestée "valable pour tout le personnel" ;

que dans ces conditions, Madame X... devait être rémunérée sur la base de ces 39 heures hebdomadaires et percevoir la majoration de 25 % attachée aux heures supplémentaires, peu important les mentions qu'elle a pu porter sur les documents adressés à l'expert comptable qui ne sauraient engager l'employeur ;

qu'il sera donc fait droit à la demande ;

2. Sur le licenciement

Attendu que la requête présentée par la SCP LEDEUR-PONROY ès qualités prévoit que la SARL PERRIN ALUMINIUM, en cours de formation, offre d'acquérir le fonds de commerce, les véhicules, le stock, de la SA PERRIN en liquidation judiciaire et, au titre des mesures sociales, propose de reprendre l'intégralité du personnel conformément aux dispositions de l'article L 122-12 du Code du travail ;

que la salariée, sans être contredite sur ce point, indique que le juge commissaire a rendu une ordonnance conforme, étant observé qu'aucune des parties ne produit cette décision ;

que dans ces conditions il ne peut en aucun cas être retenu que, selon la requête telle qu'elle a été acceptée, deux des salariés devaient se voir proposer un poste par la société PLASTIFERM ou la SAS HOLDING FERMETURES, quand bien même la société repreneuse l'avait indiqué dans son offre initiale et avait spécialement insisté sur ce point auprès du juge commissaire, rien ne permettant d'exclure des tractations ayant mené à un accord sur les termes de la requête présentée par le mandataire judiciaire ;

Attendu que l'autorisation du juge commissaire emporte transfert au cessionnaire de l'entité économique autonome constituée par l'entreprise cédée, donc transfert des contrats de travail à cette même date ;

que la nullité du licenciement au motif que le liquidateur avait seul compétence pour y procéder ne peut donc être retenue et que le jugement doit être infirmé sur ce point ;

Attendu que par courrier du 19 MAI 2004, la SARL PERRIN ALUMINIUM a convoqué Madame X... "dans le cadre de la reprise des actifs de la SA PERRIN, conformément à notre offre du 19 MARS 2004, traitant ainsi du reclassement d'une partie du personnel...afin de pratiquer une

mise au point de (sa) fonction actuelle dans l'établissement et de proposer un poste au sein de la SA HOLDING FERMETURES" ;

qu'il a déjà été rappelé que le juge commissaire n'a pas limité son autorisation à une cession d'actifs et que la requête à laquelle il a fait droit faisait état d'une reprise de la totalité du personnel ;

que l'employeur ne pouvait donc se réclamer d'un reclassement autorisé dans le cadre de la procédure collective ;

Attendu que la proposition dite de reclassement visant un transfert de la salariée à un autre employeur, pour un travail à temps partiel, faite par courriers des 11 et 24 JUIN 2004 porte en réalité sur une modification du contrat de travail, conforme à l'offre de cession initiale non homologuée;

que du reste le courrier du 24 JUIN prévoit un délai de réflexion d'un mois, le silence valant acceptation, conformément aux dispositions de l'article L 321-1-2 du Code du travail ;

que l'emploi du terme de reclassement par la salariée dans ses courriers de refus ne suffit pas à donner une qualification juridique à la proposition en cause ;

que le refus d'une telle modification ne dispense pas l'employeur de satisfaire à son obligation de reclassement ;

qu'il ne rapporte pas la preuve d'une telle démarche ;

Attendu que, suivant l'article L 321-1 du Code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une transformation ou d'une suppression d'emploi ou d'une modification refusée par le salarié, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ;

que la réorganisation de l'entreprise ne peut constituer un motif économique que si elle est effectuée pour sauvegarder sa compétitivité;

Attendu que la lettre de licenciement de Madame X..., qui fixe les limites du litige, mentionne, outre le refus de l'offre dite de reclassement, que par mesure d'économie dans le souci d'une réorganisation rentable de la société, le poste de secrétaire comptable est supprimé, qu'il n'est pas possible de trouver une autre fonction que celle figurant dans l'offre du 11 JUIN précédent, que malgré sa qualification la salariée ne faisait pas un travail correspondant au poste de secrétaire comptable, la comptabilité devant être sous-traitée à un cabinet comptable et un emploi à temps complet n'étant ainsi pas justifié ;

que le motif allégué, soit une meilleure rentabilité de l'entreprise, ne saurait justifier un licenciement pour motif économique ;

que le licenciement se trouve donc dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

Attendu qu'au regard des circonstances de la cause, notamment les conditions de la reprise de la SA PERRIN et l'ancienneté de Madame X..., le préjudice de celle-ci sera indemnisé par l'allocation de 50 000 ç ;

Attendu que la salariée présentait plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise comptant plus de11 salariés et que sera donc ordonné le remboursement des indemnités de chômage éventuellement versées dans la limite de trois mois ;

Attendu que la SARL PERRIN ALUMINIUM, qui succombe, supportera les dépens et versera à Madame X... 1 000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

STATUANT publiquement et contradictoirement,

Prononce la jonction, sous le numéro 05/01056, des procédures inscrites au rôle de la Cour d'Appel sous les numéros 05/01056 et 05/01129,

INFIRMANT le jugement,

DIT que le licenciement de Madame X... dépourvu de cause réelle et sérieuse,

CONDAMNE la SARL PERRIN ALUMINIUM à lui verser :

- 50 000 ç à titre de dommages-intérêts,

- 2 049, 11ç à titre de rappel de salaire et 204, 91 ç au titre des congés payés,

- 1 000 ç sur le fondement de l'article 700 du NCPC,

ORDONNE le remboursement par la SARL PERRIN ALUMINIUM à l'organisme concerné des indemnités de chômage éventuellement versées à Madame X... dans la limite de trois mois,

REJETTE les demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la SARL PERRIN ALUMINIUM aux entiers dépens.

Ainsi fait, jugé et prononcé les jour, mois et an que dessus ;

En foi de quoi, la minute du présent arrêt a été signée par Madame VALLEE, Président, et Madame SOUCHAY, Greffier. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, M-F Z... N. VALLEE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006950108
Date de la décision : 07/04/2006
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bourges;arret;2006-04-07;juritext000006950108 ?
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