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27/06/2024 | FRANCE | N°22/05724

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 27 juin 2024, 22/05724


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 27 JUIN 2024







SÉCURITÉ SOCIALE



N° RG 22/05724 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-NA4L





















CPAM DE LA GIRONDE



c/

Monsieur [S] [P]













Nature de la décision : AU FOND









Notifié par LRAR le :

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LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Directeur des services de greffe judiciaires,





Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 27 JUIN 2024

SÉCURITÉ SOCIALE

N° RG 22/05724 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-NA4L

CPAM DE LA GIRONDE

c/

Monsieur [S] [P]

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Directeur des services de greffe judiciaires,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 décembre 2022 (R.G. n°22/00617) par le Pôle social du TJ de BORDEAUX, suivant déclaration d'appel du 16 décembre 2022.

APPELANTE :

CPAM DE LA GIRONDE, agissant en la personne de son directeur domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 6] - [Localité 1]

assistée de Me Françoise PILLET de la SELARL COULAUD-PILLET, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉ :

Monsieur [S] [P]

né le 09 Janvier 1964 à [Localité 4]

de nationalité Française

demeurant [Adresse 3] - [Localité 2]

comparant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 mars 2024, en audience publique, devant Madame Sophie LESINEAU, Conseillère magistrat chargé d'instruire l'affaire, qui a retenu l'affaire

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Eric Veyssière, président

Madame Sophie Lésineau, conseillère

Madame Valérie Collet, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Evelyne GOMBAUD,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Le délibéré a été prorogé en raison de la charge de travail de la Cour.

EXPOSE DU LITIGE

M. [P] a été employé par la société [5] en qualité de conducteur-receveur à partir du 24 mai 1988.

Le 10 septembre 2021, son employeur a établi une déclaration d'accident du travail « le 7 septembre 2021 à 9h23, deux courriers ont été remis au salarié par son manager. Après en avoir pris connaissance, notre agent a indiqué ne pas se senti ».

Le certificat médical initial a été établi le 08 septembre 2021 dans les termes suivants : « état anxieux / choc émotionnel ».

Par décision du 06 décembre 2021, la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde (en suivant la CPAM) a refusé de prendre en charge l'accident du travail au titre de la législation des risques professionnels.

Le 12 janvier 2022, M. [P] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable de la CPAM. Par décision du 21 mars 2022, ce recours a été rejeté.

Le 16 mai 2022, M. [P] a contesté cette décision devant le tribunal judiciaire de Bordeaux.

Le 18 octobre 2022, M. [P] a été licencié pour inaptitude.

Par jugement du 05 décembre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux a :

-fait droit au recours formé par M. [P] à l'encontre de la décision du 21 mars 2022,

-dit que l'accident dont a été victime M. [P] le 07 septembre 2021 devra être pris en charge au titre de la législation professionnelle,

-dit n'y avoir lieu à l'exécution provisoire,

-condamné la CPAM aux dépens.

Par déclaration du 16 décembre 2022, la CPAM a relevé appel de ce jugement.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 05 février 2024, la CPAM demande à la cour de:

-la recevoir en ses demandes et l'en déclarer bien fondée,

-infirmer le jugement,

Statuant à nouveau,

-débouter M. [P] de ses demandes,

-condamner M. [P] aux dépens et à lui verser la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La caisse fait valoir que M. [P] ne démontre aucun fait générateur brutal ou exceptionnel à la date des faits. Elle précise que la détérioration progressive de son état de santé est liée à un contexte de travail dégradé depuis 2004, excluant ainsi la qualification d'accident du travail.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe de la cour d'appel de Bordeaux le 01 février 2024, M. [P] demande à la cour de:

-reconnaître l'accident du travail,

-condamner la CPAM à prendre en charge tous les frais médicaux pour la période concernée,

-doubler son indemnité de licenciement pour inaptitude faisant suite à son accident du travail,

-condamner la CPAM à prendre en charge le crédit de sa maison jusqu'à l'âge légal de la retraite et ce depuis la date de son licenciement.

M. [P] expose que la dégradation de son état de santé a pour origine la remise le 7 septembre 2021 par son supérieur de deux courriers alors qu'il était à son poste de conduite. Il indique ne pas avoir été en capacité de reprendre son travail à la suite de cette notification et communique à la cour plusieurs attestations de collègues au soutien de ses déclarations.

L'affaire a été fixée à l'audience du 14 mars 2024, pour être plaidée.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère aux conclusions écrites soutenues oralement à l'audience conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'au jugement déféré.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon les dispositions de l'article L 411-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige, 'est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.'

En application de ce texte, constitue un accident du travail un événement ou une série d'événements survenus à des dates certaines par le fait ou à l'occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle.

Il est constant qu'il appartient à celui qui se prétend victime d'un accident du travail d'établir autrement que par ses propres affirmations, les circonstances exactes de l'accident et son caractère professionnel, en fournissant des éléments objectifs corroborant ses déclarations. S'agissant d'un trouble psychosocial, l'assuré doit démontrer que l'arrêt de travail a été causé par une brutale altération de ses facultés mentales en relation avec les événements survenus au temps et lieu du travail ou en lien avec le travail.

En l'espèce, il est établi et non contesté que M. [P] conduisait un bus le 7 septembre 2019 au matin jusqu'au terminus arrêt Parc des expositions, sans difficulté de santé. Au terminus, à 8h55, M. [P] s'est vu remettre par son manager, Monsieur [G], deux courriers, un courrier de notification de sanction suite à un entretien disciplinaire et un courrier d'information de modification de service. Il n'est pas discuté que cet entretien s'est déroulé de façon respectueuse.

Cependant, il ressort de deux attestations communiquées à la cour par M. [P] que ce dernier, à l'issue de cet entretien, a manifesté un fort mal être.

Ainsi, M. [X] indique : 'A l'arrivée de Monsieur [P], Monsieur [G] et ce dernier se sont entretenus en privé dans son bus. Environ 10 minutes après j'ai vu entrer mon collègue dans la salle de repos. Il était très en colère, visiblement très affecté et diminué, il a littéralement craqué ; il s'est assis sur une chaise et n'a quasiment plus parlé.'

M. [C], conducteur de bus présent lors des faits, corrobore ces éléments dans son attestation : 'Monsieur [P] [S] se trouvait assis au fond de la salle de repos sans voix, hagard, complètement abattu, dépité. [...] J'ai interrogé notre manager Monsieur [G] [Y] pour savoir ce qu'il se passait dans cette salle silencieuse. Monsieur [G] m'a répondu que Monsieur [P] n'était pas bien suite à une conversation professionnelle et personnelle qu'il avait eu avec lui à son poste de conduite. [...] Monsieur [S] [P] a été pris en charge par trois agents TBM de la sécurité dans un état très critique et très inquiétant.'

Monsieur [X] précise 'qu'il a été convenu par mon responsable que mon collègue devait être relevé de son service. Je confirme qu'à ce moment là celui-ci n'était pas en état de reprendre son poste de conduite.'

A travers ces témoignages, Monsieur [P] démontre bien qu'il a subi un choc brutal sur son lieu de travail nécessitant qu'il ne reprenne pas son service et qu'il aille consulter son médecin traitant très rapidement comme le démontre le certificat médical initial établi le 8 septembre 2021 mentionnant 'état anxieux / choc émotionnel' correspondant bien à la description de l'état de Monsieur [P] à l'issue de l'échange avec son supérieur hiérarchique comme décrit par les autres conducteurs présents dans la salle de repos.

La caisse relève que Monsieur [P] évoque, dans son questionnaire et à travers la communication d'un dépôt de plainte, un harcèlement de ses supérieurs depuis de nombreuses années ne permettant pas d'établir que le mal être du salarié est lié à ce fait unique du 7 septembre 2021.

Néanmoins, il est précisément décrit tant par Monsieur [P] que les attestations citées précédemment une situation de fait précise, l'échange avec son supérieur, sur les lieux du travail, ayant généré un choc pour le salarié au point qu'il a du être relevé de son service et raccompagné par des agents de sécurité jusqu'à sa voiture.

La cour reconnaît donc le caractère professionnel de l'accident du travail de Monsieur [P] en date du 7 septembre 2021. Le jugement déféré qui a dit que l'accident devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle sera confirmé.

La cour ne pourra faire droit aux demandes de Monsieur [P] concernant le doublement de ses indemnités de licenciement pour inaptitude et la prise en charge de son crédit maison jusqu'à l'âge légal de la retraite depuis la date de son licenciement, la cour n'étant pas compétente sur ces points au regard de sa saisine.

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné la CPAM aux dépens de première instance.

La CPAM succombant en appel sera condamnée au paiement des dépens d'appel et sera déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour

CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DÉBOUTE Monsieur [S] [P] de ses demandes tenant au doublement de ses indemnités de licenciement pour inaptitude et la prise en charge de son crédit maison jusqu'à l'âge légal de la retraite depuis la date de son licenciement,

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde au paiement des dépens d'appel.

Signé par monsieur Eric Veyssière, président, et par madame Evelyne Gombaud, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

E. Gombaud E. Veyssière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 22/05724
Date de la décision : 27/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-27;22.05724 ?
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