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11/07/2024 | FRANCE | N°21/03271

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 11 juillet 2024, 21/03271


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



--------------------------







ARRÊT DU : 11 JUILLET 2024







PRUD'HOMMES



N° RG 21/03271 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MEWS







Madame [Y] [B]





c/



S.A.S. OLEAD



Monsieur [G] [D]

Monsieur [K] [S]















Nature de la décision : AU FOND

















Gro

sse délivrée aux avocats le :





à :





Me Jérôme DELAS de la SELARL ATELIER AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

Me Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX





Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 mai 2021 (R.G. n°F 19/00442) par le Conseil de Prud'hom...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 11 JUILLET 2024

PRUD'HOMMES

N° RG 21/03271 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MEWS

Madame [Y] [B]

c/

S.A.S. OLEAD

Monsieur [G] [D]

Monsieur [K] [S]

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée aux avocats le :

à :

Me Jérôme DELAS de la SELARL ATELIER AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

Me Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 mai 2021 (R.G. n°F 19/00442) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Activités Diverses, suivant déclaration d'appel du 04 juin 2021.

APPELANTE :

[Y] [B]

née le 31 Août 1975 à [Localité 4]

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

Représentée par Me Jérôme DELAS de la SELARL ATELIER AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX substitué par Me GUERARD

INTIMÉE :

SAS Olead, placée en liquidation judiciaire, prise en la personne de ses liquidateurs amiables Monsieur [G] [D] et Monsieur [K] [S]

Ayant pour avocat postulant Me Daniel LASSERRE de la SELAS ELIGE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX

et pour avocat plaidant Me DUCELLIER de la SELAS ELIGE, avocat au barreau de BORDEAUX

INTERVENANTS :

[G] [D], ès qualités de liquidateur amiable de la SAS Olead, demeurant [Adresse 2]

[K] [S], ès qualités de liquidateur amiable de la SAS Olead, demeurant [Adresse 3]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 907 et 805 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 13 mai 2024 en audience publique, devant Madame Marie-Paule Menu, présidente chargée d'instruire l'affaire, et madame Valérie Collet, conseillère qui ont entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Marie-Paule Menu, présidente,

Madame Sophie Lésineau, conseillère,

Madame Valérie Collet, conseillère,

greffière lors des débats : Sylvaine Déchamps,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCEDURE

Mme [Y] [B] a été embauchée le 4 mai 1998 par la société Iterg en contrat à durée déterminée; après plusieurs renouvellements, la relation de travail s'est poursuivie en contrat à durée indéterminée à compter du 15 octobre 1999.

Le 9 octobre 2015, Mme [B] a été informée que le transfert de son contrat de travail auprès de la SAS Olead était envisagé. Mme [B] s'y est opposée et a été informée par un courrier du 28 janvier 2016 qu'elle retrouverait son poste au sein des laboratoires de la société Iterg.

Le 28 janvier 2016, l'activité Procédés et Prestations Technologiques de la société Iterg a été reprise par la société Olead.

Mme [B] a donné sa démission par un courrier du 12 février 2016, dans la perspective de son entrée dans la société Olead le 22 février suivant.

Suivant contrat en date du 9 février 2016, la société Olead a embauché Mme [Y] [B] en qualité de technicienne laboratoire expérimental et technicienne contrôle qualité à compter du 22 février 2016; le 1er juin 1999 a été retenu comme date d'ancienneté.

Mme [B] a été déclarée inapte à son poste le 9 mars 2018 par le médecin du travail qui a précisé au titre du reclassement ' pas de manutention ni port de charges'.

Mme [B] a été informée de l'impossibilité de procéder à son reclassement par un courrier du 25 avril 2018, convoquée à un entretien préalable à son licenciement éventuel fixé au 17 mai 2018 par un courrier du 26 avril 2018, licenciée en raison de son inaptitude et de l'impossibilité de procéder à son reclassement par un courrier du 22 mai 2018.

Considérant son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse en raison des manquements de l'employeur à l'obligation de reclassement, qu'elle avait été victime d'un traitement discriminatoire et qu'elle n'avait pas été entièrement remplie de ses droits en matière salariale, Mme [B] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux de diverses demandes en paiement par une requête reçue le 21 mars 2019.

La société Olead a été placée en liquidation judiciaire amiable le 24 janvier 2020.

Par jugement du 7 mai 2021, le conseil de prud'hommes de Bordeaux, après s'être déclaré compétent pour examiner la demande d'indemnisation formée au titre de la violation de l'obligation de sécurité, a :

- jugé le licenciement fondé,

- fixé le point de départ de l'ancienneté au 1er juin 1999,

- condamné la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à régler à Mme [B] 2 865,68 euros à titre de solde sur l'indemnité compensatrice de préavis et 286,56 euros pour les congés payés afférents,

- condamné la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à régler à Mme [B] 1 150 euros au titre de la médaille du travail,

- condamné la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à régler à Mme [B] 900 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [B] du surplus de ses demandes,

- ordonné la délivrance de bulletins de salaire rectifiés, sans astreinte,

- débouté la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables aux dépens.

Mme [B] en a relevé appel par une déclaration du 4 juin 2021, dans ses dispositions qui jugent le licenciement fondé, fixent le point de départ de l'ancienneté au 1er juin 1999, la déboutent de ses demandes en paiement de la somme de 25 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif, de la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et de la somme de 5 000 euros pour traitement discriminatoire.

La société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables a relevé appel incident par voie de conclusions dans ses dispositions qui déclarent le conseil de prud'hommes compétent, qui la condamnent à paiement au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et de la médaille du travail.

L'ordonnance de clôture est en date du 09 avril 2024.

L'affaire a été fixée à l'audience du 13 mai 2024, pour être plaidée.

PRETENTIONS ET MOYENS

Suivant ses dernières conclusions, transmises par voie électronique le 11 mars 2024, Mme [B] demande à la cour de:

- in limine litis, confirmer le jugement déféré dans ses dispositions qui déclarent le conseil de prud'hommes compétent pour connaître de sa demande en indemnisation du préjudice qui a résulté des manquements de l'employeur en matière de sécurité et d'aménagement raisonnable;

- réformer le jugement déféré dans ses dispositions qui jugent le licenciement fondé, fixent le point de départ de son ancienneté au 1er juin 1999 et la déboutent de ses demandes en paiement pour licenciement abusif, manquement à l'obligation de sécurité, traitement discriminatoire et solde de l'indemnité de licenciement; statuant à nouveau,

- juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à lui payer 25 000 euros, en application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail,

- juger que la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables a manqué à l'obligation de sécurité et à l'obligation d'aménagement de son poste de travail et la condamner à lui payer 5 000 euros de dommages et intérêts,

- juger que la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables a été défaillante au regard des dispositions de l'article L.1133-3 du code du travail et condamner la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à lui payer 5 000 euros de dommages et intérêts,

- juger que son ancienneté est établie au 4 mai 1998 et condamner la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à lui payer 1 610,62 euros à titre de solde sur l'indemnité de licenciement,

- ordonner la délivrance d'un bulletin de salaire rectifié, sous une astreinte définitive et comminatoire de 250 euros par jour de retard,

- en tout état de cause,

- confirmer les chefs du jugement expressement critiqués par l'intimée, en conséquence débouter l'intimée de l'ensemble de ses demandes et confirmer la décision déférée dans ses dispositions qui lui allouent le doublement de l'indemnité de préavis et le versement de la prime liée à la médaille du mérite,

- condamner la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à lui payer 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, - condamner la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables aux frais d'exécution.

Mme [B] fait valoir en substance que:

- la juridiction prud'homale est compétente pour connaître des demandes indemnitaires en réparation du préjudice qui a résulté de l'exposition à un risque dès avant un accident du travail ou une maladie professionnelle; en l'espèce, l'indemnisation qu'elle revendique a trait au préjudice qui a résulté des manquements de l'employeur à son obligation de sécurité antérieurement à l'accident du travail du 19 septembre 2017;

- à l'instar de la société Iterg qui n'a ni modifié ni adapté son poste en dépit de ses lomboscialtalgies récidivantes, la société Olead, bien que tenue, en raison de son statut de travailleur handicapé, à une obligation de moyens renforcée en application des dispositions de l'article L.5213-6 du code du travail et qui ne rapporte pas la preuve que toute autre mesure complémentaire aurait engendré un coût disproportionné, n'a en réalité pris aucune mesure concrète, l'embauche d'un intérimaire pour la période du 19 au 30 juin 2017, les consignes données à ses collègues pour qu'ils l'aident pour les opérations de chargement et de déchargement et la journée de formation aux gestes et postures dispensée au mois de juin 2017 soit seulement après la reconnaissance du statut de travailleur handicapé n'y suppléant pas; il en a résulté la dégradation de son état de santé;

- il convient en application des dispositions de l'article 10 de la convention collective applicable de fixer le point de départ de son ancienneté au 4 mai 1998, son passage de la société Iterg à la société Olead ayant été organisé en concertation avec le directeur des deux sociétés sans qu'il puisse être considéré qu'il a rompu le principe d'une présence continue;

- la société Olead, qui la savait éligible à la médaille du travail, s'est engagée durant l'entretien préalable à lui verser la prime qu'il était d'usage dans la société Iterg de règler aux salariés récipiendaires; le refus qu'elle lui a finalement opposé caractérise de sa part un manquement à l'obligation de loyauté qui incombe à l'employeur;

- elle n'a pas été entièrement remplie de ses droits au titre de l'indemnité compensatrice de préavis en ce que la prime d'ancienneté n'a pas été prise en compte pour fixer le salaire de référence, en ce que l'article 11 de l'accord du 10 mai 2011 relatif à l'emploi des personnes handicapées prévoit son doublement peu important les dispositions de l'article L.1226-14 du code du travail, en ce que le doublement n'est pas réservé au seul cas où le préavis est effectivement réalisé;

- l'absence de mesure concrète afin d'améliorer ses conditions de travail et la proposition en contradiction totale avec le respect de sa vie familiale que lui a faite l'empoyeur de modifier ses horaires de travail caractérisent un traitement discriminatoire;

- son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse faute pour l'employeur d'avoir mené une recherche loyale et sérieuse de reclassement en ce que la société Terres Inovia, du groupe Terres Inovia/ Terres Univia auquel la société Olead appartient, compte à elle seule 25 établissements actifs employant plus de 150 salariés et n'emploie pas uniquement des ingénieurs, en ce qu'il ne ressort d'aucun des éléments du dossier que le poste de technicien responsable production au sein de l'atelier de raffinage proposé au recrutement le 22 janvier 2018 par la société Olead avait été pourvu au jour de son licenciement, en ce que M. [E] dans un échange avec M. [S] et Mme [U] fait état d'un poste disponible au sein de son unité, aménageable et laissant ouvert la possibilité d'un temps partiel, en ce que la société Olead n'a jamais fait état dans ses courriers de recherche de son statut de travailleur handicapé lequel permet pourtant d'accéder à des postes réservés, en ce que son reclassement aurait également pu passer par une formation et l'obtention d'un BTS Métiers de la chimie par le biais d'une VAE justifiant de sa capacité à progresser, en ce que la société Olead reste taisante sur les raisons pour lesquelles il était impossible de la reclasser au sein de la société Iterg;

- il serait inéquitable qu'elle conserve la charge de ses frais irrépétibles.

Suivant ses dernières conclusions, responsives et récapitulatives n° 2, transmises par voie électronique le 8 avril 2024, la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables demande à la cour de:

- in limine litis, se déclarer incompétente pour examiner la demande formée au titre de la violation de l'obligation de sécurité et d'aménagement raisonnable au profit du pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux, et infirmer le jugement déféré sur ce point,

- subsidiairement,

- confirmer le jugement dans ses dispositions qui jugent que l'ancienneté de Mme [B] se décompte à compter du 1er juin 1999, qui déboutent Mme [B] de ses demandes indemnitaires au titre du bien fondé du licenciement, de l'obligation de sécurité et pour traitement discriminatoire,

- l'infirmer dans ses dispositions qui la condamnent à paiement et en conséquence débouter Mme [B] de ses demandes au titre du préavis et de médaille du travail,

- en tout état de cause, débouter Mme [B] de l'ensemble de ses demandes et la condamner à payer les dépens et la somme de 3 312 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables fait valoir en substance que:

- les demandes relevant de l'indemnisation des préjudices liés à l'application de la législation professionnelle étant de la compétence exclusive des pôles sociaux, le conseil de prud'hommes n'est pas compétent pour connaître de la demande indemnitaire formulée par Mme [B], victime d'un accident du travail, au titre d'un prétendu manquement à l'obligation de sécurité;

- elle n'a pas été informée des difficultés liées au port de charges avant l'avis d'aptitude du 6 mars 2017; une fois celles-ci portées à sa connaissance, elle a fait dispenser à Mme [B] une formation spécifique ' gestes et postures', recruté un travailleur pour la période du 19 au 30 juin 2017 soit le temps nécessaire pour lui permettre d'aménager le poste de travail de Mme [B], mis en place une mesure alternative d'aide par les collègues de Mme [B], laquelle n'a d'ailleurs formulé aucune doléance durant les trois mois qui ont précédé l'accident; Mme [B], qui ne travaillait pas le lendemain et dont un collègue était également présent, n'avait aucune raison de porter un seau de 18 kilos;

- Mme [B] ne peut pas valablement se prévaloir d'une présence continue depuis le 4 mai 1998 puisqu'elle a refusé que son contrat de travail au sein de la société Iterg soit transféré et a même démissionné le 12 février 2016; la reprise d'ancienneté au 1er juin1999 a été retenue d'un commun accord, donné sans réserve et n'a jamais été discutée durant la relation de travail;

- aucun texte légal ou disposition conventionnelle ne prévoit qu'elle doive règler une indemnité à un salarié ayant obtenu la médaille du travail; elle ne s'y est jamais engagée envers Mme [B], laquelle était en tout état de cause sortie de ses effectifs lorsqu'elle lui a été remise le 6 juillet 2018; la preuve contraire ne peut pas résulter du compte-rendu de l'entretien préalable dont Mme [B] se prévaut, qui ne comporte aucune signature et dont elle n'a pas approuvé le contenu;

- l'article 11 de l'accord de branche du 10 mai 2011 prévoyant le doublement de la durée du préavis pour les salariés handicapés dont le licenciement ne peut pas être évité s'applique uniquement à ceux d'entre eux qui effectuent réellement leur préavis

ou qui sont dispensés de l'exécuter par l'employeur; l'article L. 1226-14 exclut par ailleurs le doublement de l'indemnité prévu par l'article L.5213-9 du code du travail;

- Mme [B] ne présente aucun fait laissant suposer l'existence d'une discrimination, étant précisé que la société a pris toutes les mesures exigées pour préserver sa santé et lui permettre de conserver son emploi et que l'exigence que son directeur a posée d'une présence dans l'entreprise répartie non plus sur 4 mais sur 5 jours afin de garantir une présence opérationnelle dans le laboratoire chaque jour de la semaine relève du pouvoir de direction de l'employeur ;

- ses recherches pour reclasser Mme [B] ont été sérieuses et loyales en ce que,

* elle a sollicité l'avis du médecin du travail à plusieurs reprises, a informé Mme [B] de ses démarches par un courrier du 13 avril 2018 afin de ne pas la laisser dans l'incertitude et a attendu les réponses de l'ensemble de ses partenaires qu'elle n'a pas hésité à relancer,

* le livre d'entrée et sortie du personnel établit que personne n'a été embauché sur un poste susceptible de convenir à Mme [B] qui n'en identifie d'ailleurs aucun,

* le poste mentionné par M. [E] impliquait de soulever des charges et s'agissant d'un poste de soutien il ne pouvait convenir à Mme [B],

* l'offre d'emploi du 22 janvier 2018 n'a en réalité jamais été diffusée; à cette date Mme [B] n'avait pas été déclarée inapte; un responsable de production dans une petite structure effectue inévitablement soit dans le cadre de ses missions, soit en cas de surcroit d'activité, soit en cas de remplacement d'un salarié absent, des ports de charges,

* elle ne fait pas partie d'un groupe au sens de l'ordonnance du 22 septembre 2017 qu'il s'agisse de la société Iterg, de Terres Inovia et/ou de Sofiprotéol, lesquelles n'établissent d'ailleurs pas de comptes consolidés; elle a dans tous les cas mené des recherches sérieuses auprès des trois,

* l'information sur le statut de travailleur handicapé, outre d'exposer l'employeur à se voir reprocher un comportement discriminatoire, n'a pas sa place au stade de la recherche d'un reclassement.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour, faisant application des dispositions de l'article 802 du code de procédure civile, déclare, d'office, irrecevables les conclusions notifiées le 2 mai 2024, par l'appelante, et les conclusions notifiées le 7 mai 2024, par l'intimée puisqu'elles ont été notifiées postérieurement à l'ordonnance de clôture du 9 avril 2024.

I - Sur la demande en dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité et d'aménagement raisonnable

Sur compétence de la juridiction prud'homale

Il est constant que les juridctions prud'homales sont compétentes pour connaître des demandes indemnitaires relatives aux préjudices découlant directement du licenciement et que le pôle social a compétence exclusive pour réparer les préjudices issus de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle qu'il y ait eu ou non un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité ayant le caractère d'une faute inexcusable, étant précisé d'une part, que le salarié dont l'affection n'est pas prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels peut engager une action contre l'employeur sur le fondement du droit commun de la responsabilité civile contractuelle, d'autre part que la demande indemnitaire fondée sur un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité relève de la compétence de la juridiction prud'homale dès lors que la salarié n'invoque pas le caractère professionnel de sa maladie.

Au cas présent, Mme [B] fonde sa demande en dommages et intérêts sur les manquements de la société Olead à ses obligations de sécurité et d'aménagement raisonnable de son poste de travail pour la période antérieure à l'accident du travail survenu le 19 septembre 2017.

Il s'en déduit que la cour, statuant en matière prud'homale, est compétente pour se prononcer sur la demande de Mme [B] et que le jugement déféré doit être confirmé de ce chef.

Sur le bien fondé de la demande

En application des dispositions de l'article L.4121-1 du code du travail, 'L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :

1° Des actions de prévention des risques professionnels ;

2° Des actions d'information et de formation ;

3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.

L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes '.

Selon l'article L.4121-2 du même code, ' L'employeur met en oeuvre les mesures prévues à l'article L.4121-1 sur le fondement des principes généraux de prévention suivants :

1° Eviter les risques ;

2° Evaluer les risques qui ne peuvent pas être évités ;

3° Combattre les risques à la source ;

4° Adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé ;

5° Tenir compte de l'état d'évolution de la technique ;

6° Remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux

7° Planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral, tel qu'il est défini à l'article L. 1152-1 ;

8° Prendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle ;

9° Donner les instructions appropriées aux travailleurs '.

Il résulte de la combinaison de ces articles que l'employeur est tenu d'une obligation légale d'assurer la sécurité et de protéger la santé physique et mentale de ses salariés, qu'il doit en assurer l'effectivité en prenant les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs  et qu'il lui est interdit dans l'exercice de son pouvoir de direction de prendre des mesures qui auraient pour objet  ou pour effet de compromettre la santé et la sécurité des salariés. Le manquement de l'employeur à cette obligation engage sa responsabilité .

L'article L.5213-6 du code du travail dispose, ' Afin de garantir le respect du principe d'égalité de traitement à l'égard des travailleurs handicapés, l'employeur prend, en fonction des besoins dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs concernés mentionnés au 1° et 4° et 9° et 11° de l'article L.5212-13 d'accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l'exercer ou d'y progresser ou pour qu'une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée. (....) Ces mesures sont prises sous réserve que les charges consécutives à leur mise en oeuvre ne soient pas disproportionnées, compte-tenu de l'aide prévue à l'article L.5213-10 qui peut compenser en tout ou partie les dépenses supportées à ce titre par l'employeur. Le refus de prendre des mesures au sens du premier alinéa peut être constitutif d'une discrimination au sens de l'article L.1133-3".

Il ressort des pièces versées au dossier que:

- Mme [B] a été placée en arrêt de travail au mois de février 2017,

- le 6 mars 2017, Mme [B] été déclarée apte à reprendre le travail, le médecin du travail préconisant cependant d'éviter le port de charges lourdes et certaines postures de travail et de prévoir une étude de poste,

- le 22 mai 2017 le médecin du travail a déclaré Mme [B] apte, exclu le port de charges lourdes, demandé l'acquisition d'un chariot peseur,

- la qualité de travailleur handicapé a été reconnue à Mme [B] au mois de mai 2017, pour la période comprise entre le 3 mai 2017 et le 30 avril 2022,

- le 19 juin 2017 Mme [B] a été déclarée apte avec restrictions, singulièrement le port de charges lourdes de manière répétée et la nécessité d'une aide physique au poste,

- une étude ergonomique du poste occupé par Mme [B] a été organisée au mois de juin 2017; il était alors observé que la configuration de l'atelier, le nombre de machines utilisées toutes spécifiques rendaient 'complexe la recherche de solutions'; il a été conclu selon les mentions portées dans le dossier individuel de santé de la salariée à la mise en place d'une aide physique et financière,

- Mme [B] a été victime d'un accident le 19 septembre 2017, pris en charge au titre de la législation sur les risques professionnels, ensuite duquel elle a été arrêtée pendant 80 jours; elle a déclaré avoir porté une charge de 18 kilos,

- le 9 janvier 2018, Mme [B] a été déclaré apte dans le cadre d'un aménagement de son poste de travail sans port ou manipulation de charges lourdes,

- le 22 janvier 2018, Mme [B] a été déclarée apte dans le cadre d'un reclassement avec aménagement, soit ' pas de port de charges de + 2kg, pas de manipulation de +2kg',

- dans une attestation de suivi renseignée le 26 février 2018, le médecin du travail a indiqué que Mme [B] pouvait occuper un poste sans manipulation ni port de charges de plus de 2 kilos,

- le 9 mars 2018, le médecin de travail a déclaré Mme [B] inapte et proscrit toute manipulation et/ou tout port de charges.

Pour confirmer la décision déférée dans ses dispositions qui déboutent Mme [B] de sa demande en dommages et intérêts, il suffira de relever que:

- quoiqu'il en soit de l'historique établi par le docteur [L] le 8 mars 2017, il ne ressort d'aucun des éléments du dossier que la société Olead a eu connaissance des lombosciatalgies affectant Mme [B] et de la nécessité de procéder à des adaptations avant le 6 mars 2017, la circonstance qu'elle partage la même direction avec la société Iterg n'y suppléant pas; les arrêts de travail antérieurs produits ont d'ailleurs été établis pour maladie et la lecture du dossier médical de Mme [B] révèle à la date du 27 juin 2016 l'existence d'antécédents sans lien avec l'activité professionnelle uniquement,

- la société Olead indique sans être aucunement contredite qu'une réunion s'est tenue sur site le 28 mars 2017 en présence du médecin du travail,

- l'étude de poste préconisée le 6 mars 2017 a été réalisée le 12 juin suivant et a conclu à la nécessité d'une aide physique et d'une aide financière,

- une formation aux gestes et postures a été délivrée à Mme [B] au mois de juin 2017,

- il n'est pas discutable que la société Olead a engagé un intérimaire pour la période du 19 au 30 juin 2017 et qu'elle a ensuite donné la consigne à ses collègues de répondre aux sollicitations de Mme [B] concernant le port et/ou la manutention de charges,

- il ne ressort d'aucun des éléments du dossier que Mme [B] a essuyé des refus de la part de ses collègues, de sorte que ses développements sur l'absence d'aménagement des plannings sont inopérants,

- l'accident est survenu alors qu'un autre salarié était présent, que Mme [B] n'a pas sollicité; il ne ressort d'aucun des éléments que celui-ci n'était pas en mesure de venir l'aider,

- Mme [B] que le médecin du travail avait déclarée apte à son poste et pour laquelle l'employeur a mis en place une aide physique comme préconisée, suffisante en l'état des éléments produits, ne peut valablement reprocher à la société Olead d'avoir fait figurer des ports de charges lourdes à son planning,

- il se déduit de l'ensemble de ces éléments que la société Olead justifie avoir mis en place une organisation et des moyens et pris les mesures de formation appropriées pour permettre à Mme [B] de conserver son emploi, conformément aux prescriptions des articles L.4121-1, L.4121-2 et L.5213-6 du code du travail.

II - Sur la demande en paiement au titre du solde de l'indemnité de licenciement

L'article 10 de la convention collective nationale des industries chimiques et connexes du 30 décembre 1952 applicable en l'espèce, dispose:

' On entend par ancienneté dans une entreprise le temps pendant lequel le salarié a été occupé d'une façon continue dans cette entreprise, quelles que puissent être les modifications survenant dans la nature juridique de celle-ci. (...)'.

L'article L.1224-1 du code du travail prévoit que ' Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise'.

Pour confirmer le jugement déféré dans ses dispositions qui fixent l'ancienneté de Mme [B] au 1er juin 1999 et déboutent Mme [B] de sa demande , il suffira de relever que le contrat de travail conclu entre la société Iterg et Mme [B] a été rompu par l'effet de la démission non équivoque que la seconde a donnée à la première par courrier du 12 février 2016, la circonstance que Mme [B] s'est déterminée afin de rejoindre un poste au sein de la société Olead dont le contour avait été arrêté d'un commun accord avec M. [S], le directeur de la société Iterg et de la société Olead, étant inopérante; que la reprise d'ancienneté au 1er juin 1999 relève, en l'état des éléments du dossier, de l'accord des parties au contrat de travail conclu entre la société Olead et Mme [B]; qu'il ne ressort d'aucun desdits éléments que le consentement de Mme [B], qui ne l'invoque d'ailleurs pas, a été vicié.

Mme [B], dont l'indemnité de licenciement a été régulièrement calculée sur la base d'une reprise d'ancienneté au 1er juin 1999, ne peut qu'être déboutée de sa demande en paiement de la somme 1 610,62 euros à titre de solde.

III - Sur la demande en paiement d'une prime au titre de la médaille du travail

Le paiement d'une prime est obligatoire pour l'employeur lorsque son versement résulte d'un usage répondant à des caractères de généralité, de constance et de fixité. C'est à celui qui se prévaut d'un tel usage de rapporter la preuve de son contenu, mais également qu'il présente les caractères précités.

Pour débouter Mme [B] de sa demande à ce titre, en conséquence infirmer la décision déférée dans ses dispositions qui condamnent la société Olead à verser à Mme [B] la somme de 1 150 euros, il suffira de relever que:

- le versement d'une somme d'argent aux récipiendaires de la médaille du travail ne ressort d'aucune disposition légale, règlementaire ou conventionnelle,

- Mme [B] ne rapporte pas la preuve qui pèse sur elle que la prime dont elle demande le versement a un caractère général, constant et fixe,

- l'engagement unilatéral de la société Olead de lui verser une prime de 1 150 euros ne saurait résulter du seul compte-rendu de l'entretien préalable de licenciement du 17 mai 2018, qui ne comporte aucune signature, pas même celle de son rédacteur, produit par Mme [B].

IV - Sur la demande en paiement au titre de l'indemnité compensatrice de préavis

L'indemnité compensatrice de préavis correspond aux salaires et avantages, y compris l'indemnité de congés payés, qu'aurait perçus le salarié s'il avait travaillé pendant cette période.

Le salaire à prendre en considération englobe tous les éléments de la rémunération auxquels le salarié aurait pu prétendre s'il avait exécuté son préavis, à l'exclusion des primes et indemnités représentant des remboursements de frais réellement engagés.

En l'espèce, l'indemnité compensatrice de préavis versée à Mme [B] s'est établie à la somme de 2 865,63 euros, soit un salaire de référence de 1 432,82 euros. Il ne ressort d'aucun des éléments du dossier, singulièrement en l'absence des bulletins de salaire correspondants, que la somme de 1 432,82 euros n'inclut pas la prime d'ancienneté.

L'accord du 10 mai 2011 relatif aux personnes en situation de handicap dans les industries chimiques prévoit: ' Dans l'hypothèse où le licenciement d'un salarié reconnu travailleur handicapé ne peut être évité, la durée du préavis prévue par les différents avenants de la convention collective des industries chimiques est doublée'.

Suivant les dispositions conventionnelles applicables, la durée du préavis en cas de licenciement des techniciens et agents de maîtrise dont le coefficient est inférieur à 275 est de deux mois.

En l'espèce, au jour de la rupture le coefficient de Mme [B] était de 225 et la qualité de travailleur handicapé lui avait été reconnue antérieurement au licenciement, ce dont il doit être déduit le doublement de l'indemnité de préavis, étant précisé qu'il ne résulte d'aucune disposition que ledit doublement est réservé au seul cas où le préavis est exécuté. Le jugement déféré est en conséquence confirmé dans ses dispositions qui condamnent l'employeur au paiement de la somme de 2 865,63 euros et à celle de 286,56 euros pour les congés payés afférents.

V - Sur la demande en dommages et intérêts pour traitement discriminatoire

L'article L. 1132-1 du code du travail dispose qu'aucun salarié ne peut faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte.

L'article L. 1134-1 dudit code précise que lorsque survient un litige en raison d'une méconnaissance des dispositions du principe de non-discrimination le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte et qu'il incombe à la partie défenderesse au vu de ces éléments de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.

Pour écarter le grief de discrimination formulé par Mme [B] et confirmer le jugement déféré dans ses dispositions qui la déboutent de sa demande en dommages et intérêts, il suffira de relever, de première part que Mme [B] ne détermine pas celui des motifs prohibés par la loi sur la base duquel elle aurait été discriminée, de deuxième part que la société Olead justifie pour les raisons susénoncées avoir mis en place une organisation et des moyens et pris les mesures de formation appropriées pour permettre à Mme [B] de conserver son emploi conformément aux prescriptions des articles L.4121-1, L.4121-2 et L.5213-6 du code du travail, de dernière part que la répartition des heures de travail, qu'en l'espèce la société Olead justifie sans être utilement contredite par les contraintes de fonctionnement du laboratoire, relève du pouvoir de direction de l'employeur, éléments objectifs permettant de considérer la mesure comme étrangère à toute discrimination.

VI - Sur les demandes au titre de la rupture du contrat de travail

L'article L.1226 -10 du code du travail dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2018 applicable en l'espèce, ' Lorsque le salarié victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l'article L. 4624-4, à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l'entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Cette proposition prend en compte, après avis du comité économique et social, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur les capacités du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation le préparant à occuper un poste adapté.

L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail.

Pour l'application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce'.

Il résulte de ce texte que le périmètre du groupe à prendre en considération au titre de la recherche de reclassement est l'ensemble des entreprises, situées sur le territoire national, appartenant à un groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.

Suivant l'article L233-1 du code du commerce, lorsqu'une société possède plus de la moitié du capital d'une autre société la seconde est considérée pour l'application des dispositions des sections II et IV du chapitre III du titre troisième du livre deuxième du code de commerce comme filiale de la première.

L'article L233-3 dispose ' I.- Toute personne, physique ou morale, est considérée, pour l'application des sections 2 et 4 du présent chapitre, comme en contrôlant une autre :

1° Lorsqu'elle détient directement ou indirectement une fraction du capital lui conférant la majorité des droits de vote dans les assemblées générales de cette société ;

2° Lorsqu'elle dispose seule de la majorité des droits de vote dans cette société en vertu d'un accord conclu avec d'autres associés ou actionnaires et qui n'est pas contraire à l'intérêt de la société ;

3° Lorsqu'elle détermine en fait, par les droits de vote dont elle dispose, les décisions dans les assemblées générales de cette société ;

4° Lorsqu'elle est associée ou actionnaire de cette société et dispose du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société.

II - Elle est présumée exercer ce contrôle lorsqu'elle dispose directement ou indirectement, d'une fraction des droits de vote supérieure à 40 % et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne. (...)'.

L'article L.233-16 du code du commerce dispose: ' I - Les sociétés commerciales établissent et publient chaque année à la diligence du conseil d'administration, du directoire, du ou des gérants, selon le cas, des comptes consolidés ainsi qu'un rapport sur la gestion du groupe, dès lors qu'elles contrôlent de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs autres entreprises , dans les conditions ci-après définies.

II - Le contrôle exclusif par une société résulte :

1° Soit de la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote dans une autre entreprise ;

2° Soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise. La société consolidante est présumée avoir effectué cette désignation lorsqu'elle a disposé au cours de cette période, directement ou indirectement, d'une fraction supérieure à 40 % des droits de vote, et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détenait, directement ou indirectement, une fraction supérieure à la sienne ;

3° Soit du droit d'exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d'un contrat ou de clauses statutaires, lorsque le droit applicable le permet.

III.-Le contrôle conjoint est le partage du contrôle d'une entreprise exploitée en commun par un nombre limité d'associés ou d'actionnaires, de sorte que les décisions résultent de leur accord'.

Suivant les dispositions de l'article L.233-17- 2 , ' Sont comprises dans la consolidation les filiales ou participations contrôlées de manière exclusive ou conjointe ou sur lesquelles est exercée une influence notable.

L'influence notable sur la gestion et la politique financière d'une entreprise est présumée lorsqu'une société dispose, directement ou indirectement, d'une fraction au moins égale au cinquième des droits de vote de cette entreprise'.

L'article L233-18 précise : ' Les comptes des entreprises placées sous le contrôle exclusif de la société consolidante sont consolidés par intégration globale.

Les comptes des entreprises contrôlées conjointement avec d'autres actionnaires ou associés par la société consolidante sont consolidés par intégration proportionnelle.

Les comptes des entreprises sur lesquelles la société consolidante exerce une influence notable sont consolidés par mise en équivalence'.

Il s'en déduit que les sociétés commerciales établissent et publient chaque année des comptes consolidés dès lors qu'elles contrôlent de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs autres entreprises et il résulte de la combinaison des articles L. 233-17-2 et L. 233-18 du code de commerce que sont comprises dans les comptes consolidés, par mise en équivalence, les entreprises sur lesquelles l'entreprise dominante exerce une influence notable.

Suivant les dispositions de l'article L.1226-12 du même code, l'employeur ne peut rompre le contrat de travail que s'il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l'article L.1226-10 du code du travail, soit du refus par le salarié de l'emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l'avis du médecin du travail que tout maintien dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l'état de santé fait obstable à tout reclassement dans l'emploi.

En l'espèce, il ne ressort d'aucun des éléments du dossier que les conditions d'un contrôle au sens des articles L. 233-1, L. 233-3, I et II, ou L. 233-16 du code de commerce sont réunies, ce dont il résulte que la société Olead n'était pas tenue de procéder à des recherches en externe. Le grief tenant à l'insuffisance des recherches effectuées auprès de sociétés Terres Inovia, Sofiproteol et Iterg n'est donc pas fondé.

Il ne ressort d'aucun des éléments du dossier que le poste de technicien responsable de production au sein de l'atelier raffinage était disponible au jour du licenciement, étant précisé qu'il ne figure pas dans l'extrait du registre du personnel produit par la société Olead, qui indique sans être aucunement contredite que l'offre d'emploi correspondante n'a finalement pas été diffusée. La cour relève encore que si Mme [B] met en cause la sincérité de l'extrait produit elle ne rapporte pas la preuve de ce qui relève en l'état d'une simple allégation.

Mme [B] a été déclarée inapte par un avis du 9 mars 2018 mentionnant au titre des conclusions et indications relatives au reclassement ' pas de manipulation ni port de charges'.

Le 15 mars 2018, M. [E], directeur R&D au sein de la société Olead, a écrit à M.[S]: ' Bonjour [K],

Nous aurions effectivement besoin d'une personne en soutien à [V] à la plate forme mais les appareils à mettre en oeuvre nécessitent de soulever des charges:

- bidons de solvants

- couvercle du filtre agité

- couvercle du cuiseur de laboratoire + agitateur

- bacs et échantiellons.

Par ailleurs, notre besoin est d'avoir une personne en charge d'assurer le rangement et la propreté des paillasses ce qui nécessité de déplacer les appareils qui s'y trouvent et peuvent peser jusqu'à une vingtaine de kilos.

L'idée est de permettre à [V] de faire son travail d'ingénieur et de la libérer des tâches les moins qualifiées. Il serait donc sans intérêt de lui adjoindre VG qui ne pourrait travailler qu'accompagner en permanence d'une personne valide'.

Il en ressort des opérations de manutention et des ports de charge pour le salarié choisi pour venir au soutien de sa collègue ingénieure.

Par courrier du 20 mars 2018 et courriel du 12 avril 2018, la société Olead a sollicité le médecin du travail afin qu'il lui précise le sens de son avis. Celui-ci lui a, selon les informations portées dans le document établi en vue de la réunion des délégués du personnel du 24 avril 2018, non querellées, confirmé que ' l'inaptitude déclarée était totalement restrictive concernant le port de charge et la moindre petite manutention'.

Le délégué du personnel a émis un avis favorable au licenciement en l'absence de poste disponible approprié aux capacités physiques de Mme [B].

Mme [B] ne peut, dès lors que le poste mentionné par M.[E] comportait des opérations de manutention et des ports de charge, valablement reprocher à la société Olead de ne pas le lui avoir proposé au reclassement.

L'obligation de l'employeur n'allant pas jusqu'à devoir former le salarié à un métier différent, les développements de Mme [B] sur sa capacité à progresser et évoluer sont inopérants.

Le grief tenant à l'absence d'information tenant au statut de travailleur handicapé de Mme [B] n'est pas fondé, la société Olead n'étant tenue pour les raisons susdéveloppées qu'à une recherche en interne.

La société Olead qui a, en l'état des éléments susmentionnés, mené des recherches loyales et sérieuses pour tenter de reclasser Mme [B] a satisfait à son obligation à ce titre.

Le jugement déféré est en conséquence confirmé dans ses dispositions qui jugent le licenciement de Mme [B] pour inaptitude et impossibilité de procéder à son reclassement fondé sur une cause réelle et sérieuse et qui déboutent la salariée de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement abusif.

VII - Sur la demande de remise de documents

La cour ordonne la remise par l'employeur à la salariée d'un bulletin de salaire prenant en compte la somme allouée par la présente décision, sans astreinte.

VIII - Sur les frais du procès et les frais d'exécution

Le jugement déféré mérite confirmation dans ses dispositions tenant aux dépens et aux frais irrépétibles.

La société Olead, qui succombe devant la cour, doit supporter les dépens d'appel et être en conséquence déboutée de sa demande au titre de ses frais irrépétibles.

L'équité commande de ne pas laisser à Mme [B] la charge de ses frais irrépétibles d'appel. La société Olead est en conséquence condamnée au paiement de la somme de 3 000 euros.

Il n'y a pas lieu de se prononcer actuellement sur les frais d'exécution forcée d'une décision dont l'exposé reste purement hypothétique et qui sont réglementés par l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution qui prévoit la possibilité qu'ils restent à la charge du créancier lorsqu'il est manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés, étant rappelé qu'en tout état de cause, le titre servant de fondement à des poursuites permet le recouvrement des frais d'exécution forcée.

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevables les conclusions notifiées le 2 mai 2024 par Mme [B] et notifiées le 7 mai 2024 par la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables

Infirme le jugement déféré dans ses dispositions qui condamnent la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à payer à Mme [B] la somme de de 1 150 euros au titre de la médaille du travail;

Confirme le jugement déféré pour le surplus de ses dispositions;

Statuant de nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Déboute Mme [B] de sa demande en paiement au titre de la médaille du travail;

Ordonne la remise par l'employeur à la salariée d'un bulletin de salaire reprenant la condamnation prononcée au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, sans astreinte;

Condamne la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables aux dépens d'appel; en conséquence la déboute de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne la société Olead prise en la personne de ses liquidateurs amiables à payer à Mme [B] 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Dit n'y avoir lieu à statuer sur les frais d'exécution.

Signé par Valérie Collet, conseillère, en l'absence de Marie-Paule Menu, présidente empêchée, et par Sylvaine Déchamps, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

S. Déchamps V. Collet


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 21/03271
Date de la décision : 11/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-11;21.03271 ?
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