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20/06/2024 | FRANCE | N°23/02808

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Juridic.premier president, 20 juin 2024, 23/02808


CONTESTATION EN MATIÈRE D'HONORAIRES D'AVOCAT

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Monsieur [K] [J], Monsieur [G] [J], Société LDH HOLDING, Société MDH HOLDING,

C/

Société ALTAIR AVOCATS

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N° RG 23/02808 - N° Portalis DBVJ-V-B7H-NJVI

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DU 20 JUIN 2024

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Notifications



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Grosse délivrée



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ARRÊT

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Rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure c...

CONTESTATION EN MATIÈRE D'HONORAIRES D'AVOCAT

---------------------------

Monsieur [K] [J], Monsieur [G] [J], Société LDH HOLDING, Société MDH HOLDING,

C/

Société ALTAIR AVOCATS

--------------------------

N° RG 23/02808 - N° Portalis DBVJ-V-B7H-NJVI

--------------------------

DU 20 JUIN 2024

--------------------------

Notifications

le :

Grosse délivrée

le :

ARRÊT

--------------

Rendu par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Le 20 JUIN 2024

LA JURIDICTION DE LA PREMIERE PRESIDENTE DE LA COUR D'APPEL DE BORDEAUX

Vu l'ordonnance de fixation en collégialité du 08 décembre 2023 de la première présidente ;

Vu le renvoi de l'affaire devant la formation collégiale composée de :

Isabelle DELAQUYS, conseillère,

Noria FAUCHERIE, conseillère,

Nathalie PIGNON, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

Nathalie PIGNON, ayant entendu les parties en qualité de rapporteur, a rendu compte des débats à la Cour,

assistées de Séverine ROMA, greffière,

dans l'affaire

ENTRE :

Monsieur [K] [J]

demeurant [Adresse 2]

Monsieur [G] [J]

demeurant [Adresse 2]

Société LDH HOLDING agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité [Adresse 2]

Société MDH HOLDING, agissant en la personne de son représentant légal, [G] [J], domicilié [Adresse 3]

représentés par Me Elise NIVAUD, avocat au barreau de PARIS

Demandeurs au recours contre une décision rendue le 23 mai 2023 par le Bâtonnier de l'ordre des avocats de BORDEAUX,

ET :

Société ALTAÏR AVOCATS - Association d'avocats à responsabilité professionnelle individuelle (AARPI), Avocats Associés, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité [Adresse 1]

représentée par Me Olivier NICOLAS membre de la SELARL DUCASSE NICOLAS SICET, avocat au barreau de BORDEAUX

Défenderesse,

A rendu publiquement l'arrêt contradictoire suivant après que la cause a été débattue devant nous, assistées de Séverine Roma, Greffière, en audience publique, le 26 Mars 2024  et qu'il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus désignés, lequel a été prorogé au 20 juin 2024, ce dont les parties ont été avisées.

Faits, procédure et prétentions :

Dans le cadre d'un projet de cession de son groupe de sociétés, une lettre de mission a été signée le 29 mars 2021 entre le Cabinet Altaïr Avocats, représenté par Maître [W] [H] et l'ensemble des associés de la société HOLDING NEW AIRE (ci-après « HNA »), au nombre desquels on comptait notamment, M. [K] [J] et M. [G] [J].

Dans le cadre de la lettre de mission précitée, une convention d'honoraires forfaitaires pour un montant de 120.000 euros HT a été conclue entre ces mêmes parties.

Par e-mail du 29 septembre 2021, le Cabinet Coblence Avocats a informé le Cabinet Altaïr Avocats qu'il avait été mandaté par M. [G] [J] afin de 'l'accompagner dans la revue d'un avenant à un protocole de cession d'actions de Holding NEW Aire'.

Par e-mail du 6 décembre 2021, M. [G] [J] a mis un terme à la mission du cabinet Altaïr.

L'AARPI ALTAÏR AVOCATS a saisi le Bâtonnier de l'ordre des avocats de Bordeaux d'une demande de taxation de ses honoraires et par décision en date du 23 mai 2023, Mme la Bâtonnière de Bordeaux a fixé les honoraires dus au Cabinet Altaïr Avocats dans les termes suivants :

- 1.304 euros TTC par Monsieur [K] [J]

- 10.564,98 euros TTC par Monsieur [G] [J]

- 3.978,17 euros TTC par la société LDH HOLDING

- 37.368,73 euros TTC par la société MDH HOLDING.

M. [K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING ont relevé appel de cette décision.

Ils demandent à la juridiction du premier président d'infirmer la décision de Madame la Bâtonnière de Bordeaux en date du 23 mai 2023 en toutes ses dispositions et en conséquence de :

- juger que le montant des honoraires de M. [W] [H] du Cabinet Altaïr Avocats doit être fixé à de plus justes proportions ;

- En tout état de cause, juger qu'aucun honoraire ne peut être facturé après le 29 juillet 2021 ;

- Par conséquent, à tout le moins, de soustraire la somme de 6.943,67 € des sommes réclamées ;

- débouter [W] [H] du Cabinet Altaïr Avocats de sa demande de condamnation au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner [W] [H] du Cabinet Altaïr Avocats à payer aux appelants une somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du CPC, ainsi qu'aux entiers dépens.

Ils soutiennent :

- qu'aucune réelle prestation n'a été effectuée pour leur compte à partir du 29 juillet 2021, en lien avec la cession de leur participation, et encore moins après le 1er octobre 2021,

- qu'il incombe au Cabinet Altaïr Avocats de justifier de la réalité des prestations qui auraient été accomplies dans leur intérêt et dont le paiement est exigé.

L'AARPI ALTAÏR AVOCATS demande à la cour de :

- confirmer la décision du Bâtonnier de l'Ordre des Avocats du Barreau de BORDEAUX du 23 mai 2023 en toutes ses dispositions ;

En conséquence,

- condamner :

- M. [K] [J] à lui payer la somme de 1.304 € TTC au titre des honoraires et frais qui lui sont dus ;

- M. [G] [J] à lui payer la somme de 10.564,98 €TTC au titre des honoraires et frais qui lui sont dus ;

- la société LDH HOLDING à lui payer la somme de 3.978,17 € TTC au titre des honoraires et frais qui lui sont dus ;

- la société MDH HOLDING à lui payer la somme de 37.368,73 € TTC au titre des honoraires et frais qui lui sont dus ;

- in solidum M. [K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING à lui payer la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile relatif à la procédure de première instance ;

- dire que ces sommes porteront intérêt à un taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal depuis le 10 juin 2022 et qu'une indemnité forfaitaire de 40 € sera due par chacun des appelants ;

En toute hypothèse,

- débouter M. [K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING de l'intégralité de leurs demandes, fins et conclusions ;

- condamner in solidum M.[K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING à lui verser la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile devant la juridiction de céans ;

- condamner M. [K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Elle fait valoir que sa mission n'a pas pris fin le 30 septembre 2021, mais le 6 décembre 2021, date du mail reçu de M. [G] [J].

Elle indique que la convention d'honoraires prévoyait qu'en cas de non-aboutissement de la mission, les honoraires seraient facturés au temps passé dans la limite des montants fixés à hauteur de 300 euros HT de l'heure s'agissant de Maître [W] [H], de 260 euros HT s'agissant d'un autre avocat de l'équipe Corporate ou de 140 euros HT pour Madame [T] [V], juriste, et affirme que le montant des honoraires facturés est parfaitement conforme à ce qui est indiqué dans la convention.

MOTIFS

Conformément à l'article 10 de la loi n 71-1130 du 31 décembre 1971 dans sa rédaction issue de la loi n 2015-990 du 6 août 2015 les honoraires de postulation, de consultation, d'assistance, de conseil, de rédaction d'actes juridiques sous seing privé et de plaidoirie sont fixés en accord avec le client.

Sauf urgence ou force majeure ou lorsqu'il intervient au titre de l'aide juridictionnelle totale ou de la troisième partie de la loi n 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, l'avocat doit conclure par écrit avec son client une convention d'honoraires.

Lorsque la mission de l'avocat est interrompue avant son terme, la convention est caduque, que la rupture intervienne à l'initiative de l'avocat ou de son client.
Si, à la date du dessaisissement de l'avocat, il n'a pas été mis fin à son mandat par un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable, les honoraires correspondant à la mission partielle effectuée par l'avocat jusqu'à cette date doivent être appréciés en fonction des seuls critères définis par l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 sauf en cas de stipulation prévoyant le versement d'honoraires en cas de dessaisissement de l'avocat.

En l'espèce, la convention d'honoraires, dont la validité n'est contestée par aucun des appelants prévoyait qu'en cas de non-aboutissement de la mission, les honoraires seraient facturés au temps passé dans la limite des montants fixés à hauteur de 300 € HT de l'heure s'agissant de Maître [W] [H], de 260 € HT s'agissant d'un autre avocat de l'équipe Corporate ou de 140 € HT pour Madame [T] [V], juriste.

La rupture de la convention entre les appelants et le cabinet intimé résulte d'un e-mail adressé le 6 décembre 2021 par M. [G] [J] à Me [H] qui indique expressément : 'Je vous prie de bien vouloir noter que j'entends, par le présent mail, en qualité de cédant majoritaire des actions de la société Holding New Aire, vous dessaisir de la représentation de mes intérêts me concernant et concernant cette société... Je vous informe en effet avoir mandaté, à compter de ce jour, votre confrère [I] [U]...'

Des termes clairs de cet e-mail, il ressort que, contrairement à ce qui est soutenu par les appelants, la mission confiée à M. [W] [H] du Cabinet Altaïr a perduré jusqu'au 6 décembre 2021.

M. [G] [J] a d'ailleurs confirmé par e-mail du 9 décembre 2021 sa demande de facturation des honoraires au temps passé 'à la date de ce jour'.

Il n'est produit aux débats aucune pièce de nature à démontrer que le cabinet intimé avait été dessaisi antérieurement à cette date, étant précisé que les développements des appelants sur les manquements imputés à Me [H] sont indifférents à la solution du présent litige, ni le Bâtonnier, ni la juridiction du premier président saisie sur recours n'étant juge de la responsabilité professionnelle de l'avocat.

Pour justifier des diligences accomplies, la société intimée produit, outre le projet de protocole de cession, des échanges d'e-mails avec le cabinet Coblence, datant de septembre, octobre et novembre 2021, mais également des échanges avec les autres parties intervenantes au projet de cession et/ou leurs conseils, ainsi que des messages de fixation de réunions en visio-conférences dont il n'est ni démontré ni allégué qu'elles n'ont pas eu lieu.

Il ressort de l'ensemble de ces éléments qu'entre le mois de septembre 2021 et la date de rupture des relations contractuelles, la société ALTAÏR a accompli plusieurs diligences de nature à faire progresser le projet de cession, dont le quantum n'apparaît pas excessif au regard de la complexité du dossier et du nombre des intervenants.

Il en résulte que c'est à tort que les appelants prétendent voir diminuer le montant des honoraires qui leur ont été facturés. La décision déférée sera en conséquence confirmée.

Il résulte des dispositions d'ordre public de l'article L. 441-6 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-776 du 04 août 2008 que dans les rapports entre l'avocat, prestataire de services et son client professionnel, les pénalités de retard pour non paiement des factures sont dues de plein droit à compter du 30ème jour suivant la délivrance de la facture au client sans avoir à être prévues par une convention d'honoraires et sans qu'un rappel soit nécessaire.

Ces pénalités correspondent, sauf stipulations contraires, à un taux d'intérêt égal à celui appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente, majoré de 10 points de pourcentage.

En l'espèce, les articles 11 et 12 de la convention d'honoraires prévoient que toute somme non payée dans les 30 jours de l'émission de la facture porte intérêt à un taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal.

Par ailleurs, en application de l'article L. 441-6 du code de commerce tout client professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard de l'avocat, prestataire de services, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé à la somme de quarante euros par l'article D. 441-5 de ce code.

Aucun des appelants ne contestant sa qualité de professionnel, et aucun paiement n'étant intervenu, il convient, en complément de la décision déférée de dire que les sommes dues porteront intérêt à un taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal depuis le 10 juin 2022, date d'émission des factures, et qu'une indemnité forfaitaire de 40 euros sera due par chacun des appelants.

Enfin il convient, en équité, de condamner in solidum M. [K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING à verser à l'AARPI ALTAIR AVOCATS la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Les appelants, qui succombent, supporteront les dépens.

PAR CES MOTIFS

Confirme la décision déférée ;

Y ajoutant :

Dit que les sommes dues porteront intérêt à un taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal depuis le 10 juin 2022, date d'émission des factures, et qu'une indemnité forfaitaire de 40 euros sera due par chacun des appelants ;

Condamne in solidum solidum M. [K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING à verser à l'AARPI ALTAIR AVOCATS la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne in solidum solidum M. [K] [J], M. [G] [J], la société LDH HOLDING et la société MDH HOLDING aux dépens.

Conformément aux articles 11 et 12 de la convention d'honoraires du 2 avril 2021, les sommes dues à l'AARPI ALTAIR AVOCATS porteront intérêt à un taux égal à trois fois le taux d'intérêt légal depuis le 10 juin 2022.

Les appelants supporteront, en sus, une indemnité forfaitaire de 40 € chacun.

Dit qu'en application de l'article 177 du décret n' 91-1197 du 27 novembre 1991, l'arrêt sera notifié aux parties par le greffe de la cour par lettre recommandée avec accusé de réception.

Le présent arrêt a été signé par Isabelle DELAQUYS, conseillère, et par Séverine ROMA, greffière, à laquelle la minute a été remise par le Magistrat signataire.

La Greffière La Conseillère


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Juridic.premier president
Numéro d'arrêt : 23/02808
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;23.02808 ?
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