COUR D'APPEL DE BORDEAUX
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 14 MARS 2024
N° RG 23/00594 - N° Portalis DBVJ-V-B7H-NDHE
Monsieur [P] [D]
Madame [J] [R] épouse [D]
c/
Madame [E] [K]
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 17 janvier 2023 (R.G. 21/06165) par le Tribunal judiciaire de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 03 février 2023
APPELANTS :
[P] [D]
né le 26 Mars 1984 à [Localité 8]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 3]
[J] [R] épouse [D]
née le 04 Décembre 1987 à [Localité 8]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 3]
Représentés par Me Nicolas NAVEILHAN, avocat au barreau de BORDEAUX
INTIMÉE :
[E] [K]
née le 21 Janvier 1947 à [Localité 5]
de nationalité Française,
demeurant [Adresse 4]
Représentée par Me Jean-david BOERNER de la SELARL BOERNER & ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX, substitué par Me Caroline LECHEVALIER, avocate au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 29 janvier 2024 en audience publique, devant la cour composée de :
Monsieur Jacques BOUDY, Président,
Monsieur Alain DESALBRES, Conseiller,
Madame Christine DEFOY, Conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Mélody VIGNOLLE-DELTI
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
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EXPOSÉ DU LITIGE
Suivant acte en date du 15 mars 2019 par Maître [O] [F], notaire associé à [Localité 6], Madame [E] [K] a vendu à Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] son immeuble sis à [Adresse 3], suivant paiement par rente annuelle et viagère de 9.000€ payable d'avance par fractions mensuelles de 750€ le 5 de chaque mois, outre les taxes foncières et d'enlèvement des ordures ménagères, après paiement effectif d'un bouquet de 72.500€.
Une clause résolutoire était prévue à l'acte de vente.
Des incidents de paiement de la rente viagère sont intervenus et des actes d'huissier de justice et des procédures de saisie ont été établis à compter d'octobre 2019.
Par acte d'huissier du 9 août 2021, Madame [E] [K] a assigné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] en résolution de la vente de l'immeuble.
Par jugement en date 17 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Bordeaux a :
- prononcé la résolution de la vente intervenue le 15 mars 2019 par le ministère de Maître [F], notaire associé à [Localité 6], de l'immeuble sis [Adresse 3], à [Localité 7] cadastré section AC Numéro [Cadastre 1], et section AC Numéro [Cadastre 2] avec effet au 7 juillet 2021,
- ordonné la publication du présent jugement par la partie la plus diligente auprès du service de la publicité foncière, aux frais de Monsieur et Madame [D],
- dit que Madame [E] [K] conservera les arrérages perçus et la somme de 36.400 € au titre de la clause pénale,
- condamné en conséquence de la résolution de la vente Madame [E] [K] à payer à Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] la somme de 36.400 € correspondant au solde du bouquet,
- dit que les sommes sont assorties du taux d'intérêt légal à compter du présent jugement et ordonné la capitalisation des intérêts pour les intérêts dus pour une année entière,
- ordonné l'expulsion de l'immeuble vendu de Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] à payer à Madame [E] [K] la somme de 752,74 € par mois à compter du 7 juillet 2021 jusqu'au départ effectif des lieux,
- débouté Madame [E] [K] du surplus de ses demandes,
- débouté Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] du surplus de leurs demandes,
- condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] à payer à Madame [E] [K] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- écarté l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] aux dépens, y compris les actes d'huissier, dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par déclaration électronique en date du 3 février 2023, Monsieur [P] [D] et Madame [J] [D] ont interjeté appel de la décision.
Dans leurs dernières conclusions en date du 3 mai 2023, Monsieur [P] [D] et Madame [J] [D] demandent à la cour de :
- les recevoir en leur appel et les y déclarer aussi bien recevables que bien fondés,
- infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bordeaux le 17 janvier 2023 en ce qu'il a :
- prononcé la résolution de la vente intervenue le 15 mars 2019 par le ministère de Maître [F], notaire associé à [Localité 6], de l'immeuble sis [Adresse 3], à [Localité 7] cadastré section AC Numéro [Cadastre 1], et section AC Numéro [Cadastre 2] avec effet au 7 juillet 2021,
- ordonné la publication du présent jugement par la partie la plus diligente auprès du service de la publicité foncière, aux frais de Monsieur et Madame [D],
- dit que Madame [E] [K] conserve les arrérages perçus et la somme de 36.400 € au titre de la clause pénale,
- condamné en conséquence de la résolution de la vente Madame [E] [K] à payer à Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] la somme de 36.400 € correspondant au solde du bouquet,
- dit que les sommes sont assorties du taux d'intérêt légal à compter du présent jugement et ordonné la capitalisation des intérêts pour les intérêts dus pour une année entière,
- ordonné l'expulsion de l'immeuble vendu de Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] à payer à Madame [E] [K] la somme de 752,74 € par mois à compter du 7 juillet 2021 jusqu'au départ effectif des lieux,
- débouté Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] du surplus de leurs demandes,
- condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] à payer à Madame [E] [K] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] aux dépens, y compris les actes d'huissier, dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.
Statuant à nouveau,
A titre principal,
- débouter Madame [E] [K] de l'ensemble de ses demandes tendant à voir prononcer la résolution judiciaire du contrat de vente du 15 mars 2019 de l'immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 7] cadastré section AC n°[Cadastre 1] et section AC n°[Cadastre 2] avec effet au 15 juin 2021 et à l'octroi de dommages et intérêts,
- reconventionnellement, à titre principal, condamner Madame [E] [K] à leur payer une somme de 59.510 € TTC, en réparation des mesures conservatoires à mettre en 'uvre et des travaux réparatoires des désordres affectant l'immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 7] cadastré section AC n°[Cadastre 1] et section AC n°[Cadastre 2], sur le fondement de la garantie décennale,
- reconventionnellement, à titre subsidiaire, condamner Madame [E] [K] à leur payer une somme de 59.510 € TTC, en réparation des mesures conservatoires à mettre en 'uvre et des travaux réparatoires des désordres affectant l'immeuble sis [Adresse 3] à [Localité 7] cadastré section AC n°[Cadastre 1] et section AC n°[Cadastre 2], sur le fondement de la garantie des vices cachés,
A titre subsidiaire,
- réduire la clause pénale stipulées dans l'acte du 15 mars 2019 à de plus justes proportions,
- condamner Madame [E] [K] à restituer à Monsieur [P] [D] la somme de 72.800 € correspondant à la somme versée comptant le jour de la signature de l'acte du 15 mars 2019, assortie des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,
- juger que les formalités de publicité foncière seront subordonnées au paiement par Madame [E] [K] de l'intégralité des sommes qui leur sont dues,
En tout état de cause,
- condamner Madame [E] [K] à verser à Monsieur [P] [D] la somme de 5.000€ sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner Madame [E] [K] aux entiers dépens de l'instance.
Dans ses dernières conclusions en date du 28 juillet 2023, Madame [E] [K] demande à la cour de :
- déclarer l'appel des époux [D] irrecevable, et les débouter de toutes leurs demandes, fins et conclusions,
- confirmer en toutes ses dispositions, le jugement du tribunal judiciaire du 17 janvier 2023,
Y ajoutant,
- condamner Monsieur [P] [D] in solidum avec Madame [J] [D] à lui payer :
- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi,
- 3 000,00 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,
- les intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-1 du code civil,
- les entiers dépens d'appel, et ce, avec distraction au bénéfice de la SCP Boerner conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 janvier 2024.
Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la résolution de la vente en viager libre
Les époux [D] font grief au jugement d'avoir prononcé la résolution judiciaire du contrat de vente en viager d'un bien immobilier. Pour justifier leur défaut d'exécution, ils excipent de la mauvaise foi et de la déloyauté de leur crédirentière, Madame [K]. En effet, ils avancent que l'immeuble vendu par cette dernière était affecté d'importants désordres structurels qui conduisaient à des infiltrations d'eau. Ces désordres trouveraient leur source dans le fait qu'elle a réalisé elle-même les travaux de reconstruction de l'immeuble en question après un incendie.
Madame [K] fait quant à elle valoir que les conditions d'application de l'exception d'inexécution ne sont pas remplies et que les époux [D] ne pouvaient valablement se prévaloir de cette exception et qu'en conséquence, faute de paiement de ses arrérages, elle est bien fondée à solliciter la résolution judiciaire du contrat.
Plusieurs éléments doivent être envisagés. Il sera ainsi nécessaire d'observer le principe de la mise en oeuvre de la résolution du contrat, avant d'aborder l'exercice de l'exception de l'inexécution comme fait justificatif.
Le principe de la résolution du contrat de vente en viager
L'article 1650 du Code civil prévoit que 'la principale obligation de l'acheteur est de payer le prix au jour et au lieu réglés par la vente'.
L'article 1654 du Code civil prévoit, quant à lui, que 'si l'acheteur ne paye pas le prix, le vendeur peut demander la résolution de la vente'.
L'acte de vente en date du 15 mars 2019 prévoit enfin qu''à défaut de paiement à son échéance exacte d'un seul terme de la rente et trente jours après une simple mise en demeure contenant déclaration par le crédirentier de son intention de se prévaloir du bénéfice de la présente clause et restée sans effet, celui-ci aura le droit, si bon lui semble, de faire prononcer en justice la résolution de la présente vente nonobstant l'offre postérieure des arrérages'.
En l'espèce, l'acte de vente du 15 mars 2019, qui tient lieu de loi entre les parties, contient une clause résolutoire qui permet la résolution judiciaire du contrat. Cette résolution est conditionnée au fait que le débirentier ne procède pas au paiement d'un seul des arrérages et que le crédirentier, trente jours après le non-paiement, lui fasse parvenir une mise en demeure.
A compter du mois d'octobre 2019, les époux [D] ont arrêté de verser les arrérages qu'ils devaient. Dès ce même mois, Madame [K] leur faisait parvenir un commandement de payer visant la clause résolutoire. Le 19 novembre 2019, elle leur faisait parvenir une mise en demeure, puis une autre le 11 juin 2020 et enfin, le 7 juin 2021, elle leur faisait parvenir un dernier commandement de payer.
Au regard de ces éléments, la clause résolutoire contenue dans l'acte de vente est susceptible d'être mise en oeuvre mais il résulte de sa rédaction que la résolution doit être prononcée en justice.
Sur l'exception d'inexécution
L'article 1219 du Code civil prévoit qu''une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave'.
Le contrat de vente avec constitution d'une rente viagère n'est pas un contrat à exécution successive mais un contrat à exécution instantanée puisqu'il opère transfert de la propriété dès sa conclusion. Or, l'exception d'inexécution, qui permet à un contractant de ne pas exécuter son obligation si son cocontractant n'exécute pas lui-même la sienne est un mécanisme qui ne s'applique que dans les contrats synallagmatiques à exécution successive.
L'obligation du vendeur, qui est l'obligation de livrer la chose vendue, a été réalisée dans son intégralité par la mise en possession des acquéreurs.
Ceux-ci ne peuvent donc invoquer une inexécution par la venderesse des obligations qu'elle avait souscrites aux termes du contrat et, propriétaires dès le 15 mars 2019, jour de la signature de l'acte authentique de vente et donc du transfert de propriété, ne pouvaient valablement mettre un terme au paiement des arrérages sur ce fondement.
Les griefs articulés par les époux [D] relèvent en effet, soit de la garantie décennale due en application des articles 1792 et suivants du code civil, soit de la garantie des vices cachés.
Ces garanties sont exercées en qualité de propriétaire du bien vendu, ne sont pas l'objet de la vente, n'en sont que la conséquence et ne peuvent donc justifier une exception d'inexécution.
En conséquence, la demande n'est pas fondée.
La cour constate que les époux [D] ont pu effectivement être confrontés à des désordres ; qu'ils ont d'ailleurs fait constater par voie d'huissier (pièce 4) et par une expertise non contradictoire (pièce 5).
Il leur appartenait, comme l'acte de vente qu'ils ont signé le prévoyait pourtant, d'engager la responsabilité de Madame [K] en sa qualité de maître d'ouvrage en qualité de propriétaire de celui-ci ce qui supposait qu'il en aient réglé le prix et qu'ils ne se soient pas exposés à la résolution de la vente.. Leur demande n'étant pas fondée, le jugement entrepris doit être confirmé et la résolution judiciaire du contrat prononcée.
Sur les conséquences de la résolution de la vente en viager libre
Les époux [D] font grief au jugement d'avoir laissé Madame [K] conserver les arrérages perçus et la somme de 36.400 euros correspondant à la moitié de la somme payant comptant au titre du bouquet au jour de la signature de l'acte authentique de vente. Ils sollicitent la réduction de la clause pénale prévue par l'acte de vente du 15 mars 2019 et ainsi rédigée : 'En cas de résolution, tous les arrérages perçus par le crédirentier et tous embellissements et améliorations apportées à l'immeuble vendu, seront de plein droit définitivement acquis au crédirentier, sans recours ni répétition de la part du débirentier défaillant, à titre de dommages et intérêts et d'indemnité forfaitaire. La partie du prix payée comptant sera, en ce cas et quant à sa destination laissée à l'appréciation souveraine du tribunal'.
Ils considèrent en effet que le fait pour Madame [K] de conserver les arrérages perçus est manifestement excessif. Ils estiment aussi que la somme de 72.800 euros doit leur être restituée, conformément au fait que la résolution du contrat a un effet rétroactif et que les parties doivent être remises dans l'état antérieur. De même, ils font valoir que Madame [K] n'avait formulé aucune demande relative au bouquet et que le tribunal a pourtant statué sur cette question.
En réponse, Madame [K] fait valoir que les époux [D] ne rapportent pas la preuve du caractère excessif de la clause pénale insérée dans le contrat de vente.
En matière de contrat de vente en viager, les parties peuvent insérer des clauses résolutoires (Cass. ass. plén., 4 avr. 2008, n 07-14.523) contenant des clauses pénales prévoyant les effets de la résolution et ce pour limiter l'effet rétroactif de la résolution du contrat.
En l'espèce, la clause pénale insérée par les parties dans l'acte de vente du 15 mars 2019 est rédigée de façon à ce que soit réglé le sort des arrérages perçus, des embellissements et améliorations apportés à l'immeuble et du bouquet. S'agissant de ce dernier, la clause pénale prévoit que son sort sera laissé à l'appréciation souveraine du tribunal. Dès lors, il importe peu que Madame [K] n'ait pas formulé de demande à ce sujet car la clause prévoit que le tribunal pourra statuer d'office sur la question.
En l'espèce, Madame [K] a reçu la somme de 13.814,74 euros au titre des arrérages avant que les époux [D] ne cessent de les régler. Conformément à la clause pénale, cette somme qui correspond à ce qui avait été convenu entre les parties doit rester acquise au bénéfice de Madame [K]. Les époux [D] n'expliquent pas en quoi ce montant serait excessif.
S'agissant du 'bouquet', c'est-à-dire de la portion du prix payée comptant, le tribunal a jugé que sur la somme de 72.800 euros, Madame [K] pouvait en conserver la moitié et devait en conséquence restituer l'autre moitié, soit 36.400 euros, aux époux [D].
Si les époux [D] estiment que Madame [K] ne justifie d'aucun préjudice qui viendrait justifier qu'elle conserve la somme de 36.400 euros, il sera pourtant relevé que cette dernière, en ayant recours à un contrat de vente en viager libre, s'attendait à percevoir une rente mensuelle lui permettant de subvenir à ses besoins et compensant une faible retraite. Or, à partir d'octobre 2019, les époux [D] ont cessé de verser la somme mensuelle de 750 euros, annihilant ainsi tout l'intérêt de recourir à une vente en viager.
De même, les époux [D] ne versent aux débats aucun élément démontrant une quelconque prise de contact avec Madame [K] afin de l'informer de l'existence de potentiels désordres dans l'immeuble objet de la vente. Les seuls éléments qu'ils fournissent sont un constat d'huissier en date du 13 septembre 2022 et un rapport d'expertise en date du 11 octobre 2022. Ces deux pièces interviennent bien après les premières tentatives de Madame [K] de recouvrer les sommes qui lui étaient dues. Comme l'a très justement relevé le tribunal, ce n'est qu'après avoir été assignés (soit 1 an, 9 mois et 25 jours entre l'arrêt des paiements et l'assignation) qu'ils ont opposé l'existence de désordres. Dans cet intervalle, ils sont restés silencieux, occasionnant de facto un préjudice à Madame [K].
Dès lors, le jugement sera confirmé sur ce point. Madame [K] pourra conserver la somme de 36.400 euros et devra restituer le même montant aux époux [D].
S'agissant de la demande de dommages-intérêts formulée par Madame [K] au regard de son préjudice moral, le jugement sera aussi confirmé en ce que l'application de la clause pénale permet, déjà, de réparer le préjudice engendré le contexte entraînant la résolution du contrat.
Sur l'expulsion et sur les indemnités d'occupation, comme l'a jugé à juste titre le jugement frappé d'appel, il convient de dire que la résolution du contrat a pris effet un mois après la date du commandement payer du 7 juin 2021 visant la clause résolutoire, soit à compter du 7 juillet 2021, date à compter de laquelle les époux [D] sont redevables d'une indemnité d'occupation d'un montant égal à celui de la rente viagère mensuelle jusqu'à complète libération des lieux.
Sur les demandes reconventionnelles
Les époux [D] sollicitent à titre reconventionnel la condamnation de Madame [K] sur le fondement de la garantie décennale, et subsidiairement, sur le fondement des vices cachés.
Comme l'a relevé le tribunal, la résolution judiciaire du contrat ayant été prononcée, ces derniers n'ont plus intérêt et qualité à agir.
Dès lors, le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur les demandes accessoires
L'équité commande l'allocation d'une indemnité à Madame [K] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
Par conséquent, le jugement sera également confirmé sur ce point tandis qu'en cause d'appel, cette indemnité sera fixée à la somme de 2000 €.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, mise à disposition au greffe et en dernier ressort,
- confirme le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bordeaux le 17 janvier 2023 en ce qu'il a :
- prononcé la résolution de la vente intervenue le 15 mars 2019 par le ministère de Maître [F], notaire associé à [Localité 6], de l'immeuble sis [Adresse 3], à [Localité 7] cadastré section AC Numéro [Cadastre 1], et section AC Numéro [Cadastre 2] avec effet au 7 juillet 2021,
- ordonné la publication du présent jugement par la partie la plus diligente auprès du service de la publicité foncière, aux frais de Monsieur et Madame [D],
- dit que Madame [E] [K] conservera les arrérages perçus et la somme de 36.400€ au titre de la clause pénale,
- condamné en conséquence de la résolution de la vente Madame [E] [K] à payer à Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] la somme de 36.400 € correspondant au solde du 'bouquet',
- dit que les sommes seront assorties du taux d'intérêt légal à compter du présent jugement et ordonné la capitalisation des intérêts pour les intérêts dus pour une année entière,
- débouté Madame [E] [K] du surplus de ses demandes,
- débouté Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] du surplus de leurs demandes,
- condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] à payer à Madame [E] [K] la somme de 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- écarté l'exécution provisoire de la présente décision,
- condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] aux dépens, y compris les actes d'huissier, dont distraction en application de l'article 699 du code de procédure civile.
L'infirme partiellement en ce qu'il a :
- ordonné l'expulsion de l'immeuble vendu de Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent jugement et condamné Monsieur [P] [D] et Madame [J] [R] épouse [D] à payer à Madame [E] [K] la somme de 752,74 € par mois à compter du 7 juillet 2021 jusqu'au départ effectif des lieux,
Statuant à nouveau,
- dit que les époux [D] devront libérer les lieux de leurs personnes, de leurs biens et de tous occupants de leur chef dans un délai de quatre mois à compter de la signification du présent arrêt, faute de quoi ils pourront y être contraints avec l'appui de la force publique.
- condamne les époux [D] à payer une indemnité d'occupation d'un montant de 752,74 euros par mois, à compter du 7 juillet 2021 jusqu'à la libération effective des lieux.
Y ajoutant,
- condamne les époux [D] à payer à Mme [E] [K] la somme de 2000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel.
La présente décision a été signée par Monsieur Jacques BOUDY, président, et Madame Mélody VIGNOLLE-DELTI, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRESIDENT