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07/06/2023 | FRANCE | N°20/00845

France | France, Cour d'appel de Bordeaux, Chambre sociale section a, 07 juin 2023, 20/00845


COUR D'APPEL DE BORDEAUX



CHAMBRE SOCIALE - SECTION A



--------------------------







ARRÊT DU : 7 JUIN 2023







PRUD'HOMMES



N° RG 20/00845 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LOXY













UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE BORDEAUX



c/



Monsieur [G] [A]



SCP Muriel Amauger & [H] [Z], prise en la personne de Maître [H] [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL SDER










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Nature de la décision : AU FOND

















Grosse délivrée le :



à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 février 2020 (R.G. n°F 19/00063) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PÉRIGUEUX, Section Agricult...

COUR D'APPEL DE BORDEAUX

CHAMBRE SOCIALE - SECTION A

--------------------------

ARRÊT DU : 7 JUIN 2023

PRUD'HOMMES

N° RG 20/00845 - N° Portalis DBVJ-V-B7E-LOXY

UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE BORDEAUX

c/

Monsieur [G] [A]

SCP Muriel Amauger & [H] [Z], prise en la personne de Maître [H] [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL SDER

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

à :

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 03 février 2020 (R.G. n°F 19/00063) par le Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PÉRIGUEUX, Section Agriculture, suivant déclaration d'appel du 14 février 2020,

APPELANTE :

UNEDIC délégation AGS - CGEA de Bordeaux, agissant en la personne de sa directrice nationale domiciliée en cette qualité audit siège social [Adresse 2]

représentée par Me Natacha MAYAUD de la SCP CABINET MALEVILLE, avocat au barreau de PERIGUEUX

INTIMÉS :

Monsieur [G] [A]

né le 27 Décembre 1963 à [Localité 4] de nationalité Française, demeurant [Adresse 3]

représenté par Me Frédérique POHU PANIER, avocat au barreau de PERIGUEUX

SCP Muriel Amauger & [H] [Z], prise en la personne de Maître [H] [Z] ès qualités de mandataire liquidateur de la SARL SDER, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social [Adresse 1]

représentée par Me Vincent MARIS de la SELARL PLUMANCY, avocat au barreau de PERIGUEUX

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 04 avril 2023 en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente chargée d'instruire l'affaire, et Madame Sylvie Tronche, conseillère

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente

Madame Sylvie Tronche, conseillère

Madame Bénédicte Lamarque, conseillère

Greffier lors des débats : A.-Marie Lacour-Rivière,

ARRÊT :

- contradictoire

- prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

EXPOSE DU LITIGE

La société des établissements [A] (SDER),créée le 7 janvier 1998 par M. [O] [A] et Mme [C], avait pour activité l'exploitation forestière.

Compagnon de Mme [C], M.[G] [A] a travaillé au sein de cette entreprise.

Par jugement du 6 novembre 2018, le tribunal de commerce de Périgueux a placé cette société en règlement judiciaire converti en liquidation judiciaire le 22 janvier 2019, la SCP Amauger- [Z] étant désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Ce dernier refusera de procéder au licenciement de M. [A] motif pris du défaut de qualité de salarié.

Demandant que cette qualité lui soit reconnue et la fixation de diverses indemnités au passif de la liquidation judiciaire de la société SDER, M. [A] a saisi le 5 avril 2019 le conseil de prud'hommes de Périgueux qui, par jugement rendu le 3 février 2020, a :

- dit que M. [A] était bien salarié de la société SDER depuis le 1er octobre 1998,

- dit le licenciement de M. [A] (sic) en licenciement pour cause économique,

- fixé sa créance à la liquidation judiciaire de la société SDER les sommes suivantes :

* 4.745,25 bruts à titre des rappels de salaires sur la période de novembre 2018 au 5 février 2019, outre 474,53 euros bruts au titre des congés payés afférents,

* 8.914,69 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 2.997 euros bruts au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 299,70 euros bruts au titre des congés payés afférents,* 2.190,65 euros bruts au titre du solde de congés payés,

* 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la demande en justice, avec anatocisme,

- ordonné la remise sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir des documents de fin de contrats à M. [A], le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte,

- dit le jugement commun et opposable aux AGS CGEA de Bordeaux dans les limites de sa garantie,

- débouté M. [A] de sa demande au titre de l'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- débouté la société Amauger-[Z], mandataire liquidateur de la société SDER de l'ensemble de ses demandes,

- débouté l'AGS CGEA de ses demandes,

- fixé les dépens à la créance de la liquidation judiciaire de la société SDER,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire.

Par déclaration du 14 février 2020, le CGEA de Bordeaux a relevé appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 15 septembre 2022, le CGEA de Bordeaux demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé l'appel formé par l'AGS CGEA,

- réformer le jugement rendu par le conseil des prud'hommes,

- dire que M. [A] n'avait pas la qualité de salarié de la société SDER,

- en conséquence, le débouter de sa demande de rappel de salaire sur la période de novembre 2019 à février 2019, ainsi que de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail,

- constater que la société Amauger-[Z] n'a pas procédé au licenciement de M. [A],

En conséquence,

- le débouter de sa demande en dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- déclarer inopposables à l'AGS CGEA :

* toutes les demandes au titre de la rupture du contrat de travail,

* les demandes de remise de document sous astreinte,

* les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- en tout état de cause juger que la décision à intervenir ne sera opposable à l'AGS CGEA que dans les limites de sa garantie.

Dans ses conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 24 février 2023, M. [A] demande à la cour de':

- réformer le jugement en ce qu'il a qualifié la rupture du contrat de travail de M. [A] en licenciement pour motif économique et l'a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture s'analysant en un licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- confirmer le jugement pour le surplus en ce qu'il a :

* dit que M. [A] était bien salarié de la société SDER depuis le 1er

octobre 1998,

* fixé la créance de M. [A] à la liquidation judiciaire de la société SDER aux sommes suivantes :

* 4.745,25 euros bruts à titre de rappel de salaires sur la période de

novembre 2018 au 5 février 2019 outre 474,53 euros bruts au titre des congés afférents,

* 8.914,69 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 2.997 euros bruts à titre d'indemnité compensatrice de préavis outre 299,70 euros bruts au titre des congés payés,

* 2.190,65 euros bruts au titre du solde de congés payés,

* 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

* dit que les sommes allouées porteront intérêts au taux légal à compter de la demande en justice avec anatocisme,

* ordonné la remise sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir des documents de fin de contrat à M. [A], le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- requalifier la rupture du contrat de travail de M. [A] en licenciement sans cause réelle ni sérieuse à la date du 5 février 2019,

- fixer sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la SDER à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse à la somme de 40.000 euros,

- condamner l'AGS CGEA et le liquidateur es qualité à verser à M. [A] la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'AGS CGEA et le liquidateur es qualité aux dépens en ce compris ceux éventuels d'exécution,

- déclarer le jugement du conseil de prud'hommes et le présent arrêt pleinement et entièrement opposables à l'AGS CGEA,

- débouter l'AGS CGEA et Me [Z] liquidateur de l'intégralité de leurs demandes.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 7 mars 2023, la société Amauger-[Z], es qualité de liquidateur judiciaire de la société SDER, demande à la cour de':

- à titre liminaire, juger les conclusions signifiées par M. [A] le 7 mars 2023 irrecevables, et les écarter des débats,

- dire la société Amauger-[Z] es qualité de liquidateur judiciaire de la société SDER recevable et bien fondé en l'ensemble de ses demandes,

- infirmer en l'ensemble de ses dispositions le jugement rendu le 3 février 2020 par le conseil de prud'hommes de Périgueux,

- constater la qualité de dirigeant de fait de M. [A],

- dire qu'il n'existe aucune relation de travail ayant existé entre M. [A] et la société SDER,

- partant, le débouter de l'ensemble de ses prétentions comme mal fondées,

- à titre reconventionnel, condamner M. [A] à verser à la société Amauger-[Z] es qualité la somme de 6.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 mars 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 4 avril 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ainsi qu'à la décision déférée.

MOTIFS

La recevabilité des conclusions

La SCP Amauger- [Z] demande à la cour de dire irrecevables les dernières conclusions transmises par M.[G] [A], motifs pris du non respect du principe du contradictoire.

Aux termes des dispositions de l' article 16 du code de procédure civile, le juge doit respecter et faire respecter le principe du contradictoire.

Après des conclusions du 30 septembre 2020 et alors que l'ordonnance de clôture avait été annoncée pour le 9 mars 2023, M. [G] [A] a déposé des conclusions et pièces le 24 février 2023, auxquelles la SCP Amauger- [Z] a répondu dès le 27 février suivant. Cette dernière ne pouvait répondre aux conclusions postérieures -identiques- de M.[G] [A] déposées les 7 et 8 mars 2023 avant l'ordonnance de clôture datée du 9 mars. En application du principe du contradictoire, les conclusions transmises par M.[G] [A] les 7 et 8 mars 2023 seront déclarées irrecevables et la cour retiendra ses écritures du 24 février 2023.

La qualité de salarié

L'Unedic délégation AGS CGEA fait valoir qu'aucun contrat de travail n'est produit et que les bulletins de paye ont été établis pour les besoins de la cause, qu'il revient à M. [G] [A] de prouver qu'il était soumis aux directives, sanctions et contraintes horaires décidées par Mme [C], associée de la SDER et compagne de l'intimée, que l'entreprise de M. [G] [A] et cette société avait le même siège social, aussi adresse du couple.

Pour l'essentiel, la SCP Amauger- [Z] fait valoir que la SDER a été créée quelques mois avant la procédure collective ouverte à l'encontre de M. [G] [A] qui sera interdit de gérer, les deux entreprises ayant la même activité et le matériel de la SDER étant celui de M. [G] [A]. Aucun contrat de travail n'a été signé et M. [G] [A] était le gérant de fait de cette société, sa compagne- qui ignorait tout de l'activité- ayant seulement établi et signé des documents et n'exerçant aucune autorité sur lui. Selon le mandataire judiciaire, M. [G] [A] détenait les procurations et signait les contrats, il était plus qu'un interlocuteur technique.

M. [G] [A] répond qu'il a été embauché par Mme [C], gérante de droit de la SDER, en 1998, après la liquidation judiciaire de son entreprise dont l'activité était différente ; qu'il verse les bulletins de paye établis par sa compagne qui a réglé les cotisations afférentes, que cette dernière, diplômée en droit, signait les contrats et gérait l'entreprise tandis qu'il ne réalisait que des fonctions techniques; qu'il ne détenait aucune procuration jusqu'au départ de sa compagne de leur domicile, qu'il n'a pas utilisé la procuration bancaire sur un des comptes de la société, datée du mois de juillet 2018 et a été placé en arrêt de travail dès le 17 août 2018.

L'existence d'un contrat de travail dépend des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. Est salarié celui qui exécute une prestation de travail au profit d'un tiers auquel il est subordonné et qui lui impose des contraintes et contrôle son travail.

En cas de contrat de travail apparent, il revient à celui qui dénie la qualité de salarié d'établir que l' intéressé n'était pas soumis à un lien de subordination.

Il n'est pas contesté que M. [G] [A] a exécuté une prestation de travail de manière constante au sein de la SDER dont Mme [C] était la gérante de fait et qu'il a été rétribué pou son travail.

Aucun contrat de travail écrit n'est produit.

Sont cependant versés des bulletins de paye sur la période du 1er novembre 1998 au 31 décembre 2018, chacun mentionnant un emploi de forestier, le nombre d'heures de travail réalisées et le cumul des salaires imposables sur l'année. Aucun élément n'établit que ces documents auraient été établis par M. [G] [A] pour les besoins de la cause. Un relevé de compte de la MSA mentionnant les cotisations payées par la SDER sur la même période est produit ainsi qu' un état d'appel de cotisation de l'AGRR du 1er trimestre 2001.

Ces éléments caractérisent l'existence d'un contrat de travail apparent dont le caractère fictif - pour absence de lien de subordination- doit être démontré par l'association appelante et le mandataire liquidateur.

Les circonstances que la SDER a été créée - par le père et la compagne de M. [G] [A] six mois avant l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de ce dernier et que Mme [C] aurait été contrainte de quitter le domicile commun sont inopérantes. Il n'est pas non plus pertinent de dénier toute compétence à cette dernière dès lors qu'elle a exercé ses fonctions pendant vingt années ni de souligner que la société portait le nom de l'intéressé puisque c'était le nom de son père associé avec Mme [C], gérante de droit mentionnée au registre du commerce et des sociétés, ensuite seule associée, ou que le siège social de l' entreprise ait été l'adresse du domicile commun du couple.

La cour constate que :

- M. [A] a été libéré de son interdiction de gérer cinq ans après son prononcé soit plus de dix ans avant la procédure collective ouverte à l'encontre de la SDER. Le moyen tiré de sa volonté de celer sa qualité de gérant est inopérant ;

- la procuration bancaire donnée à M. [A] sur un des comptes de la société est datée du 11 juillet 2018, soit quelques jours après le départ de Mme [C] du domicile commun et M. [A] a été placé en arrêt de travail pour maladie le 17 août suivant sans qu'aucune utilisation de cette procuration ne soit établie,

- aux termes de lettres manuscrites rédigées par Mme [C] après son départ du domicile commun - sa qualité d'autrice n'étant pas contestée- cette dernière informe M. [A] de ce qu'elle va faire une assemblée générale pour " faire la liquidation de la SDER " ; et elle indique des diligences à réaliser en précisant l'endroit où trouver certains documents. Par lettre datée du 20 août 2018, Mme [C] a démissionné de ses fonctions de gérante alors que M. [A] avait été placé en arrêt de travail le 17 août. Mme [C] n'a jamais prétendu ne pas exercer ses fonctions de gérante, elle les a revendiquées.

- les deux cartes bancaires de la société mentionnaient à la fois la SDER et le nom de Mme [C] ;

- la requête rédigée par celle-ci le 30 octobre 2018 pour solliciter l'ouverture d'une procédure collective mentionne que Mme [C] est la dirigeante de la société, qu'elle est partie du domicile "au début du mois de juillet 2018 et que depuis cette date, la société a fonctionné car le salarié M. [A] a travaillé avec les stocks de bois qu'il y avait mais depuis le mois de septembre 2018, il n'y a plus d'activité au sein de la société. M. [A] est en arrêt de travail ". Il n'est pas question d'une gérance de fait mais d'un travail effectué temporairement par le salarié grâce aux matériaux restants.

- l'appelant ne verse aucune pièce établissant que M. [A] s'était accaparé l'intégralité de nombreux document, avait accès à l'ensemble des pièces comptables de l'entreprise, assurait les rendez-vous avec le comptable et discutait du bilan avec M. [D]" ;

- aucun élément ne vient confirmer que selon les écritures du mandataire, " Mme [C] n'avait en réalité que la qualité d'exécutante, telle une secrétaire qui mettait en forme les documents contractuels sur les instructions de son compagnon" ;

-les attestations versées par le mandataire ne sont pas probantes :

*selon, M. [B], M. [A] était le donneur d'ordre mais deux contrats de sous traitance datés des 19 juillet et 1er octobre 2017 ne sont pas signés par celui-ci qui pouvait fixer - dans le cadre de ses fonctions techniques - les " dimensions à effectuer suivant la qualité du bois".

*M. [M] écrit que son père négociait avec M. [A] sans donner de précision sur les circonstances lui permettant de l'affirmer,

* M. [X] atteste une fois que les négociations avaient toujours lieu avec M. [A] et une autre fois que la gérante Mme [C] a fait les contrats d'achats puis les règlements,

*aucun contrat n'est produit pour corroborer les attestations de MM. [K] et [S] selon lesquels les négociations étaient menées avec M. [A],

* aucune facture ne corrobore les attestations de MM. [V] et [N], aucun élément n'établissant non plus que le premier aurait été coupeur pour la SDER plutôt que pour M. [R].

* selon M. [F] qui atteste pour le mandataire, M. [A] s'occupait de la gestion forestière et sa compagne de la gestion de la société.

Aux termes des attestations produites par M. [A], ce dernier était présent sur les chantiers et effectuait les tâches que Mme [C] lui indiquait, qui consistaient au bûcheronnage et au transport des bois; Mme [C] faisait les réceptions de bois, établissait les factures et les bons de livraison, signait les contrats et les règlements, déterminait le prix des bois. Par écrit daté du 20 novembre 2019, M. [U], salarié pendant deux ans de la SDER fait état de ce que " c'est Mme [C] [L] la gérante de la SARL SDER qui me faisait mes salaires, elle m'indiquait les tâches de bucheronnage à effectuer sur les chantiers. M. [A], salarié comme moi, effectuait les tâches que lui indiques Mme [C] [L] sur les chantiers".

Aucune précision ni pièces ne sont fournies qui établiraient l'absence de lien de subordination, peu important l'absence de sanction.

La partie appelante ne prouve pas que le contrat de travail apparent était fictif.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a reconnu à M. [A] la qualité de salarié de la SDER, le contrat de travail débutant à compter cependant du 1er novembre 1998.

La rupture du contrat de travail

M. [A] fait valoir qu'aucun salaire ni complément de salaire ne lui ont été réglés depuis le mois de novembre 2018 jusqu'à la rupture de son contrat de travail intervenue le 5 février 2019 lorsque le mandataire liquidateur, qui l'avait convoqué à un entretien préalable à licenciement et lui avait remis le contrat de sécurisation professionnelle, l' a informé de son refus de le licencier, estimant que sa qualité de salarié n'était pas établie. M. [A] fait valoir que cette rupture - intervenue dans le délai de quinze jours, du prononcé de la liquidation judiciaire - produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et que l'AGS CGEA doit garantir tant le paiement des salaires que les indemnités de rupture et les dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

L'Unedic délégation AGS CGEA fait valoir que M. [A] n'a pas été licencié par le liquidateur dans le délai de quinze jours du prononcé de la liquidation judiciaire et que sa garantie n'est pas due.

Par lettre datée du 24 janvier 2019, le mandataire liquidateur a convoqué M. [A] à un entretien préalable conformément aux dispositions de l' article L. 2132-2 du code du travail ("j'envisage votre licenciement pour motifs économiques") fixé le 1er février suivant. Le mandataire précisait qu'une adhésion à un contrat de sécurisation professionnelle lui serait proposée.

Par lettre en date du 30 janvier 2019, le mandataire a demandé à M. [A] de préciser ses tâches et fonctions, le nom de la personne à laquelle il était subordonné, ses délégations de signature, ses engagements de caution et si un bail avait été régularisé relativement au siège social.

Le jour de l'entretien préalable, M. [A] a reçu le contrat de sécurisation professionnelle établi à la date du 1er février 2019 et précisant la date limite de rétractation du salarié.

Par lettre datée du 5 février 2019, le mandataire informait M. [A] de ce que la qualité de salarié ne lui était pas reconnue en l'absence de lien de subordination et qu'il ne serait pas licencié.

Ainsi, le liquidateur a manifesté son intention de rompre le contrat de travail de M. [A] dans le délai de quinze jours suivant le jugement prononçant la liquidation judiciaire de la SDER et aucun travail ni salaire n'étaient fournis à cette date. La cour considère que le contrat de travail de M. [A] a été rompu le 5 février 2019, le moyen que la liquidation judiciaire ne mettrait pas fin au contrat de travail étant dès lors inopérant. L'AGS doit garantir les créances indemnitaires résultant de cette rupture, peu important qu'aucune lettre de licenciement n'ait été notifiée.

Les créances indemnitaires, garanties par l'AGS CGEA, seront ainsi fixées :

- 2 997 euros et 299,70 euros au titre de l' indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents, due en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse y compris si le salarié est malade pendant cette période;

- 8 914,69 euros au titre de l' indemnité de licenciement,

- 2 190,65 euros à titre d' indemnité de congés payés,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse eu égard à l'ancienneté de M. [A] qui ne verse pas de recherches d'emploi.

M. [A] étant placé en arrêt de travail pour maladie à compter du 17 août 2018, sa créance au titre des compléments de salaire sera fixée au regard des dispositions conventionnelles. La mention d'un maintien de salaire aux bulletins de paye n'établissant pas son paiement effectif, cette créance sera due à hauteur de 1 479,02 euros et congés payés afférents de 147,90 euros.

L'AGS CGEA apportera sa garantie, la rupture du contrat de travail étant intervenue dans le délai de quinze jours à compter du jugement de liquidation judiciaire.

Le mandataire liquidateur délivrera à M. [A] les documents de fin de contrat (attestation Pôle Emploi, certificat de travail et bulletin de paye rectificatif) conformes à l'arrêt dans le délai de deux mois à compter de sa signification, sans nécessité de prononcer une astreinte.

Les créances ne porteront pas intérêts à compter du jugement d'ouverture de la procédure collective.

Vu l'équité, la créance de M. [A] sera fixée au passif de la liquidation judiciaire à hauteur complémentaire de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre de la procédure d'appel, sans garantie de l'AGS CGEA.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

PAR CES MOTIFS

la cour,

Dit irrecevables les conclusions transmises par M. [A] les 7 et 8 mars 2018,

Dit recevables les conclusions de la SCP Amauger-Terxier du 27 février 2023,

Confirme le jugement en ce qu'il a dit que M. [A] était salarié de la SDER (société des établissements [A]), le contrat de travail débutant cependant le 1er novembre 1998,

Infirme le jugement en ce qu'il a dit le licenciement de M. [A] en licenciement économique,

statuant à nouveau,

Dit que la rupture du contrat de travail intervenue le 5 février 2019 produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Confirme le jugement en ce qu'il a fixé la créance de M. [A] au passif de la liquidation judiciaire de la société des établissements [A] ( SDER) aux sommes suivantes :

- 8 914,69 euros au titre de l' indemnité de licenciement,

- 2 997 euros et 299,70 euros au titre de l' indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents,

-2 190, 65 euros au titre de l' indemnité de congés payés,

- 2 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre de la procédure de première instance;

Infirme le jugement en ce qu'il a fixé la créance de M. [A] à la somme de 4 745,25 euros au titre des rappels de salaire,

statuant à nouveau de ce chef,

Fixe la créance de M. [A] au passif de la liquidation judiciaire de la société établissements [A] à la somme de 1 479,02 euros et congés payés afférents (147,90 euros) au titre des salaires à compter du 1er novembre 1998 jusqu'au 5 février 2019,

Infirme le jugement en ce qu'il a débouté M. [A] de sa demande de paiement de dommages et intérêts au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

statuant à nouveau de ce chef,

Fixe la créance de M. [A] au passif de la liquidation judiciaire de la société des établissements [A] à la somme de 5 000 euros,

Infirme le jugement en ce qu'il a ordonné les intérêts de retard capitalisables,

Statuant à nouveau,

Dit que les sommes ne produisent pas intérêts à compter du jugement d'ouverture de la procédure collective,

Fixe la créance de M. [A] au passif de la liquidation judiciaire de la société des établissements [A] à la somme complémentaire de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés dans le cadre de la procédure d'appel, aucune somme n'étant allouée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au mandataire liquidateur,

Dit que la SCP Amauger - [Z] es qualité de mandataire liquidateur de la société des établissements [A] devra délivrer à M. [A] l'attestation destinées au Pôle Emploi, le certificat de travail et un bulletin de paye rectificatif conformes à l'arrêt dans le délai de deux mois à compter de sa signification,

Dit que l'AGS CGEA de Bordeaux garantira les créances salariales et indemnitaires à l'exception des frais irrépétibles,

Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire.

Signé par Madame Catherine Rouaud-Folliard, présidente et par A.-Marie Lacour-Rivière, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

A.-Marie Lacour-Rivière Catherine Rouaud-Folliard


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Bordeaux
Formation : Chambre sociale section a
Numéro d'arrêt : 20/00845
Date de la décision : 07/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-07;20.00845 ?
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