COUR D'APPEL DE BORDEAUX
2ème CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 29 JUIN 2023
N° RG 23/00671 - N° Portalis DBVJ-V-B7H-NDMW
REPUBLIQUE DU CONGO
c/
S.A. COMMISSIONS IMPORT EXPORT (COMMISIMPEX)
SOCIÉTÉ CONGOLAISE D'ENLEVEMENT DES ORDURES MENAGERES ET D'ASSAINISSEMENT (SOCEMA)
SOCIÉTÉ CONGOLAISE D'ELECTRIFICATION ET DE CANALISATION (SOCECA)
SOCIÉTÉ BOISSONS AFRICAINES DE [Localité 9] (BAB)
LA PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE DU CONGO
S.A.R.L. BERREBI ET ASSOCIES
Nature de la décision : AU FOND
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : jugement rendu le 13 décembre 2022 par la 1ère chambre civile du tribunal judiciaire de BORDEAUX (RG : 22/05967) suivant déclaration d'appel du 20 décembre 2022 et sur assignation à jour fixe délivrée le 02 février 2023
APPELANT :
REPUBLIQUE DU CONGO,
Ministère de la Justice, [Adresse 6]/Congo
Représenté par Me CRESCENCE substituant Me Jacques-Brice MOMNOUGUI de la SELARL JURIS TIME, avocat au barreau de BORDEAUX et assisté de Me Emmanuel CAULIER, avocat au barreau de PARIS
demandeur à l'assignation à jour fixe
INTIMÉE :
S.A. COMMISSIONS IMPORT EXPORT (COMMISIMPEX)
société anonyme de droit congolais immatriculée au RCCM de Brazzaville sous le numéro RCCM CG/BZV/07 B413, pris en la personne de son représentant légal en exercice, M. [T] [C] [G]
Élisant domicile chez la SELAS Archipel, [Adresse 3], pour les besoins de la notification de toute décision à intervenir dans le cadre de la présente procédure et ses suites
Et ayant pour siège social, [Adresse 1] (République du Congo) Étant précisé que Commisimpex est dans l'impossibilité d'exercer son activité à son siège social du fait des agissements de la République du Congo et qu'en conséquence, les actes qui lui y sont adressés ne lui parviennent plus. Il est en conséquence possible de lui signifier tout acte, soit à domicile élu chez son
conseil, soit au domicile de son représentant légal en exercice, M. [T] [G], [Adresse 13] (Liban)
Représentée par Me Carolina CUTURI-ORTEGA de la SCP JOLY ' CUTURI ' WOJAS ' REYNET DYNAMIS AVOCATS, avocat au barreau de BORDEAUX
et assistée de Me Jacques-Alexandre GENET de la SELAS ARCHIPEL, avocat au barreau de PARIS et de Me Michaël SCHLESINGER de la SELAS ARCHIPEL, avocat au barreau de PARIS
défenderesse à l'assignation à jour fixe
INTERVENANTES :
LA SOCIETE CONGOLAISE D'ENLEVEMENT DES ORDURES MENAGERES ET D'ASSAINISSEMENT (SOCEMA)
sise [Adresse 8] à [Localité 9] (REPUBLIQUE DU CONGO) Société Anonyme au capital de 200.000.000 Francs CFA inscrite au RCCM sous le n° C G.BZV.RCCM. 04-M-762, agissant poursuites et diligences de son Président directeur général Monsieur [P] [I] domicilié en cette qualité audit siège
LA SOCIÉTÉ CONGOLAISE D'ELECTRIFICATION ET DE CANALISATION (SOCECA)
sise [Adresse 12] à [Localité 9] (RÉPUBLIQUE DU CONGO) Société Anonyme au capital de 509.301.313 Francs CFA, inscrite au RCCM sous le n° Cg.BZV. RCCP 04-B-76 2 agissant poursuites et diligences de son Président directeur général Monsieur [P] [I] domicilié en cette qualité audit siège
LA SOCIETE BOISSONS AFRICAINES DE [Localité 9] (BAB)
sise [Adresse 4] à [Localité 9] (REPUBLIQUE DU CONGO) Société Anonyme au capital de 1.000.000.000 Francs CFA, inscrite au RCCM sus le n° CG.BZV.RCCM 03-B-774 agissant poursuites et diligences de son Président directeur général Monsieur [P] [I] domicilié en cette qualité audit siège
La SARL BERREBI ET ASSOCIES
au capital de 7.622,45 euros, inscrite au registre du commerce et des sociétés de ANTIBES, sous le numéro B 392 079 265, dont le siège social est situé [Adresse 2] à [Localité 10] agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège social
Représentées par Me Clarisse CASANOVA de la SCP GUESPIN - CASANOVA AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de BORDEAUX et assistées de Me Hervé ROBERT de la SCP SCP Hervé ROBERT, avocat au barreau de PARIS
LA PRESIDENCE DE LA REPUBLIQUE DU CONGO,
sise au [Adresse 11] REPUBLIQUE DU CONGO, agissant par son Directeur de cabinet domicilé en cette qualité audit siège
Représentée par Me Philippe LECONTE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat au barreau de BORDEAUX et assistée de Me Simon NDIAYE de la SELAS HMN & PARTNERS, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été examinée le 16 mai 2023 en audience publique, devant la cour composée de :
Madame Paule POIREL, Président
Monsieur Rémi FIGEROU, Conseiller
Mme Christine DEFOY, Conseillère
Greffier lors des débats : Mme Audrey COLLIN
Le rapport oral de l'affaire a été fait à l'audience avant les plaidoiries.
ARRÊT :
- contradictoire
- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
EXPOSE DU LITIGE
Deux sentences arbitrales des 3 décembre 2000 à 21 janvier 2013 ont condamné la République du Congo à payer diverses sommes à la société Commissions Import Export (Commisimpex) en règlement de créances de travaux de marchés publics.
Le 27 février 2020, la cour d'appel de Paris, statuant sur appel d'une ordonnance sur requête du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris ayant rejeté la demande d'autorisation de pratiquer toute mesure d'exécution forcée sur tous bien appartenant au Congo, a autorisé toute mesure d'exécution sur tous les bien appartenant à la République du Congo, notamment les aéronefs, à l'exception de ceux utilisés ou destinés à être utilisés dans l'exercice des fonctions de la mission diplomatique de cet Etat.
Agissant en vertu de ces deux sentences arbitrales des 3 décembre 2000 et 21 janvier 2013 et de l'autorisation de la cour d'appel de Paris du 27 février 2020, le 8 juin 2020, la société Commisimpex a fait dresser un procès-verbal de saisie-vente d'aéronef portant sur l'aéronef Dassault Falcon 7X immatriculé [Immatriculation 14] appartenant à la République du Congo, entre les mains de la société Dassault Falcon Service à l'aéroport de [5], à qui il avait été confié en vue de travaux de maintenance.
Par jugement du 29 juin 2020, le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande de la République du Congo tendant à la nullité et à la mainlevée de la saisie.
Par acte d'huissier en date du 7 août 2020, la société Commisimpex a dénoncé la saisie de l'aéronef et fait assigner la République du Congo devant le tribunal judiciaire de Bordeaux, au visa des articles R. 123-1 et suivants du code de l'aviation civile, aux fins de vente forcée de l'aéronef Dassault Falcon 7X immatriculé [Immatriculation 14].
Par arrêt en date du 3 juin 2021, la cour d'appel de Paris a rejeté la demande de rétractation de l'arrêt du 27 février 2020, autorisant la saisie.
Par arrêt en date du 3 juin 2021, la cour d'appel de Paris a confirmé le jugement du 29 juin 2020 du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris qui a débouté la République du Congo de ses demandes relatives à la mainlevée de la saisie.
La République du Congo a formé des pourvois en cassation à l'encontre de ces deux arrêts du 3 juin 2021, lesquels sont toujours en cours.
Par ordonnance en date du 12 avril 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux, saisi d'un incident formé par la société Commisimpex, a :
- déclaré irrecevable devant le tribunal judiciaire de Bordeaux les moyens relatifs à la régularité ou au caractère tardif de la signification du commandement de payer du 23 août 2019, au caractère diplomatique ou non de l'aéronef saisi, à la limite de l'engagement du 3 mars 1993 et à l'absence de transcription de la saisie au registre de l'immatriculation,
- déclaré irrecevable devant le tribunal judiciaire de Bordeaux :
la demande de 'nullité de la signification de la dénonciation de la saisie d'aéronef portant assignation devant le tribunal judiciaire de Bordeaux, en raison de l'irrégularité des significations des actes de procédures',
la demande de 'libération' de l'aéronef,
- déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer formée par la société Commisimpex 'jusqu'à la décision à intervenir du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris à défaut d'autorisation du juge de procéder à la vente forcée',
- dit que le juge de la mise en état n'est pas compétent pour connaître des moyens et arguments relatifs au caractère dérisoire de la mise à prix,
- invité les parties à conclure sur l'opportunité d'un sursis à statuer dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice dans l'attente de l'issue des recours formés par la République du Congo à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 février 2020 et du jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris du 29 juin 2020.
Par jugement en date du 24 juin 2021, le juge de l'exécution de Paris a déclaré irrecevable la demande de la République du Congo tendant à dire qu'il ne saurait être procédé à la vente aux enchères de l'aéronef.
Par jugement en date du 12 octobre 2021, le tribunal judiciaire de Bordeaux, dans sa formation collégiale, statuant sur incident, a notamment ordonné le sursis à statuer dans la procédure enrôlée sous le n° RG 20/6671 jusqu'à ce qu'une décision définitive intervienne suite aux pourvois en cassation formés par la République du Congo à l'encontre des arrêts de la cour d'appel de Paris en date du 3 juin 2021.
Par arrêt du 16 décembre 2021, la juridiction du premier président de la cour d'appel de Bordeaux a autorisé la société Commisimpex a relever immédiatement appel de ce jugement.
Par arrêt en date du 4 août 2022, la cour d'appel de Bordeaux a infirmé ce jugement en ce qu'il a ordonné le sursis à statuer et a renvoyé l'affaire devant le tribunal judiciaire de Bordeaux pour que l'instance soit reprise au fond.
Devant le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Bordeaux, la République du Congo a formé un nouvel incident par conclusions notifiées le 5 octobre 2022. La société Commisimpex a demandé le renvoi de l'incident devant la formation collégiale. Elle (la République du Congo) présentait :
- une demande sursis à statuer dans l'attente de la décision de la CCI en date du 9 décembre 2021 sur sa demande de réouverture de l'arbitrage en raison de recours en révision de la sentence arbitrale de 2013, sur le fondement de faits de corruption découverts à l'encontre du président du tribunal arbitral ayant rendu la sentence dont l'exécution est poursuivie et d'une enquête ouverte par le PNF pour corruption en juillet 2022, faits susceptibles de remettre en cause la sentence arbitrale dont l'exécution est poursuivie.
-un incident de nullité de la saisie pour absence de transcription du PV de saisie vente au registre d'immatriculation et absence de remise d'un extrait certifié conforme des inscriptions sur l'aéronef.
-un incident d'irrecevabilité pour défaut de qualité à agir de la société Commisimpex en ce qu'elle n'est pas créancier inscrit.
L'incident a été fixé au même jour que la plaidoirie au fond le 8 novembre 2022 à 14 heures.
Par jugement rendu le 13 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Bordeaux statuant sur incident en formation collégiale et au fond, a :
- rejeté la demande de sursis à statuer,
- dit que la formation collégiale statuant sur l'incident n'a pas le pouvoir juridictionnel pour statuer sur la demande de nullité de saisie-vente,
- rejeté la fin de non-recevoir tirée d'un défaut de qualité à agir,
- condamné la République du Congo à payer à la société Commisimpex la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de l'incident,
Au fond,
- rejeté la demande de rabat de l'ordonnance de clôture et dit que les conclusions notifiées par la République du Congo le 8 novembre 2022 à 12h01 sont tardives,
- ordonné la vente judiciaire aux enchères publiques de l'aéronef de type Dassault Falcon 7X n°232 immatriculé [Immatriculation 14] appartenant à la République du Congo par le ministère de la Selarl Pestel-Debord, commissaire de justice, assisté de tout expert en aéronef de son choix, sur la mise à prix de 15 millions d'euros.
- dit que la vente aura lieu au moins six semaines après la présente décision,
- dit que la vente sera annoncée en République du Congo conformément aux dispositions du droit congolais au moins un mois avant la vente,
- dit que la vente devra avoir lieu au moins trois semaines après la plus récente apposition d'affiches et une insertion de cette affiche dans l'un des journaux désignés pour recevoir les annonces judiciaires du ressort du tribunal et dans le Bulletin officiel des Annonces commerciales conformément à l'article R. 123-6 de l'aviation civile,
- dit que les annonces et affiches devront comporter les mentions prévues par l'article R. 123-6 du code de l'aviation civile,
- autorisé une publicité complémentaire de cette vente sur le site interencheres.com ainsi que dans un journal de presse régionale du lieu où se trouve le Falcon 7X et sur un support approprié au regard de la nature de l'aéronef au choix de la Selarl Pestel Debord,
- dit que la République du Congo sera avisée de la date d'adjudication au moins un mois à l'avance, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à l'adresse indiquée sur le certificat d'immatriculation à savoir 'République du Congo - Présidence de la République [Adresse 7], République du Congo',
- dit que les affiches seront apposées selon les modalités prévues à l'article R. 123-5 du code de l'aviation,
- dit que la Selarl Pestel Debord, commissaire de justice, établira le cahier des charges de la vente conformément aux textes et décisions juridictionnelles régissant la vente aux enchères publiques sur saisie-vente de l'aéronef Falcon 7X n° 232 immatriculé [Immatriculation 14],
- condamné la République du Congo à payer à la société Commisimpex la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la République du Congo aux dépens comprenant les frais de commandement de procès verbal de saisie vente, de dénonciation de la saisie vente avec assignation à comparaître,
- rejeté la demande formée au titre des dépens concernant les frais de publicité et autres frais encourus pour parvenir à la vente,
- rejeté la demande tendant à voir dire que la décision sera exécutoire sur minute,
- dit n'y avoir lieu d'écarter l'exécution provisoire.
Pour statuer ainsi, il a essentiellement dit qu'il n'avait pas le pouvoir juridictionnel de statuer sur la demande de nullité de la saisie vente qui constitue des contestations à la mesure d'exécution forcée en elle même laquelle relève de la compétence exclusive du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris (article R 311-1 du code des procédures civiles d'exécution qui seul peut se prononcer sur la validité de la procédure de saisie vente) et que les textes n'imposaient pas que seuls les créanciers inscrits puissent poursuivre une procédure de saisie attribution d'un aéronef, les dispositions de l'article R 123-1 qui donnent aux seuls créanciers inscrits le pouvoir de surenchérir étant dérogatoires des précédentes.
Par déclaration électronique en date du 21 décembre 2022, la République du Congo a relevé appel de cette décision en toutes ses dispositions reprises intégralement dans sa déclaration d'appel.
Par requête enregistrée au greffe de la Cour le 16 janvier 2023, la société Commisimpex a demandé à être autorisée à assigner la République du Congo à jour fixe.
Par ordonnance du 24 janvier 2023, la société Commisimpex a été autorisée à assigner la République du Congo à l'audience collégiale de la Deuxième chambre civile du 16 mai 2023 à 14 heures.
Par assignation notifiée le 2 février 2023, la société Commisimpex a fait assigner la République du Congo à jour fixe pour l'audience du 16 mai 2023.
Dans l'intervalle, par acte de commissaire de justice en date du 18 janvier 2023, la République du Congo a fait assigner la société Commisimpex et le ministère public, en référé afin de voir juger que l'exécution provisoire du jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux rendu le 13 décembre 2022, dans le numéro RG 22/05967 au profit de la société Commisimpex est arrêtée jusqu'à la date à laquelle il sera statué sur l'appel interjeté, de juger que les frais de référé seront joints aux dépens de la procédure d'appel et de condamner la société Commisimpex aux dépens.
Par ordonnance rendue le 30 mars 2023, le Président de la cour d'appel statuant sur déféré a :
- débouté la République du Congo de sa demande tendant à l'arrêt de l'exécution provisoire résultant du jugement rendu le 13 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Bordeaux et de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la République du Congo à payer à la société Commisimpex la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la République du Congo aux entiers dépens de la procédure.
Puis, par exploit en date du 5 avril 2003, la société congolaise d'enlèvement des ordures ménagères et d'assainissement (la SOCEMA), la société congolaise d'électrification et de canalisation (la SOCECA), la société de boissons africaines de [Localité 9] (la BAB) et la Sarl Berebi et associés ont fait assigner la société Commisimpex et la république du Congo en référé afin de voir prononcer l'arrêt de l'exécution provisoire du jugement rendu le 13 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Bordeaux et de voir condamner la société Commisimpex aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Elles exposaient être intervenues volontairement à la procédure d'appel initiée par la République du Congo , en leur qualité de créancière de la République du Congo et avoir formé tierce opposition à l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 février 2020 ayant autorisé les actes d'exécution.
Par ordonnance en date du 11 mai 2023, la première présidente de la cour d'appel de Bordeaux à déclaré les sociétés SOCEMA, SOCECA, BAB, Berrebi et associés ainsi que la République du Congo irrecevables en leur demande tendant à voir arrêter l'exécution provisoire du jugement déféré à la cour, a condamné les mêmes in solidum à payer à la société Commisimpex une somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, les a déboutés de leurs demandes de ce chef et les a condamnées in solidum aux dépens.
La République du Congo, dans ses dernières conclusions d'appelante en date du 15 mai 2023, demande à la cour, au visa des articles 117, 122, 123, 221-50, 503, 524, 684 et 925 du code de procédure civile, R. 123-1 à R 123-8 et D 123-1 à D 123-2 du code de l'aviation civile, L. 6123-3 du code des transports ainsi que de la Convention de Chicago et de Genève relatives à la reconnaissance internationale des droits sur aéronefs du 19 juin 1948, de :
Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau :
A titre préalable,
- Dire et juger que le certificat d'immatriculation de l'aéronef qui est produit à la procédure avec l'extrait du registre des immatriculations vaut titre de propriété de la
Présidence de la République sur le Falcon 7X objet du litige,
- Dire et juger que le propriétaire mentionné sur le certificat et le registre
d'immatriculation de l'avion (Présidence de la République) n'est pas celui qui figure
sur les trois PV de saisie de l'avion (République du Congo),
-Dire et juger que ni Commisimpex, ni Berrebi, ni les sociétés BAB, SOCEMA, SOCECA n'ont apporté la preuve que les PV de saisie avaient été signifiés au propriétaire de l'avion et à son adresse postale telle qu'elle figure sur son certificat en violation de l'article R123-3 du Code l'aviation civile,
- Dire et Juger que l'aéronef saisi, propriété de la Présidence de la République (domaine présidentiel), jamais visé par aucun contrat, protocole, sentence ou renonciation expresse et spéciale de son propriétaire, couvert par l'immunité coutumière présidentielle et donc inviolable et insaisissable, ne peut faire l'objet d'une autorisation de mise en vente forcée,
En tout état de cause :
-Dire et juger que les conditions suivantes de la vente forcée ne sont pas
réunies :
-La purge des droits préférables des autres créanciers ;
-La remise d'un extrait certifié conforme des inscriptions sur l'aéronef ;
-La transcription des PV de saisie-vente au registre d'immatriculation ;
-La notification des PV de saisie-vente au véritable propriétaire de l'avion ;
-Déclarer l'action intentée par S.A.Commissions Import-Export (COMMISIMPEX) irrecevable pour défaut du droit d'agir ;
- Débouter la S.A.Commissions Import-Export (COMMISIMPEX) de toutes des demandes, fins et prétentions ;
En conséquence :
- Dire n'y avoir lieu à vente ;
- Faire main levée sur l'aéronef ;
- Condamner S.A. Commissions Import-Export (COMMISIMPEX) à payer les frais de gardiennage et de garage à l'entreprise Dassault ;
- Condamner S.A. Commissions Import-Export (COMMISIMPEX) aux dépens
- Condamner S.A. Commissions Import-Export (COMMISIMPEX) à 100000 euros d'article 700.
La société Commissions Import- Export (Commisimpex), dans ses dernières conclusions d'intimée en date du 15 mai 2023, comportant appel incident sur le montant de la mise à prix, demande à la cour, au visa des articles R. 123-1 et suivants du code de l'aviation civile et de l'article VII de la Convention de Genève du 19 juin 1948 relative à la reconnaissance internationale des droits sur aéronef, de :
-Déclarer irrecevables les interventions volontaires de Berrebi et du groupe [I],
-Déclarer irrecevable l'intervention volontaire de la 'Présidence de la République du Congo',
-Dire n'y avoir lieu à surseoir à statuer,
Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bordeaux le 13 décembre 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a fixé la mise à prix à hauteur de 15 000 000 euros ;
Statuant à nouveau sur ce seul point,
- Fixer la mise à prix à la somme de cinq millions d'euros (5 000 000 €)
En tout état de cause:
- Débouter la République du Congo, la 'Présidence de la République du Congo', Berrebi et le groupe [I] de l'ensemble de leurs demandes fins et conclusions,
- Condamner la République du Congo aux entiers dépens
- Condamner in solidum la République du Congo, Berrebi et Groupe [I] au paiement des dépens d'appel
- Condamner in solidum la République du Congo, Berrebi et Groupe [I] au paiement d'une somme de 100 000 € au titre des frais irrépétibles d'appel
La Société Congolaise d'Enlèvement des Ordures Ménagères et d'Assainissement (Socema), la Société Congolaise d'Electrification et de Canalisation (Soceca) et la société Boissons Africaines de [Localité 9] (Bab) d'une part, et la Sarl Berrebi et Associés d'autre part, dans leurs dernières conclusions en intervention volontaire en date du 16 mai 2023, demandent à la cour, de :
au visa :
- des articles 329 et suivants du code de procédure civile,
- de l'ordonnance du juge de l'exécution de Paris du 2 Novembre 2022 (Pièce n° 42)
- des dispositions des articles L 111-1 et L111-1-1 du Code des Procédures civiles
d'exécution.
- des dispositions des articles :
o 561 et suivants, 582 et suivants du Code de Procédure Civile.
o 684, 686, 688 et suivants du Code de Procédure Civile.
o 1498 et 1499 du Code de Procédure Civile.
- de la Convention de Coopération judiciaire entre la République Française, et la République Populaire du Congo (aujourd'hui République du Congo) publiée par le décret n° 82-140,
- Dire et juger les sociétés concluantes recevables en leur intervention volontaire à l'encontre de la décision rendue le 13 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Bordeaux et dont la Cour a été saisie par voie de déclaration d'appel de la République du Congo en date du 20 Décembre 2022.
Vu les dispositions de l'article 503 du code de procédure civile,
Vu la saisine de la cour d'appel de Paris aux fins de rétractation de l'arrêt du 27 février 2020:
-Dire et juger les concluantes bien fondées en leurs demandes.
- Prononcer en conséquence l'infirmation du jugement du 13 Décembre 2022 en ce que cette décision a ordonné la vente judiciaire aux enchères publiques de l'aéronef Falcon 7X n° 232 immatriculé [Immatriculation 14] appartenant à la République du Congo à la requête de la société Commisimpex, ainsi que les autres mesures prévues par cette décision pour y parvenir.
-Subsidiairement sur la demande de tierce opposition à l'encontre du jugement rendu le 13 décembre 2022 par le tribunal judiciaire de Bordeaux jusqu'à ce que la cour d'appel de Paris se soit prononcée sur la demande de rétractation présentée par voie de tierce opposition à l'encontre de l'arrêt rendu en matière gracieuse le 27 février 2020 par la cour d'appel de Paris statuant en matière de juge de l'exécution en application des dispositions de l'article L 11-1 du code des procédures civiles d'exécution
- Condamner la société Commisimpex en tous les dépens.
La Présidence de la République du Congo, dans ses conclusions du 15 mai 2023, demande à la cour, au visa des articles 329 et suivants, 554 du code de procédure civile, de :
-Dire recevable l'intervention volontaire de la Présidence de la République du Congo,
-Ordonner le sursis à statuer de la présente instance dans l'attente de la décision à intervenir dans l'instance pendante devant la Cour d'appel de Paris dans le cadre de la procédure en tierce opposition de la Présidence de la République du Congo visant à rétracter l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 3 juin 2021 n° RG n°20/08146,
A titre subsidiaire,
Vu l'article 582 du Code de Procédure Civile,
-Dire recevable et bien fondée la demande en tierce opposition incidente
de la Présidence de la République du Congo à l'encontre du jugement du tribunal judiciaire de Bordeaux du 13 décembre 2022 RG n°20/80785,
- Infirmer le jugement du Tribunal judiciaire de Bordeaux rendu le 13 décembre
2022 n° RG n°20/80785.
- Débouter la société Commisimpex, de toutes ses demandes.
- Condamner la société Commisimpex à payer à la Présidence de la République
du Congo la somme de 20.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure
civile ainsi qu'aux entiers dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 mai 2023.
Néanmoins, lors de l'audience sur assignation à jour fixe, les parties se sont déclarées prêtes à plaider le dossier.
Pour une plus ample connaissance du litige et des prétentions et moyens des parties, il est fait expressément référence aux dernières conclusions et pièces régulièrement communiquées par les parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Selon l'article VII de la convention de Genève du 19 juin 1948 à laquelle sont parties la République Française et la République du Congo, les procédures applicables à la saisie des aéronefs sont celle prévues par la loi de l'état contractant où la vente est effectuée et la compétence du tribunal judiciaire de Bordeaux, lieu de la vente, et de la cour d'appel de Bordeaux avec lui, est limitée en matière de saisie d'aéronefs aux mesures relatives à la vente qu'il ordonne et aux conditions de celle-ci ainsi qu'aux fins de non recevoir y afférentes, revenant au seul juge de l'exécution de Paris, conformément aux dispositions de l'article R 111-1 du code de l'exécution, de statuer sur les demandes d'autorisation prévues à l'article L 111-1 et sur les contestations relatives aux mesures conservatoires et d'exécution forcée mobilière qu'il ordonne.
I - Sur la recevabilité de l'intervention volontaire des sociétés SOCEMA, SOCECA, BAB, BERREBI.
Selon les dispositions de l'article 554 du code de procédure civile ne peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont un intérêt, que les personnes qui n'ont pas été partie ou représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité.
Selon les dispositions de l'article 329 du code de procédure civile, l'intervention est principale lorsqu'elle élève, comme le font en l'espèce les sociétés intervenantes qui prétendent à l'infirmation du jugement ayant ordonné la vente judiciaire de l'aéronef, une prétention au profit de celui qui la forme.
Il est admis que l'intervention principale n'est recevable que si son auteur a le droit d'agir relativement à cette prétention.
Selon l'article 31 du code de procédure civile, l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé.
Les sociétés intervenantes soutiennent disposer d'un intérêt à intervenir à la présente étant créancières de la République du Congo, ayant formé tierce opposition à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 27 février 2020 aux fins de rétractation et entrepris une procédure de saisie de l'aéronef selon autorisation du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris en date du 9 novembre 2022.
Il n'appartient pas à cette cour de se prononcer sur l'intérêt des sociétés intervenantes à former tierce opposition devant la cour d'appel de Paris à l'arrêt du 27 février 2020, n'étant pas saisie de ce litige.
Quant à l'intérêt du créancier concurrent à intervenir dans la procédure d'exécution forcée initiée par un créancier à l'encontre d'un débiteur commun, dans laquelle il n'est pas partie, pour s'opposer à la réalisation de l'actif, gage des créanciers, il est inexistant dès lors que la qualité de créancier poursuivant de la société Commisimpex ne lui confère aucun avantage ou privilège et que ses droits de créancier dans la procédure subséquente de distribution du prix ne sont pas remis en cause.
Les sociétés Socema, Soceca, Bab, Berrebi, sont donc irrecevables en leur intervention volontaire devant cette cour, comme étant dépourvue de tout intérêt à agir.
Par voie de conséquence, il ne saurait être statué sur leur demande de sursis à statuer formulée à titre subsidiaire jusqu'à ce que la cour d'appel de Paris se soit prononcée sur leur demande de rétractation par voie de tierce opposition de l'arrêt du 27 février 2020 ayant autorisé la procédure de saisie entreprise par la société Commisimpex, alors qu'elles ont entrepris depuis une procédure de saisie de l'aéronef, au demeurant à l'encontre de la République du Congo.
II -Sur la recevabilité de l'intervention volontaire de la Présidence de la République du Congo :
Arguant de sa qualité de propriétaire de l'Aéronef Falcon 7X, désignée comme tel par le certificat d'immatriculation de l'aéronef, la Présidence de la République du Congo, qui se prévaut de l'immunité d'exécution attachée à ce bien, a pris devant la cour des conclusions d'intervention volontaire par lesquelles elle sollicite le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur la tierce opposition qu'elle a régularisée à l'encontre de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 3 juin 2021 qui a confirmé le jugement du juge de l'exécution de Paris du 29 juin 2020 ayant débouté la République du Congo de sa demande de mainlevée de saisie.
La République du Congo qui ne revendique désormais plus la propriété de l'aéronef, insistant sur la valeur d'acte de propriété du certificat d'immatriculation, conclut de plus bel à la 'main levée sur l'aéronef', demandant à la cour de dire n'y avoir lieu à vente.
La société Commisimpex soulève le défaut de qualité à agir de la Présidence de la République du Congo, les différents organes d'un état ne disposant pas d'une personnalité distincte de celle de l'Etat alors que s'impose en droit international public le principe de l'unicité de l'Etat, en sorte que la Présidence de la République du Congo, intervenue en première instance en une autre qualité, la République du Congo, est irrecevable en son intervention volontaire.
Selon les dispositions de l'article 554 du code de procédure civile ne peuvent intervenir en cause d'appel, dès lors qu'elles y ont un intérêt, que les personnes qui n'ont pas été partie ou représentées en première instance ou qui y ont figuré en une autre qualité. Ces dispositions ne dispensent pas l'intervenant volontaire de disposer également, conformément à l'article 31 du code de procédure civile, de la qualité à agir.
Il est par ailleurs constant que la loi du for régit, en droit international privé français, les règles de procédure devant les tribunaux civils ou commerciaux en présence d'un élément d'extranéité.
Si la Présidence de la République du Congo fait justement valoir que la qualité à agir en justice est régie par la loi personnelle de celui qui agit, d'une part, elle reconnaît qu'aucun texte légal ou réglementaire congolais ne confère expressément la personnalité juridique à la Présidence de la République du Congo, ce qui ne résulterait que d'une situation de fait 'parfaitement reconnue au Congo', et d'autre part, il est surtout opposé à la Présidence le fait qu'elle ne dispose pas, en application du principe de l'unicité de l'Etat, d'une personne morale distincte de celle de l'Etat dont elle n'est qu'une émanation.
Contrairement à ce qui est soutenu par la Présidence de la République du Congo, il existe également en France un 'domaine présidentiel', doté d'un budget propre et d'un patrimoine (cf budget et patrimoine de l'Elysée), mais ce patrimoine d'affectation, ne crée pas au profit de la Présidence de la République une personnalité juridique distincte de celle de l'Etat, lui conférant qualité à agir.
D'ailleurs, la République du Congo, qui ne vient pas de découvrir que l'aéronef est immatriculé au nom de la Présidence de la République, s'est jusqu'alors toujours considérée et comportée en propriétaire de l'aéronef, sans que la Présidence de la République s'en soit inquiétée.
Dès lors, en l'absence de règle de droit congolais conférant à la Présidence de la République du Congo une personnalité juridique distincte de celle de la République du Congo, la première, qui était partie en première instance au travers la seconde, est irrecevable en son intervention volontaire devant la cour d'appel.
III - Sur la recevabilité de la contestation de la République du Congo 'à titre préalable':
La République du Congo sollicite de la cour qu'elle 'dise et juge' au préalable que le certificat d'immatriculation vaut propriété de la Présidence de la République du Congo; que le propriétaire de l'avion n'est pas celui qui figure sur les procès verbaux de saisie, qu'aucun des créanciers poursuivants, les sociétés Soceca, Socema, Berrebi ou Commisimpex n'établit que les procès verbaux de saisie ont été signifiés au propriétaire de l'avion et que l'aéronef saisi, propriété de la Présidence de la République, est couvert par l'immunité coutumière présidentielle et est donc inviolable et ne peut faire l'objet d'aucune mise en vente forcée.
Cependant, l'argument en ce qu'il émane de la République du Congo, qui ne sollicite pas le sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir sur le sort de la tierce opposition à la saisie formée par la Présidence devant la cour d'appel de Paris, d'une part, remet en cause l'autorisation même de la saisie qui échappe à la compétence de la cour d'appel de Bordeaux dont le périmètre d'intervention est à l'instar de celui du tribunal judiciaire de Bordeaux, strictement limité aux modalités de la vente forcée, et d'autre part, se heurte à l'autorité de la chose jugée de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 3 juin 2021 (N° 20/08146) qui a confirmé le jugement du juge de l'exécution de Paris du 29 juin 2020 en ce qu'il a notamment rejeté la demande de mainlevée de saisie formée par la République du Congo, et statué par des motifs décisoires sur la propriété de l'Aéronef, après avoir jugé que 'La saisie du Falcon dont il n'est pas discuté qu'il appartient à la République du Congo et qu'il est immatriculé au nom de la Présidence de la République, entre donc dans le champ de l'application de l'arrêt du 27 févier 2020 s'il est démontré que cet aéronef n'est pas utilisé ou destiné à être utilisé dans l'exercice des fonctions de la mission diplomatique de cet état' et que 'La République du Congo ne soutient, ni a fortiori ne démontre, que l'aéronef litigieux faisait partie des moyens mis à la disposition de sa mission diplomatique en France, accréditée par l'Etat français. L'appelante est donc mal fondée à invoquer la convention de Vienne inapplicable aux faits d'espèce.'
La République du Congo est donc irrecevable en sa contestation formulée à titre préalable devant la cour d'appel de Bordeaux dont la compétence est celle du tribunal judiciaire de Bordeaux
IV - Sur l'irrecevabilité tirée du défaut de qualité à agir en vente forcée de la société Commisimpex qui n'est pas créancier inscrit :
Comme en première instance la République du Congo soutient qu'en application des dispositions de l'article R 123-1 du Code de l'aviation civile, seul un créancier inscrit peut solliciter la vente forcée de l'Aéronef, ce qui n'est pas le cas de la société Commisimpex.
Cependant, les premiers juges ont par des motifs pertinents que la cour adopte justement rappelé que seul l'article L 123-1 qui vise la finalité de surenchère fait référence à la notion de créancier inscrit de sorte que cette exigence ne s'applique qu'au cas de surenchère et ne saurait être étendue à toute la procédure de saisie d'un aéronef, l'article R 123-3 prévoyant en effet les modalités selon lesquelles 'le créancier saisissant', sans autre exigence d'inscription, doit notifier copie du procès verbal de saisie au propriétaire et le faire citer devant le tribunal judiciaire du lieu où la vente est poursuivie.
Le jugement entrepris est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la fin de non recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société Commisimpex.
V - Sur les contestations afférentes aux conditions de la vente forcée :
La République du Congo soutient que les conditions de la vente forcée ne sont pas réunies et demande à la cour de 'faire main levée sur l'Aéronef', ce qui, ainsi formulé, au regard de ce qui a été précédemment retenu sur le périmètre d'intervention respectif du juge de l'exécution de Paris et du tribunal judiciaire de Bordeaux et partant de la cour d'appel, ne ressort pas de sa compétence.
Elle soutient, pour s'opposer à la vente et 'dire n'y avoir lieu à vente' :
1) qu'en application des dispositions de l'article L 6123-3 du code des transports, selon lequel, lorsqu'il est procédé à la saisie d'un aéronef immatriculé au registre d'un Etat partie à la convention relative à la reconnaissance internationale des droits sur aéronefs, signée à Genève le 19 juin 1948, aucune vente forcée ne peut avoir lieu si les droits préférables à ceux du créancier saisissant ne peuvent être éteints par le prix de vente ou s'ils ne sont pas pris en charge par l'acquéreur.
Cependant, la République du Congo ne saurait prétendre que 'les sociétés Berrebi' , contrairement à ce qu'elle soutient à tort, disposent d'un droit de préférence au seul motif de l'ancienneté de leur créance sur celle de la société Commisimpex, cet argument supposant au demeurant qu'il n'est pas revendiqué la position de créancier inscrit de ces sociétés.
Le moyen ne saurait dès lors prospérer.
2) qu'en l'absence de remise d'un extrait certifié conforme des inscriptions sur l'aéronef, condition obligatoire pour fixer la vente d'aéronefs étrangers, le jugement de vente encourt la nullité, ainsi que le prévoit l'article VII 2.B de la convention de Genève.
Elle soutient ainsi que la société Commisimpex n'aurait jamais remis au tribunal un extrait des inscriptions sur l'aéronef, à défaut d'avoir procédé à la transcription de sa saisie auprès de l'agence nationale de l'aviation civile du Congo.
Cependant, les dispositions de l'article VII.2.B de la convention de Genève ne prévoient que la remise d'un extrait certifié conforme des inscriptions sur l'aéronef, ne précisant pas qu'il doit émaner des autorités congolaises. Et, ainsi que le relève elle-même la République du Congo, la société Commisimpex a justifié des difficultés qu'elle a rencontrées dans ses démarches en ce sens (nombreuses vaines démarches effectuées par l'huissier au siège de l'ANAC), alors que cette dernière observe que le registre des immatriculation congolais est géré par la République du Congo par une simple agence placée sous la tutelle du ministre congolais de l'aviation civile, ce que ne conteste pas la République du Congo, en affirmant certes que l'ANAC (agence nationale de l'aviation civile congolaise) est un Epic doté d'une personnalité juridique propre, mais également, qu'elle est placée sous la tutelle du ministre en charge de l'aviation civile (ses conclusions page 35) ce qui confère effectivement à cette agence qualité de juge et partie et permet d'expliquer les difficultés auxquelles s'est heurtée la société Commisimpex dans ses démarches en vue de l'inscription de sa saisie sur l'aéronef.
Quoi qu'il en soit, la société Commisimpex verse aux débats le certificat n° 1394704 (sa pièce 61-2) extrait du registre international établi en application de la convention Cap du 16 novembre 2001, sous l'égide de l'OACI (organisation mondiale de l'aviation civile) en date du 15 août 2020 dont il résulte qu'il n'existe pas de créancier inscrit sur l'aéronef, pièce sur laquelle la République du Congo est taisante.
Ce moyen ne saurait dès lors prospérer.
3) que de la même manière, la société Commisimpex n'a pas fait procéder à la transcription de sa saisie au registre des immatriculations, obligation imposée par l'article R 123 - 4 et qui doit être effectuée dans le délai de 5 jours francs augmenté des délais de distance, la convention de Genève à laquelle sont parties la République Française et la République du Congo prévoyant en son article III que l'adresse du service chargé de la tenue du registre est indiquée sur le certificat d'immatriculation de tout aéronef et, qu'au cas présent, l'adresse mentionnée sur le certificat d'immatriculation est celle de l'Agence Nationale de l'Aviation Civile du Congo.
Cependant, la société Commisimpex observe à juste titre, d'une part, que les dispositions de l'article R 123-4 qui imposent cette transcription ne sont pas prévues à peine de nullité et d'autre part, que la République du Congo n'allègue aucun grief qui résulterait de ce manquement.
Elle fait encore justement valoir, sans être utilement contredite, qu'elle a de toutes façons procédé à la transcription de sa saisie, ainsi qu'il résulte du certificat 1394704 susvisé, et que le 31 juillet 2020, soit dans le délai de cinq jours augmenté des délais de distance, elle a fait signifier son inscription à l'ANAC par exploit d'huissier, ainsi qu'elle en justifie (sa pièce n° 60).
Mais surtout, il s'agit d'une condition antérieure à la vente, afférente à la validité de la saisie, échappant comme telle au périmètre d'intervention de la cour précédemment délimité.
Ce moyen ne saurait dès lors prospérer.
4) que l'absence de notification des PV de saisie vente au véritable propriétaire de l'avion empêche également la vente forcée de l'aéronef.
Cependant, cette notification conditionne pareillement la validité de la saisie vente et échappe pour les mêmes motifs que précédemment à l'appréciation de la cour.
Ce moyen ne saurait davantage prospérer.
Aucune de ces contestations n'étant de nature à faire obstacle à la vente forcée de l'aéronef, le jugement entrepris ne peut qu'être confirmé en ce qu'il l'a ordonnée.
VI - Sur les modalités de la vente forcée :
Il ne ressort pas du dispositif des conclusions de la République du Congo que les dispositions du jugement entrepris en ce qu'il a statué sur les modalités proprement dites de la vente forcée sont contestées, seule la société Commisimpex, par voie d'appel incident, demandant à la cour, de tirer les conséquences de l'effet du temps sur la valeur de l'aéronef qui se déprécie en fixant le montant de la mise à prix à 5 000 000 d'euros.
D' 'autres contestations' sont certes formulées par la République du Congo, l'une tenant au montant des charges réclamées, alors qu'une plainte pour corruption du président du tribunal arbitral qui a statué sur le différend entre les parties a été déposée par la République du Congo sur la base de laquelle elle a sollicité la révision de cette sentence, mais qui n'est d'aucune efficacité devant la cour dès lors que n'est pas sollicité le sursis à statuer, l'autre tenant à la 'menace pesant sur la restitution de sa créance' du fait de l'état financier de la société Commisimpex, mais qui est tout simplement étrangère au présent litige.
A l'appui de sa demande de diminuer le montant de la mise à prix, la société Commisimpex verse aux débats une nouvelle note technique d'Erget Aerospace du 14 avril 2023 attestant une valeur de l'avion ne dépasse pas 18 000 000 euros sur le marché du gré à gré en fin d'année 2023.
Par ailleurs, la société Commisimpex observe à juste titre qu'elle n'a pas intérêt au regard du montant de sa créance à solliciter une mise à prix plus basse et que la faculté de surenchérir préserve suffisamment les intérêts de chacun, en sorte que compte tenu de la dépréciation continue de l'avion et de ces éléments, la baisse de la mise à prix sur une base plus conforme à la valeur de négociation d'un tel avion est dans l'intérêt des parties et qu'il convient de retenir une plus juste mise à prix de 7 000 000 d'euros, le jugement entrepris étant infirmé de ce seul chef, étant confirmé en ce qu'il a statué sur les dépens et frais irrépétibles de première instance.
Succombant en son recours, la République du Congo en supportera les dépens et sera équitablement condamnée à payer à la société Commisimpex une somme de 15 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel, toutes autres demandes de ce chef étant rejetées.
PAR CES MOTIFS :
La Cour
Déclare irrecevables en leur intervention volontaire devant la cour la Société Congolaise d'Enlèvement des Ordures Ménagères (SOCEMA), la Société Congolaise d'Electrification et de Canalisation (la SOCECA), la Société de Boissons Africaines de [Localité 9] (la BAB), Sarl Berrebi et Associés et la Présidence de la République du Congo.
Déclare irrecevable les demandes de la République du Congo tendant à constater qu'elle n'est pas le propriétaire de l'avion lequel se trouve couvert par l'immunité coutumière présidentielle.
Déclare la Société Commissions Import Export (Commisimpex) recevable à agir.
Rejette les demandes de mainlevée de la saisie sur l'aéronef et les oppositions à la vente fondées sur l'absence de purge des droits préférables des autres créanciers, l'absence de remise d'un extrait certifié conforme des inscriptions sur l'aéronef, l'absence de transcription des PV de saisie vente au véritable propriétaire de l'avion, l'absence de transcription des procès verbaux de saisie-vente au registre des immatriculations.
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a fixé la mise à prix à la somme de 15 000 000 d'euros et à préciser l'immatriculation de l'avion à la Présidence de la République du Congo.
Statuant à nouveau du chef réformé :
Ordonne la vente judiciaire aux enchères publiques de l'aéronef de type Dassault Falcon 7X n°232 immatriculé [Immatriculation 14] appartenant à la République du Congo- immatriculé à la Présidence de la République du Congo-, par le ministère de la Selarl Pestel-Debord, commissaire de justice, assisté de tout expert en aéronef de son choix, sur la mise à prix de 7 000 000 d'euros ( SEPT millions).
Y ajoutant
Condamne la République du Congo à payer à la société Commissions Import Export (Commisimpex) la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Rejette toutes autres demandes de ce chef.
Condamne la république du Congo aux dépens du présent recours.
Le présent arrêt a été signé par Mme Paule POIREL, président, et par Mme Audrey COLLIN, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,