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20/03/2024 | FRANCE | N°21/01310

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 20 mars 2024, 21/01310


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



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ARRÊT DU : 20 MARS 2024







PRUD'HOMMES



N° RG 21/01310 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L7ER













Monsieur [W] [O]



c/



S.A.R.L. DOMAINES PIERRE CHAVIN

















Nature de la décision : AU FOND





















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Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 février 2021 (R.G. n°F 19/00034) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LIBOURNE, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 03 mars 2021,





APPELANT :

Monsieur [W] [O]

de nationalité française, demeurant [Adres...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 20 MARS 2024

PRUD'HOMMES

N° RG 21/01310 - N° Portalis DBVJ-V-B7F-L7ER

Monsieur [W] [O]

c/

S.A.R.L. DOMAINES PIERRE CHAVIN

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 05 février 2021 (R.G. n°F 19/00034) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LIBOURNE, Section Encadrement, suivant déclaration d'appel du 03 mars 2021,

APPELANT :

Monsieur [W] [O]

de nationalité française, demeurant [Adresse 5]

représenté par Me Elise BATAIL, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉE :

SARL Domaines Pierre Chavin, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social [Adresse 1]

N° SIRET : 519 393 524

représentée par Me Emmanuel GUENOT, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND substituant Me Patrick PUSO de la SELAS BARTHELEMY AVOCATS, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND,

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 12 février 2024 en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Sylvie Hylaire, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

Monsieur [W] [O], né en 1966, a été engagé par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er septembre 2016, en qualité de directeur artistique, statut cadre, par la SARL Domaines Pierre Chavin, située à [Localité 2], dont l'activité principale est l'élevage et l'assemblage de vins.

Il était chargé pour l'essentiel du design de packaging et des produits ainsi que de la création de concepts liés au marketing de la marque. Son contrat de travail prévoiyait une convention de forfait en jours.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des vins, cidres, jus de fruits, sirops, spiritueux et liqueurs de France .

M. [O] a été placé en arrêt de travail pour maladie ordinaire du 21 novembre 2017 au 1er février 2018, puis à compter du 5 juin 2018.

Par courrier du 4 juin 2018, la société Domaines Pierre Chavin a informé M. [O] d'un projet de licenciement économique et de l'impossibilité de le reclasser au sein de la société.

Par lettre datée du 5 juin 2018, le salarié a été convoqué à un entretien préalable en vue de son éventuel licenciement pour motif économique fixé au 14 juin suivant.

Par courrier du 14 juin 2018, la société Domaines Pierre Chavin a précisé à M. [O] le motif économique justifiant son licenciement, tenant à la fermeture de l'établissement de [Localité 4] au sein duquel le salarié travaillait et à la suppression de son poste de directeur artistique. Dans le même temps il lui a été proposé le bénéfice d'un contrat de sécurisation professionnelle auquel M. [O] a adhéré le 6 juillet 2018.

A la date de la rupture, M. [O] avait une ancienneté d'un an et dix mois et la société occupait à titre habituel plus de dix salariés.

Les conditions d'exécution du contrat de travail ainsi que sa rupture étant contestées par le salarié, une tentative de règlement amiable du différend a eu lieu le 3 août 2018 mais n'a pas abouti.

Le 20 mars 2019, M. [O] a saisi le conseil de prud'hommes de Libourne, contestant la légitimité de son licenciement et réclamant diverses indemnités, notamment pour travail dissimulé, harcèlement moral, manquement à l'obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat de travail outre des rappels de salaires sur le solde de tout compte.

Par jugement rendu le 5 février 2021, le conseil de prud'hommes a débouté M. [O] de l'intégralité de ses demandes et l'a condamné à payer à la société Domaines Pierre Chavin la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

Par déclaration du 3 mars 2021, M. [O] a relevé appel de cette décision, notifiée par lettre adressée aux parties par le greffe le 18 février 2021.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 15 janvier 2024, M. [O] demande à la cour de le dire recevable et bien-fondé en son appel, d'iinfirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de juger :

- qu'il a fourni une prestation de travail pour le compte de la société Domaines Pierre Chavin dès le mois de mai 2016, sans formalité déclarative ni rémunération de la part de l'employeur,

- que dans le cadre de l'exécution du contrat de travail, il a subi des agissements constitutifs de harcèlement moral (caractérisé par un isolement et un retrait de tâches),

- qu'en agissant ainsi, la société Domaines Pierre Chavin a manqué à son obligation de prévention et de préservation de la santé et de la sécurité de son salarié et n'a pas respecté les conditions d'exécution de la convention de forfait en jours,

- que le licenciement pour motif économique prononcé à son encontre est dépourvu de cause réelle et sérieuse, ce qui lui ouvre droit à réparation intégrale de son préjudice,

- que la société Domaines Pierre Chavin reste lui devoir des sommes au titre du solde de tout compte,

- en conséquence, la condamner au paiement des sommes suivantes :

* indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 26.000 euros,

* dommages et intérêts pour harcèlement moral : 9.000 euros,

* dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité : 9.000 euros,

* dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 9.000 euros,

* dommages et intérêts pour licenciement dénué de cause réelle et sérieuse': 100.000 euros,

* rappels de salaire sur solde de tout compte : 2.049,32 euros,

* indemnité article 700 du code de procédure civile : 6.000 euros,

* aux entiers dépens de l'instance et aux frais d'exécution et de recouvrement

- ordonner :

* la remise des bulletins de salaire et d'une attestation Pôle Emploi conformes au jugement (sic),

* l'exécution provisoire de la décision à intervenir sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 9 juillet 2021, la société Domaines Pierre Chavin demande à la cour de':

A titre principal,

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Libourne en date du 5 février 2021 en ce qu'il a débouté M. [O] de toutes ses demandes et l'a condamné à lui payer la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

- dire qu'il n'existait aucun contrat de travail avec M. [O] avant son embauche,

- le débouter en conséquence de sa demande d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- dire que M. [O] n'a pas été victime de harcèlement moral,

- dire qu'elle n'a pas violé son obligation de sécurité,

- dire qu'il n'existe aucune exécution déloyale du contrat de travail de sa part,

- dire que le licenciement pour motif économique dont a fait l'objet M. [O] repose sur un motif réel et sérieux,

- juger que M. [O] ne remplit pas les conditions pour prétendre au versement de la somme qualifiée de "13ème mois",

- en conséquence, le débouter de toutes ses demandes.

A titre subsidiaire, si la cour devait considérer que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse et allouer à M. [O] des dommages et intérêts, juger que ceux-ci ne sauraient être supérieurs à 2 mois de salaire, soit 8.000 euros, en application de l'article L. 1235-3 du code du travail, M. [O] ne rapportant pas la preuve ni de la réalité, ni du quantum de son préjudice.

En tout état de cause,

- condamner M. [O] à lui verser la somme de 3.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre à supporter la charge des dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 janvier 2024 et l'affaire a été fixée à l'audience du 12 février 2024.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'exécution du contrat de travail

Sur la période comprise entre le mois de mai 2016 et le 1er eptembre 2016

Pour infirmation de la décision déférée et la condamnation de l'employeur à lui verser la somme de 26.000 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé, M. [O] affirme avoir fourni une prestation de travail pour le compte de la société entre le mois de mai et le 1er septembre 2016, date de son embauche, sans avoir été rémunéré et sans que l'employeur ait procédé aux déclarations nécessaires auprès des organismes sociaux.

L'employeur objecte que M. [O] ne démontre pas l'existence d'une relation de travail antérieure à la conclusion de son contrat de travail en ce qu'aucun des courriels versés par ce dernier ne caractérise un quelconque lien de subordination. Il soutient également que les échanges de mails produits par le salarié avaient pour dessein de recueillir son avis afin de ne pas prendre, sur la période avant son engagement, de décisions stratégiques contraires à celles souhaitées par le futur directeur artistique qu'il allait devenir.

***

L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs.

En l'absence d'un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui s'en prévaut de rapporter la preuve qu'il a fourni un travail moyennant rémunération et dans le cadre d'un lien de subordination avec celui qu'il désigne comme son employeur.

Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité d'un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Au soutien de ses prétentions, M. [O] verse aux débats une quarantaine de courriels échangés avec [N] [E], gérante de la société, entre le 3 mai 2016 et le 1er septembre 2016 et plus particulièrement les mails des':

- 3 mai 2016 de l'employeur': « j'accepte ton entrée en poste au 1er septembre nous trouverons des solutions du 1er juin au 1er septembre je te demande t'apporter juste ton regard sur le redesign des marques stratégiques en attendant (...) celui de Vallis Queyras pour commencer, urgent car nous sommes dessus (') » ;

- 11 mai 2016, de M. [O] à Mme [E] : « je te transmets les demandes modifiées sur 3 axes. Sur la 3ème version, j'ai inversé les couleurs de la capsule, bonne réception » sont jointes des maquettes de capsules ;

- 10 juin 2016 de l'employeur le remerciant et lui précisant soumettre son projet au marché puis lui indiquant': « pour Vallis Terra nous avions tout géré, la créa a juste un souci sur l'aplat de la capsule markétée. Tu aurais cela'' »'; en réponse le salarié indique à l'employeur lui faire « passer en soirée une plateforme technique aplat pour la capsule Vallis Terra » ;

- 16 juin 2016 de M. [O] : « tu trouveras le fichier haute définition pour le capsulier de la capsule Vallis Terra validée par notre client (') comme promis je vais maintenant réfléchir tranquillement à notre projet Adhara en vue de ton brief que tu m'avais soumis afin que nous puissions cartonner sur ce nouveau marché. Tu auras un retour je pense milieu de semaine prochaine sur la gamme complète avec sparkling car je dois m'absenter en Bretagne ce week end ; l'employeur répond : '« merci beaucoup [W]'! » ;

- 20 juin 2016, de Mme [E] : « ci-joint une demande de contrôle pour toi. Est que cela te va'' »'; en réponse, M. [O] lui écrit : « Après contrôle des plates-formes techniques, il me semblerait mieux d'éliminer le cadre gris et son galbage de remplacer tout simplement par un cadre en vernis gonflant (') pour le vernis sur les galets, je voyais l'ensemble des galets en vernis et non quelques parties afin d'avoir une impression de pouvoir les toucher (') pour le reste tout me semble OK. Bien sûr pour les textes, je vous laisse le soin de la relecture.'» ; Mme [E] écrit'en réponse : « parfait tout bon'!!! je transfère à [H]'!!! » ;

- 28 juin 2016 de l'employeur : « le projet a été très bien perçu. La version 1'! est-ce que tu peux soit envoyer les fichiers sources pour faire quelques petits changements mineurs ou intégrer les informations ci-dessous : modifs : il manque France/produits de France, la couleur (') pas de millésime »'; M. [O] écrit en réponse : « Tu peux compter sur moi je m'en occupe et te ferai un retour de la version comme souhaité » ;

- 25 juillet 2016, de l'employeur : « Il me faut les fichiers sources car on rend la copie cette semaine de Suomi. Il y a des modifs. Je te les donne mais si pas le temps, [Y] prendra le relais » suivi d'une liste de modifications à apporter ;

- 26 juillet 2016, de l'employeur : « dernière déclinaison, s'il te plaît (') nous avons besoin de présenter une variante du sparkling en aromatisé (') les 3 éléments doivent être poussés sur l'étiquette principale, merci'!!! ».

Il résulte de ces éléments d'une part, que des demandes ont été adressées et des instructions précises ont été données à M. [O] dans l'exécution des projets qui lui ont été confiés portant sur la création ou la modification d'étiquettes et de capsuliers et, d'autre part, que la société a incontestablement exercé un contrôle de l'exécution de ses directives en sollicitant des modifications à apporter aux travaux soumis par M. [O] à son appréciation.

Dès lors, il est suffisamment démontré par M. [O] qu'il a accompli ses missions dans un rapport de subordination qui caractérise l'existence d'un contrat de travail pour la période comprise entre le mois de mai et le 1er septembre 2016 sans qu'il ne soit rapporté que ces travaux ont été rémunérés et ont fait l'objet de déclarations auprès des organismes sociaux, de sorte que la décision des premiers juges sera infirmée sur ce point.

Sur le harcèlement moral

Pour solliciter l'allocation d'une somme de 9.000 euros à titre de dommages et intérêts,

M. [O] soutient avoir été victime de faits de harcèlement moral de la part de son employeur, ce que ce dernier conteste, opposant son pouvoir de direction.

***

L'employeur, tenu d'une obligation de sécurité, doit assurer la protection de la santé des travailleurs dans l'entreprise et notamment prévenir les faits de harcèlement moral.

Dès lors que de tels faits sont avérés, la responsabilité de l'employeur est engagée, ce dernier devant répondre des agissements des personnes qui exercent de fait ou de droit une autorité sur les salariés.

Selon les dispositions de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L. 1154-1 prévoit, qu'en cas de litige, si le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement, au vu de ces éléments, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

***

Au soutien de ses prétentions, M. [O] invoque les éléments suivants :

- un changement de tonalité dans les échanges, les critiques de son travail succédant à l'enthousiasme du début de la collaboration,

- des pratiques d'isolement,

- le transfert de ses attributions,

- son dénigrement et les critiques de son employeur,'

- les atteintes à sa santé.

Il verse notamment aux débats les pièces suivantes :

- des mails échangés avec son employeur entre les mois de juin et septembre 2017 puis entre les mois de septembre et novembre 2017 desquels il résulte que Mme [E] a pu le féliciter et lui a également demandé dans des termes courtois exempt de toute agressivité de modifier certains de ses travaux en écrivant notamment':'« je suis désolée d'insister mais je crois vraiment dans ce projet. Je pense que l'on va faire quelque chose de top », ce qui relève du pouvoir de direction de l'employeur ;

- s'agissant des pratiques d'isolement':

* une note de 2 octobre 2017 relative au télétravail mais qui ne le concernait pas, ce qu'il reconnaît, M. [O] travaillant seul au sein de l'établissement secondaire de [Localité 4] créé pour lui tel que cela ressort des pièces de la procédure,

* un mail de Mme [E] du 22 novembre 2017 faisant état de la distance géographique qui « apporte avec elle le manque de compréhension, les interprétations, la gestion d'un stress inutile et un manque de soutien dans les actions à mener (') »'; or ce mail, dans lequel elle évoque la venue du salarié le 8 décembre « afin de faire un point global pour que tous, toi et les équipes se sentent mieux » est une réponse au courriel du salarié de la veille qui, l'informant de son état de stress et de sa visite prochaine chez le médecin, lui demandait un renfort en effectif au regard du « nombre trop important de créations de gammes à moi tout seul , aucune volonté d'isolement ne s'en déduit pour autant,

*une copie-écran de son ordinateur du 20 novembre 2017 sur lequel apparaît : « impossible de relever le courrier, le nom d'utilisateur ou mot de passe de pierre-chavin est incorrect » sans autre précision, qui démontrerait l'impossibilité de se connecter à l'outil Skype, aucun autre incident de cette nature n'étant rapporté,

* la pièce 25 concernant un échange entre le salarié et Mme [X], salariée de l'entreprise, dont il résulte que M. [O] a eu des difficultés à se connecter à son compte Google Chrome mais selon la pièce 18 produite par l'employeur, sur les conseils de son interlocutrice, M. [O] a pu redémarrer son ordinateur et « cela fonctionne » écrivait-il,

* l'attestation de M. [G], ancien salarié, selon lequel l'adresse mail de M. [O] ne figurait pas parmi les mails rattachés à l'adresse servant à communiquer avec l'ensemble des salariés soit [Courriel 6], cependant contredite par le témoignage de Mme [X] et le message de réponse de M. [O] à la note relative au télétravail dont il a été rendu destinataire par ce biais,

* le courriel de M. [U], salarié, dont l'objet est': « signature juin 2018 » adressé à teams@pierre-chavin.com, ce qui démontre que le salarié était destinataire des courriels adressés à l'ensemble de l'équipe ;

- s'agissant du transfert de ses attributions :

* un courriel qu'il a adressé le 15 février 2018 à Mme [E] selon lequel il aurait demandé à plusieurs reprises de faire le point sur ses missions et Mme [E] a proposé de lui exposer lors de sa visite du 9 février une clé organisationnelle dont il aurait compris que son départ était souhaité,

* trois courriels que Mme [L] lui a adressés les 31 janvier 2018, 12 et 14 février 2018 par lesquels cette dernière lui indique : « bon retour parmi nous, voici les projets sur lesquels tu peux commencer à travailler dès ton retour (') » « voici un nouveau brief pour le projet o'biola » et « peux-tu t'occuper de cette demande » à partir desquels il considère à tort que Mme [L], autre salariée, était en charge d'une partie de ses attributions, sans autre précision,

- l'attestation de M. [I], ancien salarié certifiant que M. [O] était dénigré ouvertement, notamment par la dirigeante en indiquant toutefois n'avoir jamais rencontré physiquement M. [O] et sans autre précision quant aux faits rapportés,

- l'attestation de M. [G] rapportant avoir entendu à plusieurs reprises Mme [E] dénigrer publiquement le travail de M. [O] sans en préciser ni les dates, ni les termes,

- des éléments médicaux'ne faisant que reprendre les propos de M. [O] alors que ce dernier a été déclaré apte à reprendre son emploi par le médecin du travail à compter du 1er février 2018 et a poursuivi son activité jusqu'à la convocation à un entretien préalable à un éventuel licenciement, à savoir :

* le certificat établi par son médecin traitant relatant l'avoir reçu en consultation le 21 novembre 2017 au cours de laquelle il avait décrit un état de stress réactionnel avec troubles du sommeil de l'appétit et idées noires et se plaignait de problèmes relationnels professionnels ainsi que d'une dégradation de ses conditions de travail,

* un extrait de son dossier médical du service de santé au travail et le compte rendu d'entretien établi par une infirmière qui précise le 5 février 2018 qu'il est finalement content de reprendre son travail et le 13 février 2018, selon les dires du salarié, que la directrice lui aurait dit qu'il fallait qu'il quitte l'entreprise, « contact +++ avec l'avocate, va essayer de négocier un départ, (') a facilement les larmes aux yeux, a les mains qui tremble et la voix parfois peu assurée »,

* son arrêt de travai du 5 juin 2018,

* un certificat du docteur [A], psychiatre, établi le 16 février 2018, constatant que M. [O] présente une décompensation psychiatrique type burn-out qui pourrait être due à « la rapide dégradation de ses conditions de travail (surcharge de travail, repos conventionnels non respectés, isolement) l'ensemble de ces faits étant perçus par l'intéressé comme un harcèlement moral »,

* deux certificats médicaux établis par son médecin traitant postérieurement à son licenciement les 19 septembre et 17 décembre 2019.

Ainsi, si ces éléments de fait témoignent du ressentiment du salarié à l'égard de l'employeur notamment du fait de sa situation géographique éloignée du siège social, pourtant choisie par lui, en revanche même pris dans leur ensemble, ils demeurent insuffisants pour laisser supposer l'existence de la situation de harcèlement moral dénoncée.

La décision critiquée sera confirmée de ce chef.

Sur la demande au titre de l'obligation de sécurité

L'article L. 4121-1 du code du travail prévoit que l'employeur doit prendre toutes les mesures pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs par des actions de prévention des risques professionnels et de pénibilité au travail, des actions d'information et de formation et la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés conformément aux principes généraux énumérés à l'article L. 4121-2 du même code.

Méconnaît l'obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur qui ne justifie pas avoir pris toutes les mesures prévues par les textes ci-dessus rappelés.

***

M. [O] sollicite l'allocation de la somme de 9.000 euros au titre du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité en invoquant'la survenue de son burn-out à l'automne 2017 qui cependant n'a pas été prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels, aucune demande en ce sens n'étant d'ailleurs formulée.

Il indique que ce trouble aurait pour origine':

- sa surcharge de travail, il produit des échanges de mails avec Mme [E] du :

* 3 octobre 2017, aux termes desquels cette dernière l'informe de recrutements à venir pour l'équipe graphique à [Localité 2] et en réponse, le salarié lui précise que ce ou cette graphiste devra être un relais pour faire aboutir les projets créatifs pour éviter un embouteillage « acant la prod (') » et sollicite un entretien avec Mme [E] pour en parler, ce qui démontre que l'employeur avait pris en compte ses demandes quant à sa charge de travail en lui proposant de recruter,

* 21 novembre 2017 par lequel le salarié indique : « ma venue le 8 décembre ou ta venue va nous permettre de savoir comment nous allons réfléchir un process cohérent et raisonnable car la création reste un moment où l'on se concentre sur une recherche créative et non pas une production de demandes qui s'empilent l'une par-dessus les autres. A [Localité 3] [son ancien employeur] tes demandes représentaient un travail de 4 graphistes créatifs packaging. Seul, tes demandes me sont aujourd'hui impossible à effectuer sans en altérer mon stress et ma santé, je ne mange plus et ne dors plus. Ma tâche devient impossible à effectuer même avec le plus grand courage de ma part. Merci de trouver une solution rapidement pour me décharger de ces tâches innombrables car je suis en phase de burn-out (') j'attends par écrit une proposition sérieuse de ta part sur la suite que tu souhaites donner à notre collaboration qui me permettra de continuer à travailler dans des conditions beaucoup plus réalistes et raisonnables sans altérer ma santé » ; le lendemain, Mme [E] s'inquiétait du sort de M. [O]'en ces termes : « je m'excuse de lire ces mots et de prendre note de ton état de stress (') quant à l'augmentation des effectifs, je suis sur un recrutement depuis quelques semaines déjà avec difficultés pour trouver un candidat qui pourra nous apaiser au pack. J'ai discuté début de semaine avec une agence de créa. Et j'ai fait lancer des devis côté Inesens pour qu'ils prennent en charge la créa. En ce qui concerne la répartition des charges, je peux t'assurer que [Y] a beaucoup à faire côté com externe (') ta venue le 8 sera l'occasion de faire un point global pour que tous, toi et les équipes se sentent mieux. Pour aujourd'hui repose toi au mieux. Prend soin de toi et fais-moi un signe pour me dire si tu te sens mieux suite à ta visite chez le médecin et la suite donnée », de sorte que ses demandes ne sont pas restées sans réponse contrairement à qu'il le prétend, M. [U], infographiste ayant été engagé en décembre 2017 ;

- les conditions d'exécution de la convention de forfait en jours à laquelle il était soumis aux termes de l'article 6 de son contrat de travail prévoyant un contigent annuel de jours travaillés de 218 jours alors que l'accord de branche du 19 avril 2001, en son article 4, ainsi que la convention collective du 15 mars 2013 prévoient un contingent d'heures travaillées ne pouvant excéder 214 jours par an; il ajoute qu'aucun dispositif d'accompagnement, aucun entretien sur sa charge de travail et aucun dispositif de contrôle de la durée du travail, des jours travaillés et non travaillés n'ont été mis en place par l'employeur.

En effet, si l'employeur produit un document intitulé « fiche d'entretien annuel d'évaluation », la cour constate à l'instar de M. [O], qu'il n'existe aucune rubrique réservée et renseignée quant à la charge et l'organisation du travail du salarié de sorte que l'employeur, auquel incombe la charge de la preuve du respect des repos obligatoires, est défaillant dans sa démonstration et qu'aucune mesure de contrôle et de suivi régulier de la charge de travail du salarié n'a été mis en place.

En conséquence de ce dernier manquement, l'employeur sera condamné à verser à M. [O] la somme de 500 euros.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail

L' article L.1221-1 du code du travail dispose que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

***

Au soutien de sa demande d'allocation d'une somme de 9.000 euros à ce titre, M. [O] invoque l'absence de dispositif d'accompagnement de la convention de forfait en jours.

La société répond que M. [O] ne démontre ni un quelconque manquement de sa part ni le moindre préjudice.

M. [O] ne justifie pas avoir subi, s'agissant de l'absence de dispositif d'accompagnement de la convention de forfait en jours, de préjudice distinct de celui réparé au titre du manquement à l'obligation de sécurité.

Il y a lieu, par voie de confirmation du jugement, de débouter M. [O] de sa demande à ce titre.

Sur la rupture du contrat de travail

Sur le'licenciement'et ses conséquences

Aux termes de l'article L.1233-3 du code du travail dans sa version applicable au présent litige constitue un licenciement pour motif économique, le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification substantielle du contrat de travail consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques.

La'réorganisation'de l'entreprise'en vue de sauvegarder sa compétitivité constitue également un'motif'valable de'licenciement'économique.

La matérialité de la suppression, de la transformation d'emploi ou de la modification d'un élément essentiel du contrat s'apprécie au niveau de l'entreprise dont le secteur d'activité, qui permet d'apprécier la cause économique du licenciement, est caractérisé par la nature des produits, biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, les modes et réseaux de distribution, se rapportant à un même marché.

En cas de contestation, le juge doit vérifier le caractère réel et sérieux du le'motif'économique'invoqué à l'appui du licenciement.

Si le'motif'économique'n'existe pas ou s'il n'est pas suffisamment caractérisé, le'licenciement'est sans cause réelle et sérieuse.

En la matière, le juge forge sa conviction en vérifiant la réalité et le sérieux, tant des raisons économiques alléguées par l'employeur (difficultés économiques, mutations technologiques,'réorganisation'de l'entreprise'etc.) que de leur incidence sur l'emploi et le contrat de travail (suppression ou transformation d'emploi ou modification du contrat de travail).

Lorsque le'motif économique repose sur la'réorganisation'ou restructuration de l'entreprise, le juge doit rechercher si celle-ci était justifiée par la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l'entreprise.

La'réorganisation'de l'entreprise'peut être un moyen de lutter contre des difficultés économiques existant à la date du'licenciement. A cet égard, un employeur peut fonder un'licenciement'économique'sur une'réorganisation'rendue nécessaire par une menace pesant sur la compétitivité de l'entreprise. Cette menace peut être caractérisée par des résultats financiers déficitaires existants au moment du licenciement pour'motif'économique.

La'réorganisation'peut aussi être destinée à sauvegarder la compétitivité de l''entreprise'quand il s'agit de prévenir des difficultés économiques à venir et leurs conséquences sur l'emploi, l'employeur pouvant légitimement anticiper des difficultés économiques prévisibles et mettre à profit une situation financière encore relativement saine pour adapter ses structures à l'évolution de son marché dans les meilleures conditions possibles, mais toujours avec la condition impérative que soient caractérisées au jour du'licenciement'pour'motif'économique'une menace pour la compétitivité ainsi que la nécessité de procéder à une'réorganisation'de l''entreprise'pour la sauvegarder.

En cas de'motif'économique'établi, le juge n'a pas à contrôler le choix effectué par l'employeur entre les différentes solutions possibles puisque cela relève de son pouvoir de direction. En effet, le juge, tenu de contrôler le caractère réel et sérieux du'motif'économique'de'licenciement et de vérifier en conséquence l'adéquation entre la situation'économique'de l'entreprise'et les mesures affectant l'emploi ou le contrat de travail envisagées par l'employeur, ne peut se substituer à ce dernier quant aux choix des mesures qu'il effectue dans la mise en oeuvre de la'réorganisation'de l'entreprise.

En l'espèce, la société est spécialisée dans la conception et le négoce de vins traditionnels, biologiques ou sans alcool et emploie une vingtaine de personnes pour le marketing et la commercialisation des produits, dont la fabrication est sous-traitée à des prestataires.'

La lettre de'licenciement'du 14 juin 2018 qui fixe les limites du litige, énonce au titre du motif économique, la'réorganisation'de l''entreprise'en vue de sauvegarder sa compétitivité et afin de prévenir des difficultés économiques impliquant d'une part, la fermeture de l'établissement secondaire de [Localité 4] qui « génère des frais fixes annuels de l'ordre de 6.500 € sans production d'une quelconque plus-value » et, d'autre part, la suppression du poste de directeur artistique dont les tâches seront « reprises par les graphistes, la chargée de communication et la gérante » et ce, en raison d'une baisse significative du résultat d'exploitation de près de 55% pour l'exercice 2017, consécutive à une dégradation de la marge commerciale liée à la hausse des prix du vrac ainsi qu'à une augmentation des ratios de la masse salariale sur le chiffre d'affaires.

Pour voir infirmer la décision déférée et obtenir l'allocation d'une somme de 100.000 euros au titre des dommages et intérêts pour licenciement abusif, M. [O] fait valoir que la hausse du chiffre d'affaires de 10% par rapport à l'année précédente et le résultat d'exploitation qui demeurait positif ne sauraient caractériser des difficultés économiques. Il affirme que les justificatifs avancés par l'employeur au soutien de la nécessaire réorganisation de l'entreprise ne peuvent légitimer le motif économique de la rupture de son contrat de travail.

Il produit trois articles de presse relatifs à l'essor de la société mais postérieurs à son licenciement, notamment un article du 11 février 2019 intitulé « les champions de la croissance 2019 » au rang desquels figure la société Domaines Pierre Chavin.

De son côté, pour justifier du licenciement pour motif économique mis en 'uvre, la société produit les comptes annuels de 2017 établis et signés d'un expert-comptable.

Il résulte de ces documents que si le chiffre d'affaires a augmenté de 10% par rapport à l'année précédente, en revanche le résultat d'exploitation a connu une baisse de 55%, s'expliquant notamment par une augmentation de près de 30% des salaires et des charges sociales s'élevant à la somme de 122.021,17 euros pour l'année 2016 et à celle de 208.796,87euros en 2017. En outre, est constatée une dégradation du résultat net, soit le bénéfice, qui a diminué de plus de 49% entre l'années 2016 et l'année 2017.

Ces perspectives préoccupantes reposent ainsi sur des éléments chiffrés qui sont de nature à caractériser une menace sur la compétitivité, les éléments comptables produits validant ainsi la menace financière pesant sur l'entreprise en l'absence de réaction de l'employeur, et ce, même si par la suite, en 2019, la situation se serait redressée au vu des coupures de presse.

Il résulte de ces considérations que la réalité du'motif'économique'invoqué est établie de sorte que le licenciement pour motif économique de M. [O] repose sur une cause réelle et sérieuse. En conséquence, le salarié sera débouté de ses demandes indemnitaires à ce titre.

La décision entreprise sera confirmée de ce chef.

Sur les rappels de salaires au titre du solde de tout compte

M. [O] sollicite le paiement de la somme de 2.049,32 euros bruts à titre de rappel de salaires pour le 13ème mois de l'année 2018 au prorata de son temps de présence dans l'entreprise.

L'employeur s'y oppose en affirmant que le contrat de travail liant les parties ne prévoit pas le versement d'une telle prime par ailleurs inexistante au regard de la convention collective applicable.

Il ajoute que l'article 42 ter de celle-ci prévoit une gratification annuelle calculée sur la base du salaire minimum conventionnel dont le salarié a bénéficié au cours de la relation contractuelle sans que cela ne soit créateur d'une quelconque obligation pour un versement au prorata en cas de rupture du contrat de travail.

Il ressort néanmoins de l'article 6 du contrat de travail qu'en « contrepartie de son activité, le salarié percevra une rémunération mensuelle brute totale de 4.000 euros sur treize mois », cette prime figurant également sur les bulletins de salaire des mois de décembre 2016 « au prorata sur 4 mois » d'un montant de 1.333,33 euros et de décembre 2017 pour un montant de 4.000 euros de sorte que contrairement à ce que soutient l'employeur, ce dernier est redevable de la somme de 2.049,32 euros au titre du 13ème mois au prorata temporis dont le quantum n'est pas discuté.

S'agissant d'un élément de rémunération, la prime de 13ème mois est génératrice de'congés'payés.

Par infirmation de la décision de première instance, la société sera ainsi condamnée à verser à M. [O] la somme de 2.049,32 euros au titre de la prime du 13ème mois ainsi qu'à la somme de 204,93 euros au titre des congés payés afférents.

Sur la demande au titre de l'indemnité forfaitaire de travail dissimulé

L'article L. 8221-5 du code du travail dans sa version applicable aux faits dispose: "Est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur:

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales."

L'article L. 8223-1 du même code prévoit qu'en cas de rupture du contrat, le salarié auquel l'employeur a eu recours en commettant les faits prévus au texte susvisé a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Le lien de subordination entre la société et M. [O] a été retenu comme établi pour la période comprise entre le mois de mai et le 1er septembre 2016, sans qu'il ne soit rapporté que ces travaux ont été rémunérés ni n'ont fait l'objet de déclarations auprès des organismes sociaux.

La matérialité des faits de travail dissimulé est établie et ce ne peut être qu'intentionnellement que la société a fait travailler pendant plusieurs mois M. [O],

sans bulletin de paie, ni rémunération, alors que ce dernier effectuait dans le même temps la période de préavis lié à son précédent emploi.

La société sera en conséquence condamner à lui verser une somme correspondante à 6 mois de salaires en application des dispositions de l'article L. 8223-1 du code du travail, soit la somme de 26.000 euros calculée à partir du salaire moyen tenant compte de la prime du treizième mois (4.333,33 x 6).

La décision déférée sera donc infirmée en ce qu'elle a débouté M. [O] de sa demande à ce titre.

Sur les autres demandes

Sur la demande de remise de documents

La société devra délivrer un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu'une attestation France Travail rectifiés en considération des condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision.

Sur l'exécution provisoire

La présente décision n'est susceptible que d'un pourvoi en cassation, recours qui est dépourvu d'effet suspensif. Il n'y a donc pas lieu d'assortir les condamnations prononcées de l'exécution provisoire.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Partie perdante à l'instance, la société sera condamnée aux dépens ainsi qu'à verser à M. [O] la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme la décision déférée en ce qu'elle a débouté M. [O] de ses demandes au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail, du harcèlement moral et de l'absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement,

L'infirme pour le surplus,

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit que M. [O] a accompli une prestation de travail pour la société Domaines Pierre Chavin entre le 3 mai et le 1er septembre 2016 avant de conclure un contrat de travail à cette date,

Condamne la société Domaines Pierre Chavin à verser à M. [O] les sommes suivantes':

- 500 euros à titre de dommages et intérêts en raison du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité,

- 26.000 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- 2.049,32 euros au titre de la prime du 13ème mois ainsi que 204,93 euros au titre des congés payés afférents,

- 2.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel,

Dit que la société Domaine Pierre Chavin devra délivrer à M. [O] un bulletin de salaire récapitulatif des sommes allouées, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte ainsi qu'une attestation France Travail rectifiés en considération des

condamnations prononcées et ce, dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société Domaines Pierre Chavin aux dépens.

Signé par Sylvie Hylaire, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Sylvie Hylaire


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 21/01310
Date de la décision : 20/03/2024

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2024-03-20;21.01310 ?
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