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20/06/2024 | FRANCE | N°22/02779

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 20 juin 2024, 22/02779


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 20 JUIN 2024







SÉCURITÉ SOCIALE



N° RG 22/02779 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MXUO





















Monsieur [C] [H]



c/

CPAM DE LA GIRONDE













Nature de la décision : AU FOND









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La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Directeur des services de greffe judiciaires,





Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 20 JUIN 2024

SÉCURITÉ SOCIALE

N° RG 22/02779 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MXUO

Monsieur [C] [H]

c/

CPAM DE LA GIRONDE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Directeur des services de greffe judiciaires,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 mai 2022 (R.G. n°18/00527) par le Pole social du TJ de BORDEAUX, suivant déclaration d'appel du 09 juin 2022.

APPELANT :

Monsieur [C] [H] - comparant -

né le 16 Mai 1954 à Les Boissiers (30114)

de nationalité Française, demeurant [Adresse 1]

assisté de Me Jean-Marc DUCOURAU de la SARL CABINET DUCOURAU AVOCAT, avocat au barreau de BORDEAUX substitué par Me DO ROGEIRO

INTIMÉE :

CPAM DE LA GIRONDE prise en la personne de son directeur domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 3]

représentée par Me Françoise PILLET de la SELARL COULAUD-PILLET, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 avril 2024, en audience publique, devant Madame Valérie Collet, conseillère chargée d'instruire l'affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Marie-Paule Menu, présidente

Madame Sophie Lésineau, conseillère

Madame Valérie Collet, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Sylvaine Déchamps,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

FAITS ET PROCÉDURE

La Société nationale des poudres et explosifs, qui employait M. [C] [H] en qualité d'ouvrier qualifié depuis le 8 mai 1978, a établi une déclaration d'accident du travail survenu à son salarié le 10 octobre 1980 dans les termes suivants : 'L'intéressé a été accidenté à [Adresse 2] avant le carrefour de [Adresse 4] et du centre Psychothérapique. Un fourgon s'est déporté sur l'axe médian de la route et il est venu percuter le véhicule de l'intéressé'.

M. [H] a été déclaré consolidé de ses séquelles au 26 novembre 1980, selon le certificat médical final établi le même jour.

La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde a attribué à M. [H] un taux d'incapacité permanente partielle de 8%.

Le 11 septembre 2017, un certificat médical d'aggravation a été adressé à la CPAM de la Gironde.

Le 15 février 2018, la CPAM de la Gironde a notifié à M. [H] l'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 9%.

Par lettre recommandée réceptionnée par le greffe le 26 mars 2018, M. [H] a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Bordeaux afin de contester ce taux.

Par jugement du 5 mai 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux, après avoir ordonné une consultation médicale réalisée par le Dr [W] le 24 mars 2022, a :

- dit qu'à la date de la demande de révision pour aggravation, le 11 septembre 2017, le taux d'incapacité permanente partielle en réparation des séquelles de l'accident du travail dont M. [H] a été victime le 10 octobre 1980 était de 9% ;

En conséquence,

- débouté M. [H] de son recours à l'encontre de la décision de la CPAM de la Gironde en date du 15 février 2018 ;

- rappelé que le coût de la présente consultation médicale était à la charge de la caisse nationale d'assurance maladie ;

- dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Par déclaration du 9 juin 2022, M. [H] a relevé appel de ce jugement.

Les parties ont été convoquées à l'audience du 11 avril 2024.

PRÉTENTIONS ET MOYENS

M. [H], reprenant oralement ses conclusions transmises par voie électronique le 8 décembre 2022, sollicite de la cour qu'elle infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau, qu'elle :

A titre principal

- juge qu'il y a lieu de fixer à plus de 10% son taux d'incapacité permanente partielle suite à l'aggravation de son état de santé, postérieurement à l'accident du 10 octobre 1980, à effet du 15 février 2018, date de la demande de révision qu'il a présentée ;

A titre subsidiaire,

- ordonne une mesure d'expertise médicale complémentaire afin de fixer son taux d'incapacité permanente partielle ;

En tout état de cause

- déboute la CPAM de la Gironde de ses demandes ;

- condamne la CPAM de la Gironde à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne la CPAM de la Gironde aux entiers dépens.

M. [H] indique avoir été victime d'un accident de trajet le 10 octobre 1980 dont il conserve des séquelles qui n'ont de cesse de s'aggraver. Il explique souffrir de raideurs douloureuses du cou entraînant des fourmillements dans les deux mains et soutient que le médecin-consultant désigné par le tribunal n'en a pas tenu compte. M. [H] ajoute présenter une intensification des douleurs par l'apparition d'une arthrose invalidante et se prévaut du certificat médical rédigé le 18 mai 2018 par le docteur [F] selon lequel les lésions conservées justifieraient un taux d'incapacité permanente partielle d'au moins 10%. L'assuré produit également un autre certificat médical en date du 26 mai 2022 et émanant du même praticien, contestant l'avis rendu par le professeur [W] et arguant un taux d'incapacité permanente partielle compris entre 10 et 15%. M. [H] ajoute que son état de santé entraîne un retentissement sur son rythme de vie et son sommeil et nécessite une prise en charge médicamenteuse et kinésithérapeutique. Il estime que le rapport du médecin consultant doit être écarté en ce qu'il ne comporte aucun développement sur des points déterminants pour fixer l'IPP et en ce qu'il ne mentionne aucun compte-rendu d'un examen complet du rachis cervical ni aucune analyse des bilans radiologiques ni aucune analyse du retentissement de l'accident sur l'accélération de l'arthrose.

La CPAM de la Gironde, reprenant oralement ses conclusions transmises par voie électronique le 27 mars 2024, sollicite de la cour qu'elle :

- confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;

- déboute M. [H] de ses demandes ;

- condamne M. [H] à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux entiers dépens.

La CPAM de la Gironde se prévaut des avis rendus par son médecin-conseil et le médecin-consultant désigné par le tribunal, selon lesquels l'état de santé de M. [H] justifie bien un taux d'incapacité permanente partielle de 9%. Elle rappelle que l'annexe I au code de la sécurité sociale prévoit en son paragraphe 3.1 un taux d'incapacité compris entre 5 et 15% pour une persistance des douleurs et d'une gêne fonctionnelle discrètes du rachis cervical et considère ainsi que les deux praticiens ont fait une juste application de ce texte au regard des séquelles imputables à l'accident du 10 octobre 1980. Elle estime que M. [H] ne fait valoir aucun nouvel élément médical au soutien de son appel, la note du docteur [F] se bornant à soutenir un avis différent de celui du docteur [W], sans toutefois l'objectiver.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il y a lieu d'écarter des débats la note en délibéré que M. [H] a adressée à la cour, le 11 avril 2024, après l'audience alors qu'il n'y avait pas été autorisé.

Sur la demande d'augmentation du taux d'incapacité permanente partielle

Conformément aux dispositions des articles L434-2 et R434-32 du code de la sécurité sociale, le taux d'incapacité permanente partielle d'une victime d'un accident du travail est déterminé d'après la nature de son infirmité, son état général, son âge, ses facultés physiques et mentales mais aussi d'après ses aptitudes et qualifications professionnelles compte tenu de barèmes d'invalidité annexés au code précité.

La notion de qualification professionnelle s'entend au regard des possibilités d'exercice d'une profession déterminée. Quant aux aptitudes, il s'agit là des facultés que peut avoir la victime à se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.

Les barèmes indicatifs d'invalidité dont il est tenu compte pour la détermination du taux d'incapacité permanente, d'une part, en matière d'accidents du travail et, d'autre part, en matière de maladies professionnelles sont annexés au livre IV de la partie réglementaire du code de la sécurité sociale (annexes 1 et 2 du code). Lorsque ce dernier barème ne comporte pas de référence à la lésion considérée, il est fait application du barème indicatif d'invalidité en matière d'accidents du travail.

Les barèmes évoqués sont purement indicatifs et ont pour but de fournir des bases d'estimation du préjudice consécutif aux séquelles des accidents du travail ou maladies professionnelles. Le médecin chargé de l'évaluation du taux d'incapacité permanente partielle dispose ainsi de l'entière liberté de s'en écarter en fonction des particularités propres à chaque assuré et précédemment cités, à condition d'en exposer clairement les raisons.

Il est en outre acquis que le taux d'incapacité permanente partielle :

- doit être fixé en fonction de l'état séquellaire au jour de la consolidation de l'état de la victime sans que puissent être pris en considération des éléments postérieurs à ladite consolidation (Cass. civ. 2e, 15 mars 2018 n°1715400),

- relève de l'appréciation souveraine et motivée des juges du fond (Cass. civ. 2e 16 septembre 2010 n°0915935 ; 4 avril 2018 n°1715786).

En l'espèce, le recours formé par M. [H] devant le tribunal du contentieux de l'incapacité de Bordeaux à l'encontre du taux d'incapacité permanente partielle de 9% fixé par la caisse suite à la rechute de son accident du travail du 10 octobre 1980, a donné lieu à la mise en 'uvre d'une consultation médicale confiée au professeur [W]. Après examen des pièces du dossier médical en sa possession et de la personne de M. [H], le praticien a confirmé le taux de 9%, concluant que "Les douleurs sont uniquement nocturnes, le patient ne prend pas de traitement antalgique mais uniquement un traitement contre l'arthrose (Arthro 50), la limitation de la mobilité du rachis est modérée le patient se plaint de difficultés à regarder vers le haut. Il n'y a pas de souffrance neurologique avérée (EMG normal). Dans ces conditions on peut proposer le maintient du taux d'IPP à 9%".

M. [H] conteste cet avis, estimant qu'il n'a pas tenu compte de toutes ses atteintes et difficultés. Il argue en effet des raideurs douloureuses du cou entraînant des fourmillements dans les deux mains et se prévaut de deux avis du docteur [F] fixant un taux d'incapacité permanente partielle compris entre 10 et 15%.

Cependant, la note du 18 mai 2018, que le médecin-consultant désigné par le tribunal cite d'ailleurs dans son rapport de consultation, se borne à évoquer une arthrose cervicale descendant jusqu'aux vertèbres dorsales sans plus d'explications. Le praticien, qui évoque les barèmes indicatifs d'invalidité, ne fait état d'aucune mesure permettant d'évaluer les limitations présentées par M. [H]. Il ne mentionne pas non plus de traitement médicamenteux et n'apporte aucun élément relatif à l'incidence de cette atteinte sur la réalisation des actes de la vie quotidienne. Le certificat médical également établi par le docteur [F], le 26 mai 2022, n'est pas plus détaillé et se borne à contester l'avis du professeur [W], qui n'aurait pas répertorié le contenu des pièces médicales qui lui ont été transmises à l'audience du 24 mars 2022 et n'en aurait pas tenu compte. Il ressort pourtant du jugement critiqué que le docteur [F] a pu assister M. [H] lors de l'audience et était présent lors de la consultation, de sorte qu'il a pu faire valoir ses observations au médecin consultant.

De plus, le fait que le médecin-consultant désigné par le tribunal ne soit pas d'accord avec l'avis du médecin-consultant de la victime, ne saurait suffire à démontrer qu'il a ignoré les pièces qui lui ont été communiquées, étant en outre observé que d'une part, le Dr [F] explique lui-même qu'il a 'remis les éléments du dossier à l'expert' de sorte que le Dr [W] a bien eu connaissance de l'entièreté des documents médicaux nécessaires à l'évaluation du taux d'IPP de M. [H] et que d'autre part, le Dr [W] évoque, dans son rapport, une IRM du 19 juillet 2017, une EMG normal, l'absence de prise de traitement antalgique, les conclusions de la CPAM du 19 janvier 2018 et le certificat médical du Dr [F] du 18 mai 2018.

De plus, les pièces produites par M. [H] à hauteur d'appel retraçant l'historique des lésions et confirmant le diagnostic d'arthrose cervicale, n'atteste pour autant pas des limitations des amplitudes de mouvements de l'assuré. En dehors du certificat médical de rechute, il n'est pas retrouvé de mentions à des paresthésies et M. [H] ne produit pas non plus de bilan neurologique se rapportant à ces symptômes. Plusieurs ordonnances de médicaments sans rapport avec l'espèce sont versées (Titanoreine, Desloratadine, Allopurinol). Une prescription pour du Tramadol a été effectuée le 7 juin 2018 sans qu'il soit précisé si ce médicament concernait les douleurs arthrosiques de M. [H].

Si un certificat médical en date du 28 mars 2018 évoque un traitement par Arcoxia et Pascledine, des anti-inflammatoires, il y a lieu de constater que rien n'est produit concernant la période où M. [H] a été examiné par le médecin-consultant désigné par le tribunal, de sorte que ses observations sur l'absence de traitement antalgique ne sont pas contredites. Par ailleurs, le fait d'avoir bénéficié de séances de kinésithérapie ne justifie pas non plus une majoration du taux d'incapacité permanente partielle au-delà de 9%, qui demeure cohérent au regard de l'annexe I au code de la sécurité sociale qui prévoit, en son paragraphe 3.1 un taux d'incapacité compris entre 5 et 15% pour une persistance discrète de la gêne fonctionnelle et des douleurs du rachis cervical.

En outre, le docteur [W] a motivé son avis, en expliquant que le taux de 9% était justifié par l'absence de traitement autre qu'Arthro 50, une limitation modérée de la mobilité du rachis et l'évolution naturelle due au vieillissement, M. [H] étant actuellement âgé de 70 ans (68 au moment de la consultation médicale). Si le Dr [F] critique, dans son certificat médical du 26 mai 2022, le rapport du Dr [W] en ce qu'il n'y aurait aucune analyse du retentissement de l'accident sur l'accélération de l'arthrose, la cour constate que le Dr [F] ne propose, de son côté, aucune analyse permettant de retenir une majoration du taux d'IPP.

Il s'ensuit que l'appelant échoue à contredire utilement l'avis rendu par le docteur [W]. Il ne soulève pas non plus d'anomalie durant la consultation susceptible de justifier que ses conclusions soient écartées. En conséquence, le jugement entrepris est confirmé en toutes ses dispositions, sans qu'il y ait lieu d'ordonner une mesure d'expertise médicale, laquelle ne peut avoir pour but de pallier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.

Sur les frais du procès

En application de l'article 696 du code de procédure civile, M. [H], qui succombe, sera condamné aux dépens de la procédure d'appel. Eu égard à la nature du litige, il n'y a pas lieu de faire application de l'article 700 du code précité.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 5 mai 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de Bordeaux ;

Y ajoutant,

Déboute M. [C] [H] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Déboute la caisse primaire d'assurance maladie de la Gironde de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [C] [H] aux dépens de la procédure d'appel.

Signé par Madame Marie-Paule Menu, présidente, et par Madame Sylvaine Déchamps, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

S. Déchamps MP. Menu


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 22/02779
Date de la décision : 20/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-20;22.02779 ?
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