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20/06/2024 | FRANCE | N°22/03367

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 20 juin 2024, 22/03367


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 20 JUIN 2024







SÉCURITÉ SOCIALE



N° RG 22/03367 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MZK6





















Madame [H] [U]



c/

G.I.E. MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES (M DPH) DE LA GIRONDE













Nature de la décision : AU FOND


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Notifié par LRAR le :



LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Directeur des services de greffe judiciaires,





Grosse délivrée le :...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 20 JUIN 2024

SÉCURITÉ SOCIALE

N° RG 22/03367 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MZK6

Madame [H] [U]

c/

G.I.E. MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES (M DPH) DE LA GIRONDE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Directeur des services de greffe judiciaires,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 10 mai 2022 (R.G. n°21/00675) par le Pole social du TJ de BORDEAUX, suivant déclaration d'appel du 12 juillet 2022.

APPELANTE :

Madame [H] [U]

née le 01 Janvier 1973 à [Localité 3]

de nationalité Marocaine, demeurant [Adresse 2]

représentée par Me Nadia BOUCHAMA, avocat au barreau de BORDEAUX substituée par Me FRALEUX

INTIMÉE :

G.I.E. MAISON DEPARTEMENTALE DES PERSONNES HANDICAPEES (M DPH) DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]

représentée par Madame [J] dûment mandatée

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 avril 2024, en audience publique, devant Madame Valérie Collet, conseillère chargée d'instruire l'affaire, qui a retenu l'affaire.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Paule Menu, présidente

Madame Sophie Lésineau, conseillère

Madame Valérie Collet, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Sylvaine Déchamps,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCÉDURE

Le 21 août 2020, Mme [H] [U] a déposé une demande d'allocation adultes handicapés (AAH) auprès de la maison départementale des personnes handicapées (la MDPH) de la Gironde.

Par décision du 3 février 2021, la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) lui a refusé le bénéfice de cette prestation, estimant que son état de santé justifiait un taux d'incapacité compris entre 50 et 79% mais qu'aucune restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi ne pouvait être retenue.

Le 5 mars 2021, Mme [U] a formé un recours administratif préalable obligatoire à l'encontre de cette décision. La CDAPH a rejeté ce recours par décision du 7 avril 2021.

Par lettre recommandée du 28 avril 2021, Mme [U] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux d'un recours contre la décision de rejet de sa demande d'AAH.

Par jugement du 10 mai 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux, après avoir ordonné une consultation médicale réalisée par le Dr [T], a :

- constaté qu'à la date de la demande du 21 août 2020, Mme [U] présentait un taux d'incapacité compris entre 50% et 79% mais n'était pas atteinte d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi ;

En conséquence,

- dit qu'à cette date, Mme [U] n'avait pas droit à l'allocation aux adultes handicapés ;

En conséquence,

- rejeté le recours par Mme [U] à l'encontre de la décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées de la Gironde en date du 7 avril 2021, sur recours administratif préalable obligatoire de sa décision initiale du 3 février 2021 ;

- rappelé que le coût de la consultation médicale était à la charge de la caisse nationale d'assurance maladie ;

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens ;

- débouté Mme [U] de sa demande au titre de ses frais irrépétibles ;

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement.

Par déclaration du 12 juillet 2022, Mme [U] a relevé appel de ce jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 11 avril 2024.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

Mme [U], reprenant oralement ses conclusions transmises par voie électronique le 26 mars 2024, sollicite de la cour qu'elle infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau, qu'elle :

A titre principal :

- fixe son taux d'incapacité permanente partielle a minima à hauteur de 80 % ;

A titre subsidiaire :

- ordonne une mesure d'expertise confiée à tel expert qu'il plaira, au besoin à l'audience, avec pour missions de déterminer son taux d'incapacité permanente partielle de Mme [U] et déterminer s'il existe une restriction substantielle et durable pour l'accès à un emploi ;

En tout état de cause :

- ordonne à la MDPH de la Gironde sa prise en charge au titre de l'allocation adulte handicapé ;

- condamne la MDPH de la Gironde à payer Maître Nadia Bouchama, son avocat, la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 au titre des frais irrépétibles de première instance ;

- condamne la MDPH de la Gironde à payer Maître Nadia Bouchama, avocat de Mme [U], la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 au titre des frais irrépétibles d'appel ;

- condamne la MDPH de la Gironde aux dépens de l'instance.

Mme [U] indique présenter :

-une gonalgie gauche ayant fait l'objet d'infiltrations, de viscosupplémentations et d'une thérapie cellulaire par injection PRP ;

-des poly-arthralgies diffuses en rapport avec une polyarthrite rhumatoïde nécessitant un traitement de fond au long cours ;

-une inflammation de la face plantaire des deux pieds ;

-un remaniement dégénératif du médio-pied au niveau talo-naviculaire.

Ces pathologies entraînent chez elle des douleurs, réveils nocturnes, difficultés à se déplacer (fatigabilité, marche limitée, besoin d'une canne anglais, difficultés à monter des escaliers, plier le genou et aller chercher sa fille à l'école). Elle considère ainsi qu'au vu de ses pathologies et du fait qu'elle doit être aidée pour marcher, son taux d'incapacité devrait être de 80% sans condition supplémentaire pour bénéficier de l'AAH. Elle rappelle qu'en 2011, l'AAH lui a été accordée au motif qu'elle justifiait d'un taux d'IPP supérieur à 80% et affirme que depuis lors, son état de santé ne s'est pas amélioré. Mme [U] estime que le médecin-consultant désigné par le tribunal ne s'est pas placé à la date de sa demande mais à la date de son examen, tenant donc compte de l'arrêt des séances de kinésithérapies, qui ne sont, en outre, pas un obstacle à la fixation d'un taux de 80% au regard du guide-barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées. Elle insiste sur le fait qu'elle n'a en réalité jamais cessé les séances de kinésithérapie.

Si la cour devait retenir que son taux d'IPP est compris entre 50 et 80%, elle considère que la seconde condition tenant à la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est remplie, rappelant que l'AAH lui avait été accordée du 1er octobre 2015 au 30 septembre 2017 puis du 1er octobre 2017 au 30 octobre 2019 au motif qu'elle présentait une telle restriction. Elle affirme que les déficiences à l'origine de son handicap son telles qu'il lui est impossible de travailler et qu'aucun aménagement de poste ou de temps de travail ne serait de nature à lui permettre de travailler. Elle ajoute que ses limitations sont accentuées par le fait qu'elle ne maîtrise pas la langue française, qu'elle n'est pas titulaire du permis de conduire et qu'elle est titulaire d'une carte mobilité inclusion attribuée en raison d'une mobilité pédestre réduite et d'une perte d'autonomie dans le déplacement. Elle estime que la restriction à l'emploi est durable et fait observer que la MDPH de la Gironde ne fournit aucun indice sur le type de poste qu'elle pourrait éventuellement occuper, y compris à mi-temps ou avec un aménagement de poste. Elle souligne que la seule mise à niveau de français préconisée par la MDPH de la Gironde ne serait pas de nature à lui permettre de s'insérer sur le marché du travail. Elle fait valoir que le médecin consultant n'a pas motivé la prétendue absence de restriction substantielle et durable à l'emploi.

La MDPH de la Gironde, développant oralement ses conclusions datées du 6 février 2024, demande à la cour de confirmer le jugement entrepris.

La MDPH indique avoir retenu :

-un syndrome douloureux poly-articulaire avec gonflement ;

-des douleurs au niveau de sa jambe gauche avec une usure prématurée du genou entraînant une boiterie, une fatigabilité, une pénibilité à la station debout prolongée et une difficulté dans ses déplacements à l'intérieur et à l'extérieur (port de semelle orthopédique);

-une tendance au repli sur soi et à l'isolement, Mme [U] n'ayant ni emploi ni loisirs ;

-une incapacité modérée à la réalisation de certains actes de la vie quotidienne (faire les courses, préparer les repas, assurer les tâches ménagères), avec maintien de l'autonomie dans les actes essentiels (faire sa toilette, s'habiller, se déshabiller, s'alimenter) ;

-le bénéfice de séances de kinésithérapie à raison de deux séances par semaine, un suivi médical régulier auprès d'un chirurgien orthopédiste et d'un rhumatologue et un traitement antalgique à la demande.

Elle explique que selon le guide-barème, l'équipe pluridisciplinaire a reconnu à Mme [U] des difficultés entraînant une gêne notable dans sa vie sociable tout en considérant que son autonomie était conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne, ce qui correspondait à un taux d'incapacité égale ou supérieur à 50% mais inférieur à 80%.

La MDPH de la Gironde indique également que Mme [U] ne fait référence à aucune démarche d'insertion professionnelle, ne s'est pas inscrite en tant que demandeur d'emploi, n'a pas de projet professionnel et ne souhaite pas suivre de formation. Elle précise que si l'équipe pluridisciplinaire a identifié que les possibilités pour Mme [U] d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites, sa situation ne caractérise toutefois pas une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi. La MDPH de la Gironde rappelle que Mme [U] bénéficie de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé à titre définitif depuis 2019, mais qu'aucune démarche d'insertion professionnelle n'a été entreprise.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande d'attribution de l'allocation aux adultes handicapés

Par application des articles L.821-1, L.821-2, D.821-1 et R.821-5 du code de la sécurité sociale, l'allocation aux adultes handicapés est accordée aux personnes qui présentent un taux d'incapacité permanente au moins égal à 80 %, pour une période au moins égale à un an et au plus égale à dix ans.

Si le handicap n'est pas susceptible d'une évolution favorable, l'allocation aux adultes handicapés peut être attribuée sans limitation de durée.

Le bénéfice de l'allocation aux adultes handicapés peut être accordé à partir de l'âge de vingt ans ou aux requérants âgés d'au moins seize ans qui cessent de réunir les conditions exigées pour ouvrir droit aux allocations familiales.

Cette prestation est également versée à toute personne dont le taux d'incapacité permanente est inférieur à 80 % et supérieur ou égal à 50 %, et qui, compte tenu de son handicap, est atteinte d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi telle que définie à l'article D.821-1-2 du code précité.

En l'espèce, il n'est pas contesté que Mme [U] présente des pathologies articulaires, notamment du genou gauche. L'ensemble de ces atteintes a été répertorié par la MDPH ainsi que par le médecin-consultant désigné par le tribunal qui a rendu un avis clair, détaillé et motivé. Les pièces médicales en sa possession ont été décrites, tout comme les doléances de Mme [U], son traitement médicamenteux et les constatations faites à l'issue de son examen physique.

S'il est constant que l'appelante présente des difficultés à se déplacer, le médecin-consultant n'a pas retrouvé d'éléments justifiant un taux d'incapacité de 80%. En effet, le guide-barème pour l'évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées énonce que ce "taux correspond à des troubles graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle. Cette autonomie individuelle est définie comme l'ensemble des actions que doit mettre en 'uvre une personne, vis-à-vis d'elle-même, dans la vie quotidienne. Dès lors qu'elle doit être aidée totalement ou partiellement, ou surveillée dans leur accomplissement, ou ne les assure qu'avec les plus grandes difficultés, le taux de 80 % est atteint. C'est également le cas lorsqu'il y a déficience sévère avec abolition d'une fonction".

Or, il ressort du certificat médical en date du 19 août 2020 jointe à la demande d'AAH de Mme [U], qu'elle doit être accompagnée pour effectuer des courses et se déplacer en extérieur, mais il est également noté un maintien de l'autonomie.

De plus, l'appelante produit aux débats plusieurs certificats médicaux établis entre le 9 juin 2021 et le 26 mars 2024, soit postérieurement à la date de sa demande, qui ne permettent donc pas d'évaluer son état de santé au 21 août 2020.

Quant aux pièces contemporaines à la date de la demande (compte-rendu d'IRM des 13 et 28 février 2020, certificat du 13 mars 2020), ils se bornent à confirmer les atteintes déjà retenues par la MDPH comme par le médecin-consultant désigné par le tribunal.

La cour observe également que si Mme [U] a bénéficié d'une AAH pour la période du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2015 au motif que son taux d'IPP était évalué entre 80 et 95%, elle a ensuite bénéficié d'une AAH pour la période du 1er octobre 2015 au 30 septembre 2017 puis du 1er octobre 2017 au 30 septembre 2019 avec un taux d'IPP retenu entre 50% et 79%, Mme [U] ne démontrant pas qu'à la date du 21 août 2020, sa situation se serait de nouveau aggravée pour justifier un taux d'IPP d'au moins 80%.

La cour considère donc que c'est à juste titre que la CDAPH puis le médecin consultant ont retenu un taux d'IPP compris entre au moins 50% et inférieur à 80% pour Mme [U] à la date de sa demande d'AAH, sans qu'il soit nécessaire d'ordonner une expertise médicale qui n'a pas vocation à pallier la carence des parties.

Ce taux ne permet pas toutefois d'attribuer à Mme [U] l'allocation adulte handicapé sauf à ce que soit reconnue l'existence d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi.

Conformément aux dispositions de l'article D.821-1-2 du code précédemment cité, "la restriction est substantielle lorsque le demandeur rencontre, du fait de son handicap même, des difficultés importantes d'accès à l'emploi. À cet effet, sont à prendre en considération :

a) Les déficiences à l'origine du handicap ;

b) Les limitations d'activités résultant directement de ces mêmes déficiences ;

c) Les contraintes liées aux traitements et prises en charge thérapeutiques induits par le handicap ;

d) Les troubles qui peuvent aggraver ces déficiences et ces limitations d'activités.

Pour apprécier si les difficultés importantes d'accès à l'emploi sont liées au handicap, elles sont comparées à la situation d'une personne sans handicap qui présente par ailleurs les mêmes caractéristiques en matière d'accès à l'emploi.

2° La restriction pour l'accès à l'emploi est dépourvue d'un caractère substantiel lorsqu'elle peut être surmontée par le demandeur au regard :

a) Soit des réponses apportées aux besoins de compensation mentionnés à l'article L. 114 1 1 du code de l'action sociale et des familles qui permettent de faciliter l'accès à l'emploi sans constituer des charges disproportionnées pour la personne handicapée;

b) Soit des réponses susceptibles d'être apportées aux besoins d'aménagement du poste de travail de la personne handicapée par tout employeur au titre des obligations d'emploi des handicapés sans constituer pour lui des charges disproportionnées ;

c) Soit des potentialités d'adaptation dans le cadre d'une situation de travail.

3° La restriction est durable dès lors qu'elle est d'une durée prévisible d'au moins un an à compter du dépôt de la demande d'allocation aux adultes handicapés, même si la situation médicale du demandeur n'est pas stabilisée. La restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi est reconnue pour une durée de un à cinq ans.

4° Pour l'application du présent article, l'emploi auquel la personne handicapée pourrait accéder s'entend d'une activité professionnelle lui conférant les avantages reconnus aux travailleurs par la législation du travail et de la sécurité sociale.

5° Sont compatibles avec la reconnaissance d'une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi :

a) L'activité à caractère professionnel exercée en milieu protégé par un demandeur admis au bénéfice de la rémunération garantie mentionnée à l'article L. 243 4 du code de l'action sociale et des familles ;

b) L'activité professionnelle en milieu ordinaire de travail pour une durée de travail inférieure à un mi-temps, dès lors que cette limitation du temps de travail résulte exclusivement des effets du handicap du demandeur ;

c) Le suivi d'une formation professionnelle spécifique ou de droit commun, y compris rémunérée, résultant ou non d'une décision d'orientation prise par la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées mentionnée à l'article L. 241-5 du code de l'action sociale et des familles".

Il résulte de ce texte que relèvent de la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi :

- les personnes dont les tentatives d'insertion ou de réinsertion professionnelle se sont soldées par des échecs en raison des effets du handicap ;

- les personnes ponctuellement en emploi ordinaire de travail d'une durée supérieure ou égale à un mi-temps, mais dont le handicap fluctuant ne leur permet pas une insertion pérenne sur le marché du travail ;

- les personnes en emploi avec un contrat de travail d'une durée supérieure ou égale à un mi-temps, mais dont les conséquences du handicap ne leur permettent plus un maintien pérenne dans leur travail ;

- les personnes connaissant des arrêts de travail prolongés d'une durée à venir prévisible d'au moins un an dont les conséquences du handicap ne leur permettent pas un exercice effectif et un maintien dans une activité professionnelle ;

- les personnes connaissant des arrêts de travail répétés et réguliers en lien direct avec un handicap au cours d'au moins une année ;

- les personnes ayant strictement besoin de formation pour être employables.

A contrario, ne relèvent pas de la restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi:

- des personnes exerçant une activité professionnelle (entreprise adaptée incluse) pour une durée de travail supérieure ou égale à un mi-temps sans rencontrer de difficultés disproportionnées liées au handicap pour s'y maintenir (éventuellement avec un aménagement de poste) ;

- des personnes en arrêt de travail prolongé dont la durée prévisible est inférieure à un an;

- des personnes n'ayant pas strictement besoin de formation pour être employables (d'autres compétences acquises sont mobilisables et permettent d'envisager l'accès et le maintien dans l'emploi) ou si la formation ne peut pas être suivie pour des raisons autres que le handicap.

Afin d'évaluer les capacités d'accès ou de maintien dans l'emploi de la personne handicapée, il faut tenir compte :

- des facteurs liés au handicap,

- des facteurs personnels (durée de l'inactivité, formation initiale'),

- des facteurs environnementaux (marché du travail, réseau de transports')

Doivent, en revanche, être exclus les restrictions d'accès à l'emploi liés à des facteurs étrangers au handicap telles que la situation familiale, le logement, les ressources et la barrière linguistique.

La commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées a considéré que la situation Mme [U], lors de l'évaluation faite par l'équipe pluridisciplinaire, ne permettait pas de conclure qu'elle rencontrait une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi, précisant que sa situation n'interdisait pas l'accès à l'emploi ou le maintien dans l'emploi pour une durée de travail supérieure ou égale à un mi-temps.

Le Dr [T], désignée par le tribunal, pour sa part, n'a procédé à aucune analyse de ce chef relevant, sans aucune référence médicale ni motivation particulière que « pas de RSDAE». A l'évidence, cet avis ne permet pas à la cour de considérer qu'il n'existe pas de restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi de Mme [U].

Cependant, Mme [U] ne produit aucun élément démontrant que son état de santé, à la date de la demande, serait identique à celui ayant permis l'attribution de l'AAH du 1er octobre 2017 au 30 octobre 2019.

Par ailleurs, le Dr [C] a effectivement indiqué dans son certificat médical du 14 juin 2021 mais également dans celui antérieur du 2 mars 2021, que les problèmes de santé de Mme [U] étaient tels que 'actuellement', ils l'empêchaient de travailler, la cour constate que le Dr [C] n'indique pas qu'il y avait une impossibilité de travailler à la date du 21 août 2020. La cour constate également que tous les autres documents médicaux produits par Mme [U] sont largement postérieurs à la date de la demande d'AAH, objet du présent litige, de sorte qu'ils ne permettent pas de retenir que Mme [U] présentait une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi le 21 août 2020.

En outre, la nécessité d'un suivi kinésithérapeutique et d'une prise en charge médicamenteuse ne suffit pas à démontrer une impossibilité à exercer une activité professionnelle.

Il est par ailleurs inopérant pour Mme [U] de soutenir qu'elle est dans une situation de précarité financière et qu'elle ne maîtrise pas la langue française, ces éléments ne figurant pas dans les conditions d'octroi de l'AAH.

Enfin, le fait que Mme [U] présente, incontestablement, des difficultés à la marche et doit être aidée ne suffit pas à lui seul à caractériser une restriction substantielle et durable pour l'accès à l'emploi au sens des textes sus visés.

Il convient donc de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, Mme [U] ne présentant pas les conditions requises pour l'attribution de l'AAH à la date du 21 août 2020.

Sur les frais du procès

En application de l'article 696 du code de procédure civile, Mme [U] qui succombe, sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel. Elle sera également déboutée de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 10 mai 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux ;

Y ajoutant,

Déboute Mme [H] [U] de ses demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

Condamne Mme [H] [U] aux dépens de la procédure d'appel.

Signé par Madame Marie-Paule Menu, présidente,et par madame Sylvaine Déchamps, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

S. Déchamps MP. Menu


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 22/03367
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.03367 ?
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