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23/03/2001 | FRANCE | N°00/01892

France | France, Cour d'appel de bourges, Chambre sociale, 23 mars 2001, 00/01892


FAITS ET PROCEDURE

Madame X... est entrée au service de l' A.S.A.V.P.A, en qualité de secrétaire dactylo à compter du 1er mai 1983 d'abord par contrat à durée déterminée puis par contrat à durée indéterminée.

Le 22 décembre 1998 elle a fait l'objet d'un licenciement économique motivé par la réorganisation et la redéfinition des missions de l' Association, limitées au développement, par la rupture de la convention passée entre l' Association et la Chambre d ' Agriculture, et par la suppression de la subvention allouée par cette Chambre à l' Association, le

tout entraînant la suppression du poste de secrétaire.

Contestant cette décisio...

FAITS ET PROCEDURE

Madame X... est entrée au service de l' A.S.A.V.P.A, en qualité de secrétaire dactylo à compter du 1er mai 1983 d'abord par contrat à durée déterminée puis par contrat à durée indéterminée.

Le 22 décembre 1998 elle a fait l'objet d'un licenciement économique motivé par la réorganisation et la redéfinition des missions de l' Association, limitées au développement, par la rupture de la convention passée entre l' Association et la Chambre d ' Agriculture, et par la suppression de la subvention allouée par cette Chambre à l' Association, le tout entraînant la suppression du poste de secrétaire.

Contestant cette décision, Mme X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Châteauroux pour obtenir un solde d'indemnité de licenciement ainsi que des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement du 5 octobre 2000, le Conseil a considéré que le licenciement était abusif et a condamné l' A.S.A.V.P.A à payer à Mme X... la somme de 152 452 F à titre de dommages et intérêts (17 mois de salaire), ainsi que celle de 2 000 F par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

L' A.S.A.V.P.A a régulièrement interjeté appel de ce jugement, dont Mme X... est également appelante à titre incident, sur le montant des dommages et intérêts. MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Y... l'appui de son recours, l' Association appelante soutient que ses difficultés financières, loin d'être temporaires, sont au contraire permanentes et graves, que du fait du retrait d'une partie des missions par la Chambre d' Agriculture le poste de Mme X... n'avait plus de raison d'être, les tâches résiduelles de secrétariat pouvant être confiées à l'autre salariée Mme Y... qui a également pris en charge la nouvelle mission de développement. Elle ajoute que si la Chambre d'

Agriculture a passé avec elle une nouvelle convention, c'est uniquement dans le cadre de cette nouvelle mission, les anciennes missions de formation et d'emploi ayant définitivement disparu.

Elle fait par ailleurs valoir qu'elle a recherché à reclasser Mme X... au sein de la Chambre d' Agriculture mais en vain, et que cette salariée ne pouvait se voir confier le poste nouveau nécessité par la redéfinition de la mission, exigeant autonomie et rigueur.

Elle estime donc que c'est à tort que les Premiers Juges ont considéré que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse, et elle demande à la Cour d'infirmer leur décision en déboutant Mme X... de sa demande de dommages et intérêts.

Subsidiairement, pour le cas où la Cour considérerait que le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, elle soutient que ce serait alors à tort que Mme X... aurait perçu l'indemnité conventionnelle de licenciement majorée prévue en cas de licenciement économique et qu'elle n'aurait droit qu'à l'indemnité légale, d'où un trop perçu par elle de 79 713, 92 F, dont elle sollicite le remboursement. Elle considère également que Mme X... ne justifie pas d'un préjudice permettant l'octroi de 17 mois de salaire à titre de dommages et intérêts et demande à la Cour dans le même cadre subsidiaire de réduire l'indemnité qui lui a été allouée par les Premiers Juges.

Elle réclame enfin, par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité de 3 000 F.

Madame X... fait au contraire valoir que contrairement à ce que soutient l' Association appelante, les missions traditionnelles de celle-ci n'ont pas entièrement changé, que aussitôt après l'expiration de son préavis, une nouvelle convention a été signée entre la Chambre d' Agriculture et l' Association et qu'une salariée, jusqu'alors en C.E.S puis en C.E.C, a été embauchée définitivement, en qualité de

"gestionnaire de mission", dont la qualification de base est ignorée, et dont il n'est absolument pas démontré qu'elle ait des compétences supérieures aux siennes ni qu'elle accomplisse des tâches très différentes de celles qui lui avaient été jusqu'alors confiées.

Elle demande par conséquent à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse.

En revanche elle sollicite une élévation des dommages et intérêts pour tenir compte de son importante ancienneté et elle réclame à ce titre la somme de 215 227 F.

En ce qui concerne l'indemnité conventionnelle de licenciement, elle soutient que dès lors que l'employeur s'est prévalu d'un motif économique, il doit assumer les conséquences de cette position, peut important que le motif économique invoqué soit ou non valable. Elle demande par conséquent à la Cour de confirmer sur ce point également le jugement déféré.

Enfin elle réclame une indemnité de 3 000 F par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. MOTIFS DE LA DECISION

1° - Sur le licenciement

Le licenciement de Mme X... est essentiellement motivé par la rédéfinition des missions de l'Association, ainsi que par la perte de la subvention versée chaque année par la Chambre d' Agriculture, elle même consécutive à la rupture de la convention liant l' Association à la Chambre.

En ce qui concerne le premier point, il doit être rappelé que l'employeur, parce qu'il doit exécuter de bonne foi le contrat de travail, a le devoir d'adapter le salarié aux mutations qui affectent son emploi, par tout moyen nécessaire. En l'espèce l' A.S..A.V.P.A ne démontre absolument pas que Mme X... aurait été incapable, au prix si

nécessaire d'une formation, de s'adapter aux nouvelles tâches qui auraient pu être les siennes dans le cadre des nouvelles missions, étant précisé qu'en tout état de cause ces missions quelles qu'elles soient génèrent des travaux administratifs pour lesquels la compétence de Mme X... ne saurait être remise en cause. En soutenant que le "nouveau profil de poste" requiert rigueur et autonomie (soit) et en affirmant, sans nullement le démontrer, que de telles qualités seraient étrangères à Mme X... , l' A.S.A.V.P.A procède par pure pétition de principe et ne justifie pas, bien au contraire, avoir rempli l'obligation d'adaptation qui lui incombe. De plus, pour remplir ce nouveau poste, l' Association, prétendument incapable de faire face aux charges générées par le salaire de Mme X... , n'a pas hésité à embaucher définitivement une autre salariée qui n'occupait jusqu'alors qu'un emploi précaire, et ce dès le 31 mai 1999, soit avant même l'expiration du préavis de Mme X... Z... entendu il n'est aucunement justifié des compétences spéciales de cette salariée et d'une qualification supérieure à celle de la salariée licenciée. Le premier motif de licenciement est donc totalement dénué de sérieux.

Le second motif l'est tout pareillement. En effet d'une part les difficultés de l' Association ne l'ont pas empêché d'embaucher Mme Y... (voir ci-dessus) dès le 31 mai 1999. D'autre part la rupture de la convention, loin d'avoir été imposée unilatéralement par la Chambre d' Agriculture, a été décidée d'un commun accord entre les présidents de chacun des organismes en cause, accord formalisé le 30 novembre 1998, le jour même ou Mme X... a été convoquée à l'entretien préalable au licenciement. Enfin cette rupture annoncée à Mme X... "pour l'année 1999 et les années ultérieures" n'a en réalité été que fort temporaire puisque dès le 12 juillet 1999 une nouvelle convention a été signée entre les mêmes présidents avec effet rétroactif au 1er janvier 1999, prévoyant une subvention certes inférieure à celle qui

était versée jusque là mais cette subvention ayant expressément pour objet de financer le poste nouvellement créé.

Par ailleurs, l'employeur n'a nullement satisfait à son obligation de reclassement et les observations faites plus haut relativement à l'absence de toute tentative d'adaptation de Mme X... au nouveau poste sont également valables de ce point de vue.

C'est donc à fort juste titre que les Premiers Juges ont considéré que le licenciement était radicalement dénué de cause réelle et sérieuse. L'appréciation qu'ils ont faite du préjudice de Mme X... , salariée ancienne littéralement évacuée au profit d'une salariée plus jeune, est exacte et doit être confirmée.

2° - Sur l'indemnité de licenciement

Ce n'est pas sans une certaine audace que l'employeur, qui s'est volontairement placé sur le terrain économique, entend tirer profit de l'absence de motif réel et sérieux pour priver Mme X... de la majoration prévue par la Convention Collective en cas de licenciement économique. Il lui sera rappelé que le défaut de réalité et de sérieux du motif économique invoqué ne fait pas perdre au licenciement son caractère économique, et, d'une manière plus générale, que nul n'est admis à se prévaloir de sa propre turpitude...

Le jugement déféré doit donc être confirmé de ce chef également.

3° - Sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens :

L' A.S.A.V.P.A succombant en son recours sera condamnée aux dépens d'appel et dès lors déboutée de la demande qu'elle a fondée sur l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. Elle devra verser à Mme X... , par application de ce texte, une indemnité de 1 000 F.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, en matière

sociale et après en avoir délibéré,

En la forme, déclare recevables aussi bien l'appel principal que l'appel incident ;

Au fond, confirme intégralement le jugement déféré ;

Y ajoutant,

Condamne l' A.S.A.V.P.A à payer à Mme X... la somme de 1 000 F soit 152.45 euros par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

La déboute de la demande qu'elle a formée sur le même fondement ;

La condamne aux dépens du recours.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00/01892
Date de la décision : 23/03/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement économique - Cause - Cause réelle et sérieuse - Motif économique - Défaut

Lorsque l'employeur a prononcé un licenciement pour motif économique, il doit assumer toutes les conséquences de son choix, même si par la suite le juge prud'homal retient que le licenciement prononcé est sans cause réelle et sérieuse. Il doit en particulier si le montant de l'indemnité de licenciement est majoré dans le cadre d'un licenciement économique, verser l'indemnité majorée


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bourges;arret;2001-03-23;00.01892 ?
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