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24/04/2024 | FRANCE | N°24/00092

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, C.e.s.e.d.a., 24 avril 2024, 24/00092


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

COUR D ' A P P E L D E B O R D E A U X







N° RG 24/00092 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NXVT





ORDONNANCE









Le VINGT QUATRE AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE à 14 H 30



Nous, Marie-Dominique BOULARD-PAOLINI, conseillère à la Cour d'appel de Bordeaux, agissant par délégation de madame la première présidente de ladite Cour, assistée de François CHARTAUD, greffier,



En l'absence du Ministère Public, dûment avisé,



En pr

ésence de Monsieur Gilles LAVERGNE, représentant du Préfet de La Haute-Vienne,



En présence de Monsieur [V] [Y], né le 19 Octobre 1988 à [Localité 2] (ALGERIE), de nationalité...

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

COUR D ' A P P E L D E B O R D E A U X

N° RG 24/00092 - N° Portalis DBVJ-V-B7I-NXVT

ORDONNANCE

Le VINGT QUATRE AVRIL DEUX MILLE VINGT QUATRE à 14 H 30

Nous, Marie-Dominique BOULARD-PAOLINI, conseillère à la Cour d'appel de Bordeaux, agissant par délégation de madame la première présidente de ladite Cour, assistée de François CHARTAUD, greffier,

En l'absence du Ministère Public, dûment avisé,

En présence de Monsieur Gilles LAVERGNE, représentant du Préfet de La Haute-Vienne,

En présence de Monsieur [V] [Y], né le 19 Octobre 1988 à [Localité 2] (ALGERIE), de nationalité Algérienne, et en l'absence de son conseil Maître Margaux GUILLOUT, dûment avisé,

Vu la procédure suivie contre Monsieur [V] [Y],

né le 19 Octobre 1988 à [Localité 2] (ALGERIE), de nationalité Algérienne et l'arrêté préfectoral de reconduite à la frontière du 15 avril 2024 visant l'intéressé,

Vu l'ordonnance rendue le 23 avril 2024 à 14h27 par le juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de Bordeaux, ordonnant la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [V] [Y], pour une durée de 28 jours à l'issue du délai de 48 heures de la rétention,

Vu l'appel interjeté par Monsieur [V] [Y], né le 19 Octobre 1988 à [Localité 2] (ALGERIE), de nationalité Algérienne, le 23 avril 2024 à 15h12,

Vu l'avis de la date et de l'heure de l'audience prévue pour les débats donné aux parties,

Vu les explications de Monsieur [V] [Y], ainsi que les observations de Monsieur [T] [S], représentant de la préfecture de La Haute-Vienne. Monsieur [V] [Y] qui a eu la parole en dernier,

A l'audience, Madame la Conseillère a indiqué que la décision serait rendue le 24 avril 2024 à 14h30,

Avons rendu l'ordonnance suivante :

FAITS ET PROCÉDURE

Le 15 avril 2024, M. le Préfet de Haute Vienne a pris à l'encontre de M. [V] [Y] se disant de nationalité algérienne un arrêté portant obligation de quitter sans délai le territoire français, notifié le 15 avril 2024 à 16 heures 21.

Par arrêté du 15 avril 2024, notifié le 15 avril 2024 à 16h21 le préfet de la Sarthe a ordonné son assignation à résidence.

Par arrêté du 21 avril 2024, notifié le jour même à 13 heures, le préfet de la Haute-Vienne a ordonné le placement en rétention administrative de M. [V] [Y] pour une durée de 48 heures dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire.

Par requête reçue au greffe du juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Bordeaux le 22 avril 2024 à 13h14, à laquelle il convient de se reporter pour l'exposé des moyens, le conseil de [V] [Y] a formé une requête en contestation de l'arrêté de placement en rétention.

Par requête reçue et enregistrée au greffe du juge des libertés de la détention le 23 avril 2024 à 9h59, le préfet de la Haute-Vienne a sollicité, au visa des articles L 742-1 à L742-3 du Code de l'Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d'Asile la prolongation de la rétention administrative pour une durée maximale de 28 jours.

Par ordonnance rendue le 23 avril 2024 à 14h27, le juge des libertés et de la détention du Tribunal Judiciaire de Bordeaux a :

- ordonné la jonction des deux dossiers, statuant en une seule et même ordonnance,

- accordé l'aide juridictionnelle provisoire à M.[V] [Y]

- déclaré recevables en la forme la requête en prolongation de la rétention administrative et celle en contestation formée par [V] [Y],

- rejeté les moyens d'irrégularité soulevés,

- déclaré la requête en prolongation de la rétention administrative régulière,

- autorisé la prolongation de la rétention administrative de M. [V] [Y] pour une durée de 28 jours à l'issue du délai de 48 heures de rétention,

- dit n'y avoir lieu à faire droit à la demande de [V] [Y] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Par courriel reçu au greffe de la Cour d'appel le 23 avril 2024 à 15h12, M. [V] [Y], en personne, a interjeté appel de l'ordonnance du 23 avril 2024.

A l'appui de son recours, il indique souhaiter être libéré et faire appel de la décision « pour raisons familiales » pour subvenir aux besoins de son fils, ce qui implique qu'il conteste la régularité de la décision de rétention administrative.

A l'audience, M. Le Représentant de la Préfecture soulève d'abord l'irrecevabilité de l'appel non conforme aux dispositions de l'article R743 ' 2 du CESEDA et s'oppose ensuite à la remise en liberté de l'intéressé, qui ne démontre pas la réalité ni l'intensité des liens avec son fils ni le fait qu'il participe à son entretien et son éducation.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la recevabilité de l'appel

Effectué dans les délais et motivé « pour des raisons familiales », expliquant qu'il est le père d'un enfant français dont il déclare s'occuper, en le visitant en lieu neutre pendant une heure, une fois par mois, l'appel est recevable .

- Sur la régularité du placement en rétention administrative

L'appel d'[V] [Y] est limité à la régularité du placement rétention administrative résultant du non-respect de sa vie privée et familiale et de l'intérêt supérieur de l'enfant, si bien que les autres éléments débattus en première instance ' mais non contestés ' ne seront pas examinés en appel.

L'obligation de quitter le territoire français ne doit pas avoir pour conséquence de couper l'étranger de ses racines ou de le séparer de sa famille et ne saurait constituer une atteinte considérable et disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale qu'il tient de l'article 8 de la Convention Européenne des Droits de l'Homme.

Par ailleurs, il doit être pris en considération l'intérêt supérieur de l'enfant conformément à l'article 3 de la CIDE.

Devant la Cour, M. [V] [Y] affirme bénéficier de la part d'un juge des enfants Madame [H], d'un droit de visite en lieu neutre de façon mensuelle pour voir son fils « qui aura 3 ans en décembre », auquel il fait des cadeaux grâce à des revenus perçus de travail non déclaré. Il affirme que la dernière fois qu'il a rendu visite à son enfant remonte au 16 avril mais ne se souvient pas des dates précédentes de visite.

Cependant, [V] [Y] ne justifie pas de la réalité ni de l'intensité des liens qu'il pourrait entretenir avec son fils, alors même que ce dernier est né en décembre 2021 et que l'intéressé a été incarcéré rapidement à compter du 1er septembre 2022 jusqu'au 18 mars 2023 avant d'être retenu en centre de rétention jusqu'en mai 2023, sans voir son fils ' ainsi qu'il le reconnaît ' et alors même qu'il a été condamné à de nombreuses reprises depuis 2012 à des peines d'emprisonnement ferme pour différentes infractions notamment des vols mais également trafic de stupéfiants et des violences à l'encontre de la mère de l'enfant [K] [J], éléments défavorables qui ne permettent pas de considérer que la présence d' [V] [Y] auprès d'un jeune enfant qu'il ne voit pratiquement jamais, soit conforme à l'intérêt supérieur de ce dernier.

Par ailleurs il résulte d'un jugement en assistance éducative rendue le 27 octobre 2022 par Claire JAROUSSIE, juge des enfants à Limoges, que [G] [Y] fait l'objet d'une mesure d'assistance éducative en raison des carences maternelles sachant que Madame [J] a pu exprimer le fait de souffrir de ce que [V] [Y] apparaissait comme peu soutenant et que ce dernier consommait des stupéfiants au domicile familial.

Il n'est aucunement justifié des liens entretenus par [V] [Y] avec son enfant pas plus qu'il n'est justifié de sa participation à l'entretien et l'éducation de son fils et ce d'autant qu'il ne dispose d'aucune ressource et qu'il vit de façon géographiquement éloignée, puisqu'il serait hébergé par une compagne au Mans.

Dans son audition devant les services de police du 15 avril 2024, il expliquait être sans profession ni aucune ressource, être célibataire mais occupant à titre gratuit d'un logement appartenant à [I] [L] dont il indiquait qu'elle avait 4 enfants (en réalité 5) dont il ne pouvait indiquer ni les prénoms ni les âges, qui demeure au Mans dans la Sarthe.

L' arrêté du 15 avril 2024 portant obligation de quitter le territoire français sans délai a pris en compte la situation familiale exposée par l'intéressé et notamment l'existence de son fils issu de sa relation avec [K] [J] ressortissante française en relevant l'absence de stabilité et d'intensité des liens du fait de ses incarcérations successives, de son placement en centre de rétention du 18 mars 2023 au 17 mai 2023 et de son éloignement géographique à plus de 300 km du lieu de vie de son enfant ;

Enfin, il ne démontre pas être dépourvu de toute attache dans son pays d'origine où résident ses parents, sa s'ur, et où il a vécu la majorité de sa vie.

D'où il suit que ce moyen ne saurait prospérer puisque l'arrêté de placement en rétention administrative ne porte pas atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et ne méconnaît pas l'intérêt supérieur de son enfant.

Sachant qu' [V] [Y] ne dispose pas de garanties de représentation alors qu'il n'a pas de passeport en cours de validité, qu'il s'est présenté sous différentes identités, qu'il a été condamné sous divers alias à de nombreuses reprises pour des faits qui troublent l'ordre public, qu'il ne dispose d'aucune ressource et qu'il a manifesté sa volonté de rester sur le territoire français puisqu'il ne s'est pas conformé à deux autres obligations de quitter le territoire français prises précédemment, qu'il n'a pas respecté l'assignation à résidence prise le 15 avril l'obligeant à rester tous les jours de 13 heures à 16 heures chez Madame [I] [L] et à pointer quotidiennement à 8h45 au commissariat du Mans, qu'il a été interpellé le 20 avril 2004 à [Localité 1] après avoir pris la fuite suite à un accident matériel de la circulation, l'accueil chez sa nouvelle compagne est parfaitement insuffisant pour permettre le retour effectif de [V] [Y] dans son pays d'origine.

L'autorité administrative n'a commis aucune erreur d'appréciation et le placement en rétention administrative est régulier.

En conséquence, dans les limites de l'appel, la décision du juge de première instance sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Statuant après débats en audience publique par ordonnance mise à la disposition au greffe après avis aux parties,

Déclarons l'appel recevable,

Déclarons la procédure régulière,

Confirmons, dans les limites de l'appel, l'ordonnance prise par le juge des libertés et de la détention le 23 avril 2024,

Disons que la présente ordonnance sera notifiée par le greffe en application de l'article R.743-19 du Code de l'Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d'Asile, 

Le Greffier, La Conseillère déléguée,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : C.e.s.e.d.a.
Numéro d'arrêt : 24/00092
Date de la décision : 24/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-24;24.00092 ?
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