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12/01/2001 | FRANCE | N°00/00910

France | France, Cour d'appel de bourges, Chambre sociale, 12 janvier 2001, 00/00910


Par jugement en date du 17 avril 2000, le Conseil de Prud'hommes de BOURGES a condamné la société DAUPHIN à payer à son ex salarié Monsieur X... les sommes de : * 27 231, 36 Francs à titre d'indemnité de préavis; * 2 723, 13 Francs à titre de congés payés y afférents ; * 72 843, 88 Francs à titre d'indemnité de licenciement ; * 82 200 Francs à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; * 2 500 Francs par application de l'article 700 du N.C.P.C.

La même décision a débouté les parties de toutes leurs autres demandes.

Le

29 mai 2000, la société DAUPHIN a relevé appel de cette décision, dont elle sollic...

Par jugement en date du 17 avril 2000, le Conseil de Prud'hommes de BOURGES a condamné la société DAUPHIN à payer à son ex salarié Monsieur X... les sommes de : * 27 231, 36 Francs à titre d'indemnité de préavis; * 2 723, 13 Francs à titre de congés payés y afférents ; * 72 843, 88 Francs à titre d'indemnité de licenciement ; * 82 200 Francs à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; * 2 500 Francs par application de l'article 700 du N.C.P.C.

La même décision a débouté les parties de toutes leurs autres demandes.

Le 29 mai 2000, la société DAUPHIN a relevé appel de cette décision, dont elle sollicite de la Cour la réformation en ce qu'elle a fait droit aux demandes de son adversaire.

Elle fait valoir en effet que c'est à tort et par des motifs dépourvus de pertinence que les premiers juges ont estimé que le licenciement de Monsieur X... ne procédait d'aucun motif réel et sérieux, alors qu'il ressort de l'étude attentive des pièces produites que d'une part la procédure de licenciement a été tout à fait régulière, que d'autre part, il est parfaitement fallacieux de soutenir que la rupture est intervenue à la suite d'un licenciement verbal et enfin que la réalité et la gravité des fautes commises par Monsieur X... ne sont ni discutables ni au demeurant discutées.

Elle demande en conséquence à la Cour de débouter Monsieur X... de l'ensemble de ses demandes et de le condamner à lui restituer la somme de 29 954, 49 Francs versée au titre de l'exécution attachée au premier jugement.

A titre infiniment subsidiaire, elle fait observer que Monsieur X... ne justifie en aucune manière du préjudice qu'il prétend avoir subi.

Elle invite enfin la Cour à lui allouer la somme de 10 000 Francs par application de l'article 700 du N.C.P.C.

Monsieur X... réplique que le jugement doit être confirmé en son principe, car il a à très juste titre retenu qu'il avait fait l'objet d'un licenciement verbal le 2 novembre 1999, comme l'établit un constat d'huissier ; tout en relevant qu'il conteste absolument les faits qui lui sont reprochés, il note que l'attitude de son employeur qui lui a permis de poursuivre ses activités tout en le rémunérant lui interdit de soutenir devant la Cour l'existence d'une faute grave.

Formant un appel incident, il invite la Cour à porter le montant des dommages et intérêts devant lui revenir à la somme de 326 776 Francs, arguant de l'extrême gravité du préjudice qu'il a subi.

Il revendique l'application à son profit des dispositions de l'article 700 du N.C.P.C. jusqu'à concurrence de 10 000 Francs. SUR QUOI LA COUR

Attendu qu'il convient de se référer pour un exposé complet des faits et plus ample des moyens et prétentions des parties aux énonciations du premier jugement et aux écritures en cause d'appel oralement développées.

Attendu que devant la Cour, il y a lieu d'observer que Monsieur X... ne remet pas en cause la décision des premiers juges en ce que d'une part, elle l'a débouté de sa demande en paiement d'une prime et d'autre part a rejeté sa demande pour non respect de la procédure de licenciement. Attendu qu'ainsi reste seulement en litige la légitimité de son licenciement.

Attendu que pour retenir que Monsieur X... avait été congédié abusivement, les premiers juges ont mis en évidence que son contrat de travail avait été rompu verbalement le 2 novembre 1999.

Mais attendu que cette affirmation méconnaît la réalité de la

situation.

Attendu qu'en effet, il ne peut être oublié que le 27 octobre 1999, soit plusieurs jours avant l'incident du 2 novembre 1999 sur lequel il sera revenu, la société DAUPHIN a rédigé une lettre de licenciement à l'encontre de Monsieur X... et lui a adressé le même jour celle-ci.

Attendu que pour des raisons qui ne sont pas imputables à la société DAUPHIN, ce courrier, qui à en croire l'enveloppe produite a fait l'objet d'une première présentation infructueuse (comme l'atteste la mention "à représenter"), n'a pu être remis à son destinataire que le 4 novembre 1999.

Attendu que la réalité de la décision de l'employeur et de la matérialisation de celle-ci par la rédaction de la lettre de licenciement avant l'incident du 2 novembre 1999 ne peut être discutée.

Attendu que le seul fait que l'employeur ait refusé certes par des formules maladroites de laisser Monsieur X... effectuer sa prestation de travail est tout à fait insuffisant pour établir la réalité d'un licenciement verbal, alors qu'il est établi par ailleurs qu'une lettre de licenciement avait été rédigée et expédiée plusieurs jours auparavant.

Attendu qu'en outre, aucune disposition n'interdit à un employeur qui a adressé une lettre de congédiement non encore réceptionnée de dispenser le salarié de sa prestation de travail, tout en ayant dans cette hypothèse l'obligation de le rémunérer jusqu'à la réception de la lettre en question ; que la Cour ne peut manquer de constater que la société DAUPHIN a adopté une telle attitude, les réponses faites à l'huissier devant être interprétées en ce sens.

Attendu qu'il découle de ces remarques que Monsieur X... ne peut avec efficacité soutenir qu'il a fait l'objet d'un licenciement

verbal, ipso facto sans cause réelle et sérieuse.

Attendu qu'il convient dés lors de rechercher si l'employeur sur qui pèse la charge de la preuve, puisqu'il s'est placé sur le terrain de la faute grave établit la réalité des faits fautifs allégués et leur gravité.

Attendu qu'au-delà des contestations de principe de Monsieur X..., la Cour ne peut manquer de constater qu'il ressort d'un constat d'huissier dont les mentions n'ont fait l'objet d'aucune observation que le salarié a procédé à l'affirmation mensongère de la pose d'une affiche le 11 octobre 1999, alors que cette pose n'a été en réalité effectuée que le 13 octobre 1999.

Attendu que la réalité du manquement de Monsieur X... à ses obligations contractuelles, mais également au principe de loyauté vis à vis de son employeur ne saurait être en conséquence discutée.

Attendu que de plus, il ne peut être contesté que le "retard" dans l'affichage ne peut manquer d'avoir des conséquences sur les relations entre la société DAUPHIN et ses clients qui tiennent au respect du calendrier de la pose des affiches, ne serait-ce que pour des raisons commerciales.

Attendu qu'ainsi, l'attitude de Monsieur X... ne saurait être admise et constituait pour l'employeur un motif légitime de mettre fin à son contrat de travail.

Attendu qu'il découle de ce constat que sa demande en dommages et intérêts est sans fondement, ce qui implique la réformation du jugement de ce chef.

Attendu que la société DAUPHIN soutient que Monsieur X... a commis une faute grave justifiant son licenciement sans indemnité et elle met en avant à l'appui de ses prétentions les dispositions contractuelles et du règlement intérieur.

Mais attendu que ce faisant, elle oublie que d'une part le contrat de

travail ne peut "pré-constituer" des motifs de licenciement et a fortiori des motifs de licenciement pour faute grave et que de plus ni le contrat, ni le règlement intérieur ne peuvent priver le juge prud'homal du pouvoir d'appréciation et de qualification que lui reconnaît l'article L.122-14-3 du Code du Travail.

Attendu que dés lors, il appartient à la Cour de rechercher si le manquement commis par Monsieur X... rendait impossible son maintient dans l'entreprise pendant la durée limitée du préavis.

Or attendu que la Cour ne peut que constater que la société DAUPHIN pourtant informée complètement des agissements du salarié dés le 13 octobre 1999 l'a laissé travailler sans la moindre réserve jusqu'au 3 novembre 1999, admettant ainsi sans la moindre équivoque que sa présence dans l'entreprise n'était en aucune manière insupportable et qu'il pouvait sans la moindre difficulté effectuer son préavis.

Attendu qu'ainsi, la faute grave n'est pas constituée et il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à Monsieur X... une indemnité de préavis (et les congés payés correspondants) et une indemnité de licenciement dont les montants n'ont fait l'objet d'aucune discussion.

Attendu que chacune des parties succombant, les dépens seront partagés par moitié entre elles.

Attendu que la prise en considération de la situation économique respective des parties et l'équité imposent de ne pas les faire bénéficier des dispositions de l'article 700 du N.C.P.C. devant la Cour. PAR CES MOTIFS La COUR, statuant en matière sociale, publiquement et contradictoirement après en avoir délibéré ; Reçoit les appels réguliers en la forme. Réformant le jugement, déboute Monsieur X... de sa demande en dommages et intérêts. Confirme le jugement en toutes ses autres dispositions. Déboute les parties de

toutes leurs autres demandes. Fait masse des dépens et dit qu'ils seront supportés par moitié par chacune des parties.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de bourges
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00/00910
Date de la décision : 12/01/2001
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Licenciement - Formalités préalables - Formalités prévues par une convention collective ou un règlement intérieur - Application

Le contrat de travail ne peut ni "pré-constituer" des motifs de licenciement et a fortiori des motifs de licenciement pour faute grave, ni priver le juge prud'homal du pouvoir d'appréciation et de qualification que lui reconnaît l'article L.122-14-3 du Code du travail


Références :

Article L122-14-3 du Code du travail

Décision attaquée : DECISION (type)


Composition du Tribunal
Président : Président : - Rapporteur : - Avocat général :

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.bourges;arret;2001-01-12;00.00910 ?
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