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26/01/2001 | FRANCE | N°00/1206

France | France, Cour d'appel de bourges, Chambre sociale, 26 janvier 2001, 00/1206


FAITS ET PROCEDURE

Monsieur Philippe X... a été embauché par la Société SOFRADECOR le 9 mars 1998 en qualité de "directeur des ventes export". Le 21 juillet 1999, il a été licencié au motif de la suppression du poste en question, elle même nécessitée par les très faibles résultats obtenus depuis la création de ce poste. Il a été dispensé d'exécuter le préavis d'une durée de trois mois expirant le 22 octobre 1999.

Contestant cette décision, M. X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Nevers pour obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cau

se réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour non respect de la procédure de...

FAITS ET PROCEDURE

Monsieur Philippe X... a été embauché par la Société SOFRADECOR le 9 mars 1998 en qualité de "directeur des ventes export". Le 21 juillet 1999, il a été licencié au motif de la suppression du poste en question, elle même nécessitée par les très faibles résultats obtenus depuis la création de ce poste. Il a été dispensé d'exécuter le préavis d'une durée de trois mois expirant le 22 octobre 1999.

Contestant cette décision, M. X... a saisi le Conseil de Prud'hommes de Nevers pour obtenir des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, un complément d'indemnité de préavis jusqu'au 16 novembre 1999, avec congés payés et prorata de 13ème mois, un rappel de salaire et de congés payés, le montant de la participation.

Par jugement du 5 juin 2000, le Conseil, considérant que le licenciement litigieux présentait un caractère économique et qu'il était dénué de cause réelle et sérieuse, a condamné la Société SOFRADECOR à payer à M. X... la somme de 100 000 F à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et celle de 8 000 F à titre de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement, mais a débouté le demandeur de ses autres prétentions.

La Société SOFRADECOR a régulièrement interjeté appel de cette décision, dont Monsieur X... est également appelant à titre incident. MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

A l'appui de son recours, la Société appelante soutient que M. X..., qui n'ignorait pas que son activité n'apportait rien au développement de l'entreprise, était tout à fait d'accord pour le licenciement et avait parfaitement conscience que son poste, sans aucune utilité pour la société, ne pouvait être conservé. Elle ajoute que contrairement à

ce qu'il soutient, M. X... n'a aucunement été remplacé au sein de l'entreprise, et elle soutient qu'il n'y avait aucun moyen de le reclasser à un poste correspondant à ses compétences. Elle demande par conséquent à la Cour de réformer le jugement en ce qu'il a fait droit à la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Subsidiairement, elle sollicite la minoration des dommages et intérêts, et, admettant que le défaut de mention de la priorité de réembauchage dans la lettre de licenciement est susceptible d'avoir causé un préjudice au salarié, elle ne s'oppose pas à la réparation de ce préjudice, par l'octroi d'une indemnité n'excédant pas un mois de salaire.

En ce qui concerne la procédure de licenciement, tout en reconnaissant que le délai devant séparer l'entretien préalable du licenciement n'a pas été respecté, elle demande à la Cour de proportionner les dommages et intérêts au préjudice réellement subi, qu'elle considère comme infime.

Au sujet du préavis, elle rappelle que ce préavis n'est pas suspendu pendant la période de congés payés, et elle demande à la Cour de débouter M. X... de sa demande de complément de préavis.

Elle ajoute que M. X... a été absent pour convenance personnelle pendant trois jours au cours du mois de juillet 1999, et qu'il ne saurait dès lors prétendre au salaire correspondant à ces trois journées.

Monsieur X... demande au contraire à la Cour de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a considéré que son licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse et fait valoir à cet effet que d'une part son poste n'a pas été réellement supprimé, que d'autre part aucun reclassement dans l'entreprise n'a été tenté ni même envisagé, qu'enfin aucune mention n'a été faite dans la lettre de licenciement de la priorité de réembauchage qui de surcroît a été

bafouée. Mais il estime que son préjudice a été sous-estimé par les Premiers Juges et il demande à la Cour d'élever à 117 000 F les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de lui allouer en outre une indemnité de 36 000 F en réparation du préjudice subi par le défaut d'indication dans la lettre de licenciement de la priorité de réembauchage et par la violation de cette priorité.

En ce qui concerne la procédure de licenciement, il rappelle son caractère irrégulier et estime qu'une indemnité de 18 000 F, supérieure à celle fixée par les Premiers Juges, doit lui être allouée à ce titre.

Il considère par ailleurs que le préavis est suspendu pendant la période de congés payés et soutenant que ces congés ont commencé à courir à compter du 16 juillet 1999, il demande à la Cour de dire, contrairement aux Premiers Juges, que ce préavis doit être prorogé jusqu'au 16 novembre et qu'il doit par conséquent bénéficier d'un complément d'indemnité de préavis pour la période du 22 octobre 1999 au 16 novembre 1999, soit la somme de 14 400 F à laquelle il lui demande d'ajouter celle de 1440 F à titre de congés payés, celle de 1 183,56 F à titre de prorata de 13 ème mois et celle de 662 F à titre de rappel d'indemnité de licenciement.

Il nie avoir été absent pendant 3 jours en juillet 1999 et demande par conséquent à la Cour de faire droit à sa demande de rappel de salaire pour un montant de 2 449,50 F, outre les congés payés pour 244,95 F.

Il soutient que lui restent dus 7 jours de congés payés et il réclame à ce titre la somme de 5 040 F.

Il fait encore valoir que la Société SOFRADECOR étant tenue de respecter les dispositions législatives relatives à la participation, doit lui remettre une attestation mentionnant ses droits à ce titre,

et il demande à la Cour d'ordonner la remise de cette attestation sous astreinte de 1 000 F par jour de retard à compter du 15 ème jour suivant la notification de l'arrêt à intervenir.

Il sollicite également la délivrance d'une attestation ASSEDIC rectifiée sous astreinte de 300 F par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt.

Il réclame enfin une indemnité de 8 000 F par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1 - Le licenciement

Ainsi que l'on fait pertinemment remarquer les Premiers Juges, il existe une incontestable ambigu'té dans le motif de licenciement, qui semble résider dans la suppression d'un poste (motif économique) elle même due aux mauvais résultats du salarié (motif personnel). Quoiqu'il en soit du motif réel, il n'est pas établi que l'activité de M. X..., auquel aucun quota n'avait été imposé, ait été insuffisante. Par ailleurs, au sujet du reclassement de l'intéressé, la société appelante ne procède que par affirmation et ne justifie en rien des efforts qu'elle aurait du mettre en oeuvre pour opérer ou tenter d'opérer ce reclassement.

C'est donc à juste titre que les Premiers Juges ont estimé que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse.

En revanche, l'appréciation qu'ils ont faite du préjudice de M. X... est quelque peu exagérée si l'on tient compte da la très faible ancienneté de l'intéressé. Il conviendra de limiter à 60 000 F le montant de ces dommages et intérêts.

Par ailleurs, il est constant que la lettre de licenciement ne fait pas mention de la priorité de réembauchage. Il s'agit d'une irrégularité qui a inévitablement causé un préjudice à M. X..., même

s'il n'établit pas la violation à proprement parler de cette priorité, et qu'il convient de réparer par l'allocation d'une indemnité de 18 000 F.

Il est pareillement constant que la procédure de licenciement est entachée d'une double irrégularité : délai insuffisant entre la convocation à l'entretien préalable et cet entretien lui-même ( 2 jours seulement ce qui ne peut être considéré comme un délai raisonnable), délai insuffisant entre l'entretien préalable et le prononcé du licenciement. Le préjudice résultant de cette double irrégularité a été correctement apprécié par les Premiers Juges dont la décision ne doit pas être remise en cause sur ce point.

2 - le préavis

Il résulte d'une attestation versée aux débats par M. X... qu'au moment où le licenciement a été prononcé, le personnel de la Société SOFRADECOR était en congés payés. Contrairement à ses allégations, cette société ne rapporte pas la preuve contraire. Il s'en suit que le licenciement a été notifié en période de congés payés, de telle sorte que le préavis n'a pu commencer à courir que du jour où le congé annuel a pris fin. Il importe peu à cet égard que l'employeur ait dispensé le salarié de l'exécution du préavis. C'est donc à juste titre que M. X... sollicite un complément d'indemnité compensatrice et à tort que les Premiers Juges, dont la décision devra être réformée sur ce point, l'ont débouté de cette demande. Il y sera par conséquent fait droit et la Société SOFRADECOR sera condamnée à lui payer la somme de 14 400 F, à laquelle il convient d'ajouter celle de 1 440 F à titre de congés payés, celle de 1 183,56 F à titre de prorata de 13 ème mois, et enfin celle de 662 F à titre de complément d'indemnité de licenciement.

3 - Le rappel de salaire

Il n'est nullement démontré par la Société SOFRADECOR que M. X...

n'aurait pas travaillé, à sa demande, pendant 3 jours en juillet 1999. C'est donc à juste titre qu'il réclame le rappel de salaire correspondant, soit la somme de 2 449,50 F, à laquelle il convient d'ajouter celle de 249,95 F à titre de congés payés.

4 - Le rappel de congés payés

Le décompte établi par M. X... n'établit nullement qu'il n'aurait pas été rempli de ses droits à congés payés, les bulletins de salaire permettant au contraire d'établir qu'il a bénéficié de tels congés. C'est par conséquent à juste titre qu'il a été débouté de cette demande.

5 - La participation

Il résulte des termes de l'article R 442-6 du Code du Travail que les tribunaux compétents pour connaître des litiges relatifs à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise sont les Tribunaux d'Instance et de Grande Instance, en fonction du montant de la demande. Le Conseil de Prud'hommes n'est donc pas compétent pour connaître des demandes relatives à cette participation, ce qu'il conviendra de dire en désignant, eu égard au caractère indéterminée de la demande (remise d'attestation) le Tribunal de Grande Instance de Nevers.

6 - La remise d'une attestation ASSEDIC rectifiée

Cette attestation n'est pas véritablement erronée, et la délivrance d'une attestation rectifiée ne s'impose nullement.

7 - L'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et les dépens

La société SOFRADECOR, qui succombe dans la plus grande partie de son appel, sera tenue des dépens du recours, et devra être condamnée à payer à M. X..., par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, une indemnité de 4 000 F.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Statuant publiquement, contradictoirement, en matière sociale et après en avoir délibéré,

En la forme, déclare recevable tant l'appel principal que l'appel incident ;

Au fond,

Confirme le jugement déféré sur le principe de la condamnation à dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sur l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile et sur les dépens ;

Le réforme sur le surplus, et

Statuant à nouveau,

- Condamne la société SOFRADECOR à payer à M. X... la somme de 60 000 F (soit 9 146,94 euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

- La condamne à lui payer la somme de 18 000 F (soit 2 744,08 euros) à titre de dommages et intérêts pour non indication dans la lettre de licenciement de la priorité de réembauchage ;

- La condamne à lui payer la somme de 14 400 F(soit 2 195,27 euros) à titre de rappel d'indemnité de préavis, outre celle de 1 440 F (soit 219,53 euros) à titre de congés payés sur rappel d'indemnité de préavis, celle de 1 183,56 F (soit 180,43 euros) à titre de rappel de 13 ème mois, et de 662 F(soit 100,92 euros) à titre de complément d'indemnité de licenciement ;

- La condamne à lui payer la somme de 2 449,50 F (soit 373,42 euros) à titre de rappel de salaire de juillet 1999, outre celle de 244,95 F (soit 37,34 euros) à titre de congés payés ;

- Se déclare incompétente pour statuer sur les demandes relatives à la participation et désigne le tribunal de grande instance de Nevers pour connaître de ces demandes ;

- Déboute M. X... du surplus de ses demandes ;

Ajoutant au jugement déféré,

Condamne la Société SOFRADECOR à payer à M. X... la somme de 4 000 F (soit 609,80 euros)par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

La condamne aux dépens du recours.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00/1206
Date de la décision : 26/01/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Salaire - Participation aux résultats de l'entreprise

Il résulte des termes de l'article R 442-6 du Code du travail que les tribunaux compétents pour connaître des litiges relatifs à la participation des salariés aux résultats de l'entreprise sont les tribunaux d'instance et de grande instance, en fonction du montant de la demande. Le conseil de prud'hommes n'est donc pas compétent pour connaître des demandes relatives à cette participation, en l'espèce eu égard au caractère indéterminée de la demande, il convient de désigner le tribunal de grande instance territorialement compétent


Références :

Article R 442-6 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bourges;arret;2001-01-26;00.1206 ?
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