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12/06/2024 | FRANCE | N°21/01885

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 12 juin 2024, 21/01885


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 12 JUIN 2024







PRUD'HOMMES



N° RG 21/01885 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MA4E













Monsieur [C] [R]

Syndicat CGT ENERGIE 24



c/



Caisse Centrale d'Activités Sociales du Personnel des Industries Electriques et Gazières

















Nature de la décision : AU FON

D























Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 mars 2021 (R.G. n°F 20/00020) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PÉRIGUEUX, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 30 mars 2021,...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 12 JUIN 2024

PRUD'HOMMES

N° RG 21/01885 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-MA4E

Monsieur [C] [R]

Syndicat CGT ENERGIE 24

c/

Caisse Centrale d'Activités Sociales du Personnel des Industries Electriques et Gazières

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 02 mars 2021 (R.G. n°F 20/00020) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PÉRIGUEUX, Section Industrie, suivant déclaration d'appel du 30 mars 2021,

APPELANTS :

Monsieur [C] [R]

né le 19 Novembre 1962 à [Localité 4] ([Localité 4]) de nationalité Française Profession : Agent Enedis, demeurant [Adresse 2]

SAINT-LAURENT-SUR-MANOIRE Syndicat CGT Energie 24, pris en la personne de son secrétaire général domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 1]

représentés par Me Catherine CHEVALLIER de la SELARL CHEVALLIER CATHERINE, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉE :

Caisse Centrale d'Activités Sociales du Personnel des Industries Electriques et Gazières, agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 3]

représentée par Me Mathieu RAFFY de la SELARL MATHIEU RAFFY - MICHEL PUYBARAUD, avocat au barreau de BORDEAUX, assistée de Me Fabrice FEVRIER de la SELARL 3S AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 25 mars 2024 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [C] [R], né en 1962 a été engagé en qualité de releveur de compteur par la société EDF, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 4 janvier 1982.

La gestion des activités sociales est assurée par des organismes institués par le statut national du personnel des industries électriques et gazières (IEG).

Ces organismes sont dirigés par des représentants des organisations syndicales représentatives des salariés de la branche élus aux termes d'élections organisées auprès des bénéficiaires.

Au titre de ces organismes, il existe des Caisses Mutuelles Complémentaires et d'Action Sociale (CMCAS), la Caisse Centrale des Activités Sociales (CCAS) et le Comité de Coordination des CMCAS.

Pour assurer la gestion des activités sociales, l'article 25 paragraphe 3 du statut national du personnel des IEG prévoit la mise à disposition de la CCAS et des CMCAS de personnel dit 'statutaire ' par les entreprises de la branche. Ces agents statutaires ayant pour employeurs de droit les entreprises de la branche (EDF, ENEDIS, GRDF...) sont mis à disposition des organismes sociaux par le moyen, dans la période récente, de conventions de mise à disposition afin qu'il assure la conduite des activités des CMCAS et de la CCAS).

Cette mise à disposition est encadrée par un tableau hiérarchique (dit TH) en fonction d'un nombre de points hiérarchiques attribués à une CMCAS aboutissant à un nombre d'équivalent temps plein à mettre à disposition.

En 2009, certaines CMCAS, ont adhéré à un nouveau dispositif contractuel par lequel la CCAS assure une mission de support aux CMCAS pour la conduite de leurs tâches administratives, financières et comptable, ainsi de gestion du personnel mis à leur disposition pour assurer les activités sociales

La même année, la CMCAS de [Localité 4] a décidé de mettre en commun ses moyens humains avec la CMCAS d'Agen et disposait ainsi au moment de la mise en oeuvre du projet de transformation des activités sociales et ainsi de son adhésion à cette nouvelle organisation du 'territoire Aquitaine Nord' de cinq agents mis à sa disposition.

M. [R] a été mis à disposition du CMCAS Périgord en 1999. Puis, après un passage à la CMCAS d'Agen de 2008 à 2018, il a conclu une convention de mise à disposition le 9 janvier 2019 pour assurer les fonctions de technicien d'action sanitaire et sociale au profit de la CMCAS Périgord.

Lors de sa réunion du 28 mars 2019, le Conseil d'administration de la CMCAS Périgord a pris la décision de sortir du Territoire Aquitaine Nord de la CCAS, et ainsi de mettre fin à son adhésion à ce dispositif.

Plusieurs échanges ont eu lieu entre le Comité de Coordination des CMCAS, la CCAS et le président de la CMCAS Périgord, au sujet de la vigilance à adopter dans le cadre du processus de désadhésion, notamment quant à l'organisation du transfert du personnel mis à sa disposition directement au profit de la CMCAS,

Par délibération du 17 septembre 2019, le Comité de Coordination des CMCAS a pris acte de la désadhésion de la CMCAS Périgord et a confirmé la sortie du territoire et le rattachement du personnel statutaire nécessaire au fonctionnement de cette dernière, soit 5 équivalents temps plein, conformément à l'article 49 du règlement de la CMCAS.

Par délibération du 16 octobre 2019, le Conseil d'administration de la CCAS a pris acte de la demande du Conseil d'administration de la CMCAS Périgord de mettre fin à la réalisation des missions professionnelles de la CMCAS par la CCAS telle qu'établie auparavant.

Le 8 novembre 2019, la CCAS a informé les employeurs de la branche (Enedis, GRDF, EDF) des décisions du Comité de Coordination des CMCAS et de la CCAS actant la désadhésion de la CMCAS Périgord et a transmis la liste des 5 agents mis à disposition concernés 'qui pourront, s'ils le souhaitent, se porter candidat sur les postes que la CMCAS Périgord mettra à la publication'.

Le 12 novembre 2019, les quatre salariés mis à disposition par les entreprises de la branche ont refusé de donner suite aux propositions de rencontres proposées auparavant par le directeur du Territoire Aquitaine Nord de la CCAS et la CMCAS Périgord a continué de contester le niveau de tableau hiérarchique notifié par le Comité de Coordination dans le cadre de sa rétrocession à la CMCAS.

Le 20 décembre 2019, M. [R] a reçu un courrier du DRH de la CCAS mettant fin à la mise à disposition compte tenu de la résiliation des conventions liant la CMCAS et la CCAS de manière unilatérale.

Ce même jour, le directeur interterritorial CCAS Nouvelle-Aquitaine a informé le directeur de l'entité support de M. [R] de la résiliation de la convention de mise à disposition en ajoutant 'nous vous laissons le soin de revenir vers M. [R] pour mettre en place le processus de réintégration'.

Le 20 février 2020, M. [R] a saisi le conseil de prud'hommes de Périgueux réclamant des dommages et intérêts pour non-respect des dispositions conventionnelles et réglementaires et pour le préjudice moral et matériel subi et la condamnation de la CCAS à payer au syndicat CGT Energie 24 des dommages et intérêts.

Le 5 mars 2020, la CMCAS Périgord a assigné la CCAS devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de voir constater l'absence de motif légitime dans la rupture de la convention de partenariat et du contrat d'engagement et d'autre part de voir imposer la reprise par la CCAS de ses obligations liées à ces deux contrats. La CMCAS a été déboutée de ses demandes par ordonnance du 29 juillet 2020 et n'a pas interjeté appel.

Le 23 juin 2020, la CMCAS de [Localité 4] a assigné le Comité de Coordination des CMCAS devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins que lui soit alloué un TH de 6 ETP avec convocation d'une assemblée générale des CMCAS. La CMCAS a été déboutée de ses demandes par ordonnance du 2 novembre 2020 et n'a pas interjeté appel.

Suite à la publication des postes par la CMCAS Périgord le 21 juillet 2020, préalablement validés par le comité de coordination des CMCAS, M. [R] a été nommé au poste de technicien activités sociales et culturelles au sein du CMCAS Périgord au 1er septembre 2020.

Par jugement rendu le 2 mars 2021, le conseil de prud'hommes a :

- dit que les demandes de M. [R] à l'encontre de la Caisse Centrale d'Activités Sociales du personnel des industries électrique et gazière ne sont pas fondées,

- débouté M. [R] de l'ensemble de ses demandes,

- dit que les demandes du syndicat CGT Energie 24 à l'encontre de la Caisse Centrale d'Activités Sociales du personnel des industries électrique et gazière ne sont pas fondées,

- débouté le syndicat CGT Energie 24 de l'ensemble de ses demandes,

- mis à la charge de M. [R] et du syndicat CGT Energie 24 l'ensemble des dépens par parts égales.

Par déclaration du 30 mars 2021, M. [R] et le Syndicat CGT Energie 24 a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 19 mai 2023, M. [R] et le syndicat CGT Energie 24 demandent à la cour de :

- infirmer la décision du conseil de prud'hommes du 2 mars 2021,

Et statuant à nouveau,

- condamner la CCAS prise en la personne de son représentant légal à verser à M. [R] les sommes de

* 5.000 euros à titre de dommages-intérêts, pour non-respect des dispositions conventionnelles et réglementaires,

* 46.000 euros à titre de dommages-intérêts, pour le préjudice moral et matériel subi,

* 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner encore la CCAS prise en la personne de son représentant légal aux entiers dépens de l'instance comprenant les frais éventuels d'huissier, en application des dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile,

- condamner la CCAS prise en la personne de son représentant légal à payer au syndicat CGT Energie 24 les sommes de

* 10.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- condamner la CCAS prise en la personne de son représentant légal à verser au syndicat CGT Energie 24 la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 18 août 2021, la CCAS demande à la cour de :

- juger les appelants irrecevables et mal fondes en leur appel et leurs demandes,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 2 mars 2021 par le conseil de prud'hommes de Périgueux, notamment en ce qu'il a dit infondées les demandes des appelants, et debouté ceux-ci de l'ensemble de leurs demandes,

Et en conséquence,

A titre principal,

- prononcer la mise hors de cause de la CCAS et débouter M. [R], ainsi que le syndicat CGT Energies 24 de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

A titre subsidiaire,

- débouter M. [R] , ainsi que le syndicat CGT Energies 24 de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions,

En tout état de cause,

- juger irrecevables et infondées les demandes du syndicat CGT Energies 24, et l'en

débouter,

- à laisser à la charge de M. [R], ainsi que du syndicat CGT Energies 24

les entiers dépens de premiere instance et d'appel,

Et, y ajoutant,

- à condamner le syndicat CGT Energies 24 à lui verser la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 1er mars 2024 et l'affaire a été fixée à l'audience du 25 mars 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exécution déloyale de la convention de mise à disposition

Au visa des articles 1103, 1104 du code civil et L. 1222-1 du code du travail, M. [R] sollicite l'allocation d'une somme de 5.000 euros pour manquement de la CCAS à son obligation de loyauté. Aux visas de l'article 1241-1 du code civil, faisant état de son préjudice moral, il sollicite la condamnation de la CCAS à lui verser la somme de 46.000 euros.

M. [R] conteste tout lien entre la sortie du territoire décidée par la CMCAS et la décision unilatérale de la CCAS de fin de convention de mise à disposition. Le seul cas de résiliation prévue est soumis à la condition qu'un nouveau dispositif de mise à disposition soit mis en oeuvre, avec nouvelle convention tripartite. Il ne peut y avoir carence entre deux conventions de mise à disposition.

Or, M. [R] soutient que le comité de coordination des CMCAS a validé l'organigramme avec les postes adhérents lors de la session du 8 janvier 2020, soit plus de 15 jours après la rupture unilatérale par la CCAS du contrat de mise à disposition qui la liait et dix mois après la décision de sortir du territoire. L'employeur n'a de son côté publié les postes relatifs à cette organisation que le 21 juillet 2020 sur la bourse de l'emploi, soit huit mois après la rupture contractuelle décidée par la CCAS

M. [R] soutient que la CCAS a manqué à ses obligations en résiliant de manière unilatérale la convention de mise à disposition par courrier recommandé du 20 décembre 2019 à effet au 1er janvier 2020, ne respectant pas les deux conditions nécessaires à la résiliation de la convention individuelle de mise à disposition qui prévoyait d'une part un préavis de 6 mois et d'autre part l'accord de l'ensemble des parties sur demande de l'entreprise ou sur demande de la CCAS ou sur demande de M. [R].

M. [R] soutient ne pas avoir bénéficié des dispositions de la convention individuelle de mise à disposition prévoyant qu'un point devait être fait au plus tard 6 mois avant la fin de la mise à disposition entre la CCAS, l'entreprise et lui-même pour définir au mieux les possibilités de réintégration, étant resté du 1er janvier au 31 août 2020 sans activité.

Il indique en outre qu'il était en congés lorsqu'il a reçu le courrier lui indiquant la fin de sa mise à disposition le 20 décembre 2019 à effet au 1er janvier 2020 et l'employeur ne lui ayant pas proposé de réorientation professionnelle ni formation après 23 an d'expérience.

La CCAS demande en premier lieu sa mise hors de cause en ce que la situation professionnelle de M. [R] et son statut actuel sur le plan contractuel en tant que salarié mis à disposition résultent des décisions et relèvent de la seule responsabilité de la CMCAS Périgord.

Elle se fonde sur la délibération du conseil d'administration de la CMCAS Périgord qui a décidé la sortie du territoire Aquitaine Nord de la CCAS et le rattachement à son profit du personnel mis à disposition et soutient que cette décision a entraîné d'une part le transfert de la convention de mise à disposition des salariés assurant les activités de la CCAS au profit de la CMCAS Périgord et d'autre part le rattachement à son profit de ce personnel mis à disposition.

Subsidiairement, sur le fond, la CCAS, se référant à l'article 16 de la convention individuelle de mise à disposition soutient qu'en l'absence de dénonciation par l'une des parties, il ne pouvait être fait application du délai de préavis de six mois. Elle fait valoir que suite à la décision de la CMCAS Périgord de reprendre en direct la gestion du personnel mis à disposition, il s'agissait de la mise en oeuvre d'un nouveau dispositif de mise à disposition.

Elle soutient qu'il appartenait donc à la CMCAS Périgord de reprendre la gestion du personnel mis à disposition dans le cadre de la rétrocession du TH induite par sa désadhésion au Territoire Nouvelle Aquitaine.

S'agissant du préjudice moral, la CCAS soutient que le salarié a perçu sa rémunération sans aucune interruption.

- Sur la mise hors de cause de la CCAS

L'article 25 § 3 du statut national du personnel de la production, du transport et de la distribution du gaz et de l'électricité stipule que le personnel nécessaire au fonctionnement administratif des CMCAS et de la CCAS, ainsi que le personnel de direction des institutions sociales, dont le fonctionnement est permanent, est mis à disposition de ces caisses, sur leur demande, dans la limite du tableau hiérarchique par les entreprises dont le personnel est soumis au présent statut.

(...)

Le tableau hiérarchique des emplois, approuvé par le ministre (...) fixe tous les cinq ans le plafond des effectifs mis à disposition par les entreprises après consultation du comité de coordination, de la CCAS et des fédérations syndicales représentatives de branches'.

(...) Les entreprises dont le personnel est soumis au présent statut déterminent par convention entre elles, les modalités de réintégration du personnel mis à disposition auprès des organismes'.

L'article 49 du règlement des CMCAS stipule :

'Conformément à l'article 25 du statut national du personnel des industries électriques et gazinières, le personnel nécessaire au fonctionnement administratif des CMCAS, ainsi que le personnel de direction des institutions sociales dont le fonctionnement est permanent est mis à disposition des CMCAS, sur leur demande, par les services, exploitations ou entreprises.

Il est soumis au statut national du personnel des industries électriques et gazières, et continue à faire partie des services, exploitations ou entreprises.'

La CMCAS Périgord et la CCAS ont adopté une convention de partenariat le 30 septembre 2011 dans le cadre de l'adhésion au territoire Aquitaine Nord. Un contrat d'engagement du même jour faisant référence à la convention de partenariat du 14 janvier 2010 définissait les missions réalisées par la structure professionnelle territoriale CCAS dans les missions de la CMCAS.

Par convention individuelle en date du 9 janvier 2019 entre la CCAS, Enedis - GRDF et M. [R], ce dernier a été mis à disposition de la CCAS.

L'article 16 de cette convention prévoyait une cessation anticipée de la mise à disposition sur demande d'une des parties, sous réserve d'un préavis de six mois et de l'accord de l'ensemble des parties.

En revanche, la convention pouvait être résiliée de plein droit en cas de mise en oeuvre d'un nouveau dispositif de mise à disposition.

Par délibération du 28 mars 2019, le conseil d'administration de la CMCAS Périgord a décidé, 'concomitamment à la sortie du territoire, le rattachement du personnel statutaire comme les dispositions de l'article 49 de ce même règlement lui autorisent.

En ce sens, une nouvelle organisation professionnelle issue de cette décision sera prochainement soumise par le bureau au CA'.

Le bénéfice des engagements contractuels entre les parties est lié au processus d'adhésion au territoire tel que cela ressort du préambule de la convention de partenariat.

Il résulte de ces dispositions que la CCAS n'était tenue d'aucun délai de prévenance pour mettre fin à la mise à disposition de M. [R], aucune partie liée au contrat n'ayant demandé sa résiliation, la CMCAS Périgord s'étant engagée à reprendre les salariés mis à disposition de la CCAS de manière concomitante à sa désadhésion du partenariat Territoire Nord Aquitaine.

Toutefois, pour que soient respectées les dispositions finales de l'article 16 de la convention individuelle prévoyant sa résiliation de plein droit, il fallait que le nouveau dispositif de mise à disposition en soit contemporain.

Il résulte de ces dispositions que la CCAS était tenue à un délai de prévenance pour mettre fin à la mise à disposition de M. [R] et qu'à ce titre , sa demande d'être mis hors de cause sera rejetée.

Il s'agit ensuite de savoir si la CCAS est fautive en ce qu'elle a résilié le contrat de mise à disposition de M. [R] le 20 décembre 2019 sans attendre la signature d'une nouvelle convention de mise à disposition au profit de la CMCAS Périgord, ou si celle- ci a empêché la signature d'un nouveau contrat alors qu'elle s'était engagée à reprendre les salariés mis à disposition de al CCAS de manière concomitante à sa déshadésion du partenariat Territoire Nord Aquitaine.

- Sur le manquement contractuel

Par courrier du 26 mars 2019, le comité de coordination des CMCAS attirait l'attention de la CMCAS Périgord, sur la nécessité, compte tenu de cette reprise en main de la gestion du personnel, de procéder aux formalités nécessaires pour l'établissement de la nouvelle convention et notamment sur ' la vigilance à adopter dans le cadre du processus de désadhésion, notamment quant à l'organisation du transfert du personnel mis à sa disposition directement au profit de la CMCAS', en l'invitant à interroger les instances représentatives du personnel des IEG (comité d'établissement et CHSCT) pour avis et trouver l'unité support qui rattacherait administrativement les personnels remis à disposition de la CMCAS sauf à prendre le risque de conduire des salariés dans un vide administratif'.

Toutefois, par délibération du 28 mars 2019, le conseil d'administration de la CMCAS Périgord a décidé, 'concomitamment à la sortie du territoire, le rattachement du personnel statutaire comme les dispositions de l'article 49 de ce même règlement lui autorisent.

En ce sens, une nouvelle organisation professionnelle issue de cette décision sera prochainement soumise par le bureau au CA'.

Il appartenait ainsi à la CMCAS d'établir une nouvelle convention tripartite à la place de la précédente liant la CCAS, l'employeur de droit et M. [R], sur la base d'une nouvelle organisation.

Par courriel du 18 juillet 2019, le comité de coordination des CMCAS informait le président de la CMCAS Périgord qu'il attendait un projet d'organisation professionnelle proposé par le conseil d'administration devant être examiné lors de la session du 17 septembre 2019.

En l'absence de transmission de projet, le comité de coordination des CMCAS confirmait par délibération du 17 septembre 2019 la rétrocession de cinq ETP à la CMCAS Périgord, lui permettant de formuler sa demande de mise à disposition auprès des entreprises des IEG.

Par délibération du 16 octobre 2019, le conseil d 'administration de la CCAS a pris acte à son tour de la demande de la CMCAS Périgord de mettre fin à la réalisation des missions professionnelles de la CMCAS par la CCAS telle qu'établie auparavant.

Par ailleurs, la CCAS a invité M. [R] le 5 novembre 2019 pour l'accompagner et répondre à ses questions, qu'il a refusé par courrier commun du 12 novembre avec les autres salariés concernés.

Le 25 novembre 2019, la CCAS a confirmé par courrier à la CMCAS la résiliation des conventions les liant à la date du 1er janvier 2020, date correspondant à l'engagement d'un nouvel exercice budgétaire pour toutes les CMCAS et a informé celle-ci avoir communiqué l'ensemble des délibérations afin que 'soit organisé le transfert des personnels', notamment en signant une nouvelle convention de mise à disposition avec la CMCAS.

Par courrier du 20 décembre 2019, la CCAS a informé les entreprises de la branche, employeurs de droit des quatre salariés, de la situation afin que soit organisé le transfert des personnels réalisant les missions professionnelles de la CMCAS par la CCAS.

Toutefois, malgré les nombreux courriels d'alerte de la part du comité de coordination des CMCAS et de la CCAS, des délibérations officielles, la CMCAS Périgord n'a engagé le processus de publication des postes permettant le transfert des salariés mis à disposition à son bénéfice que le 8 juillet 2020, contestant jusque là le nombre d'ETP tel qu'il résultait du tableau hiérarchique établi et validé par le comité de coordination depuis 2009, sollicitant six ETP et non cinq.

Ce n'est que par courrier du 3 janvier 2020 que la CMCAS Périgord a demandé aux entreprises de la branche d'engager les formalités nécessaires à l'affectation des postes nécessaires à son fonctionnement, mais en sollicitant un ETP supplémentaire.

Le comité de coordination des CMCAS dans sa session du 8 janvier 2020 a maintenu les cinq ETP.

Il ressort ainsi des échanges produits entre le président de la CMCAS Périgord et la CCAS d'une part et le comité de coordination de la CMCAS d'autre part que la demande que soit attribué à la CMCAS Périgord un ETP supplémentaire était une condition pour établir la nouvelle convention tripartite avec les salariés anciennement mis à disposition de la CCAS, ne proposant ainsi aucune organisation permettant une nouvelle mise à disposition des cinq salariés concernés.

Il résulte ainsi de l'ensemble de ces éléments que M. [R] ne démontre pas que la CCAS a manqué à une obligation de loyauté, ayant engagé à plusieurs reprises la CMCAS Périgord à signer le nouveau dispositif de mise à disposition concomitamment à sa décision de quitter le Territoire Aquitaine Nord; mais qu'au contraire, la CMCAS a cherché à contourner le dispositif existant pour obtenir un nouveau calcul du tableau hiérarchique en sa faveur.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. [R] de ce chef.

Sur l'intervention du syndicat CGT Energie 24

Le syndicat CGT Energie 24 est intervenu volontairement à l'instance pour solliciter le paiement de la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour atteinte à l'intérêt collectif de la profession relatif au non-respect des dispositions statutaires relatives aux conditions de résiliation de la mise à disposition et de réintégration dans l'entreprise. Le syndicat CGT Energie 24 fait également valoir le préjudice subi en raison de son rôle au sein des institutions sociales, le CMCAS Périgord étant composé de dix sept membres CGT sur vingt quatre suite aux dernières élections.

Les statuts du syndicat sont versés aux débats.

La CCAS soutient qu'il n'est pas justifié d'un manquement à une disposition conventionnelle, l'existence d'une convention de mise à disposition n'étant pas une obligation au regard de l'article 25 du statut du personnel des IEG ni de l'atteinte à l'intérêt collectif de la profession par le non respect d'un contrat de travail et en demande le rejet des demandes du syndicat.

***

Aux termes des dispositions des articles L. 2132-3 et L 2262-10 du code du travail, lorsque l'action principale exercée par un salarié repose sur une convention ou un accord collectif, un syndicat professionnel peut intervenir volontairement à l'instance engagée à raison de l'intérêt collectif que la solution du litige peut présenter pour ses membres.

En l'espèce, le non-respect des dispositions du règlement des CMCAS pris en application de l'article 25 du statut national du personnel de la production, du transport et de la distribution du gaz et de l'électricité, justifie la recevabilité et le bien-fondé de l'intervention du syndicat.

Toutefois, en l'absence de condamnation de la CCAS, sa demande de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi sera rejetée.

Le jugement déféré sera confirmé.

Sur les autres demandes

M. [R] et le syndicat CGT Energie 24 qui succombent à l'instance seront condamnés aux dépens.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à l'égard de M. [R].

Le Syndicat CGT Energie 24 sera condamné à payer à la CCAS la somme de 1.200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Condamne M. [R] et le Syndicat Energie 24 aux dépens ;

Condamne le Syndicat Energie 24 à verser à la CCAS la somme de 1.200 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile à l'égard de M. [R].

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 21/01885
Date de la décision : 12/06/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-06-12;21.01885 ?
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