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12/06/2024 | FRANCE | N°21/02331

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 12 juin 2024, 21/02331


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 12 JUIN 2024







PRUD'HOMMES



N° RG 21/02331 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MCEQ













Monsieur [N] [P]



c/



S.C.O.P. S.A. SYNERGY

















Nature de la décision : AU FOND























Gro

sse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 avril 2021 (R.G. n°F19/00821) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 20 avril 2021,





APPELANT :

Monsieur [N] [P]

né le 25 Janvier 1974 à [Localité 5] (ROYAUME DU MAROC) ...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 12 JUIN 2024

PRUD'HOMMES

N° RG 21/02331 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MCEQ

Monsieur [N] [P]

c/

S.C.O.P. S.A. SYNERGY

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 avril 2021 (R.G. n°F19/00821) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BORDEAUX, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 20 avril 2021,

APPELANT :

Monsieur [N] [P]

né le 25 Janvier 1974 à [Localité 5] (ROYAUME DU MAROC) de nationalité Française

chez Monsieur [I] [P] - [Adresse 4]

représenté par Me Pierre BURUCOA, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SCOP SA Synergy, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 397 596 248

représenté par Me Christophe BIAIS de la SELARL BIAIS ET ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 mars 2024 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

L'association Synergy créée en 1982 a pour activité principale la sous-traitance industrielle et administrative avec pour objectif d'employer 80% de travailleurs handicapés.

En 2006, elle est devenue entreprise adaptée. A partir du 1er janvier 2015, elle devenue une société coopérative ouvrière de production (SCOP) à capital variable, certains salariés en étant devenus associés. Elle est soumise à un contrat d'objectifs triennal conclu avec le préfet de la région Nouvelle Aquitaine et bénéficie de subventions au regard de son objectif social qui fait l'objet d'un audit annuel et d'un agrément délivré pour trois ans par la DIRECCTE, organisme de contrôle.

Monsieur [N] [P], né en 1974, reconnu travailleur handicapé, a été engagé en qualité d'agent de propreté par l'entreprise adaptée Synergy, par contrat de travail à durée déterminée à compter du 1er octobre 2014.

Par contrat du 30 décembre 2014, la relation de travail s'est poursuivie à durée indéterminée aux mêmes fonctions et selon la même classification.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de la métallurgie de [Localité 2] et des [Localité 3].

En dernier lieu, la rémunération mensuelle brute moyenne de M. [P] s'élevait à la somme de 1.526,88 euros.

A compter de juin 2016, M. [P] s'est vu prescrire plusieurs arrêts de travail, le dernier en date du 24 août 2018 pour état anxio-dépressif.

Après avoir déclaré M. [P] apte à chacune des visites médicales de reprise 2018, le médecin du travail l'a déclaré, lors de la dernière visite de reprise du 17 décembre 2018, définitivement inapte à tous les postes dans l'entreprise, son maintien dans l'emploi étant gravement préjudiciable à sa santé.

Ensuite de ce dernier avis médical, l'employeur a mené une recherche de reclassement en interne et en externe mais les réponses ont été négatives.

Par courrier du 19 janvier 2019, M. [P] a été avisé des motifs s'opposant à son reclassement.

Par lettre datée du 22 janvier 2019, M. [P] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 31 janvier 2019.

M. [P] a ensuite été licencié pour inaptitude d'origine non professionnelle par lettre datée du 7 février 2019.

A la date du licenciement, M. [P] avait une ancienneté de quatre ans et qautre mois et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Par une lettre du 11 février 2019, M. [P] a demandé ses documents de rupture.

Le 7 juin 2019, M. [P] a saisi le conseil de prud'hommes de Bordeaux, réclamant la fixation de son salaire de référence à la somme de 1.526,88 euros bruts, la condamnation de l'employeur à lui verser des sommes au titre du manquement à l'obligation de formation, du harcèlement moral, des manquements à l'obligation de prévention et sécurité, de l'exécution déloyale du contrat de travail, et du licenciement nul et privé de cause réelle et sérieuse, outre diverses indemnités et la condamnation de la société Synergy à rembourser au Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine les allocations d'aide au retour à l'emploi qui lui ont été versées dans la limite de six mois d'indemnités.

Par jugement rendu le 7 avril 2021, le conseil de prud'hommes a :

- débouté M. [P] de l'intégralité de ses demandes,

- débouté la société Synergy de ses demandes reconventionnelles,

- laissé à chacune des parties la charge de ses dépens.

Par déclaration du 20 avril 2021, M. [P] a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 24 janvier 2024, M. [P] demande à la cour, outre de le déclarer recevable et bien fondé en son appel, de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Synergy de ses demandes reconventionnelles,

- l'infirmer pour le surplus,

En statuant à nouveau,

- fixer son salaire de référence à la somme de 1.526,88 euros bruts,

- condamner la société Synergy à lui verser les sommes suivantes :

* 8.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de formation,

* 30.000 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral, manquement à l'obligation de prévention et de sécurité, et exécution déloyale du contrat de travail,

*9.161,28 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul et privé de cause réelle et sérieuse,

* 3.053,76 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 305,38 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférents,

* 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que ces condamnations porteront intérêts moratoires à compter de la date de saisine du conseil de prud'hommes, avec capitalisation des intérêts,

- ordonner à la société Synergy de lui communiquer son certificat de travail, les bulletins de salaire afférents, ainsi que le reçu pour solde de tout compte et l'attestation Pôle Emploi,

- ordonner à la société Synergy de rembourser à France Travail venant aux droits du Pôle Emploi Nouvelle Aquitaine les allocations d'aide au retour à l'emploi versées à M. [P] dans la limite de six mois d'indemnités, sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail,

- débouter la société Synergy de ses demandes reconventionnelles,

- condamner la société Synergy aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 15 février 2024, la société Synergy demande à la cour de :

- dire qu'elle n'a pas manqué à l'obligation de formation et d'adaptation,

- juger qu'elle ne s'est pas rendue coupable de faits de harcèlement moral,

- dire qu'elle n'a pas manqué à l'obligation de prévention et de sécurité,

- juger qu'elle a exécuté loyalement le contrat de travail du salarié,

- dire que le licenciement pour inaptitude physique à l'emploi, d'origine non professionnelle, repose sur une cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- débouter le salarié de l'intégralité de ses demandes et en cela confirmer le jugement,

- condamner le salarié au paiement d'une indemnité de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts, à son bénéfice, pour procédure abusive, malicieuse et infamante, sur le fondement de l'article 1240 du code civil et en cela réformer le jugement,

- condamner le salarié à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner le salarié aux entiers dépens et frais éventuels d'exécution.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er mars 2024 et l'affaire a été fixée à l'audience du 25 mars 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le manquement de l'employeur à son obligation d'adaptation

Selon les dispositions de l'article L.6321-1 du code du travail, l'employeur doit assurer l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veiller au maintien de leur capacité à occuper leur emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations.

L'article L.5213-13 du même code, dans sa rédaction applicable au litige, prévoit, concernant les entreprises adaptées, qu'elles favorisent la réalisation des projets professionnels des travailleurs handicapés qu'elles emploient, en vue de la valorisation de leurs compétences, de leur promotion et de leur mobilité au sein de la structure elle-même ou au sein d'autres entreprises.

En l'espèce, M. [P] dénonce une absence totale de formation depuis son arrivée dans l'entreprise, soit à compter d'octobre 2014, malgré sa situation de travailleur handicapé et son illettrisme, connus de l'employeur. Il ajoute qu'une unique démonstration d'une demi-heure d'utilisation d'une cireuse monobrosse ne saurait suppléer ce manquement qui a incontestablement majoré ses difficultés professionnelles et entrainé l'aggravation de son état de santé.

La société Synergy, à laquelle incombe la charge de la preuve du respect de ses obligations à ce titre, oppose l'absence de demande de formation de la part du salarié qui disposait d'une solide expérience professionnelle en la matière car occupant le poste d'agent d'entretien depuis 2006 et ayant bénéficié d'une formation en 2011 dispensée par l'AFPA. Elle évoque la mise à disposition d'un planning très précis, l'emploi d'une autre personne sur le poste pour pallier les retards récurrents de M. [P], l'achat d'un nouveau matériel, la proposition qui lui a été faite d'un accompagnement socio-professionnel pour l'obtention du permis de conduire et les nombreuses absences du salarié, peu propices à l'organisation d'une formation.

Elle produit :

- l'attestation de Mme [D], magasinière, expliquant avoir formé oralement en octobre 2015 le salarié à l'utilisation de la cireuse monobrosse pour l'entretien de l'entreprise pendant une demi-heure environ, ce que ce dernier ne conteste pas,

- son entretien d'évaluation du 7 octobre 2015 dont elle déduit que le salarié n'a formulé aucune demande de formation,

- son entretien d'évaluation du 10 février 2017 aux termes duquel le salarié indique que le matériel a été renouvelé et qu'il y a une répartition des tâches et des bons produits,

-la facture d'achat d'une aspiro-laveuse Karcher dont le salarié se dit satisfait aux termes de son entretien d'évaluation du 10 février 2017 car cette machine lui permet de se déplacer rapidement,

- le courrier du 15 mai 2017 du salarié confirmant l'accompagnement proposé pour suivre une formation afin d'obtenir le permis de conduire,

- le planning de travail du salarié de 2015 à 2017 très précis quant aux tâches à accomplir, qu'il a respecté malgré son illettrisme et pour lequel il n'a jamais fait connaitre d'éventuelles difficultés pour y parvenir,

- des documents en faveur de la présence au sein de la société de trois formateurs.

- un tableau des absences du salarié

Cependant et ainsi que le souligne à juste titre M. [P], les moyens tirés d'un planning précis, de l'absence de demande de formation de sa part, du recrutement d'un autre salarié pour palier ses absences, de l'attribution d'un nouvel outil de travail et de la mesure d'accompagnement socio-professionnel sont inopérants en ce qu'ils ne répondent pas à l'obligation de formation du salarié qui n'a reçu en tout et pour tout qu'une demi-heure de formation dispensée par l'une de ses collègues alors que la société indique occuper en son sein trois formateurs. La cour observe par ailleurs à l'instar de M. [P], que les rubriques relatives à la formation, insérées dans les formulaires d'évaluation du salarié n'ont pas été renseignées et qu'aucun entretien dédié à l'évolution professionnelle du salarié n'a été réalisé. S'agissant des absences récurrentes du salarié, il résulte certes du tableau produit par l'employeur que l'absentéisme est devenu plus important à compter de septembre 2017 mais pour autant, il n'est justifié d'aucune proposition de formation avant cette période hormis une demi-heure en octobre 2015.

En considération de l'ensemble de ces éléments, la seule formation d'une demi-heure, pour le moins restreinte, apparaît peu propice au maintien d'une employabilité satisfaisante au regard tant de l'ancienneté du salarié que de sa situation particulière de handicap et de son illettrisme.

Le manquement de l'employeur est donc établi et il apparaît justifié d'accorder de ce chef à M. [P] une somme de 2.000 euros à titre de dommages et intérêts.

- Sur le harcèlement moral, le manquement de l'employeur à ses obligations de prévention et de sécurité et l'exécution déloyale du contrat de travail

Pour infirmation de la décision entreprise et solliciter l'allocation d'une somme de 30.000 euros, M. [P] évoque le harcèlement moral dont il aurait été victime, les manquements de l'employeurs à ses obligations de prévention et de sécurité ainsi qu'une exécution déloyale du contrat de travail, ce que conteste l'employeur.

* * *

Selon les dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L. 1154-1 prévoit, qu'en cas de litige, si le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En outre, en application des dispositions des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, dans leur rédaction applicable au présent litige, l'employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement de circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. Il lui appartient ainsi de planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral.

Enfin, l'article L.1222-1 du code du travail prévoit que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

* * *

M. [P] invoque au soutien du harcèlement moral, les éléments suivants :

- la transformation en 2014 de l'entreprise adaptée sous forme associative en société anonyme à conseil d'administration sous forme coopérative ce qui aurait engendré une modification de la politique patronale au regard de la rentabilité et de la gestion du handicap avec un système d'incitation à la performance, dont l'instauration de primes d'objectifs, le tout sans accompagnement au changement entraînant la multiplication des départs contraints, le travail des personnes en situation de handicap n'étant plus perçu comme la raison d'être de la nouvelle structure ; il considère que ces éléments constituent un mensonge quant au maintien de la philosophie associative,

- la privation de formation,

- à compter de juin 2016, les reproches de la responsable des ressources humaines, Mme [V], concernant ses avances sur salaires, ses sollicitations du service social, ses choix de vie personnelle en lui imposant ses jours de congés,

- les agressions verbales régulières de Mme [V] à son endroit,

- le dénigrement de ses qualités professionnelles,

- des procédures disciplinaires injustifiées,

- le défaut de réponse à l'alerte du salarié du 15 mai 2017,

- des courriers vexatoires des 6 juillet et 7 septembre 2017,

- l'absence de visites médicales à l'occasion de deux reprises du travail,

- le dépôt de plainte de Mme [V] à son encontre pour dénonciation calomnieuse,

- la dégradation de son état de santé ayant conduit à son hospitalisation en psychiatrie en juillet 2017,

- la tentative de rupture conventionnelle du 28 aout 2017,

- la recherche tardive des possibilités de reclassement,

- privation injustifiée de ressources jusqu'en février 2019,

- le mensonge de l'employeur dans le formulaire transmis à la CPAM le 8 juin 2018.

Il verse notamment aux débats les éléments suivants :

- S'agissant du mensonge quant au maintien de la philosophie associative :

* le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 22 avril 2014, au sujet de la transformation à venir de la structure, au cours de laquelle il a été promis la transparence et la clarté quant au processus de transformation et de ne rien changer concernant son fonctionnement quant à son activité et son personnel,

* un arrêt rendu par la cour le 6 novembre 2019 constatant que le licenciement d'un salarié était intervenu alors que l'entreprise rencontrait des difficultés financières justifiant le droit d'alerte du comité d'entreprise et le rapport de ce dernier qui pointe de nombreux dysfonctionnements d'origines différentes, sans les préciser,

* un courriel du médecin du travail en date du 23 avril 2014 évoquant les problèmes d'un salarié avec sa hiérarchie, les difficultés économiques de l'entreprise, les changements de direction et de conseil d'administration l'inclinant à envisager une action collective ultérieure, qui n'a pas été finalement mise en 'uvre,

* une demande tardive d'accompagnement (sa pièce 51), qui démontre cependant son existence et la prise en compte des risques psycho-sociaux,

* le procès-verbal de la réunion du comité d'entreprise du 14 janvier 2016 sur lequel figure l'encart suivant: « nous devrons avoir un retour sur investissement rapide nous sommes aujourd'hui les seuls à travailler avec ce type d'équipement sans être passés en 2X8 », ce qui n'est toutefois pas contraire au pacte d'objectif triennal conclu prévoyant en son article 5 que cette entreprise est une unité économique de production soumise aux lois du marché, à la concurrence et doit pour se dynamiser, se développer, afficher des objectifs de gestion, de développement ou d'adaptation en terme d'activité de production et de chiffre d'affaire,

* l'adhésion des salariés intéressés financièrement aux résultats de la société et le départ rapide de quatre salariés, membres de la commission rémunération qui se sont opposés au changement philosophique imposé par l'employeur, cependant trois d'entre eux ont fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude tandis que le dernier a fait l'objet d'une rupture conventionnelle ; il sera en outre relevé que le fait d'être une entreprise adaptée destinée à favoriser l'emploi de personnes handicapées ne dispense pas ses responsables de se soucier de sa bonne gestion afin de la voir perdurer alors qu'il est justifié des difficultés rencontrées et du redressement entrepris pour recouvrer sa santé économique.

- Sur le comportement de Mme [V] :

* ses entretiens d'évaluations élogieux,

* son courrier d'alerte du 16 juin 2017 dans lequel il évoque le comportement agressif de Mme [V] à plusieurs reprises lorsqu'il lui demandait des avances sur salaires, son immixtion en lui conseillant de ne pas se marier notamment ; il y précise en avoir avisé sa responsable hiérarchique qu'il désigne par son prénom « [U] » laquelle serait intervenue et aurait interdit à Mme [V] de le « torturer », cependant il ne verse pas son témoignage tandis que l'employeur produit celui de Mme [U] [Y], supérieure hiérarchique du salarié ' vraisemblablement la même personne- et selon laquelle elle a demandé à plusieurs reprises à Mme [V] de le recevoir pour évoquer ses retards, son attitude au travail et ses absences injustifiées ; elle dément avoir « dit quoique ce soit à Mme [V] sur le déroulé de ces entretiens avec M. [P], ce dernier n'a jamais mis à profit les conseils de bonne conduite formulés par Mme [V], au contraire cela a continué », ces derniers éléments étant corroborés par les attestations de Mme [V] et de M. [K] qui ne souffrent d'aucune irrégularité de sorte qu'elles seront retenues par la cour, le seul fait qu'elles émanent de salariés en lien de subordination avec l'employeur ne saurait les rendre partiales et inopérantes;

- Sur les procédures disciplinaires :

* trois courriers des 2, 5 et 15 mai 2017 rappelant au salarié qu'ayant quitté son poste de travail à compter du 26 avril 2017 il lui appartenait de justifier de son absence en fournissant un arrêt de travail dans un délai de 48 heures, le dernier consistant en une convocation à un entretien préalable en raison de son absence injustifiée, dont la matérialité n'est toutefois pas contestée par le salarié et qui n'a cependant donné lieu à aucune sanction disciplinaire,

* un courrier du 7 septembre 2017 pour une absence non justifiée du 28 août précédent non suivie d'une quelconque sanction ;

- S'agissant du défaut de réponse à l'alerte du 15 mai 2017,

* le courrier du 15 mai 2017, concomitant à sa convocation à un entretien préalable à une éventuelle sanction disciplinaire, par lequel le salarié avise l'employeur du harcèlement moral qu'il subit depuis juin 2016 de la part de Mme [V] qui : « ne cesse de me mettre la pression, de me torturer, de me harceler moralement tout au long de cette période sans raison particulière et sans même raison liée au travail. Elle ne cesse de me crier dessus de se mêler de ma vie personnelle, d'intervenir entre moi et les assistantes sociales jusqu'au point de nier totalement, c'est elle qui gère tout sans me laisser décider['] ; le courrier en réponse du directeur général en date du 31 mai 2017 lui demandant , afin d'instruire sa demande et de prendre les dispositions qui s'imposeraient, de lui communiquer par retour du courrier la description précise des faits ainsi que leur date de commission ainsi que la communication d'une éventuelle plainte entre les mains du procureur de la République avant de diligenter une enquête contradictoire afin de vérifier les faits et de prendre les mesures nécessaires,

* son courrier du 16 juin 2017 sériant les faits suivants : le 26 avril 2017 date à laquelle une altercation a eu lieu entre Mme [V] et lui-même au sujet d'un jour de congés nécessaire pour aller régler une amende ; il cite « Mme [T], Mme [C] , Mme [E] , Mme [U] et M. [K] » qui l'ont vu pleurer ensuite dans le couloir, « Mme [U] » étant intervenue auprès de Mme [V]. Il évoque ensuite la troisième semaine de novembre 2016 au cours de laquelle Mme [V] a refusé de lui donner un acompte de 50 euros puis s'est résolue à le lui donner après qu'il l'a imploré ; il cite le vendredi 24 mars 2017, Mme [V] lui ayant indiqué que c'était la dernière fois qu'elle faisait droit à sa demande d'acomptes. Il évoque les ordres données aux assistantes sociales pour interrompre sa prise en charge et produit des documents médicaux attestant de son état d'angoisse, de son suivi psychologique et de l'impossibilité d'assister à un entretien avec Mme [V] ; en réponse, l'employeur lui écrit le 6 juillet 2017 l'informant de l'engagement d'une enquête contradictoire et rappelant les règles relatives au paiements des amendes ainsi qu'au versement des acomptes mais également les nombreuses prestations de la psychologue financées par l'entreprise au profit de M. [P] ainsi que les prestations de l'assistante sociale pour l'accompagner, en vain afin : « de résoudre des problématiques administratives, de budget et de logement. Vous avez à ce jour consommé à vous tout seul pour l'ensemble de ces motifs, à partie de septembre 2015, 3 heures sur 20 heures prévues, 15 heures sur 60 heures en 2016 et rien qu'en 2017 Mme [L] a eu l'occasion de vous indiquer dans le SMS que vous mentionnez dans votre courrier du 16 juin 2017 « je travaille normalement 5h par mois pour Synergy et je passe plus de 10 heures par mois uniquement pour vous » sans que les termes employés dressant le tableau de toutes les mesures d'accompagnement mises en 'uvre à son profit ne puissent revêtir un quelconque caractère vexatoire ainsi que le soutient le salarié; L'employeur y rappelle également que le psychologue dédié n'a pas été interpelé à ce sujet par M. [P] ; le procès-verbal de la réunion du CHSCT du 5 octobre 2017 en présence de l'inspectrice du travail, saisie à cet effet, fait état d'une saisine du CHSCT aux fins de diligenter une enquête dont les conclusions ont été rendues au cours d'une réunion du 22 novembre 2017, le CHSCT retenant que les faits « évoqués par M. [P] dans sa requête dans laquelle il prétend avoir subi un harcèlement moral de la part de Mme [V] ne nous permet pas d'affirmer qu'il y a eu harcèlement »;

- Sur le dépôt de plainte de Mme [V] à son encontre pour dénonciation calomnieuse :

* sa convocation pour être entendu dans le cadre d'une audition libre par les services enquêteurs sans que soit indiquer l'identité de plaignant même s'il résulte des attestations produites que c'est Mme [V], exclusivement, qui a déposé plainte pour ces faits à l'encontre du salarié ;

- S'agissant de l'absence de visites médicales à l'occasion de deux reprises du travail, il est établi que l'employeur, qui dispose d'un délai de huit jours pour organiser la visite médicale de reprise, a sollicité la médecine du travail à ce sujet qui, dès la reprise du 1er juin, a adressé une convocation au salarié pour une visite fixée au 8 juin 2017, de la même façon, lors de sa reprise du 26 juin, il a été destinataire le même jour, d'une convocation pour le 3 juillet suivant ;

- Concernant la tentative de rupture conventionnelle du 28 août 2017 :

* une lettre manuscrite datée du 29 aout 2017 demandant une rupture conventionnelle ; il indique qu'elle a été rédigée par son supérieur hiérarchique et pensait qu'il s'agissait d'une demande d'avance sur salaire ; cependant il est établi par la pièce 25 versées par ses soins, que cette procédure a été annulée après qu'il a informé son employeur de la rédaction de ce courrier par un autre salarié, ce que ce dernier, M. [K] confirme en précisant que c'était à la demande de M. [P];

- S'agissant la recherche tardive des possibilités de reclassement, le salarié soutient qu'en engageant des recherches fictives de reclassement, l' employeur l' a privé de ressources de décembre 2018 à janvier 2019 cependant, si en effet l'employeur n'a pas à rechercher de reclassement lorsque le médecin du travail a expressément indiqué que tout maintien du salarié dans l'emploi serait gravement préjudiciable à sa santé, ce qui est le cas en l'espèce aux termes de l'avis d'inaptitude établi le 17 décembre 2018, il n'en demeure pas moins que l'employeur a, par courrier du 11 janvier 2019, proposé au salarié de le recevoir afin d'étudier avec lui toutes les possibilités de reclassement interne et externe en lui faisait connaître ses v'ux en matière de mobilité professionnelle et géographique ; M. [P] a répondu qu'il n'envisageait pas une quelconque reprise du travail de sorte que la procédure de licenciement pour inaptitude a été initiée et son licenciement notifié le 7 février 2019 ; M.[P] a sollicité par courrier du 11 février 2019 l'envoi de des documents de rupture qui lui ont été adressés le 14 février 2019 de sorte que ces délais ont été mis en 'uvre pour assurer le maintien du salarié dans l'emploi ;

Concernant la privation injustifiée de ressources jusqu'en février 2019 en raison de la suppression de la subrogation en 2018 :

* le courrier adressés aux salariés le 27 juillet 2018 afin de les informer de la fin de la subrogation, procédure par laquelle les indemnités journalières étaient versées directement à l'employeur avant que ce dernier ne les reverse ensuite aux salariés concernés, cette modification visant l'ensemble des salariés ;

Sur le mensonge de l'employeur dans le formulaire transmis à la CPAM le 8 juin 2018, saisie d'une demande en reconnaissance de la maladie professionnelle de M. [P] :

* le formulaire faisant figurer la mention selon laquelle le salarié n'a pas signalé de difficultés professionnelles, ce qui, au regard de l'enquête diligentée par la CPAM, n'a pu être la cause exclusive du refus de prise en charge au titre de la maladie professionnelle de son état dépressif en lien avec le harcèlement moral dont il se prévaut.

- S'agissant de la dégradation de son état de santé en lien avec ses conditions de travail :

* ses différents arrêts de travail qui témoigneraient des faits dénoncés et de l'acharnement procédural de l'employeur à son encontre, un certificat établi le 3 mai 2017 par une psychologue faisant état d'une dépression sévère dont les manifestations, aux dires de M. [P], ont débuté en juin 2016 et sont réactionnelles à un harcèlement au travail, un certificat relevant une crise d'angoisse le 31 mars 2017 à l'origine de son passage au service des urgences et mentionnant un suivi ancien par un psychiatre, outre une précédente crise en août 2016, son hospitalisation en psychiatrie le 12 juillet 2017 pour un bilan psychique, l'avis d'inaptitude ; cependant ces éléments médicaux qui ont été établis à partir des dires du salarié ne font pas de lien avec les conditions de travail alors qu'il n'est pas établi que la salarié ait saisi le médecin du travail des difficultés rencontrées à l'occasion des multiples visites de reprises aux termes desquelles il a été déclaré apte.

Ces faits ne peuvent ainsi constituer un ensemble d'éléments matériels précis et concordants laissant supposer l'existence d' un harcèlement moral dans la mesure où il s'agit de l'addition de plusieurs événements, pour la plupart, sans lien entre eux. Seul, le défaut d'adaptation et de formation a été retenu supra mais ne peut à lui seul, à défaut de constituer plusieurs agissements répétés, laissé supposer le harcèlement moral dont M. [P] se plaint.

En conséquence, ces éléments, pris dans leur ensemble, ne peuvent être retenus comme étayant le harcèlement moral invoqué.

Ils ne peuvent pas davantage être retenus au titre de l'obligation d'exécuter loyalement le contrat de travail ainsi qu'au titre des manquements de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité sauf en ce qui concerne le défaut de formation retenu supra et la tardiveté des recherches d'un reclassement. En effet et ainsi que le souligne M. [P], ces recherches -non obligatoires- ne pouvaient que retarder son indemnisation alors que, par ailleurs, l'employeur avait la possibilité de saisir le SAMETH (service d'aide au maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés) dès le lendemain de la déclaration d'inaptitude, ce qu'il ne pouvait ignorer au regard de la spécificité de l'effectif de l'entreprise et de la particulière précarité de la situation sociale de M. [P] dont il était pleinement informé à la lecture de son courrier du 6 juillet 2017. En procédant de la sorte, l'employeur a indéniablement manqué à son obligation de prévention et de sécurité.

A ce stade, il convient de rappeler que l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité qui s'applique en cas de souffrance morale en lien avec le travail. Il faut néanmoins rechercher si le syndrome dépressif d'un salarié, lié à la souffrance au travail et à l'origine de l'inaptitude, résulte de manquements de l'employeur aux obligations lui incombant.

il est également établi par les pièces produites que malgré d'une part, l'absentéisme de M. [P] devenu important dans le courant de l'année 2017, d'une autre part, l'incident du 26 avril 2017 avec Mme [V] à la suite duquel M. [P] a été retrouvé pleurant dans le couloir ce dont atteste Mme [J], salariée de l'entreprise,ayant nécessité la délivrance d'une autorisation afin qu'il rentre chez lui et à la suite duquel il a bénéficié d'un arrêt de travail, et d'une dernière part, de la situation conflictuelle avec Mme [V] dont le salarié avait saisi un représentant du personnel, l'employeur n'a pas inscrit ces difficultés à l'ordre du jour de la réunion du CHSCT qui s'est tenue le 1er juin 2017 bien qu'alerté par le salarié lui-même dès le 15 mai 2017.

De la même façon, malgré cette alerte du salarié du mois de mai 2017 réitérée dans des termes précis en juin suivant, l'employeur n'a provoqué une réunion spécifique du CHSCT qu'en octobre 2017 sans diligenter au préalable une quelconque mesure de médiation avec Mme [V] ou autres mesures de résolution ou d'apaisement des difficultés relationnelles rencontrées, notamment dans le cadre de son obligation de prévention des risques psychosociaux. En effet, l'employeur ne justifie d'aucune mesure précise et concrète de prévention des risques prise dans le cadre des difficultés rencontrées au sujet de M. [P] et des tensions connues de l'employeur entre celui-ci et Mme [V], autrement que par les courriers qui lui a adressés. Certes, une note a été diffusée en ce qui concerne la possibilité de l'intervention d'une psychothérapeute, notamment pour accompagner la gestion des conflits, face à des difficultés psychiques pouvant correspondre au cas de M. [P] mais il n'est pas justifié que celle-ci ait été saisie. De même, aucune action de la responsable Qualité Sécurité Environnement, ayant notamment une mission en matière de sécurité et de protection des salariés, n'est établie.

En s'abstenant de mettre en 'uvre de telles mesures à destination d'un salarié particulièrement fragile en raison de sa situation de handicap et de la précarité de sa situation personnelle dont il était parfaitement avisé, l'employeur a négligé son obligation de sécurité. Ces faits permettent ainsi de caractériser le manquement de l'employeur à son obligation de sécurité et de prévention à l'égard de M. [P] ainsi que la relation entre ce manquement et la dégradation de l'état de santé de M. [P] au regard de la chronologie de ces faits et des éléments médicaux produits, à l'origine de son état d'inaptitude.

Enfin l'incertitude du statut juridique de l'entreprise qui résulterait de l'absence de qualité associative ou de société anonyme de Synergy telle que figurant sur le contrat de travail de M.[P] ne saurait constituer une quelconque exécution déloyale du contrat de travail, les bulletins de salaire ultérieurs faisant apparaitre sa dénomination sociale de SCOP, aucun préjudice n'en découlant par ailleurs.

Compte tenu des éléments ci-dessus tels que retenus et caractérisant les manquements de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité, il convient d'allouer à M. [P] la somme de 4.000 euros en réparation de son préjudice.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu'il a débouté le salarié de ce chef de demande.

Sur la rupture du contrat de travail

M. [P] sollicite la nullité de son licenciement en soutenant avoir fait l'objet de harcèlement moral et de discrimination en raison de son état de santé et à tout le moins de dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse au regard des manquements de l'employeur à ses obligations ce que conteste l'employeur.

* * *

L'article L.1152-3 du code du travail dispose que toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L.1152-1 et L. 1152-2 est nul.

* * *

Selon les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les demandes énoncées au dispositif des dernières conclusions. Ainsi, la discrimination sur le handicap ne figure pas dans le dispositif des conclusions de M. [P].

Il résulte en outre des développements supra qu'aucune cause de nullité de son licenciement n'est établie par M. [P], l'existence d'un harcèlement moral n'ayant pas été retenue.

En revanche, il a été considéré que les manquements de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité sont établis et qu'ils sont à l'origine de l'état d'inaptitude du salarié. Il en résulte dès lors que le licenciement de M.[P] est sans cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuse

M. [P] sollicite le versement de la somme de 9.161,28 euros correspondant à 6 mois de salaire.

Au vu des bulletins de salaire produits, le salaire mensuel brut est de 1526,88 euros, non contesté par l'employeur.

En application des dispositions de l'article L.1235-3 du code du travail, M.[P], peut légitimement prétendre, en raison de son ancienneté et des effectifs de l'entreprise, à une indemnité dont le montant doit être compris entre trois et cinq mois de salaire.

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise qui employait environ 170 salariés, de l'âge de l'appelant au moment du licenciement, de son ancienneté de plus de quatre ans, de sa rémunération, des circonstances du licenciement et des conséquences de celui-ci telles qu'elles résultent des pièces et explications qu'il fournit, il apparaît justifié de lui accorder une somme de 6.000 euros à titre d'indemnité en réparation du préjudice résultant de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement.

Il sera en outre fait droit à sa demande d'indemnité compensatrice de préavis, à hauteur de deux mois de salaire, soit la somme de 3.053,76 euros bruts outre la somme de 305,37 euros au titre des congés payés afférents.

Par ailleurs, il sera ordonné le remboursement par l'employeur à France Travail des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié depuis son licenciement à hauteur de six mois.

Le jugement entrepris sera en conséquence infirmé.

Sur la demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la société

Pour solliciter l'allocation d'une somme de 5.000 euros, la société fait état d'une procédure abusive, malicieuse et infamante de la part de l'appelant qui, aux termes de ses écritures, prétendu qu'un salarié se serait suicidé sur son lieu de travail et que l'employeur aurait fourni de fausses informations à la CPAM lors de l'instruction de sa demande au titre de la reconnaissance de la maladie professionnelle.

M. [P] s'estimant victime de harcèlement moral, était en droit d'engager une action à ce titre contre l'employeur quelle qu'en soit l'issue, sans qu'il soit démontré un abus.

En outre et ainsi que le souligne le conseil de l'appelant, les conclusions d'avocat ne peuvent donner lieu à action en diffamation, la loi du 29 juillet 1881 protégeant les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux.

En considération de ces éléments, il convient de débouter la société de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour procédure abusive.

La décision entreprise sera confirmée sur ce point.

Sur les autres demandes

Il n'y a pas lieu de déroger aux dispositions des articles 1231-6 et 1231-7 du code civil et les intérêts au taux légal seront dus à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale, et à compter du présent arrêt pour les créances indemnitaires, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

La société Synergy sera en outre condamnée à remettre à M. [P] un certificat de travail, les bulletins de salaire afférents, le reçu pour solde de tout compte et l'attestation France Travail après rectification tenant compte de la présente décision et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de celle-ci.

La société partie perdante à l'instance sera condamnée aux dépens tant de première instance que d'appel ainsi qu'à verser à M. [P] la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté M. [P] de ses demandes au titre du harcèlement moral et de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- débouté la SCOP Synergy de ses demandes reconventionnelles,

L'infirme pour le surplus,

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que la SCOP Synergy a manqué à son obligation de formation et d'adaptation ainsi qu'à celle de prévention et de sécurité à l'égard de M. [P],

Déboute M. [P] de sa demande au titre de la nullité du licenciement,

Dit que le licenciement de M. [P] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Fixe la rémunération mensuelle moyenne de M. [P] à la somme de 1526,88 euros bruts,

Condamne la SCOP Synergy à verser à M. [P] les sommes suivantes :

- 2.000 euros en réparation du préjudice consécutif au défaut de formation et d'adaptation,

- 4.000 euros à titre de dommages et intérêts en raison du manquement de l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité,

- 6.000 euros au titre de l'indemnité pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse,

- 3.053,76 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis,

- 305,37 euros au titre des congés payés afférents,

- 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

Dit que les intérêts au taux légal seront dus à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes, en ce qui concerne les créances de nature salariale, et à compter du présent arrêt pour les créances indemnitaires, avec capitalisation dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

Dit que la SCOP Synergy devra remettre à M. [P] un certificat de travail, un bulletin de paie, le reçu pour solde de tout compte et l'attestation France Travail, rectifiés en considération du présent arrêt et ce, dans le délai de deux mois à compter de sa signification,

Ordonne le remboursement par la SCOP Synergy à France Travail des indemnités de chômage éventuellement versées à M. [P] depuis son licenciement, à hauteur de six mois d'indemnités,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la SCOP Synergy aux dépens de première instance et d'appel.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 21/02331
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;21.02331 ?
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