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20/06/2024 | FRANCE | N°24/00142

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, C.e.s.e.d.a., 20 juin 2024, 24/00142


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

COUR D ' A P P E L D E B O R D E A U X







N° RG 24/00142 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-N2NU





ORDONNANCE









Le VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE à 17 H 30



Nous, Noria FAUCHERIE, conseillère à la Cour d'appel de Bordeaux, agissant par délégation de madame la première présidente de ladite Cour, assistée de François CHARTAUD, greffier,



En l'absence du Ministère Public, dûment avisé,



En présence de Monsieur [U]

[D], représentant du Préfet de La Gironde,



En présence de Monsieur [H] [W] [F], né le 03 Janvier 1996 à [Localité 1] (SÉNÉGAL), de nationalité Sénégalaise, et de son conseil M...

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

COUR D ' A P P E L D E B O R D E A U X

N° RG 24/00142 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-N2NU

ORDONNANCE

Le VINGT JUIN DEUX MILLE VINGT QUATRE à 17 H 30

Nous, Noria FAUCHERIE, conseillère à la Cour d'appel de Bordeaux, agissant par délégation de madame la première présidente de ladite Cour, assistée de François CHARTAUD, greffier,

En l'absence du Ministère Public, dûment avisé,

En présence de Monsieur [U] [D], représentant du Préfet de La Gironde,

En présence de Monsieur [H] [W] [F], né le 03 Janvier 1996 à [Localité 1] (SÉNÉGAL), de nationalité Sénégalaise, et de son conseil Maître Okah Atenga CRESCENCE MARIE FRANCE,

Vu la procédure suivie contre Monsieur [H] [W] [F], né le 03 Janvier 1996 à [Localité 1] (SÉNÉGAL), de nationalité Sénégalaise et l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière du 13 juin 2023 visant l'intéressé,

Vu l'ordonnance rendue le 18 juin 2024 à 14h22 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Bordeaux, ordonnant la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [H] [W] [F], pour une durée de 30 jours supplémentaires,

Vu l'appel interjeté par le conseil de Monsieur [H] [W] [F],

né le 03 Janvier 1996 à [Localité 1] (SÉNÉGAL), de nationalité Sénégalaise, le 19 mai 2024 à 13h50,

Vu l'avis de la date et de l'heure de l'audience prévue pour les débats donné aux parties,

Vu la plaidoirie de Maître Okah Atenga CRESCENCE MARIE FRANCE, conseil de Monsieur [H] [W] [F], ainsi que les observations de Monsieur [U] [D], représentant de la préfecture de La Gironde et les explications de Monsieur [H] [W] [F] qui a eu la parole en dernier,

A l'audience, Madame la Conseillère a indiqué que la décision serait rendue le 20 juin 2024 à 17h30,

Avons rendu l'ordonnance suivante :

PROCÉDURE

Par une requête en date du 17 juin 2024, le préfet de la Gironde a sollicité, auprès du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux, une seconde prolongation du placement en rétention de Monsieur [F] [H] [W], né le 3 janvier 1996 au Sénégal, de nationalité sénégalaise.

Il est fait état de ce qu'une obligation de quitter le territoire français a été prononcée à son encontre le 13 juin 2023 par le préfet de la Gironde et, pour l'exécution de cette mesure d'éloignement, d'une ordonnance de maintien en rétention administrative prise le 20 mai 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux confirmée par la cour d'appel le 22 mai 2024.

L'impossibilité d'exécuter la décision d'éloignement résultant de la non présentation de son passeport par Monsieur [F] a justifié cette requête en 2ème prolongation.

Par courrier du 5 juin 2024, les autorités consulaires sénégalaises ont informé l'autorité préfectorale que la copie du passeport fourni par l'intéressé fait l'objet de vérification auprès des autorités compétentes. La délivrance du laissez-passer sollicité cité n'était pas parvenue au jour de la requête et l'identification de Monsieur [F] était toujours en cours.

Suite à cette requête, l'absence de ce document étant assimilable à une perte de documents de documents de voyage, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux, par une ordonnance en date du 18 juin 2024 à 14h22 a autorisé la prolongation de la rétention de Monsieur [F] pour une durée de 30 jours supplémentaires.

Par l'intermédiaire de son conseil, Monsieur [F] a formé appel de la décision le 19 mai 2024 à 13h50. L'appel est dûment accompagné d'un mémoire dont il convient de se référer pour plus ample renseignements. En substance, il est sollicité, outre l'octroi de frais irrépétibles à hauteur de 1000 € et à titre subsidiaire le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire, d'ordonner la remise en liberté de Monsieur [F] au motif qu'il y a absence de perspectives d'éloignement et défaut ou insuffisance de diligences de la part de l'autorité préfectorale sur le fondement de l'article 741'3 du CESEDA.

Monsieur [F] a accepté de répondre aux questions du magistrat. Il a expliqué être rentré légalement en France en 2019 avec un visa. Il a travaillé durant 5 ans sous une fausse identité. Il a commis un délit car il avait des problèmes avec sa copine et n'a pas trouvé de travail durant quelques mois. Il a fait des allers-retours entre la France et l'Espagne, il ne savait pas qu'il faisait l'objet d'une OQTF car il était à ce moment-là en Espagne.

Son conseil a développé oralement ses conclusions écrites. Le représentant de la préfecture a été entendu en ses observations et sollicite la confirmation de la décision querellée.

Monsieur [F] a eu la parole en dernier et a indiqué ne rien vouloir ajouter.

MOTIVATION

- Sur la recevabilité de l'appel

La déclaration d'appel régulièrement motivée a été formée dans le délai légal, elle est donc recevable.

- Sur les perspectives d'éloignement et les diligences de l'autorité préfectorale

Il résulte des dispositions de l'article L 742-4 du CESEDA qu'un étranger ne ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ.

Il résulte de ce texte que le placement ou le maintien en rétention d'étrangers faisant l'objet d'une mesure ordonnant leur éloignement du territoire français ne saurait, sans méconnaître l'objet assigné par la loi à la mise en rétention, être décidé par l'autorité administrative lorsque les perspectives d'éloignement effectives du territoire à brève échéance sont inexistantes.

Le conseil constitutionnel a par ailleurs dans une décision en date du 20 novembre 2003 indiqué que : « l'autorité judiciaire conserve la possibilité d'interrompre à tout moment, la prolongation du maintien en rétention lorsque les circonstances de droit ou de fait le justifient ».

La seule exigence du CESEDA, au visa de l'article L 742-1, porte sur la saisine rapide des autorités consulaires. Il a été jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, pourvoi du 9 juin 2010, que le préfet n'ayant aucun pouvoir de contrainte sur les autorités consulaires, il ne peut lui être reproché que la saisine soit restée sans réponse et qu'il n'y a pas lieu de vérifier les diligences éventuelles postérieures à la saisine du consulat.

La seconde prolongation de la rétention administrative d'une personne est régie par les conditions particulières de l'article L 742'4 du CESEDA.

Il résulte de ce texte, que la seconde demande de maintien en rétention peut intervenir pour quatre motifs, un seul d'entre eux étant suffisant pour justifier la mesure :

1 - l'urgence absolue,

2 - la menace d'une particulière gravité pour l'ordre public,

3 - l'impossibilité d'exécuter la mesure d'éloignement imputable à l' étranger, en raison notamment de la perte ou de la destruction des documents de voyage, la dissimulation d'identité ou d'une obstruction volontaire volontaire, étant précisé que l'absence de documents de voyage est assimilée à la perte de ce document.

4 - le retard non imputable à l'administration, tel le défaut de délivrance de documents de voyage par le consulat et l'absence de moyens de transport susceptible d'être surmonté à bref délai ou la délivrance de documents de voyage trop tardive malgré les diligences de l'administration pour pouvoir procéder à l'exécution de la mesure d'éloignement dans le délai de 30 jours.

Dès lors, le maintien en rétention ne ce conçoit que s'il existe des perspectives d'éloignement et il convient de se demander non seulement si la préfecture a effectué les démarches nécessaires mais également si les diligences ont une chance d'aboutir dans la durée légale de la rétention.

En l'espèce il n'est pas contestable que l'autorité préfectorale a effectué les démarches nécessaires auprès des autorités consulaires sénégalaises, étant rappelé que Monsieur [F] ne dispose pas d'un passeport en original en cours de validité. La préfecture de la Gironde a saisi les autorités compétentes dès le 14 mai 2024 aux fins de la délivrance d'un laisser passer consulaire pour l'intéressé soit en amont de sa sortie de détention. Ce dernier était incarcéré à la maison d'arrêt de Bordeaux-Gradignan afin d'effectuer une peine de 3 mois d'emprisonnement prononcée par le tribunal correctionnel de Bordeaux, le 11 mars 2024, pour des faits de vol aggravé.

L'autorités préfectorale sur laquelle repose la charge de la preuve de perspectives raisonnables d'éloignement pendant la durée de la rétention a joint au dossier une correspondance des autorités consulaires sénégalaises en date du 5 juin 2024 sur laquelle il est mentionné : « nous avons bien reçu votre demande de laissez-passer consulaire en date du 31 mai 2024, en faveur de Monsieur [H] [W] [F]. La copie du passeport fournie fait l'objet de vérification auprès des autorités sénégalaises compétentes et toute suite y afférente sera communiquée, en temps opportun. »

Même si cette correspondance a tardé (l'autorité administrative française ne peut enjoindre à un pays étranger de collaborer, les relances selon la Cour de Cassation ne sont pas obligatoires même si elles sont souhaitables), il n'en demeure pas moins que les autorités sollicitées ne se désintéressent pas du retenu. Il ne peut être affirmé que la délivrance du laissez-passer consulaire n'interviendra pas dans le délai supplémentaire de 30 jours à charge pour l'autorité préfectorale de relancer amiablement, à nouveau les autorités consulaires sénégalaises afin de s'assurer que les recherches actuelles soient suivies de la délivrance d'un laissez-passer consulaire.

Ce titre peut être obtenu rapidement car Monsieur [F] dispose de cette copie de passeport qui va faciliter les recherches des autorités consulaires sénégalaises.

Il y a lieu en conséquence de confirmer la décision querellée en toutes ses dispositions.

- Sur les frais irrépétibles et sur l'aide juridictionnelle provisoire

Au visa de l'article 700 du NCPC, les juges ont un pouvoir souverain d'appréciation de la condition d'équité.

L'application de l'article 700 relève du pouvoir souverain du juge et ce pouvoir est exclusif de l'exigence de motivation.

Il y a lieu de dire que chaque partie conservera à sa charge les frais engagés par elle.

En revanche il y a lieu d'accorder à Monsieur [F] le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire dont distraction profit de son conseil.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant après débats en audience publique et en dernier ressort ;

Déclare l'appel recevable en la forme mais mal fondé ;

Accorde à Monsieur [H] [W] [F] le bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire dont distraction au profit de Me Okah Atenga CRESCENCE MARIE FRANCE ;

Confirme l'ordonnance du juge des libertés la détention du tribunal judiciaire de Bordeaux en date du 18 juin 2024 4 à 14h22 en toutes ses dispositions ;

Rejette toute autre demande ;

Dit que la présente ordonnance sera notifiée par le greffe en application de l'article R.743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d'Asile, 

Le Greffier, La Conseillère déléguée,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : C.e.s.e.d.a.
Numéro d'arrêt : 24/00142
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 01/07/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;24.00142 ?
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