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02/07/2024 | FRANCE | N°24/00149

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, C.e.s.e.d.a., 02 juillet 2024, 24/00149


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

COUR D ' A P P E L D E B O R D E A U X







N° RG 24/00149 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-N3BD





ORDONNANCE









Le DEUX JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE à 11 H 00



Nous, Noria FAUCHERIE, conseillère à la Cour d'appel de Bordeaux, agissant par délégation de madame la première présidente de ladite Cour, assistée de François CHARTAUD, greffier,



En l'absence du Ministère Public, dûment avisé,



En présence de Monsieur [D

] [C], représentant du Préfet de La Gironde,



En présence de Monsieur [X] [R], interprète en langue arabe déclarée comprise par la personne retenue à l'inverse du Français, ins...

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

COUR D ' A P P E L D E B O R D E A U X

N° RG 24/00149 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-N3BD

ORDONNANCE

Le DEUX JUILLET DEUX MILLE VINGT QUATRE à 11 H 00

Nous, Noria FAUCHERIE, conseillère à la Cour d'appel de Bordeaux, agissant par délégation de madame la première présidente de ladite Cour, assistée de François CHARTAUD, greffier,

En l'absence du Ministère Public, dûment avisé,

En présence de Monsieur [D] [C], représentant du Préfet de La Gironde,

En présence de Monsieur [X] [R], interprète en langue arabe déclarée comprise par la personne retenue à l'inverse du Français, inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Bordeaux,

En présence de Monsieur [N] [K] alias [J] [V],

né le 03 Octobre 1998 à [Localité 5] (MAROC), de nationalité Marocaine, et de son conseil Maître Nadia EDJIMBI,

Vu la procédure suivie contre Monsieur [N] [K] alias [J] [V], né le 03 Octobre 1998 à [Localité 5] (MAROC), de nationalité Marocaine et l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière du 29 septembre 2023 visant l'intéressé,

Vu l'ordonnance rendue le 30 juin 2024 à 11h45 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Bordeaux, ordonnant la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [N] [K] alias [J] [V], pour une durée de 28 jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention,

Vu l'appel interjeté par le conseil de Monsieur [N] [K] alias [J] [V], né le 03 Octobre 1998 à [Localité 5] (MAROC), de nationalité Marocaine, le 1er juillet 2024 à 11h37,

Vu l'avis de la date et de l'heure de l'audience prévue pour les débats donné aux parties,

Vu la plaidoirie de Maître Nadia EDJIMBI, conseil de Monsieur [N] [K] alias [J] [V], ainsi que les observations de Monsieur [D] [C], représentant de la préfecture de La Gironde et les explications de Monsieur [N] [K] alias [J] [V] qui a eu la parole en dernier,

A l'audience, Madame la Conseillère a indiqué que la décision serait rendue le 02 juin 2024 à 11h00,

Avons rendu l'ordonnance suivante :

PROCÉDURE

Par une requête en date du 29 juin 2024, Monsieur le préfet de la Gironde a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux concernant Monsieur [N] [K] alias [V], né le 3 octobre 1998 à Tanger (Maroc), de nationalité marocaine, lequel fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prononcée à son encontre le 29 septembre 2023 par le préfet de la Corrèze et pour l'exécution de cette mesure d'éloignement d'une décision initiale de placement en rétention administrative prise par l'autorité préfectorale le 28 juin 2024.

L'examen de sa situation a fait apparaître il se trouve en France en situation irrégulière. Il ne présente pas de garanties de représentation effective, il est démuni de documents de voyage en cours de validité, sans-domicile-fixe (il a précisé habiter chez un ami sans toutefois préciser l'adresse) et être sans ressources sur le territoire national, il a déclaré travailler illégalement pour UBER EAT.

À la suite de cette requête, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux a autorisé la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [K] pour une durée de 28 jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention par une ordonnance en date du 30 juin 2024 à 11h45.

Par l'intermédiaire de son conseil, Monsieur [K] a interjeté appel de la décision le 1er juillet 2024 à 11h37. L'appel est dûment accompagné d'un mémoire dont il convient de se rapprocher pour plus amples renseignements. En substance, il est sollicité outre la condamnation du préfet de la Gironde à la somme de 1000 € irrépétibles pour frais et d'accorder le bénéfice provisoire à Monsieur [K], d'ordonner la main levée du placement en rétention de l'intéressé au motif que la requête en prolongation de la rétention est irrecevable pour défaut de pièces utiles à savoir la réquisition du procureur de la république qui constitue le support juridique du contrôle identité de Monsieur [K] qui a été le préalable à son interpellation et à son placement en rétention.

À l'audience de la cour qui s'est tenue le 1er juillet 2024 à 16 heures, Monsieur [K] a accepté de répondre aux questions du magistrat délégué.

Il lui a été indiqué qu'il ressort de l'étude de l'OQTF prise par le préfet de la [Localité 2] qu'il était connu en Espagne pour une entrée illégale en 2017 sous l'identité de [K] [G], né le 3 octobre 1999 à [Localité 4] (Algérie), de nationalité algérienne. Il a répondu qu'il a fait cette réponse par peur d'être expulsé vers le Maroc mais il est bien [K] [N] né le 3 octobre 1998 à [Localité 5] de nationalité marocaine.

Il a reconnu également avoir indiqué aux policiers plusieurs identités différentes lorsqu'il était plus jeune en région parisienne par peur de devoir quitter le territoire français.

Il a expliqué être venu en France pour un aller-retour afin de récupérer des affaires lui appartenant qu'il n'avait pas pu prendre avant de repartir en Espagne après avoir été remis en liberté du C.R.A. d'[Localité 3] le 8 décembre 2023. Il a indiqué avoir une compagne en Espagne et être le père de son enfant. Il a demandé à la cour de lui permettre de repartir en Espagne retrouver sa famille.

Son conseil a développé oralement ses conclusions écrites, relatives à l'absence de la réquisition du ministère public pour le contrôle identité et sur l'absence de perspectives d' éloignement. Elle a présenté l'attestation de la compagne espagnole de Monsieur [K]. Il a été fait état de ce qu'il n'a pas été reconnu par les autorités algériennes et marocaines lors de son dernier séjour dans le C.R.A. d'[Localité 3] et qu'il n'existe pas de perspective d'éloignement.

Le représentant du ministère public a exposé qu'un laissez-passer consulaire avait été sollicité auprès des autorités marocaines, l'Algérie n'ayant pas reconnu l'intéressé. Il est sollicité la confirmation de la décision du JLD.

MOTIVATION

- Sur la recevabilité de l'appel

La déclaration d'appel régulièrement motivée a été formée dans le délai légal, elle est donc recevable.

- Sur le contrôle identité à l'origine du placement en rétention administrative de Monsieur [K]

Le samedi 29 juin 2024 à 19h41, la réquisitions aux fins de contrôle d'identité sur le fondement de l'article 78-2 alinéas 7 du code de procédure pénale a été jointe à la procédure soit la veille de l'audience et mise à la disposition de Monsieur [K] et de son conseil bien en amont de l'audience prévue à 10 heures le dimanche 30 juin. Monsieur [K] ne peut donc invoquer aucun grief.

Le moyen soulevé est donc rejeté.

- Sur le placement en rétention ministre administrative et les garanties de représentation

Il résulte de l'article L 741'1 du CESEDA que peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, l'étranger qui ne présente pas de garanties de représentations effectives propres c'est-à-dire notamment lorsqu'il existe un risque que l' étranger se soustrait à cette obligation, risque qui, selon les mêmes dispositions peut être regardé comme établi, sauf circonstances particulières lorsque l'étranger s'est soustrait à l'exécution de précédente mesure d'éloignement ou lorsqu'il ne présente pas de garanties de représentations suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité.

Monsieur [K] a indiqué à l'audience que l'identité sous laquelle il a été placé au C.R.A. de [Localité 1] est sa véritable identité.

Il a présenté une attestation d'hébergement non datée envoyée par mail au conseil de Monsieur [K], émanant d'une ressortissante espagnole Madame [W] [M] accompagnée de la copie de sa carte d'identité espagnole, laquelle a indiqué dans son écrit qu'elle héberge l'intéressé à son domicile espagnol, lequel est le père de son enfant.

Une assignation à résidence ne peut être mise en place en dehors du territoire français, la demande de Monsieur [K], de pouvoir retourner en Espagne, ne peut trouver à s'appliquer en l'état. En effet, les autorités françaises n'ont aucune certitude quant à l'identité réelle de Monsieur [K], ce dernier ne dispose pas d'un titre de transport même périmé afin de prouver qu'il est bien la personne qu'il prétend être.

- Sur les perspectives d'éloignement

Il résulte des dispositions de l'article L 742-4 du CESEDA qu'un étranger ne ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ.

Il résulte de ce texte que le placement ou le maintien en rétention d'étrangers faisant l'objet d'une mesure ordonnant leur éloignement du territoire français ne saurait, sans méconnaître l'objet assigné par la loi à la mise en rétention, être décidé par l'autorité administrative lorsque les perspectives d'éloignement effectives du territoire à brève échéance sont inexistantes.

Le conseil constitutionnel a par ailleurs dans une décision en date du 20 novembre 2003 indiqué que : « l'autorité judiciaire conserve la possibilité d'interrompre à tout moment, la prolongation du maintien en rétention lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient ».

La seule exigence du CESEDA, au visa de l'article L 742-1 porte sur la saisine rapide des autorités consulaires. Il a été jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, pourvoi du 9 juin 2010, que le préfet n'ayant aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires, il ne peut lui être reproché que la saisine soit restée sans réponse et qu'il n'y a pas lieu de vérifier les diligences éventuelles postérieures à la saisine du consulat.

L'autorité préfectorale a saisi les autorités consulaires marocaines dès le 29 juin 2024 d'une demande en vue d'identifier l'intéressé. Cette demande est accompagnée de tous les documents nécessaires tels que la fiche d'empreintes et les photographies de l'intéressé. Les diligences ont été effectuées dans un temps raisonnable et adapté.

Si, effectivement, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne le 8 décembre 2023 a rejeté la requête en prolongation du maintien en rétention de Monsieur [N] [K] à l'issue du délai de 60 jours de rétention au motif que les autorités consulaires algériennes et marocaines n'ont pas, à la date de l'ordonnance, reconnu l'intéressé comme l'un de leurs ressortissants, il n'en demeure pas moins que, s'agissant de la première prolongation de 28 jours, il ne peut être exclu que les autorités consulaires marocaines s'intéressent à la situation de Monsieur [K] lors du présent placement au centre de rétention administrative de [Localité 1].

En l'absence de réponse des autorités consulaires marocaines à l'issue de cette première prolongation, il appartiendra au magistrat saisi de tirer toutes conséquences que de droit de ce silence eu égard à la motivation de la décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bayonne en date du 8 décembre 2023.

Il y a lieu en conséquence de confirmer l'ordonnance de première instance en toutes ses dispositions.

- Sur les frais irrépétibles

Au visa de l'article 700 du NCPC, les juges ont un pouvoir souverain d'appréciation de la condition d'équité.

L'application de l'article 700 relève du pouvoir souverain du juge et ce pouvoir est exclusif de l'exigence de motivation.

Il y a lieu d'indiquer que chaque partie conservera à sa charge les frais engagés par elle.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après débats en audience publique et en dernier ressort ;

Déclare l'appel recevable en la forme mais mal fondé ;

Accorde à Monsieur [N] [K] le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire dont distraction au profit de Me Nadia EDJIMBI ;

Confirme l'ordonnance du juge des libertés la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 30 juin 2024 à 11h45 en toutes ses dispositions ;

Rejette toute autre demande ;

Dit que la présente ordonnance sera notifiée par le greffe en application de l'article R.743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d'Asile, 

Le Greffier, La Conseillère déléguée,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : C.e.s.e.d.a.
Numéro d'arrêt : 24/00149
Date de la décision : 02/07/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 08/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-07-02;24.00149 ?
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