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11/04/2024 | FRANCE | N°22/00946

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section b, 11 avril 2024, 22/00946


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION B



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ARRÊT DU : 11 AVRIL 2024







SÉCURITÉ SOCIALE



N° RG 22/00946 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MR33





















S.A.S. [3]



c/

URSSAF AQUITAINE





















Nature de la décision : AU FOND







Notifié par LRAR le :





LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :



La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).



Certifié par le Greffier en Chef,



Grosse délivrée le :



à :



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 février 2022 (R.G. n°19/0002...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION B

--------------------------

ARRÊT DU : 11 AVRIL 2024

SÉCURITÉ SOCIALE

N° RG 22/00946 - N° Portalis DBVJ-V-B7G-MR33

S.A.S. [3]

c/

URSSAF AQUITAINE

Nature de la décision : AU FOND

Notifié par LRAR le :

LRAR non parvenue pour adresse actuelle inconnue à :

La possibilité reste ouverte à la partie intéressée de procéder par voie de signification (acte d'huissier).

Certifié par le Greffier en Chef,

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 février 2022 (R.G. n°19/00020) par le Pôle social du TJ de BORDEAUX, suivant déclaration d'appel du 22 février 2022.

APPELANTE :

S.A.S. [3] agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]

représentée par la SELARL QUESNEL substituant Me Thomas PERINET de la SELAS OPTEAM AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

URSSAF AQUITAINE prise en la personne de son directeur domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 2]

représentée par Me Dorian AUBIN substituant Me Sylvain GALINAT de la SELARL GALINAT BARANDAS, avocat au barreau de BORDEAUX

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 février 2024 en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIÈRE, Président,

Madame Sophie LESINEAU, Conseillère,

Madame Valérie COLLET, Conseillère,

qui en ont délibéré.

Greffière lors des débats : Mme Evelyne GOMBAUD,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

Le délibéré a été prorogé en raison de la charge de travail de la Cour.

Exposé du litige

La société [3] a fait l'objet d'un contrôle par un inspecteur du recouvrement de l'Urssaf Aquitaine portant sur l'application de la législation sociale sur la période courant du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016.

Le 23 mars 2018, l'Urssaf a notifié une lettre d'observations à la société [3] portant sur 4 chefs de redressement pour un montant total de 57. 016 euros.

Le 25 avril 2018, la société [3] a formulé des remarques sur le redressement.

Le 26 juillet 2018, l'Urssaf a ramené le montant total du redressement à la somme de 24. 018 euros après annulation du chef de redressement relatif aux 'rémunérations non déclarées : rémunérations non soumises à cotisations' (point n°2 de la lettre d'observations).

Le 28 août 2018, l'Urssaf a mis en demeure la société [3] de lui verser la somme de 26.414 euros, dont 24.018 euros de cotisations et 2 396 euros de majorations de retard.

Le 4 octobre 2018, la société [3] a saisi la commission de recours amiable de l'Urssaf aux fins de contestation de cette mise en demeure.

Le 7 janvier 2019, la société [3] a saisi le tribunal de grande instance de Bordeaux aux fins de contester la décision implicite de rejet de la commission de recours amiable.

Par décision du 17 septembre 2019, la commission de recours amiable de l'Urssaf a maintenu partiellement le redressement contesté et a validé la mise en demeure du 28 août 2018 pour un montant ramené à 17 169 euros.

Le 27 janvier 2020, la société [3] a saisi le tribunal judiciaire de Bordeaux aux fins de contester la décision explicite de rejet de la commission de recours amiable.

Par jugement du 7 février 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :

- débouté la société [3] de l'ensemble de ses demandes,

- validé la mise en demeure n°52430893 du 28 août 2018 pour un montant total ramené à 18.882 euros, dont 17.169 euros en cotisations et 1 713 euros en majorations de retard,

- condamné la société [3] à verser à l'Urssaf Aquitaine la somme de 18. 882 euros,

- condamné la société [3] à verser à l'Urssaf Aquitaine la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société [3] au paiement des entiers dépens,

Par déclaration du 22 février 2022, la société [3] a relevé appel de ce jugement.

Par ses dernières conclusions enregistrées le 18 janvier 2024, la société [3] demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel formé par la société [3],

Y faisant droit,

- réformer le jugement du 7 février 2022 en qu'il a :

- débouté la société [3] de l'ensemble de ses demandes,

- validé la mise en demeure n°52430893 du 28 août 2018 pour un montant total ramené à 18 882 euros, dont 17 169 euros en cotisations et 1 713 euros en majorations de retard,

- condamner la société [3] à verser à l'Urssaf Aquitaine la somme de 18 882 euros,

- condamner la société [3] à verser à l'Urssaf Aquitaine la somme de 1 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société [3] au paiement des entiers dépens,

Statuant à nouveau :

- constater l'absence de mise à disposition permanente des véhicules de fonctions au sein de la société [3],

- annuler la décision de la commission de recours amiable notifiée le 21 novembre 2019 en ce qu'elle a maintenu le redressement pour la somme de 18.882 euros,

En conséquence,

- annuler le redressement notifié pour un montant total de 18.882 euros,

- débouter l'Urssaf de toutes ses demandes, fins et conclusions,

- condamner l'Urssaf au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'Urssaf aux entiers dépens.

Dans ses dernières écritures enregistrées le 18 septembre 2023, l'Urssaf Aquitaine conclut à la confirmation du jugement entrepris et sollicite la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées et oralement reprises.

Motifs de la décision

Sur le chef de redressement : ' avantage en nature véhicule : principe et évaluation-hors cas des constructeurs et concessionnaires'

La société conteste le bien fondé de ce chef de redressement ; elle prétend que l'Urssaf a, au cours des opérations de contrôle, refusé de prendre en compte les éléments de preuve qu'elle fournissait démontrant que les véhicules de l'entreprise mis à disposition des salariés n'étaient pas utilisés à titre privé et notamment les contrats de travail de salariés ou les chartes internes à l'entreprise stipulant l'interdiction d'utiliser les véhicules en dehors de l'exercice professionnel ; elle fait valoir, par ailleurs, que la date d'écriture comptable ne doit pas être confondue avec la date de réalisation des frais engagés ; ceci permet de démontrer que l'allégation de l'Urssaf sur les 'pleins de carburant la veille ou le lendemain de week-end' est dénuée de fondement. Elle rappelle que les salariés qui conservent un véhicule sur la semaine de travail et ne l'utilisent pas sur les périodes de repos hebdomadaire ou de congés ne bénéficient pas d'un avantage en nature. Elle soutient qu'aucune disposition réglementaire n'impose l'identification formelle du véhicule dont il est interdit un usage privé ; elle liste les salariés dont l'activité exige des déplacements à l'extérieur de l'entreprise et qui utilisent des véhicules de la société pour leur travail dont des véhicules utilitaires qui, par nature, ne sont pas utilisés à des fins privées.

Aux termes de l'article L 242-1 du code de la sécurité sociale dans sa version applicable au litige, pour le calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, sont considérées comme rémunérations toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l'occasion du travail, notamment les salaires ou gains, les indemnités de congés payés, le montant des retenues pour cotisations ouvrières, les indemnités, primes, gratifications et tous autres avantages en argent, les avantages en nature, ainsi que les sommes perçues directement ou par l'entremise d'un tiers à titre de pourboire.

L'arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale prévoit à l'article 3 que l'avantage en nature véhicule se définit par la mise à disposition permanente d'un véhicule de l'entreprise au salarié.

La mise à disposition permanente est caractérisée dés lors que le salarié est autorisé à utiliser le véhicule à des fins privées en dehors du temps de travail.

Les trajets 'domicile-lieu de travail' ne donnent pas lieu à un avantage en nature lorsque :

- l'utilisation du véhicule est nécessaire à l'activité professionnelle,

- le véhicule n'est pas mis à disposition de façon permanente et ne peut donc être utilisé à des fins personnelles,

- les salarié ne peut pas, pour ces trajets, utiliser les transports en commun, soit parce que le trajet n'est pas désservi, soit en raison de conditions ou d'horaires particulier de travail.

En l'espèce, la société [3] a pour activité la prestation de services auprès des entreprises de restauration ; elle employait 18 salariés lors du contrôle. Elle louait alors en moyenne 11 à 13 véhicules par mois utilisés par les salariés.

L'inspecteur du recouvrement a constaté que l'entreprise prenait en charge les frais de location, d'assurance, d'entretien et de carburant des véhicules mis à disposition des salariés.

Contrairement à ce qui est soutenu par la société, la Cour relève que l'inspecteur du recouvrement, puis la commission de recours amiable, ont examiné les documents fournis par l'entreprise, démontrant, selon elle, l'interdiction faite aux salariés d'utiliser les véhicules à des fins privées.

Il a, ainsi été constaté qu'aucune charte d'utilisation des véhicules n'était produite pour M. [H], [Z], [I], que les chartes remises à Mme [T], [V], [U], [C], [P] visaient des véhicules qui n'étaient pas ceux utilisés par les intéressés.

En ce qui concerne le cas particulier de M. [H], président de la société [4], elle-même directrice générale de la société [3] et de Mme [Z], prestataire commerciale de la société, lesquels bénéficient d'un véhicule mis à disposition par cette dernière, l'Urssaf observe, à juste titre, que toute somme ou avantage alloué à un salarié par un tiers qui n'est pas son employeur en contrepartie d'une prestation accomplie dans l'intérêt de ce tiers, constitue un avantage en nature.

En revanche, la commission de recours amiable a retenu que les chartes signées par Mme [J], M.[M], Mme [L] et Mme [W] étaient valables puisqu'elles concernaient bien les véhicules utilisés par les salariés. Elle a, en conséquence, annulé le redressement de ce chef.

Ainsi que le soutient l'Urssaf, l'absence d'identification du véhicule utilisé par le salarié dans la charte qui lui est remise, est un élément à prendre en compte pour caractériser un avantage en nature dés lors qu'il n'est pas corroboré par d'autres éléments probants sur l'utilisation exclusivement professionnelle du véhicule mis à disposition.

Or, en l'espèce, l'inspecteur du recouvrement a constaté que la société n'était pas en mesure de justifier de l'obligation pour les salariés de tenir un carnet de bord précisant les distances parcourues et les motifs des déplacements, étant observé que les notes de frais établies mensuellement ne comportent aucune mention du nombre de kilomètres parcourus.

De même, il a été constaté, s'agissant de la restitution de véhicules en fin de semaine, des pleins de carburant le vendredi soir à des heures tardives (21h38 par exemple) et à des distances éloignées du siège de l'entreprise (plus de 2 heures de route) pour lesquels la société ne démontre pas qu'il s'agit de trajets professionnels alors que ces éléments présument une non restitution des véhicules en fin de semaine et donc une utilisation à titre privée.

Il est à noter, à cet égard, que les chartes ou les contrats de travail mentionnant une interdiction d'utilisation des véhicules à titre privée ne précisent pas que le salarié a l'obligation de restituer le véhicule en fin de semaine ou au cours des périodes de congés.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments, que l'Urssaf, après avoir examiné les documents produits par la société, en a déduit, à bon droit, qu'elle ne justifiait pas, sauf pour les cas pris en compte par la commission de recours amiable, que les véhicules mis à disposition des salariés étaient utilisés à des fins exclusivement professionnelles, de sorte que cette mise à disposition constituait un avantage en nature.

Le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu'il a validé la décision de la commission de recours amiable.

Sur les autres demandes

La société partie perdante supportera la charge des dépens et sera condamné au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme le jugement entrepris

y ajoutant

Condamne la société [3] aux dépens et à payer à l'Urssaf Aquitaine la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Signé par monsieur Eric Veyssière, président, et par madame Evelyne Gombaud, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

E. Gombaud E. Veyssière


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section b
Numéro d'arrêt : 22/00946
Date de la décision : 11/04/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 17/04/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-04-11;22.00946 ?
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