COUR D'APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
--------------------------
ARRÊT DU : 04 JUILLET 2024
N° RG 21/06021 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MMWN
[H] [F]
c/
GIRONDE HABITAT OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT (OPH)
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 21 octobre 2021 par le tribunal judiciaire de LIBOURNE ( RG : 20/00305) suivant déclaration d'appel du 08 novembre 2021
APPELANTE :
[H] [F]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 1]
Représentée par Me Hélène JANOUEIX de l'AARPI MONTESQUIEU AVOCATS, avocat au barreau de LIBOURNE
INTIMÉ :
GIRONDE HABITAT OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT (OPH) Etablissement public à caractère industriel et commercial, immatriculée au RCS de BORDEAUX sous le n° 404 877 086, pris poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège [Adresse 2]
Représenté par Me Katell LE BORGNE de la SCP LAVALETTE AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 mai 2024 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Bérengère VALLEE, conseiller,, qui a fait un rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Paule POIREL, président,
Bérengère VALLEE, conseiller,
Emmanuel BREARD, conseiller,
Greffier lors des débats : Séléna BONNET
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
Le 5 décembre 2016, Mme [H] [F], locataire d'un appartement situé dans une résidence appartenant à la société Gironde Habitat Office Public de l'Habitat (OPH), a chuté dans le hall d'entrée de l'immeuble.
Par acte du 9 mai 2020, Mme [F] a assigné la société Gironde Habitat OPH en responsabilité sur le fondement de l'article 1242 du code civil.
Par jugement contradictoire du 21 octobre 2021 le tribunal judiciaire de Libourne a :
- déclaré l'action engagée par Mme [F] prescrite,
- constaté l'irrecevabilité de l'action engagée par Mme [F],
- dit les autres demandes sans objet,
- condamné Mme [F] à payer à la société Gironde Habitat OPH la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Mme [F] au paiement des entiers dépens,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Mme [F] a relevé appel de l'ensemble des chefs de ce jugement par déclaration du 8 novembre 2021, et par dernières conclusions déposées le 2 février 2022, elle demande à la cour de :
- réformer en toute ses dispositions la décision du tribunal judiciaire de Libourne du 21 octobre 2021,
- déclarer la société Gironde Habitat OPH, responsable du préjudice subi par Mme [F] à la suite de sa chute du 5 décembre 2016,
En conséquence,
- condamner la société Gironde Habitat OPH à indemniser Mme [F] de l'intégralité de son préjudice,
Avant-dire droit sur cette indemnisation,
- ordonner l'organisation d'une mesure d'expertise,
- désigner tel médecin qu'il plaira aux fins d'examiner Mme [F] et de fournir tous éléments permettant de liquider, au sens médico-légal, son préjudice corporel, suite à l'accident dont elle a été victime,
- condamner la société Gironde Habitat OPH à verser à Mme [F] une provision d'un montant de 3 000 euros à valoir sur son préjudice,
- condamner la société Gironde Habitat OPH à verser à Mme [F] une somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la société Gironde Habitat OPH aux entiers dépens, en ce compris les frais futurs d'expertise.
Par dernières conclusions déposées le 27 avril 2022, l'établissement public Gironde Habitat OPH, demande à la cour de :
A titre principal :
- confirmer le jugement du tribunal judiciaire de Libourne du 21 octobre 2021 dans l'intégralité de ses dispositions,
En conséquence,
- déclarer l'action engagée par Mme [F] prescrite,
- constater l'irrecevabilité de l'action engagée par Mme [F],
- déclarer les autres demandes sans objet,
- condamner Mme [F] à payer à la société Gironde Habitat OPH la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance, ainsi qu'au paiement des entiers dépens de première instance,
Ajoutant au jugement entrepris,
- condamner Mme [F] à verser à société Gironde Habitat OPH une indemnité de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
A titre subsidiaire et si par impossible la cour ne déclarait pas prescrite l'action engagée par Mme [F] :
- débouter Mme [F] de l'intégralité de ses demandes comme étant non fondées,
- condamner Mme [F] aux entiers dépens de première instance et d'appel, outre à payer à la société Gironde Habitat OPH une indemnité de 4 000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,
A titre encore plus subsidiaire et si par impossible la cour considérait que la responsabilité contractuelle de la société Gironde Habitat OPH est engagée :
- dire qu'il entrera dans la mission de l'expert désigné de :
* déterminer l'immutabilité des lésions au fait dommageable,
* dire s'il existe ou non un état antérieur de Mme [F] et dans l'affirmative, déterminer si cet état antérieur est susceptible d'avoir une incidence sur les lésions, leur évolution et les séquelles présentées et le quantifier au niveau de l'incapacité,
- fixer à la charge de Mme [F] la consignation a valoir sur la rémunération de l'expert judiciaire,
- rejeter la demande de provision formée par Mme [F],
- dire n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- réserver les dépens,
- débouter Mme [F] de toutes demandes plus amples ou contraires.
L'affaire a été fixée à l'audience rapporteur du 23 mai 2024.
L'instruction a été clôturée par ordonnance du 10 mai 2024.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la prescription de l'action
Reprochant au tribunal d'avoir appliqué la prescription triennale de l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989, Mme [F], appelante, soutient que son action envers le bailleur n'est pas prescrite en vertu de l'article 2226 du code civil selon lequel 'l'action en responsabilité née à raison d'un évènement ayant entraîné un dommage corporel, engagée par la victime directe ou indirecte des préjudices qui en résultent, se prescrit par dix ans à compter de la date de la consolidation du dommage initial ou aggravé.'
Il convient cependant de constater que Mme [F], locataire de la société Gironde Habitat en vertu d'un contrat de bail signé entre les parties le 13 octobre 2014, fait valoir dans ses écritures, au visa de l'article 1719 du code civil et de l'article 6 de la loi du 6 juillet 1989, que la société Gironde Habitat, en sa qualité de bailleresse, n'a pas rempli son obligation d'entretien des parties communes, entraînant sa chute sur une plaque de béton cassée.
Le préjudice de Mme [F] résultant du manquement contractuel allégué de son bailleresse, c'est à bon droit que le premier juge a rappelé que le principe de non option des responsabilités contractuelle et délictuelle interdit au créancier d'une obligation contractuelle de se prévaloir, contre le débiteur de cette obligation, des règles de la responsabilité délictuelle et a appliqué la prescription triennale issue de l'article 7-1 de la loi du 6 juillet 1989 selon lequel 'Toutes actions dérivant d'un contrat de bail sont prescrites par trois ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.'
Dès lors que l'accident dont a été victime Mme [F] a eu lieu le 5 décembre 2016, cette dernière avait donc jusqu'au 6 décembre 2019 pour intenter une action en responsabilité contre le bailleur, en sorte que l'action engagée par l'acte introductif d'instance du 9 mars 2020 est prescrite.
Le jugement sera confirmé en ce qu'il a déclaré irrecevable comme prescrite l'action formée par Mme [F] à l'encontre de la société Gironde Habitat OPH.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de l'article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n'en mette la totalité ou une fraction à la charge d'une autre partie. Mme [F] supportera la charge des dépens d'appel.
En application de l'article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, Mme [F] sera condamnée à payer une somme de 1.000 euros à la société Gironde Habitat OPH.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamne Mme [H] [F] à payer à la société Gironde Habitat OPH la somme de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [H] [F] aux dépens d'appel.
Le présent arrêt a été signé par Madame Paule POIREL, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,